Recensions

Renouveler l’aménagement et l’urbanisme : planification territoriale, débat public et développement durable, sous la dir. de Mario Gauthier, Michel Gariépy et Marie-Odile Trépanier, Montréal, Presses de l’Université de Montréal, 2008, 350 p.[Notice]

  • Alexandre Maltais

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Dans la plupart des sociétés occidentales, le développement durable et le débat public sont devenus des passages obligés du processus de planification territoriale. Le pari que fait cet ouvrage stimulant, rassemblant des contributions de chercheurs québécois et français, est d’explorer la nature et la portée des changements que ces deux « impératifs » ont provoqués dans les pratiques d’aménagement. Renouveler l’aménagement et l’urbanisme pose ainsi un regard critique sur la mise en oeuvre de cette planification plus ouverte et plus démocratique qu’on a tour à tour qualifiée, dans le sillage de théoriciens comme John Forester ou Patsy Healey, de « délibérative », « collaborative » ou « transactionnelle ». L’ouvrage est divisé en trois sections de généralité décroissante. La première partie, intitulée « Planification territoriale et métropolitaine », propose des repères théoriques permettant de mieux saisir les contributions subséquentes en les situant dans l’histoire de la planification régionale québécoise (Marc-Urbain Proulx), dans le « foisonnement de dispositifs participatifs » survenu en France depuis les années 1980 (Franck Scherrer), ou en les mettant en relation avec les phénomènes de métropolisation des grandes villes (Louis Guay). Prolongeant cette dernière réflexion, Nicolas Douay interroge pour sa part la relation entre la métropolisation des institutions publiques et l’évolution des dispositifs de participation, à partir du cas de la Communauté métropolitaine de Montréal. Il souligne les difficultés de la dernière génération de structures à s’imposer comme de véritables « arènes de négociation », un constat qui rejoint celui de Proulx sur l’évolution récente de la planification territoriale québécoise. La deuxième partie de l’ouvrage, « Villes et débats publics », rassemble des contributions qui interrogent les processus de planification à partir des dispositifs de participation publique censés les alimenter. Pour Florence Paulhiac, ces dispositifs auraient permis de mobiliser une expertise publique plus vaste et de désamorcer en amont les conflits dans l’élaboration des plans de déplacements urbains dans trois grandes villes françaises : Lyon, Lille et Grenoble. Mario Gauthier propose un examen plus général de l’évolution des mécanismes de participation à Montréal, montrant comment ces mécanismes auraient permis de « traduire le concept de développement durable en termes concrets ». Comme Paulhiac, il constate l’émergence d’une « culture de la participation », cela en dépit de la vulnérabilité des dispositifs participatifs aux fluctuations politiques. Le chapitre du commissaire Jean Paré, de l’Office montréalais de consultation publique, bonifie cette analyse d’une perspective de praticien. Marie-Odile Trépanier et Martin Alain s’intéressent quant à eux aux effets de la réorganisation municipale québécoise du tournant des années 2000 sur la participation des citoyens de la ville de Montréal aux enjeux d’aménagement. Ils se montrent sceptiques à l’égard de la redistribution de dispositifs participatifs auparavant centralisés au profit des échelons infra-local et supra-local, questionnant la capacité de la société civile à suivre ce déplacement (encore incertain) de la prise de décision. De son côté, Gérard Beaudet adopte une posture plus critique, déplorant dans son chapitre sur l’institutionnalisation des mécanismes de protection du patrimoine montréalais une « attitude clientéliste » des pouvoirs publics, caractérisée par une recherche abusive de consensus et qui aurait engendré une « neutralisation des débats ». Les trois contributions de la troisième partie, intitulée « Les projets urbains », présentent des exemples concrets de projets ayant intégré – à des degrés divers et avec un succès variable – les principes du développement durable et de la participation. Marie-Hélène Bacqué et Yankel Fijalkow proposent une comparaison transatlantique fort éclairante des processus de requalification de deux quartiers populaires, l’un à Paris, l’autre à Boston. Ils y constatent notamment un certain « émiettement participatif » qui repose sur l’institutionnalisation …