France Gélinas : J’ai d’abord travaillé à l’Hôpital Laurentien en physiothérapie et ensuite dans la communauté. J’ai complété une maîtrise en administration des affaires et avec ce diplôme, j’ai eu l’opportunité de faire des remplacements en ressources humaines, direction de services et en administration, tant en milieu hospitalier que communautaire. À ce moment, la Loi 8 sur les services en français prévoyait des coordonnatrices ou coordonnateurs des services en français dans tous les hôpitaux, un poste que j’ai occupé pendant plus d’un an. Par la suite, j’ai travaillé au Centre de santé communautaire de Sudbury, d’abord à titre de promotrice de la santé, pour ensuite en devenir la directrice générale. Donc, je suis passée du milieu hospitalier au milieu communautaire, pour ensuite être recrutée pour devenir politicienne, chose que je n’avais jamais envisagée. Pour moi, la politique c’était pour des hommes blancs, riches, d’un certain âge, et qui parlaient l’anglais. Mais j’ai tout de même accepté de me présenter. Ma première élection fut en 2007. Arrivée à Queen’s Park, venant du milieu de la santé, j’avais pour la plupart du temps travaillé en français, avec des femmes et dans un milieu collaboratif où on essaie de regrouper des gens, de trouver les liens qui unissent plutôt que ceux qui divisent. En politique, c’est l’inverse. De plus, il s’agit d’un groupe d’hommes plus vieux, riches, anglophones qui sont en place et qui ne se gênent pas pour te faire comprendre qu’une femme francophone n’est pas la bienvenue. En 2007, je pense que nous étions 23 % de femmes. Donc j’ai fait le saut en politique, et j’ai compris qu’il y a du bon monde dans les trois partis, des gens qui sont là pour les bonnes raisons. Quand nous travaillons en comité et qu’il n’y a pas de caméra, les gens veulent tous la même chose. Nous voulons tous que le projet de loi sur lequel nous travaillons soit le meilleur possible. Et si tu fais tes devoirs et que tu amènes des arguments solides, les gens sont prêts à écouter. Je le sais parce que j’ai été témoin de changements. Pour les francophones, pour les gens du Nord, pour les femmes, ça fait une différence. Pour les gens marginalisés avec qui j’ai travaillé toute ma vie, je vais avoir fait une différence. Ça, c’est très valorisant. France Gélinas : Mes valeurs me viennent de ma famille. Mon père vient d’une famille de 14 enfants et ma mère d’une famille de 12 enfants. En grandissant, j’allais chez mes grands-parents tous les jours. Ma grand-mère était une femme d’avant son temps. Elle était professeure et ne s’est pas mariée avant d’avoir 25 ans parce qu’à l’époque les femmes mariées n’avaient pas le droit de travailler. De ma grand-mère, j’ai appris que ce n’est pas parce qu’une personne vit avec un handicap ou des défis dans sa vie qu’elle n’a pas le droit d’être heureuse ou d’avoir des ressources pour l’appuyer. Beaucoup de mes valeurs viennent de ces moments. Et quand tu as ce genre de mentorat, tu apprends que tout le monde a le droit au respect, et que les droits, c’est pour tout le monde. Tu apprends aussi lorsque tu viens d’une grande famille et que tu n’as pas beaucoup de ressources que si tu les mets ensemble, tu réussis à faire bien des choses. Je pense que les valeurs du Parti néo-démocrate sont similaires aux miennes : le partage de la prospérité et la justice sociale. Certes, nous n’avons pas tous les mêmes ressources, mais il faut que ça marche pour tout le monde. La prospérité c’est correct, mais elle …