Recensions

Le Québec entre son passé et ses passages, de Jocelyn Létourneau, Montréal, Fides, 2010, 256 p.[Notice]

  • Gilbert Mclaughlin

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Historien québécois, Jocelyn Létourneau est professeur à l’Université Laval et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en histoire et économie politique du Québec contemporain. Auteur de livre et de plusieurs articles sur la construction identitaire, son nouveau livre s’intitule Le Québec entre son passé et ses passages. Cet ouvrage s’intéresse à l’histoire du Québec et, plus précisément, au rapport que la province entretient avec son passé. Il s’agit d’une réflexion sur la société québécoise et sur son identité qui tourne autour du désir d’altérité et du souci d’historicité (p. 11). Comment s’occuper d’un futur qui n’est pas encore arrivé ? De fait, les sociétés ont depuis toujours réussi à revoir leur histoire tout en adaptant leur identité à des repères. Cela a permis, entre autres, aux sociétés d’affronter les nouveaux défis et de fonder une narration qui permet le vivre-ensemble. Toutefois, l’arrivée de la modernité amène son lot de problèmes qui bouleversent les repères historiques des sociétés. Au Québec, la société est secouée par la mondialisation, la mobilité sociale et l’arrivée des nouvelles générations, ce qui a eu comme conséquence de rendre encore plus complexe la question nationale. Devant cet effritement, il est nécessaire d’explorer d’autres avenues pour revoir le rapport au passé dans les représentations du présent et de l’avenir. Il est donc important de regarder le passer du Québec, mais surtout ses passages, afin de bien comprendre son évolution et d’y voir des pistes de solution qui pourraient faciliter le vivre-ensemble. L’auteur demandera alors : « Quelle narration collective offrir à la société québécoise pour lui permettre de passer à l’avenir sans dénaturer ce qu’elle a été dans le temps ? » (p. 16) Analyser l’expérience historique pose tout un problème d’approche. Il n’est surtout pas valable, pour Létourneau, de trafiquer l’histoire pour le bien-être des descendants. Il est encore moins valable de voir l’histoire comme un héritage stagnant qui immobiliserait la mémoire. Même si ces solutions ne devraient pas être considérées, il est quand même possible de revoir le passé pour régler les problèmes d’aujourd’hui sans que la trame historique en soit dénaturée. Ainsi, l’auteur propose d’ouvrir l’histoire aux membres de la société qui, comme plusieurs, sont aux prises avec une diversité culturelle qui cause des problèmes à la conciliation d’une mémoire collective. L’objectif de cette ouverture est toujours le même, soit « de permettre aux contemporains de se sentir en lien avec une expérience historique et développer sur cette base des raisons communes » (p. 16). Afin de mieux comprendre la complexité de cette problématique, l’auteur a divisé l’oeuvre en deux grandes parties, soit ce qui a été (passé) et ce qui s’effectue (passage). Cette coupure permet de comprendre l’étendue des défis de l’histoire nationale tout en laissant place à une synthèse sur le devenir du Québec. La première partie de l’ouvrage offre une série de chapitres dans lesquels il est question du passé et de l’actualisation de l’histoire et de la mémoire comme enjeux d’avenir au Québec. L’homme étant, selon Létourneau, un animal fondamentalement historique, il constate que la déhistorialisation des sociétés postmodernes serait exagérée. L’être humain ne cesse de se rapporter à l’antériorité pour donner du sens à son actualité et envisager sa postérité (p. 24-25). L’auteur en rend compte, par ses études sur l’éducation de l’histoire dans les écoles : malgré une connaissance historique incomplète, les élèves ont tous développé une mémoire nationale (p. 44). Il pense alors qu’il serait bien que l’enseignement de l’histoire devienne un moyen d’aiguiser l’intelligence des élèves tout en enrichissant les perspectives critiques. Serait-il préférable alors d’ouvrir l’enseignement de l’histoire linéaire à la complexité historique …