Recensions

L’avenir du fédéralisme canadien – Acteurs et institutions, sous la direction d’Alain-G. Gagnon et Johanne Poirier, Québec, Presses de l’Université Laval, coll. « Prisme », 2020, 422 p.[Notice]

  • Jordan Mayer

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Comme son titre l’indique, l’ouvrage collectif proposé, sous la direction du politologue Alain-G. Gagnon et de la juriste Johanne Poirier, rassemble des contributions qui s’intéressent au fédéralisme canadien sous l’angle de ses acteurs et de ses institutions. S’inscrivant comme troisième volume d’une série lancée par le Groupe de recherche sur les sociétés plurinationales, celui-ci tente de saisir la nature de l’expérience fédérale canadienne « à l’aune de sa capacité à promouvoir l’autonomie de différents groupes ainsi que du potentiel des institutions communes à concilier les intérêts divers » (p. 2-3). Il n’est donc pas ici question d’une genèse historique du fédéralisme au Canada ou d’une simple revue des enjeux actuels entourant la notion. L’ouvrage aborde autant le passé du système fédéral canadien, ses tensions et défis contemporains, que les enjeux qui se profilent selon une visée prospective. Le pari est de réunir autant des politologues et des juristes que des historiens afin d’explorer la richesse normative et institutionnelle du fédéralisme en tant que modes d’organisation et de gouvernance des États démocratiques libéraux. L’ouvrage propose une double grille d’analyse, soit l’influence d’une institution sur les « acteurs clés » de la fédération canadienne, notamment les entités fédérées, mais aussi les peuples autochtones, les nations minoritaires et les minorités linguistiques (p. 3-4). De surcroît, les différents auteurs ne font pas l’économie, en début de chaque thématique institutionnelle, d’apports comparatifs pertinents qui permettent de contribuer au dialogue international sur le potentiel des fédérations à structurer le débat entre différents groupes. Ainsi, les expériences australienne, belge, allemande et suisse jouissent chacune d’un chapitre rédigé par des experts propres à leur système. La première partie s’intéresse au bicaméralisme. Prenant en exemple l’expérience australienne, Cheryl Saunders examine les différents rôles qui sont attribués à une seconde chambre au sein d’un corps législatif fédéral bicaméral (p. 30). Censées être de prime abord une tribune pour les différents groupes fédérés au sein du palier fédéral, les secondes chambres tendent davantage à devenir un organe de révision qui n’échappe pas à la politique partisane, quoique dans un degré moindre que la première chambre (p. 38 et 40). À la différence de la première chambre, le Sénat australien se prête davantage à la représentation des minorités et des plus petits partis politiques (p. 46). Jörg Broschek explore quant à lui les mécanismes institutionnels servant à concilier les différends entre le palier fédéral et les paliers provinciaux. Il infère que des faiblesses structurelles inhérentes au moment de la formation de la fédération se répercutent au fil de son histoire. Le Sénat canadien échoue à sa mission de gouvernance conjointe (p. 72). Les provinces, au fil du temps, ont préféré miser sur le renforcement de leur autonomie en passant par des relations intergouvernementales moins formalisées que les institutions fédérales communes (p. 73). L’analyse de Broschek se termine par une revue des options futures pour l’évolution de la structure fédérale. Le politologue conclut que des réformes institutionnelles en profondeur sont peu susceptibles de se produire, auquel cas les relations intergouvernementales seront privilégiées. Ian Peach arrive au même constat de la relative inefficacité du Sénat canadien comme vecteur de dialogue intra-institutionnel sur les mécanismes de partage des pouvoirs et la mise en commun des compétences. Il avance toutefois des solutions institutionnelles en guise de remplacement du Sénat (p. 94 et 98). Il plaide notamment pour la constitutionnalisation d’un Conseil de la Fédération fédéral/provincial/territorial qui ferait office d’organe de consultation et de coordination des politiques communes. Linda Cardinal souligne pour sa part le rôle significatif que le Sénat canadien a joué dans la représentation des intérêts des minorités au sein de la fédération. Elle explore …