Recensions

Splendeurs, misères et ressorts des régions. Vers un nouveau cycle de développement régional, de Marc-Urbain Proulx, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2019, 272 p.[Notice]

  • Marc-André Houle

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Lorsqu’on étudie le développement régional au Québec à partir d’un département de science politique montréalais, on se sent parfois isolé. La publication d’ouvrages sur le sujet est donc toujours accueillie avec enthousiasme. C’est aussi dans cet esprit que tous ceux et celles qui s’intéressent à la problématique devraient accueillir Splendeurs, misères et ressorts des régions. Vers un nouveau cycle de développement régional, le plus récent ouvrage de Marc-Urbain Proulx, économiste et spécialiste du développement régional à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC). Dans ce livre qu’il qualifie d’« essai scientifique » (p. 4), l’auteur puise dans sa longue expérience de recherche ainsi que dans son expérience de sous-ministre associé aux Régions au sein du gouvernement de Pauline Marois pour proposer une démarche en deux temps. D’abord, dans les quatre premiers chapitres, Proulx pose un regard sur le cadre et la trajectoire (les « splendeurs » et les « misères ») du développement des régions périphériques québécoises. Précisons d’emblée que les régions dont il est ici question correspondent, pour l’essentiel, aux régions administratives du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, de la Côte-Nord, de l’Abitibi-Témiscamingue et du Saguenay–Lac-Saint-Jean. Cette dernière, en raison du point d’attache de l’auteur, retiendra davantage l’attention tout au long de l’ouvrage. Dans cette première partie, donc, l’auteur reprend à sa manière et de façon synthétique les grands jalons de l’histoire régionale au Québec à partir de la Nouvelle-France (chap. 1 et 2). Il met ensuite en lumière l’évolution du rôle de l’État québécois en matière de développement régional à partir des années 1950 (chap. 2 et 3), c’est-à-dire à partir du moment où le développement régional commence à se développer en tant que discipline de recherche et à faire l’objet de politiques publiques. Il s’agit là d’une bonne entrée en matière, mais l’intérêt de cet ouvrage ne se trouve pas dans ces chapitres plutôt sommaires et dont les éléments traités ont fait l’objet de nombre de publications beaucoup plus étoffées. À notre avis, l’intérêt réside plutôt dans les chapitres qui suivent et, au premier chef, au chapitre 4 qui propose sept profils types permettant d’expliquer l’évolution de la trajectoire démographique des villes régionales québécoises. Cette modélisation, qui aurait gagné à être mieux présentée, suggère que la polarisation et la pérennité des villes régionales ont essentiellement reposé sur la dotation en ressources et leur accessibilité, et moins sur la centralité comme facteur de polarisation. Proulx conclut ce chapitre de manière plutôt pessimiste en disant « qu’à l’exception des réserves autochtones, il semble que les localités périphériques soient toutes incapables de relancer leur croissance démographique et économique » (p. 63). La deuxième partie de l’ouvrage se divise en treize chapitres qui correspondent à autant de leviers de développement (les « ressorts ») mis en oeuvre par les autorités québécoises en matière de développement régional. Il s’agit de la contribution la plus originale et la plus pertinente de l’ouvrage. Les présentations sont concises (une dizaine de pages chacune), claires et illustrées par des exemples. On y retrouve des leviers plus classiques comme la polarisation (chap. 5), la décentralisation (chap. 6), la planification territoriale (chap. 7), l’innovation (chap. 10) et l’éducation supérieure (chap. 15). Il est également question de concertation, de médiation et de gouvernance dans les chapitres 8 et 17. Les chapitres traitant des leviers de la spécialisation territoriale (chap. 11) et de la diversification (chap. 12) ont retenu notre attention. Souvent considérées comme des stratégies de développement en opposition, voire contradictoires, Proulx, qui en explique bien les tenants et aboutissants, suggère qu’« elles constitueraient plutôt deux dimensions complémentaires du même phénomène de prospérité d’une économie. La spécialisation engendre initialement la …