Recherches amérindiennes au Québec
Volume 47, numéro 2-3, 2017 Les petites bêtes dans l’histoire et les cosmologies amérindiennes Sous la direction de Frédéric Laugrand et Denys Delâge
Sommaire (21 articles)
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Introduction : les petites bêtes dans l’histoire et les cosmologies amérindiennes
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Coléoptères, poux et puces subfossiles provenant d’habitats de chasseurs-cueilleurs : l’apport des recherches archéoentomologiques dans le Nord circumpolaire
Véronique Forbes, Frédéric Dussault, Olivier Lalonde et Allison Bain
p. 11–21
RésuméFR :
L’archéoentomologie, l’analyse des restes d’insectes préservés en contexte archéologique, est une approche relativement méconnue en Amérique du Nord. Bien qu’une première étude d’insectes subfossiles provenant d’un site paléoesquimau ait été conduite à la fin des années 1960 au Groenland, il s’est écoulé près de trois décennies avant que de telles études se réalisent dans l’Arctique nord-américain. Depuis, une vingtaine de sites de cultures paléoesquimaudes (Saqqaq, Dorset) et néoesquimaudes (thuléennes, inuites, yup’iks) ont fait l’objet d’analyses archéoentomologiques, produisant des milliers de spécimens de coléoptères, de poux et de puces. Ces données permettent d’examiner les pratiques de subsistance et d’hygiène des anciens peuples autochtones de l’Alaska, du Nord canadien et du Groenland, ainsi que leurs effets sur la faune et la flore locale. Cet article présente un bilan de l’apport des analyses archéoentomologiques à l’étude des modes de vie des chasseurs-cueilleurs du Nord circumpolaire.
EN :
Archaeoentomology, the analysis of insect remains preserved in archaeological contexts, is an approach that is relatively unknown in North America. Even though the first study of insect subfossils from Greenland was conducted in the 1960s, nearly three decades passed before studies were undertaken in the North American Arctic. Since then, a little more than twenty sites of palaeoeskimo (Saqqa, Dorset) and neoeskimo (Thule, Inuit, Yup’ik) cultures have been examined for their subfossil insect faunas, producing thousands of beetle, lice and flea specimens. This data allows an examination of the subsistence and hygiene practices of past indigenous peoples of Alaska, northern Canada and Greenland, as well as their impacts on the local fauna and flora. This paper reviews the contribution of archaeoentomology in the study of hunter-gatherer lifeways in the Circumpolar North.
ES :
La arqueoentomología, el análisis de los restos de insectos preservados en un contexto arqueológico es un enfoque relativamente desconocido en Norteamérica. Aunque a finales de los años sesenta se llevó a cabo en Groenlandia un primer estudio de insectos fósiles de un sitio paleo-esquimal, han transcurrido casi tres décadas para que estudios similares se realizasen en el Ártico norteamericano. Desde entonces, una veintena de sitios de culturas paleoesquimales (Saqqaq, Dorset) y neoesquimales (Thule, Inuit, Yup’ik) han sido sometidos a una serie de análisis arqueoentomológicos, generando información sobre miles de escarabajos, piojos y pulgas. Estos datos brindan la oportunidad de examinar las prácticas de subsistencia y de higiene de los antiguos pueblos indígenas de Alaska, del norte de Canadá y de Groenlandia, así como de sus efectos sobre la flora y la fauna local. Este artículo presenta una evaluación del aporte de los análisis arqueoentomológicos al estudio de los modos de vida de los cazadores-recolectores en el norte circumpolar.
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Des mouches, des morts, des offrandes : archéoentomologie de tombes mochicas de la pyramide de la Lune, Pérou
Jean-Bernard Huchet
p. 23–34
RésuméFR :
De récentes investigations archéoentomologiques conduites sur une plateforme funéraire du site de la Huaca de la Luna, au Pérou, ont permis de souligner l’importance des insectes nécrophages dans les rites funéraires des Mochicas. La riche iconographie montrant des mouches qui survolent des squelettes dansant ou accompagnant de futurs sacrifiés vient corroborer l’existence de pratiques mortuaires singulières et suggère que ces insectes avaient vraisemblablement une fonction psychopompe. L’originalité de ce site emblématique de l’Amérique précolombienne ne s’arrête pas là puisque d’autres insectes, associés aux dépôts funéraires, nous documentent sur la nature des offrandes destinées à accompagner les défunts dans l’au-delà.
EN :
Recent archaeoentomological investigations of a funeral platform at the Mochica site of Huaca de la Luna, Peru, have highlighted the importance of necrophagous insects in the funeral rites of these Indians. A rich iconography showing flies flying over dancing skeletons or accompanying future sacrificed individuals corroborates the existence of singular mortuary practices, and suggests that probably these insects had a psychopomp function. The originality of this emblematic site of pre-Columbian America does not end there, as other insects, associated with funerary deposits, provide us relevant information about the nature of the offerings designed to accompany the deceased in his journey to the beyond.
ES :
Investigaciones arqueoentomológicas recientes realizadas en una plataforma funeraria del sitio de la Huaca de la Luna en Perú han destacado la importancia de los insectos necrófagos en los ritos funerarios Mochicas. La rica iconografía que muestra moscas sobrevolando esqueletos bailando o acompañando futuros sacrificios corrobora la existencia de prácticas mortuorias singulares, y sugiere que estos insectos probablemente tenían una función psicopómpica. La originalidad de este sitio emblemático de la América precolombina no se detiene ahí porque otros insectos, asociados a los yacimientos funerarios, documentan sobre la naturaleza de las ofrendas destinadas a acompañar al difunto en el más allá.
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Tlaloc, le dieu parasite
Dimitri Karadimas
p. 35–46
RésuméFR :
Travaillant à partir de sources variées et composites, l’auteur livre une analyse iconographique originale sur Tlaloc, le dieu parasite des Mayas, figure centrale de leur panthéon, souvent qualifié par les spécialistes des sociétés mésoaméricaines comme le « dieu de la pluie », mais aussi des tornades, des séismes et autres éléments météorologiques. À travers une démarche archéologique et anthropologique, l’auteur propose de mettre en lumière une « pensée analogique », traversant différentes sociétés précolombiennes, qui, pour créer les êtres imaginaires, trouve son inspiration dans les formes significatives apparaissant au sein du monde vivant, notamment dans certaines espèces d’insectes.
EN :
Working with a variety of sources and of a heterogeneous nature, the author delivers an original and iconographic analysis of Tlaloc, the parasitic god of the Maya, and a central figure of their pantheon, often referred to by the specialists of Mesoamerican societies as the “god of rain”, but also tornadoes, earthquakes and other meteorological elements. Adopting an archeological and anthropological approach, the author proposes to highlight the “analogical thought”, that crosses different pre-Columbian societies which, to create imaginary beings, finds its inspiration in the significant forms appearing within the living world, and especially in some species of insects.
ES :
Trabajando a partir de fuentes variadas y compuestas, el autor ofrece un análisis iconográfico original de Tlaloc, el dios parásito de los Mayas, figura central de su panteón, a menudo denominado por los especialistas de las sociedades mesoamericanas como el «dios de la lluvia», pero también de los tornados, terremotos y otros fenómenos meteorológicos. A través de un enfoque arqueológico y antropológico, el autor propone resaltar un «pensamiento analógico» que cruza diferentes sociedades precolombinas, que, para crear seres imaginarios, encuentra su inspiración en las formas significativas que aparecen en el mundo de los vivos, y especialmente en algunas especies de insectos.
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Les araignées et les insectes dans la mythologie et la religion des Indiens hopis
Armin W. Geertz
p. 47–59
RésuméFR :
Les araignées et les insectes jouent un rôle important dans la mythologie et la religion des Indiens hopis. Ils apparaissent souvent dans l’art rupestre, sur les peintures murales et les objets cérémoniels. Ils sont également très présents dans les mythes et les histoires, où ils jouent des rôles de héros ou de méchants. Les insectes sont en effet conceptualisés comme des créatures bénéfiques portant la vie dans les mythes fondateurs des rituels, ou comme des assistants malfaisants dans la sorcellerie et la magie noire. Il n’existe aucune étude systématique générale sur les araignées et les insectes dans la mythologie et la religion des Indiens hopis, mais un certain nombre de recherches s’intéressent à des insectes en particulier, et l’on retrouve évidemment des références aux insectes dans la littérature. Dans cette étude préliminaire, l’auteur explore les diverses représentations des araignées et des insectes dans la pensée et les comportements des Hopis.
EN :
Spiders and insects play an important role in Hopi Indian mythology and religion. They often appear in ancient rock art, on wall-paintings, and on ceremonial paraphernalia. They play a significant role in myths and tales for good and bad. Insects are conceptualized as beneficial, life-bearing creatures in the origin myths of rituals or as evil assistants in witchcraft and black magic. There is no general systematic study of spiders and insects in Hopi Indian mythology and religion. There are, however, a small number of studies that focus on particular insects, and there are, of course, references to insects throughout the literature. This preliminary study will explore various ways that spiders and insects figure in Hopi thought and behavior.
ES :
Las arañas y los insectos juegan un papel importante en la mitología y en la religión de los indios Hopi. A menudo aparecen en el arte rupestre, en las pinturas murales y en los objetos ceremoniales. También están muy presentes en mitos e historias, donde actúan como héroes o villanos. Los insectos son conceptualizados como criaturas benéficas portadores de vida en los mitos fundacionales de los rituales, o como malvados asistentes de la brujería y la magia negra. No existe ningún estudio sistemático general sobre las arañas y los insectos en la mitología y la religión de los Hopi, pero una serie de estudios se interesan en los insectos en particular, y se encuentran evidentemente referencias a los insectos en la literatura. En este estudio preliminar, el autor explora las diversas representaciones de arañas e insectos en el pensamiento y el comportamiento de los Hopi.
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Insectes, monstres et esprits : la conjonction des êtres invisibles dans les taxonomies athapascanes subarctiques
Marie-Françoise Guédon
p. 61–78
RésuméFR :
Les Athapascans de l’Alaska et du Nord-Ouest canadien utilisent les mêmes termes pour désigner d’une part les insectes et tout ce qui grouille et, d’autre part, les monstres aquatiques ou nocturnes, les géants mythiques, les esprits et les fantômes, ainsi que les gens-des-bois, êtres sauvages qui hantent la forêt subarctique. À première vue, il est difficile de trouver, entre ces diverses créatures, un lien qui justifierait une taxonomie aussi ambiguë, même en tenant compte des particularités des systèmes de classification athapascans. Une comparaison des créatures en question révèle des indices inattendus qui permettent une hypothèse : toutes ces créatures entretiennent un lien avec l’espace chamanique et mythique (ink’on), y compris les insectes qui feraient déjà directement partie de cet espace parce qu’ils étaient présents au début des temps mythiques, avant l’émergence de l’humanité. Des études linguistiques pourraient confirmer le lien sémantique entre ink’on et insectes.
EN :
Northern Athapaskan people use the same terms, translated as “bug”, to designate insects, worms and snake-like animals, giant beings, night monsters, ghosts and spirits of various kinds and “bushmen or brushmen” (wild beings known throughout the subarctic forest). It is difficult to find a common ground justifying putting all these creatures in the same class, even while taking into account the particularities of Athapaskan taxonomy. Comparing these various creatures reveals connections that allow us a new hypothesis: These creatures share a direct connection with the shamanic and mythical space (ink’on), including the insects as they already belong to that space as a result of their presence in the earliest mythical times ruled by oneiric and creative powers before the existence of human beings. Linguistic studies could confirm the semantic link between ink’on and insects.
ES :
Los Atabascanos de Alaska y del noroeste de Canadá usan los mismos términos para referirse, por un lado, a los insectos y todo lo que se arrastra y, por otro lado, a los monstruos acuáticos o nocturnos, los gigantes míticos, los espíritus y los fantasmas, así como también a la gente de los bosques, criaturas salvajes que acechan en el bosque subártico. A primera vista, es difícil encontrar un vínculo entre estas diversas criaturas que justifique una taxonomía tan ambigua, incluso teniendo en cuenta las particularidades de los sistemas de clasificación Atabascanos. Una comparación de las criaturas en cuestión revela pistas inesperadas que llevan a una hipótesis: todas estas criaturas mantienen un vínculo con el espacio chamánico y mítico (ink’on), incluyendo a los insectos que ya formarían parte directamente de este espacio porque estaban presentes al comienzo de los tiempos míticos, antes del surgimiento de la humanidad. Los estudios lingüísticos podrían confirmar el vínculo semántico entre el ink’on y los insectos.
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Ciissit : les insectes dans la tradition orale yup’ik
Ann Fienup-Riordan
p. 79–93
RésuméFR :
Les insectes jouent un rôle important dans la tradition orale yup’ik du sud-ouest de l’Alaska. Même s’ils sont considérés comme des parasites indésirables dans certains contextes, ces minuscules êtres possèdent et peuvent donner une grande puissance. Certains existent depuis les tout débuts de l’humanité, à l’époque où Corbeau a créé les humains alors que tout était neuf. Selon les aînés yup’iks, aucun autre animal n’est autant associé au pouvoir de guérir que la chenille, et aucun autre animal n’a la capacité de consommer ou de détruire un corps – animal ou humain – que l’asticot ou le ver. Tous les insectes possèdent la capacité de penser et, comme pour les animaux, on considère qu’ils traitent les humains comme ces derniers eux-mêmes les traitent. Jusqu’à ce jour, on indique que deux types de chenilles poilues et glabres peuvent se présenter à ceux, parmi les humains, qu’elles considèrent comme purs et leur conférer le pouvoir de guérir. Les humains qui en héritent ont été assez sages pour surmonter leurs craintes. Ils ont accueilli ces petites bestioles sans être effrayés par leur présence.
EN :
Insects hold an important place in the oral tradition of the Yup’ik people of southwest Alaska. While considered undesirable pests in some contexts, these tiny beings both possess and can bestow great power. Some were said to have been in existence from the beginning, while Raven created others when the world was new. According to Yup’ik elders, no animal is more strongly associated with healing than the caterpillar, and none so directly tied to the consumption and destruction of the body – whether animal or human – than the maggot or worm. All insects possess minds, and like other animals their treatment of people depends on how people treat them. To this day, both furry and hairless caterpillars may present themselves to those they consider pure, and then bestow the power to heal on people wise enough to overcome their apparently creepy presence and welcome them.
ES :
Los insectos juegan un papel importante en la tradición oral Yup’ik del suroeste de Alaska. Aunque en algunos contextos se consideran parásitos indeseados, estos seres diminutos poseen o pueden otorgar un gran poder. Algunos existen desde los inicios de la humanidad, en la época donde el Cuervo creó a los humanos, cuando todo era nuevo. Según los ancianos Yup’iks, ningún otro animal está tan asociado al poder de sanación como la oruga, y ningún otro animal tiene la capacidad de consumir o destruir un cuerpo -animal o humano- como la larva o el gusano. Todos los insectos tienen la capacidad de pensar, y como con los animales, se considera que tratan a los humanos como estos últimos los tratan a ellos. Hasta el día de hoy, se indica que dos tipos de orugas peludas y sin pelo pueden presentarse a aquellos entre los humanos a quienes consideran puros y a los que dan el poder de curar. Los humanos que heredan este poder han sido lo suficientemente sabios para superar sus temores. Recibieron a estas pequeñas criaturas sin ser asustados por su presencia.
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Bestioles néfastes, prédateurs supportables et alliés susceptibles : les « petites bêtes » dans les savoirs et l’imaginaire des Maseuals de la Sierra Norte de Puebla, Mexique
Pierre Beaucage et Taller de Tradición Oral Totamachilis
p. 95–110
RésuméFR :
Cet article décrit et analyse les représentations et pratiques, concernant les « petites bêtes » (okuiltsitsin), du peuple maseual (nahua) de la région de Cuetzalan, dans la Sierra Nororiental de Puebla, au Mexique. Il se fonde sur une vaste enquête de terrain sur les savoirs zoologiques amérindiens, réalisée en collaboration avec le Taller de Tradición Oral Totamachilis. En plus d’être classés selon un critère morphologique qui distingue les insectes, les arachnides et les gastéropodes, les petits êtres sont rangés en fonction de leur proximité avec la société humaine, qui souvent correspond avec les bienfaits matériels et spirituels qu’ils apportent : à un extrême, on trouve la prédation pure, sans contrepartie ; à l’autre, la réciprocité va même jusqu’à un « partage d’essence » avec l’insecte de prédilection, l’abeille autochtone (Scaptotrigona mexicana). Les représentations entomologiques ont largement recours à la métaphore et à la métonymie.
EN :
This paper describes and analyzes the representations and practices concerning « little animals » (okuiltsitsin) among the Maseual (Nahuat) people of the Cuetzalan area, in the Sierra Nororiental de Puebla, Mexico. It is based upon a vast fieldwork research on native zoological knowledge, made in collaboration with the Taller de Tradición Oral Totamachilis (« Oral Tradition Workshop ‘Our Knowledge’ »). Apart from being classified according to a morphological criterion, which distinguishes insects, arachnids and gastropods, small beings are ranked in function of their proximity with human society, which often corresponds to the material and spiritual benefits they bring: at one extreme, one finds pure predation, without counterpart, at the other, reciprocity stretching as far as « a shared essence » with the preferred insect, the native bee (Scaptotrigona mexicana). Entomological representations commonly resort to metaphor and metonymy.
ES :
En este artículo describimos y analizamos las representaciones y las prácticas acerca de los « animalitos » (okuiltsitsin) entre los maseualmej (nahuas) de Cuetzalan, en la Sierra Nororiental de Puebla, México. Nos fundamos sobre una amplia investigación de campo realizada en colaboración con el Taller de Tradición Oral Totamachilis (‘Nuestros saberes’). Además de ser clasificados siguiendo un criterio morfológico, que distingue insectos, arácnidos y gasterópodos, los ‘seres pequeños’ se ordenan en función de su proximidad supuesta con la sociedad humana, lo que corresponde a menudo con los beneficios materiales y espirituales que nos traen. En un extremo, encontramos la depredación pura, sin contraparte, y en el otro, una reciprocidad que llega al punto de « compartir la esencia » con el insecto predilecto, la abeja indígena (Scaptotrigona mexicana). Las representaciones entomológicas a menudo utilizan la metáfora y la metonimia.
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Des monstres, des moustiques et des cendres : les insectes dans la mythologie, les rituels et l’art de la côte Nord-Ouest
Marie Mauzé
p. 111–121
RésuméFR :
Les insectes sont présents dans la mythologie, les rituels et l’art des sociétés de la côte Nord-Ouest, cependant, à la différence des autres animaux qui sont au centre de leur cosmologie, les travaux les concernant sont quasi inexistants. En se fondant principalement sur la mythologie des principaux groupes de cette région, l’auteure montre que les moustiques nés des cendres de monstres calcinés partagent avec ceux-ci les mêmes dispositions et sont, à leur échelle, des maillons nécessaires à la perpétuation de la vie, celle-ci étant indissociablement liée à la mort, car il faut mourir pour renaître. Les esprits moustiques sont des esprits auxiliaires des chamanes tlingits, et quant aux esprits guêpes, ils sont censés rendre les guerriers invulnérables et agressifs.
EN :
Insects are present in mythology, rituals and the art of the Northwest Coast societies, however, unlike other animals that are at the center of their cosmology, little is known about them in the ethnographic literature. Mainly based on the mythology of the main ethnic groups in this region, we can show that mosquitoes born from the ashes of charred monsters share with them the same qualities: they are, at their level, the necessary links to the perpetuation of life, which is inseparably tied to death, because one must die to be reborn. Mosquito spirits are helping spirits of Tlingit shamans, and wasp spirits are supposed to make warriors invulnerable and aggressive.
ES :
Los insectos están presentes en la mitología, en los rituales y en el arte de las sociedades de la Costa Noroeste, sin embargo, a diferencia de otros animales que están en el centro de su cosmología, los trabajos con respectos a ello son casi inexistentes. Basándose principalmente en la mitología de los principales grupos de esta región, la autora muestra que los mosquitos nacidos de las cenizas de los monstruos calcinados comparten las mismas disposiciones y son, a su escala, eslabones necesarios para la perpetuación de la vida, que está indisolublemente ligada a la muerte, porque es necesario morir para renacer. Los espíritus mosquitos son espíritus auxiliares de los chamanes Tlingit, y en cuanto a los espíritus de las avispas, se supone que hacen a los guerreros invulnerables y agresivos.
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Pénétration, dévoration, métamorphoses, adoption : modalités d’interactions entre les Inuits et les « petites bêtes » (qupirruit)
Vladimir Randa
p. 123–133
RésuméFR :
Cet article s’attache à éclairer les rapports que les Inuits entretiennent avec les « petites bêtes » qupirruit, en confrontant les textes de tradition orale avec les données ethnozoologiques et linguistiques recueillies sur le terrain. Comparée aux autres catégories taxinomiques inuites, la catégorie qupirruit est très hétérogène, comprenant les insectes mais aussi des vers et des araignées, et même certains petits crustacés. Le contraste est saisissant entre l’absence des « petites bêtes » du domaine de la subsistance et leur présence (re)marquée dans l’imaginaire collectif qui les fait interagir avec les humains, en s’inspirant de certains éléments empiriques. Les rapports des qupirruit avec les humains sont pensés pour l’essentiel en termes d’agression physique. Celle-ci prend la forme du parasitisme mais surtout de la pénétration et de la dévoration des humains, même dans un contexte aussi spécifique que l’adoption. Le corps humain s’avère être également un terrain privilégié où des qupirruit se transforment en d’autres qupirruit. Tout cela concourt à susciter chez les Inuits des sentiments de frayeur et de répulsion.
EN :
This article examines the relations between the Inuit and qupirruit “creepy-crawlies”, by comparing oral tradition texts with ethnozoological and linguistic data collected in the field. In comparison to the other Inuit taxonomic categories, the category qupirruit is highly heterogeneous and includes insects as well as worms and spiders, and even some small crustaceans. The contrast is striking between the absence of “creepy-crawlies” from the subsistence domain and their remarkable presence in the collective imagination which portrays them as interacting with humans, inspired by various empirical facts. Relations between qupirruit and humans are mostly construed in terms of physical aggression. This aggression can take on the form of parasitism, but pertains more often to the penetration and devouring of humans, even in specific contexts such as adoption. The human body is also seen as grounds favored by qupirruit for transforming into other qupirruit, all of which trigger in the Inuit feelings of fear and repulsion.
ES :
Este artículo busca esclarecer las relaciones que los inuit tienen con los “pequeños animales” qupirruit, comparando textos de tradición oral con datos etnozoológicos y lingüísticos recopilados en terreno. En comparación con otras categorías taxonómicas inuit, la categoría qupirruit es muy heterogénea, incluyendo a los insectos, pero también a los gusanos y arañas, e incluso algunos pequeños crustáceos. El contraste es llamativo entre la ausencia de las “pequeñas criaturas” en el ámbito de la subsistencia y su (re)marcada presencia en el imaginario colectivo que las hace interactuar con los humanos, inspirándose en ciertos elementos empíricos. La relación de qupirruit con los humanos es esencialmente pensada en términos de agresión física. Esta toma la forma de parasitismo, pero sobre todo de la penetración y devastación de los seres humanos, incluso en un contexto tan específico como la adopción. El cuerpo humano también demuestra ser un terreno privilegiado donde el qupirruit se transforma en otros qupirruit. Todo esto contribuye a suscitar sentimientos de miedo y repulsión entre los inuit.
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Les messagers de l’invisible chez les Inuits de l’Arctique de l’Est canadien : les petites bestioles (qupirruit) à l’âge des changements climatiques
Frédéric B. Laugrand
p. 135–147
RésuméFR :
Les rapports que les Inuits entretiennent avec les qupirruit (les petites bestioles) et les savoirs qu’ils possèdent à leur égard demeurent méconnus. Dans les rares études disponibles, l’accent a surtout été placé sur les peurs et la terreur que suscitent ces petites bêtes auprès des humains. On a également souligné leur rôle dans l’initiation chamanique, ces êtres étant en contact avec la mort et susceptibles de revivre ou de se métamorphoser. À partir de sources orales anciennes et contemporaines, cet article aborde un tout autre aspect des petites bestioles, en particulier leur rôle de messagers. Les qupirruit sont des entités capables de guider les humains dans leurs gestes et leurs prises de décision, de les accompagner et de les protéger, d’annoncer des événements à venir. Alors que les traditions chamaniques ont basculé dans l’invisible, il convient de se demander si les petites bestioles ne sont pas aujourd’hui perçues plus positivement que jadis, nonobstant leur ambivalence.
EN :
The relationships that Inuit maintain with qupirruit (small critters) and the knowledge they have about them remain unknown. In the few available studies that can be found, the emphasis has been mainly on the fears and terror that these little animals bring to humans. Their role in the shamanic initiations has also been emphasized, these small critters being in contact with death and able to revive or to metamorphose. Using classical and contemporary oral sources, this paper addresses a very different aspect of small critters, their role as messengers. Qupirruit are entities able to guide humans in their gestures and their decision-making. They can sometimes accompany them and protect them, or announce events to come. While shamanic traditions are now underground, it is necessary to wonder whether these little critters are not perceived more positively than before, notwithstanding their ambivalence.
ES :
Las relaciones que los Inuit mantienen con los qupirruit (las pequeñas criaturas) y el conocimiento que tienen sobre ellos siguen siendo desconocidos. En los pocos estudios disponibles, se hizo hincapié en los temores y en el terror que causan estas pequeñas criaturas a los seres humanos. Se destacó igualmente su papel en la iniciación chamánica, estando estos animales en contacto con la muerte y siendo capaces de revivir o de metamorfosearse. A partir de testimonios orales antiguos y contemporáneos, este artículo describe un aspecto diferente de las pequeñas criaturas, especialmente su papel como mensajeros. Los qupirruit son entidades capaces de guiar a los seres humanos en sus acciones y decisiones, de acompañarlos y de protegerlos, capaces de anunciar eventos futuros. Aunque las tradiciones chamánicas han caído en lo invisible, es apropiado preguntarse si los pequeños insectos no son percibidos más positivamente hoy que en el pasado, a pesar de su ambivalencia.
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Ce qu’évoquent les petites bêtes : hétérogénéité des modes d’appréhension et d’(inter)action chez les Wayùus de Manaure, Colombie
Lionel Simon
p. 149–159
RésuméFR :
Les mythes wayùus fourmillent de petites bêtes, souvent décrites comme des passeurs entre le domaine céleste des êtres qui, dans un passé originaire, contribuèrent à donner au monde ses cycles saisonniers stables et ses événements climatiques plus imprévisibles, celui, sous-terrain, des créatures invisibles et de la mort, et celui, terrestre, des hommes. Outre ces récits faisant jouer aux insectes des rôles cosmogoniques de grande ampleur, certaines bestioles sont, au quotidien, le support d’inférences notables. Qu’on les traite comme des envahisseurs dotés du pouvoir pülasü des esprits, qu’on les écoute annoncer la venue de Jepirachi, le vent du nord-est, ou qu’on entende les faire compenser des dommages, ces bêbêtes évoquent aux Wayùus bien plus qu’un ersatz d’animal. Elles sont révélatrices de dynamiques immanentes et de ce que le monde, aux yeux des Wayùus, se meut au gré des humeurs et tempéraments d’êtres susceptibles de le rendre hospitalier ou non.
EN :
The Wayùus myths swarm with little creatures, often described as transmitters between the celestial realm of beings who, in an original past, helped give the world its stable seasonal cycles and its more unpredictable climatic events, the underground of invisible creatures, of death and the earthly one of humans. Besides the stories that bring into play the significant cosmogenic roles of insects, some creatures can support important assumptions of daily life. That they treat them as invaders with the power pülasü of the spirits, whether they are heard to announce the coming of Jepirachi, the northeast wind, or that we understand them to compensate for damage, these beasts evoke for the Wayùus well more than some unimportant animals. In the eyes of the Wayùus they reveal the importance of the inherent driving force of the moods and temperaments of beings able to render the world hospitable or not.
ES :
Los mitos wayùu abundan de insectos, a menudo descritos como seres que consiguen unir el dominio celestial de los dioses, el dominio subterráneo de las criaturas invisibles y el dominio terrestre de los hombres. Además de estos cuentos que hacen jugar a los insectos unos papeles cosmogónicos de gran escala, ciertos bichos son, a diario, el soporte de inferencias notables. Que se los trate como invasores dotados del poder pülasü de los espíritus, que se los escuche anunciar la llegada de Jepirachi, el Viento del Nordeste, o que se piense hacerlos compensar daños, estas bestias pequeñas evocan a los Wayùu mucho más que un ersatz de animal. Son reveladores de dinámicas inmanentes y de lo que el mundo, con los ojos de los Wayùu, se mueve en función de los humores y de los temperamentos de seres susceptibles de hacerlo hospitalario o no.
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Tshiheu : le battement d’ailes d’un passeur culturel et écologique chez les Pekuakamiulnuatsh
Carole Delamour, Marie Roué, Élise Dubuc et Louise Siméon
p. 161–172
RésuméFR :
Cet article étudie un motif de naïade de libellule brodé sur un manteau en cuir d’orignal ayant pour origine la Première Nation des Pekuakamiulnuatsh de Mashteuiatsh, manteau actuellement conservé au National Museum of the American Indian (Smithsonian Institution) de Washington. Alors que l’étude des motifs décoratifs innus s’est principalement concentrée sur les motifs floraux, cet article en propose une lecture renouvelée. Les auteures analysent la place des libellules dans les savoirs et les pratiques ilnus en s’attachant aux relations interspécifiques qui leur sont associées, notamment avec les poissons. S’inscrivant dans un contexte de recherche collaborative entre experts locaux et chercheurs universitaires, l’article expose comment a été identifié puis étudié le motif au sein de la communauté. Il s’attache enfin à illustrer comment l’étude du manteau et du motif peut devenir un support de revitalisation et de réappropriation de connaissances culturelles et écologiques.
EN :
This article examines a dragonfly naiad pattern embroidered on a moose-hide coat from the Pekuakamiulnuatsh First Nation of Mashteuiatsh, now conserved at the National Museum of the American Indian (Smithsonian Institution) in Washington. While the study of Innu decorative motifs has focused primarily on floral patterns, this article proposes a new reading. The authors analyze the dragonfly’s place in Ilnu knowledge and practices by focusing on inter-species relationships associated with them, especially with fish. Following a collaborative research approach between local experts and university researchers, the article discusses how the motif was identified and studied within the community. Finally it seeks to illustrate how the study of the coat and motif can support the revitalization and reappropriation of cultural and ecological knowledge.
ES :
Este artículo explora un motivo náyade de libélula bordado en un abrigo de cuero de alce procedente de la Primera Nación Pekuakamiulnuatsh de Mashteuiatsh, actualmente en el Museo Nacional del Indio Americano (Instituto Smithsoniano) en Washington. Mientras que el estudio de los motivos decorativos Innu se ha centrado principalmente en los motivos florales, este artículo ofrece una nueva lectura. Los autores analizan el lugar de las libélulas en el conocimiento y las prácticas ilnus, centrándose en las relaciones interespecíficas que le son asociadas, especialmente con los peces. En el contexto de una investigación colaborativa entre expertos locales e investigadores universitarios, el artículo explica cómo se identificó y estudió el motivo dentro de la comunidad. Por último, el artículo busca ilustrar cómo el estudio del abrigo y del motivo puede convertirse en un apoyo para la revitalización y reapropiación del conocimiento cultural y ecológico.
Note de recherche
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La légende de Wemishoosh
George Fulford
p. 173–179
RésuméFR :
Les Moskégons des basses terres de la baie James et de la baie d’Hudson, ainsi que de l’Ontario et du Manitoba, possèdent un riche patrimoine de légendes. Nombre d’entre elles constituent une source précieuse en matière de savoir écologique. Dans cette note de recherche, l’auteur établit une comparaison entre une légende rapportant l’origine de la phrygane, et les connaissances entomologiques sur cet insecte. Au moyen d’un dialogue de médiation faisant intervenir l’auteur ainsi que Louis Bird, conteur moskégon, et Glenn Wiggins, entomologiste de renom, ce texte explore la complémentarité entre narration traditionnelle, sciences sociales et sciences naturelles.
EN :
The Swampy Cree people of the Hudson and James Bay Lowlands of Ontario and Manitoba have a rich heritage of legends. Many of these provide a rich source of ecological knowledge. In this Research Note the author compares a legend about the origin of caddisflies with entomological research on the topic. Through a mediated dialogue involving the author together with Louis Bird, a Swampy Cree storyteller, and Glenn Wiggins, a noted entomologist, the complementary nature of traditional storytelling, social science, and natural science is explored.
ES :
Los Moskégons de las tierras bajas de la Bahía James y de la Bahía de Hudson, así como de Ontario y de Manitoba, tienen un rico patrimonio de leyendas. Muchas de ellas son una valiosa fuente de conocimientos ecológicos. En esta nota de investigación, el autor establece una comparación entre una leyenda sobre el origen de la frigánea y los conocimientos entomológicos de este tipo de insecto. A través de un diálogo de mediación que involucra al autor, a Louis Bird, narrador Moskégon, y al renombrado entomólogo Glenn Wiggins, este texto explora la complementariedad entre la narrativa tradicional, las ciencias sociales y las ciencias naturales.
In memoriam
Comptes rendus
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Amerindia : essais d’ethnohistoire autochtone, Roland Viau. Les Presses de l’Université de Montréal, Montréal, 2015, 247 p.
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Les étoiles s’éteignent à l’aube, Richard Wagamese. Éditions Zoé, Genève, 2016, 285 p.
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Le Pouvoir vient d’ailleurs. Leadership et coopération chez les Inuits du Nunavik, Caroline Hervé. Les Presses de l’Université Laval, Canada, 2015, 439 p.
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A quiet evolution. The emergence of Indigenous-local intergovernmental partnerships in Canada, Christopher Alcantara et Jen Nelles. University of Toronto Press, Toronto, 2016, 159 p.