Lu pour vous

C. Jetté, B. Lévesque, L. Mager, Y. Vaillancourt, Économie sociale et transformation de l’État-providence dans le domaine de la santé et du bien-être : une recension des écrits (1990-2000), Montréal, Presses de l’Université du Québec, 2000.Y. Vaillancourt, L. Tremblay (dir.), L’économie sociale dans le domaine de la santé et du bien-être au Canada : une perspective interprovinciale, Montréal, LAREPPS (Laboratoire de recherche sur les pratiques et les politiques sociales), 2001.[Notice]

  • Marc Charron

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  • Marc Charron
    Professeur, département de sociologie, Université Laurentienne

Fruit de la réflexion d’un groupe de chercheurs, ces deux livres cherchent à circonscrire la zone d’interface entre l’économie sociale et le bien-être. C’est dans la mesure où cette interface crée une brèche dans les modes de régulation antérieurs que les auteurs s’y intéressent et examinent les diverses pratiques s’y rapportant dans le domaine de la santé et du bien-être. Dans le contexte actuel de crise de l’État-providence, selon les auteurs, on assiste actuellement à une reconfiguration de l’offre de services en matière de santé et de bien-être entre quatre secteurs de régulation, soit le marché, l’État, le tiers secteur ou secteur d’économie sociale et enfin, un secteur informel prenant appui sur l’univers domestique (liens familiaux et aidants naturels). Conscients que les entreprises d’économie sociale peuvent servir de soupape de sûreté à la crise financière de l’État en suppléant des services dont l’État veut se départir et avoir un impact sur le marché du travail et la crise de l’emploi (travail à moindre coût), les chercheurs pensent néanmoins que la remise à jour de l’importance de l’économie sociale fait contrepoids aux théories dominantes. En effet, selon eux, trop d’économistes voudraient soumettre les domaines politiques, culturels, sociaux et de la santé aux seuls impératifs de la main invisible du marché qui harmoniserait la demande (les besoins) et l’offre (les services et les biens). En contrepartie, «l’économie sociale se positionne comme une résultante organisée de l’action de certains mouvements sociaux (notamment le mouvement des femmes et le mouvement communautaire) qui tente d’élaborer des réponses concrètes et novatrices aux problèmes de santé et de bien-être des populations» (Jetté et al. 2000: 44). Mais qu’entend-t-on au juste par économie sociale dans le domaine de la santé et du bien-être? Essentiellement, cette appellation recouvre trois grandes catégories d’initiatives, d’organismes ou d’entreprises, soit, 1) les ressources communautaires, coopératives, associatives comme les organismes à but non lucratif, qui dispensent des services ou organisent des activités dans le domaine de la santé, du bien-être et des affaires sociales; 2) les structures de soutien au développement d’entreprises d’économie sociale dans les communautés locales; 3) les organismes communautaires d’intégration ou d’insertion au travail et de formation de la main-d’oeuvre (Jetté et al. 2000: 10). Dans le domaine de la santé et du bien-être, ces initiatives communautaires s’inscrivent dans une stratégie visant à améliorer les conditions de vie des populations (revenu, scolarisation, logement et emploi) et à soutenir leurs milieux de vie. En effet, «les études de pointe sur les coûts du système de santé et de bien-être, au Canada et dans les pays de l’OCDE, convergent. L’amélioration de la santé et du bien-être de la population passe moins par l’ajout de nouvelles ressources budgétaires et humaines dans le système de services que par la réallocation des ressources et la prise en considération des déterminants de la santé et du bien-être, situés à l’extérieur du système sociosanitaire. Elle exige le passage d’une perspective curative à une perspective préventive et attentive aux facteurs environnementaux» (Jetté et al. 2000: 30). Naturellement, nous pourrions ajouter à la liste des éléments qui caractérisent l’économie sociale en matière de santé et de bien-être. Nous avons souligné uniquement les grands traits qui justifient l’intérêt d’un tel projet de recherche. Ainsi, dans un premier temps, les chercheurs ont voulu s’équiper théoriquement en faisant une recension des écrits touchant principalement l’interface entre les modes de régulation étatique en pleine transformation et l’économie sociale. Le livre de Jetté et al. présente une bibliographie exhaustive des principaux articles, livres et documents (en tout, 811 documents) analysant à la fois la crise de l’État-providence et la redécouverte de l’économie …