Les années passent et marquent d’importants changements dans le profil des communautés francophones du Manitoba. Sur le plan démographique, celles-ci ont connu des hauts et des bas, allant de population largement majoritaire, il y a plus d’un siècle, à une minorité qui représente en 2006 à peine plus de 4 % de la population totale de la province. La faiblesse de leur poids démographique n’a pas pour autant freiné le dynamisme des Franco-manitobains dans leurs efforts pour conserver leur langue, participer au rayonnement des activités culturelles et vouloir imposer leur influence économique et politique (Allain, 2002). Il est possible de se faire servir en français dans un restaurant à Winnipeg, de participer à un groupe pour femmes francophones violentées ou même de diriger en français le conseil d’administration d’un organisme communautaire. Pour en arriver là, il a fallu que les francophones passent par un long parcours parsemé d’embuches, de rebondissements, de victoires et de déceptions (Rocque, 2011). À différents moments de leur histoire, les Franco-manitobains ont dû mener des actions collectives de revendication auprès des autorités en place ou de collaboration avec elles. Ils ont réalisé un travail de construction sociale et identitaire qui constitue un exemple édifiant de résistance et d’affirmation collective par comparaison à d’autres communautés francophones en semblable situation (Allain, 2002). Ces changements n’ont pas pour autant fait disparaître les nombreuses difficultés que vivent les communautés en situation minoritaire : survivance linguistique, problèmes d’intégration sociale, pauvreté, violence, assimilation, problèmes de santé et absence de certains services sociaux essentiels en français. Fiers de recouvrer certains de leurs droits au sein d’une société majoritairement anglophone, les francophones du Manitoba peuvent maintenant entreprendre un partenariat institutionnel avec les autorités en place et promouvoir un développement économique de leurs communautés afin de s’y épanouir. Une de ces collaborations se réalise sous l’égide de la Société franco-manitobaine (SFM), la structure organisationnelle étendard créée dans les années 1960 et qui chapeaute les actions menées par trente-six organismes communautaires. Le nouveau contexte a contribué au renforcement de la mission de la SFM qui est de guider et d’aider les communautés à réclamer leurs droits, à sauvegarder leurs acquis historiques, culturels et identitaires et à relever les multiples défis économiques. Dans cet article, nous esquissons un portrait des communautés minoritaires francophones du Manitoba. Nous situons la SFM comme acteur social de leur développement à travers les objectifs d’intervention définis dans son plan global. Ces objectifs ciblent les principales problématiques qui confrontent les populations francophones et francophiles. Puis, nous nous penchons sur l’apport de l’immigration francophone. Pour conclure, nous identifions quelques défis à relever pour le développement des communautés francophones du Manitoba. Quand on parle du Manitoba, on doit se rappeler que cette province a été fondée par les francophones. Les communautés francophones étaient majoritaires bien avant l’adhésion de la province à la Confédération canadienne en 1870 (Marchand, 2004; Sing, 2005). Classés en troisième position après les Allemands et les Anglais, les francophones ont subi un déclin et sont devenus minoritaires (Statistique Canada, 2002). Le recensement de 2006 mentionne que 44 110 habitants du Manitoba parlent le français comme première langue. Ils représentent maintenant 4 % des 1 133 515 habitants qui constituent la population totale de la province (Statistique Canada, 2006). La communauté francophone est essentiellement urbaine ou semi-urbaine. Près de 80 % de cette population vit à Winnipeg ou dans ses alentours. La population francophone qui réside à Winnipeg a tendance à se concentrer dans les quartiers historiquement francophones comme Saint-Boniface, Saint-Vital et Saint-Norbert (de Moissac et collab., 2011). Cette communauté forme une mosaïque linguistique et identitaire. Si bien, qu’il est plus convenable de …
Parties annexes
Bibliographie
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