FR :
Le travail à n’importe quel prix est devenu une obligation incontournable depuis que l’État ne reconnaît plus la créance collective des plus démunis à son endroit. Au Québec, l’entrée en vigueur de la Loi sur la sécurité du revenu n’échappe pas à cette logique. Il s’agit d’une législation qui a essentiellement pour objet de forcer et non de faciliter la réintégration du marché du travail par les bénéficiaires. C’est ce que le présent article entend d’abord démontrer. Pour ce faire, l’auteure procédera à l’examen de la nouvelle norme de l’aptitude au travail ainsi qu’à celui des fonctions essentiellement disciplinaires qu’elle entraîne avec elle. Dans un deuxième temps, quelques questionnements juridiques sont soulevés : que peut-on espérer du respect du droit à la sécurité de sa personne garanti par l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés lorsqu’une loi, dite de sécurité du revenu, met tout en oeuvre pour nier la reconnaissance du droit à la garantie de moyens de subsistance ? Qu’en est-il du droit aux mesures d’assistance financière garantissant un niveau de vie décent énoncé à l’article 45 de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec ?
Par ailleurs, l’auteure prétend qu’il faut tenter de tirer le maximum d’enseignement de la récente décision de la Cour d’appel fédérale dans l’affaire Finlay. À l’occasion de l’adoption de la Loi sur la sécurité du revenu, le gouvernement québécois tenterait d’atteindre un seuil de désengagement que n’autoriserait pas les règles de financement du Régime d’assistance publique du Canada.
Enfin, n’est-ce pas au coeur des plus profonds engagements de la communauté internationale qu’il faut chercher à identifier les limites négatives que peuvent atteindre les mathématiques de la sécurité sociale ? Car on ne saurait renoncer au respect de la dignité humaine, lequel est, entre autres moyens, garanti par des mesures d’assistance financière efficaces et suffisantes aux fins de combler les besoins essentiels des citoyens les plus démunis.
EN :
This article shows that the philosophy underlying Quebec's Income Security Act is that any work is better than no work at all, and that the state no longer accepts the collective claim of the disadvantaged to adequate social security. This newly enacted legislation aims not simply to facilitate return to work, but to force welfare recipients back into the work force. Particular attention will be paid to provisions regarding classification of recipients according to their capacity to work, and the disciplinary functions of these new rules.
Charter questions will be raised: does section 7 of the Canadian Charter of Rights and Freedoms provide protection against a so-called income security act that does everything to deny the right to a decent standard of subsistence? Does section 45 of the Quebec Charter of Human Rights and Freedoms really ensure an acceptable standard of living?
The author discusses the importance of the Federal Court of Appeal decision in the Finlay case; examining whether Quebec's welfare cutbacks are compatible with the rules prescribed by the Public Assistance Act.
The article concludes with a look at international sources, reminding us that the quality of financial assistance programs is a measure of a society's respect for human dignity.