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Enjeux de la nouvelle économie sociale dans la Péninsule acadienne[Notice]

  • Isabelle Légère

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  • Isabelle Légère, M.S.S.
    Université d’Ottawa et doctorante en service social, Université Laval

L’économie sociale est plus que jamais au coeur de l’actualité politique, économique et sociale au Canada. Dans le contexte actuel de l’appauvrissement des collectivités, l’économie sociale est considérée comme un moyen de repenser le rapport entre l’État, le marché et la communauté. Notre intérêt pour le développement économique communautaire a été suscité par la situation précaire dans laquelle vit une grande partie des habitantes et habitants dans la région de la Péninsule acadienne, alors que de plus en plus de familles acadiennes sont aux prises avec des problèmes de pauvreté. Les difficultés et les défis de la Péninsule acadienne soulèvent beaucoup de questions pour les leaders communautaires, notamment quant aux moyens à privilégier pour faire face aux problèmes. L’objectif de cet article est d’explorer et de questionner la pertinence et l’utilité de l’économie sociale dans le contexte de communautés rurales éloignées et, plus spécifiquement, dans celui de la Péninsule acadienne. Ainsi, nous présenterons d’abord un profil de la situation de la Péninsule acadienne, pour ensuite situer certaines notions se dégageant des écrits sur la nouvelle économie sociale. Pour ce faire, nous nous appuierons sur certains éléments-clés que nous avons dégagés d’une analyse documentaire des écrits sur la nouvelle économie sociale, effectuée dans le cadre d’un mémoire de maîtrise . Finalement, nous nous demanderons si les approches de «Familles et Communautés d’abord» (FCD), un organisme qui cherche à favoriser l’émergence de projets d’économie sociale dans la Péninsule acadienne, correspondent aux éléments-clés de l’économie sociale. La Péninsule acadienne est un territoire d’environ 2 000 km2, située à la limite nord-est du Nouveau-Brunswick, dans le comté de Gloucester. Baignant dans l’océan Atlantique, elle est bordée au nord par la baie des Chaleurs, à l’est par le golfe Saint-Laurent et elle est limitée à l’ouest par une frontière conventionnelle reliant la paroisse de New Bandon aux municipalités de Saint-Léolin, Paquetville, Saint-Isidore et Néguac. Cette région inclut trois pôles principaux qui structurent son territoire: Caraquet au nord, Tracadie-Sheila au sud et Shippagan à l’est. Dans l’ensemble, le territoire est très rural et la plus grande partie des structures administratives est située dans des districts de services locaux (DSL), c’est-à-dire des entités rurales non incorporées qui dépendent du gouvernement provincial. La Péninsule acadienne comprend près de 56 180 habitantes et habitants, principalement francophones (95 %), qui vivent dans huit paroisses (habitations regroupées autour d’une église et plus petites qu’un village), dix villages et quatre villes. Ces appellations sont déterminées par la province, en fonction du nombre d’habitantes et d’habitants et de la superficie du territoire. La population de la Péninsule acadienne compose 7,7 % de la population du Nouveau-Brunswick, qui comprend 729 498 personnes (Statistique Canada 2003). La situation rurale de la Péninsule acadienne se caractérise par une «faible densité de population, [l’] absence de grandes métropoles, [l’] éloignement des marchés importants» (Polèse, Shermur et al. 2002; Statistique Canada 2003). Globalement, le sous-développement économique de la Péninsule acadienne est porteur de nombreux problèmes. Parmi eux, on trouve la perte d’emplois permanents, le décrochage scolaire, le taux élevé de suicides chez les jeunes de 20 à 24 ans, l’augmentation des familles monoparentales, l’augmentation de la mendicité et l’augmentation du nombre de foyers bénéficiaires des services de l’État (Statistique Canada 2003; DRHC 2003). Dans ce contexte de sous-développement, nombreux sont ceux qui font face à l’isolement social, la perte d’estime de soi et qui ont une immense difficulté à demeurer actifs. Les personnes employées (77 % des gens de 15 ans ou plus) le sont dans des emplois saisonniers ou précaires, c’est-à-dire temporaires, surnuméraires, sur appel ou de remplacement, et seulement 23 % d’entre elles …

Parties annexes