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La détection du mensongeL’effet Pinocchio existe-t-il?[Notice]

  • Michel St-Yves et
  • Joe Navarro

Depuis que l’humain sait communiquer, il cherche à découvrir (et à cacher) la vérité par tous les moyens. En Chine, un millénaire avant Jésus-Christ, on obligeait les personnes suspectées d’avoir menti à mâcher du riz sec avant de le recracher : si le rejet était sec (par manque de salive), on estimait qu’elles avaient menti. Au Moyen Âge, les juges utilisaient une méthode semblable. Ils faisaient avaler de la farine aux accusés dans le but d’identifier ceux qui avaient la bouche sèche. Dans le cas où un accusé avait la bouche sèche, cela signifiait qu’il n’avait pas dit la vérité. Depuis, un grand nombre de techniques, plus ou moins scientifiques, ont vu le jour. Du riz utilisé dans l’Antiquité au polygraphe employé aujourd’hui, qu'avons-nous appris sur la détection du mensonge? L’effet Pinocchio existe-t-il? Ce texte fait le point sur ce que la science nous a appris au sujet de la détection du mensonge, par l’observation des signes verbaux et non verbaux, ainsi que des mythes qui y sont associés, et surtout, des limites liées à la détection du mensonge. Mentir est un comportement normal (dans une certaine mesure) et (souvent) nécessaire. Un enfant apprend à mentir dès l'âge de 3 ans, d'abord d'une manière ludique, puis, à « l'âge de raison » (vers 6-7 ans), ses mensonges peuvent être suffisamment bien construits et crédibles pour tromper un adulte (Vrij 2000). On ne peut leur en vouloir, car nous sommes souvent les artisans de leur capacité à mentir (St-Yves, Pilon et Landry, 2004) : [le téléphone sonne] « Chut, papa n'est pas là ». Il est également plus logique de mentir que de dire la vérité. Si on ment, on peut se sortir d'une situation embarrassante ou éviter une conséquence, alors que si on dit la vérité, on devra inévitablement faire face aux conséquences. Les enfants apprennent à mentir très tôt et leur prédisposition à mentir ou à dire la vérité sera influencée par les enjeux (punition versus récompense) qui y sont reliés. Si l’on demande à un enfant si c’est lui qui a fait une bêtise (en supposant que c’est bel et bien lui), il hésitera à répondre parce qu’il évaluera les conséquences possibles (punition) de ses actes. Il sait que la personne qui pose la question ne possède probablement pas de preuve puisqu’elle l’interroge à ce sujet. En mentant, l’enfant a la possibilité de s’en sortir indemne, alors que s’il dit la vérité, il a de fortes chances d’être puni : « Non, ce n’est pas moi ». Nous mentons délibérément pour toutes sortes de raisons : pour se valoriser, pour dissimuler des émotions, par haine, pour éviter une conséquence, et même parfois, pour le plaisir ou pour faire plaisir. Les gens mentent en moyenne une à deux fois par jour (DePaulo, Kashy, Kirkendol, Wyer et Epstein, 1996), mais cette moyenne serait influencée par un petit groupe (à peine 5 %) de menteurs invétérés (Serota, Levine et Boster, 2010). Lorsque vient le temps de mentir, les hommes sont généralement plus à l'aise et se sentent moins coupables que les femmes. Cependant, il n'y aurait pas de différence significative quant à la fréquence des mensonges (DePaulo, Epstein et Wyer, 1993). Toutefois, on observe des différences dans le type de mensonge. Les hommes ont plus tendance à dire des mensonges d’autoprotection dans l’intention de préserver ou d’améliorer leur propre image (les exagérations, par exemple), tandis que les femmes inventent plus souvent des mensonges altruistes (sous forme de compliments) (DePaulo, Kashy, Kirkendol, Wyer et Epstein, 1996). On ne détecte pas le mensonge, mais plutôt l'anxiété qu'il génère. Chez certains individus, …

Parties annexes