Résumés
Résumé
En se reconnaissant tous dans la nation suisse, les quatre groupes de langue officielle font de la mosaïque suisse une authentique nation politique. Pour beaucoup, le ciment de cette mosaïque est le principe de territorialité des langues (le citoyen doit utiliser la langue officielle d’un territoire), qui dispense un sentiment de sécurité culturelle. Pourtant, ce principe coexiste plus souvent qu’on ne le pense avec le principe de la liberté de la langue (le citoyen choisit sa langue de communication avec les autorités), et il ne suffit donc pas à résoudre des conflits liés au contact des langues qui, dans certains cantons, ont parfois le caractère passionnel des mouvements nationalitaires. Il s’agit donc de se pencher sur le niveau cantonal, où se règlent généralement les conflits, pour mesurer les représentations linguistiques en Suisse, en ce qui concerne la territorialité et l’homogénéité linguistique, mais aussi, plus généralement, le plurilinguisme. Ce texte propose d’examiner comment les conseillers municipaux des cantons bilingues français/allemand (Berne, Fribourg, Valais) perçoivent le fait plurilingue dans leur commune, dans leur canton ainsi qu’en Suisse. Car, en fonction des stratégies identitaires, de l’appartenance à un canton et à un groupe linguistique minoritaire ou majoritaire – au niveau cantonal ou national –, les discours varient considérablement, qu’il s’agisse de bilinguisme individuel ou institutionnel, de l’enseignement des langues ou encore du statut de la diglossie (coexistence entre une langue standard et des dialectes).
Abstract
By recognizing themselves in the Swiss nation, the four official language groups make of the Swiss mosaic a genuine political nation. For many, the cement of this mosaic is the “territorial principle” (a citizen must use the official language of a given territory), which is said to provide a feeling of cultural security. Yet, more often that one might think, this principle coexists with the “personal principle” (a citizen chooses the language of communication with authorities), and it cannot in itself settle conflicts related to language contact, some of which, in certain cantons, can be as passionate as nationality conflicts. Thus, we want to look into the cantonal level, where conflicts generally have to be resolved, in order to assess linguistic representations in Switzerland, in regard to territoriality and linguistic homogeneity, but also, more generally, to multilingualism. This paper proposes to study how municipal counsellors in French/German bilingual cantons (Bern, Fribourg, Valais) perceive multilingualism, in their municipality, in their canton, as well as in Switzerland. Depending on identity strategies, on the cantonal belonging and the belonging to a minority or a majority linguistic group (at the cantonal or national level), the discourses can vary considerably when one approaches certain topics—be it the individual or institutional bilingualism, language teaching, or the status of diglossia (coexistence between a standard language and dialects).