Diversité et altérité d’identité et de territoire

Le droit foncier en regard des réalités autochtones[Notice]

  • Karine Gentelet,
  • Jeremy Webber et
  • Pierre Noreau

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  • Karine Gentelet
    Département des sciences sociales, Université du Québec en Outaouais, Gatineau

  • Jeremy Webber
    Faculté de droit, Université de Victoria, Victoria (C.-B.)

  • Pierre Noreau
    Faculté de droit, Université de Montréal, Montréal

Entre 2006 et 2013, une équipe multidisciplinaire menait plusieurs chantiers de recherche sous le thème « Peuples autochtones et gouvernance » (PAG). Le programme réunissait des chercheurs québécois, canadiens et européens, des universitaires et chercheurs autochtones et non autochtones, francophones et anglophones. Trente-cinq chercheurs et près d’une centaine d’étudiants ont participé à ce vaste programme. Évoluant au rythme de plusieurs recherches théoriques et empiriques concurrentes, on y aura abordé le problème de la reconnaissance des rapports entre droit autochtone et droit étatique (y compris la question des relations difficiles entre la reconnaissance et l’autodétermination), le problème des conditions de l’autonomie économique autochtone, des modalités de sortie du colonialisme, de l’évolution du fédéralisme dans une perspective favorable à l’autonomie gouvernementale autochtone, etc. Ce programme était ambitieux, mais il aura tenu ses promesses en ce qu’il a activement stimulé la réflexion sur les conditions de la recherche en contexte autochtone au Canada et au Québec. On y a surtout insisté sur la poursuite d’un dialogue serré entre chercheurs autochtones et non autochtones, voire entre des savoirs fondés sur l’expérience et la réflexion ancrées dans les traditions autochtones, et des savoirs construits dans la perspective d’un discours non autochtone. PAG constituait en effet une des premières grandes initiatives de collaboration universitaire sur un thème dont les prémisses portaient sur les principes d’autodétermination, de décolonisation des modèles de gouvernance et de participation active des Premières Nations dans le cadre de recherches qui les concernaient au premier plan. Ces sept années de recherche ont permis de former une nouvelle génération de chercheurs en études autochtones, des chercheurs qui, du fait de leurs perspectives critiques, pluralistes et multidisciplinaires participeront à la refonte d’un domaine de recherche qui ne laissait, à l’époque, que très peu de place aux perspectives et méthodes de recherche autochtones. Sur le plan québécois, PAG a marqué un point tournant dans la conception, jusque-là unilatérale, qu’on se faisait de la recherche en droit, en contexte autochtone. Grâce à des méthodes basées notamment sur l’observation et la recherche empirique sur le terrain, la recherche en droit s’ouvrait à la richesse des traditions juridiques autochtones. Cette démarche a également permis d’imposer, dans le domaine des études juridiques, le concept de « droit autochtone », en tant que droit singulier. Réduisant la définition de droit à la seule législation fédérale s’appliquant aux Autochtones (la Loi sur les Indiens), on entretenait jusque-là une sorte de fiction colonialiste, totalement inadaptée à la réalité juridique des peuples autochtones, et ce, que ce soit avant ou après la colonisation, sans parler du déni entretenu à l’égard de la complexité des systèmes juridiques autochtones. Nous espérons que, grâce à la nouvelle génération de chercheurs formés dans la cadre du projet PAG, cette fiction n’ait désormais plus de place dans les études en droit, du moins en contexte autochtone. Le dossier publié dans ce numéro de la revue Recherches amérindiennes au Québec porte sur le thème : « Complexité d’identité et de territoire dans la revendication des droits autochtones au Québec et au Canada ». Il s’agit de la dernière publication du projet « Peuples autochtones et gouvernance ». Il réunit les contributions d’Étienne Le Roy, de Sylvie Vincent et de Jacques Leroux. Le problème de la territorialité s’y trouve posé de façon originale, notamment parce que le dossier est inspiré par les travaux anthropologiques de Le Roy sur l’appropriation et l’usage des ressources foncières en Afrique de l’Ouest. Le modèle développé par Le Roy sert ici de point d’appui aux travaux de cette équipe et fonde l’étude du rapport au territoire des Autochtones en contexte québécois. Il s’agit d’un pari risqué, …