Volume 36, numéro 2, automne 2009 Edmund Husserl (1859-1938) Sous la direction de Denis Fisette
Sommaire (20 articles)
Articles
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Husserl à Halle (1886-1901)
Denis Fisette
p. 277–306
RésuméFR :
Cette présentation générale a pour but d’expliciter l’arrière-plan théorique et historique des études réunies dans ce numéro de Philosophiques, lesquelles portent principalement sur l’oeuvre de Husserl durant la période de Halle (1886-1901). Après une description succincte des années d’apprentissage de Husserl en philosophie entre 1876 et ses études avec Brentano à Vienne, je décris les étapes qui ont marqué le développement de sa philosophie de son arrivée à Halle en 1886 jusqu’à la publication des Recherches logiques (1900-1901) : ses études sous la direction de C. Stumpf, la publication du premier volume de sa Philosophie de l’arithmétique, les recherches relatives au projet de la rédaction du deuxième volume de cet ouvrage, l’abandon de ce projet et l’élaboration de la phénoménologie des Recherches logiques. La dernière partie est un examen sommaire des enjeux philosophiques sous-jacents à la disputatio autour d’un ouvrage récent sur Husserl.
EN :
This presentation aims to clarify the historical and theoretical background of the studies included in this issue of Philosophiques, which focus on the work of Husserl during the period of Halle (1886-1901). After a brief description of Husserl’s early years of apprenticeship in philosophy between 1876 and his studies with Brentano in Vienna, I identify several steps that marked the development of his philosophy from his arrival in Halle (1886) to the publication of the Logical Investigations (1900-1901) : his studies under the direction of C. Stumpf, the publication of the first volume of Philosophy of Arithmetic, the researches belonging to the project of the second volume of this work, the abandonment of this project and the development of the phenomenology of the Logical Investigations. The last part of this paper is an examination of the philosophical issues underlying the disputatio on D. W. Smith’s recent book on Husserl’s philosophy.
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Bolzano et (le jeune) Husserl sur l’intentionnalité
Wolfgang Künne
p. 307–354
RésuméFR :
Dans les « Prolégomènes à la logique pure » de ses Recherches logiques (LU), Husserl rend hommage aux deux premiers volumes de la Wissenschaftslehre (WL) de 1837 de Bernard Bolzano comme un « ouvrage qui […] surpasse de loin tout ce que la littérature mondiale a à offrir en termes de contributions systématiques à la logique ». Cet article porte sur le jeune Husserl comme lecteur du chef-d’oeuvre de Bolzano, visant ainsi à contribuer à une compréhension adéquate de certains aspects des théories de Bolzano et de Husserl et de ce sur quoi portent ces théories. Je me concentrerai sur la question de savoir comment Bolzano en 1837 et Husserl autour de 1900 ont conçu les contenus des actes et états mentaux.
Dans les sections 1 et 2, je fais état de la redécouverte de la WL de Bolzano au sein de l’École de Brentano, et en ce qui concerne le problème des représentations sans objets, j’endosse la défense de Bolzano par Husserl contre Twardowski. Dans les sections 3 et 4, je présente un aperçu de la théorie des propositions (Sätze an sich) et des notions (Vorstellungen an sich), et montre comment Husserl assimile le cadre conceptuel bolzanien dans ses RL. Tandis que Bolzano considère les propositions et les notions comme étant des objets abstraits sui generis, le jeune Husserl développe une conception des notions et des propositions en termes d’espèces. J’explique cette conception dans la section 5 et je la défends contre le dernier Husserl. La discussion la plus extensive et la plus détaillée d’une seule et unique thèse de la philosophie de la logique de Bolzano qu’on puisse trouver dans les livres et les articles publiés par Husserl de son vivant se trouve dans le dernier chapitre de ses RL. Le sujet de discussion, et la dernière section de cet article, est une affirmation courageuse, pour ne pas dire outrageuse de Bolzano qui, du moins pris au pied de la lettre, contredit tout simplement ce que la plupart des philosophes ont tenu pour acquis depuis Aristote. Les questions, soutient Bolzano, sont une espèce particulière de propositions, et donc leur vérité est susceptible d’être évaluée.
EN :
In the “Prolegomena to Pure Logic” of his Logical Investigations (LI) Husserl praised the first two volumes of Bernard Bolzano’s Wissenschaftslehre (WL) of 1837 as “a work which … far surpasses everything that world-literature has to offer in the way of systematic contributions to logic”. This paper is about the early Husserl as a reader of Bolzano’s masterpiece, hoping thereby to contribute to a proper understanding of certain aspects of Bolzano’s and Husserl’s theories and of what those theories are about. I shall concentrate on the question how Bolzano in 1837 and Husserl around 1900 conceive of the contents of mental acts and states.
In sections 1-2 I report on the rediscovery of Bolzano’s WL in the school of Brentano, and as regards the issue of objectless presentations, I endorse Husserl’s defence of Bolzano against Twardowski. In sections 3-4 I present an outline of Bolzano’s theory of propositions (Sätze an sich) and notions (Vorstellungen an sich) and go on to show how Husserl assimilates the Bolzanian framework in his LI. While Bolzano takes propositions and notions to be sui generis abstract objects, the early Husserl develops a species conception of notions and proposition. I explain this view in section 5 and defend it against Husserl’s later self. The most extensive and most thorough discussion of a single contention in Bolzano’s philosophy of logic that can be found in any of Husserl’s books and articles published during his lifetime is contained in the last chapter of his LI. The topic of this discussion, and of the final section of this paper, is a courageous if not outrageous Bolzanian contention : questions, he claims, are a special kind of propositions and hence truth-evaluable.
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Géométrie, fiction et discours sous hypothèse : Husserl et les objets intentionnels en 1894
Guillaume Fréchette
p. 355–379
RésuméFR :
Dans l’essai Objets intentionnels de 1894, Husserl développe en réaction à Twardowski une théorie originale de l’assomption comme solution au problème des représentations sans objet. Après avoir examiné le détail de cette théorie et en avoir soulevé les difficultés, je montre dans cet article que la solution proposée par cette théorie doit être abordée de manière indépendante de celle qui sera développée plus tard dans les Recherches logiques et j’expose dans quelle mesure elle est ancrée dans la psychologie descriptive brentanienne tout en mettant à profit certains outils de la logique de Bolzano. Enfin, j’indique que Husserl continuera à développer cette théorie après les Recherches logiques, confirmant ainsi qu’elle occupe une place de choix dans la théorie phénoménologique du jugement.
EN :
In his essay Intentional Objects of 1894, Husserl develops in response to Twardowski an original theory of assumptions as a solution to the problem of objectless presentations. First, I analyze in this paper the main points of his theory and point out some of the difficulties it raises. I then suggest that the solution presented in this theory must be addressed independently of the one developed by Husserl later in the Logical Investigations and try to show in which extent his theory of assumptions is rooted in the brentanian descriptive psychology, although it makes good use of some logical tools from Bolzano’s Wissenschaftslehre. Since Husserl continues to work on this theory even after the Logical Investigations, it confirms the important place one should give to the theory of assumptions it the phenomenological theory of judgment.
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Quelques aspects de la première théorie du jugement de Husserl
Robin D. Rollinger
p. 381–398
RésuméFR :
La théorie du jugement était une des préoccupations de Husserl depuis la toute première période de sa carrière. Ses premières recherches dans ce domaine se trouvent dans deux manuscrits rédigés en 1893 et 1893-1894 et publiés dans le volume XL des Husserliana (Texte no 1 et 2). Dans cet article, j’examinerai la théorie du jugement dans ces manuscrits en relation aux questions suivantes : 1) les jugements en relation aux représentations ; 2) les assomptions comme des actes qui se déroulent parallèlement aux jugements ; 3) les jugements impropres en tant que distincts des jugements propres ; 4) les jugements objectifs ; 5) les états de choses en tant que corrélatifs des actes de juger. Nous verrons que, tandis que Husserl se libère à maints égards de la théorie du jugement de Brentano qu’il avait apprise à Vienne puis (de Stumpf) à Halle, ses positions sont en même temps tout à fait représentatives de la phénoménologie autrichienne dans la mesure où elles impliquent à la fois une psychologie descriptive et une théorie de l’objet, bien que sans aucune prétention d’établir une nouvelle méthode en philosophie.
EN :
The theory of judgment was one of Husserl’s concerns from a very early period of his career onward. His early investigations in this area are to be found in two manuscripts which he wrote in 1893 and 1893/94, which have been published as Text Nr. 1 and Text Nr. 2 of Husserliana XL. In this paper I examine the theory of judgment in these manuscripts with regard to the issues of 1) judgments in relation to presentations, 2) assumptions as acts which run parallel to judgments, 3) improper judgments as distinct from improper ones, 4) objective judgments, and 5) states of affairs as correlatives of judging acts. While we see Husserl freeing himself in many respects from the Brentanian theory of judgment which he had learned in Vienna and again (from Stumpf) in Halle, it is at the same time seen that Husserl’s views are quite representative of Austrian phenomenology insofar as they involve both descriptive psychology and object-theory, though without any pretense of establishing a novel method of philosophy.
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La théorie des assomptions chez le jeune Husserl
Robert Brisart
p. 399–425
RésuméFR :
Afin de « sauver une existence » pour les objets dont il est question dans les représentations mathématiques, le jeune Husserl invente en 1894 une théorie des assomptions. Notre but est d’explorer cette théorie pour montrer en quoi elle constituait une alternative probante par rapport à l’ontologie réaliste et à la conception correspondantiste de la vérité. De celles-ci, pourtant, Husserl ne parviendra pas à se départir à l’époque, comme en témoigne la dichotomie qu’il opère entre la signification et la perception, et c’est pourquoi il ne saura non plus tirer parti de sa propre théorie des assomptions. Elle semble pourtant refaire surface à la fin de son oeuvre, suite à la rupture avec le réalisme que marque précisément l’introduction du concept de sens ou de noème de perception.
EN :
In the year 1894, Husserl introduces a theory of assumptions with the aim of « saving an existence » for the objects in mathematical representations. We want to examine this theory in order to show why it constituted a convincing alternative to a realist ontology and a correspondance conception of truth. Yet, during this period, Husserl remained attached to those positions, as the dichotomy between meaning and perception shows. It is also the reason why he does not manage to benefit from his discovery of assumptions. However, this topic seems to reappear in the last work of Husserl, following his breaking with realism, which is precisely corroborated by the emergence of the concept of a perceptual meaning or noema.
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Catégories formelles, nombres et conceptualisme. La première philosophie de l’arithmétique de Husserl
Arkadiusz Chrudzimski
p. 427–445
RésuméFR :
Dans son premier livre (Philosophie de l’arithmétique 1891), Husserl élabore une très intéressante philosophie des mathématiques. Les concepts mathématiques sont interprétés comme des concepts de « deuxième ordre » auxquels on accède par une réflexion sur nos opérations mentales de numération. Il s’ensuit que la vérité de la proposition : « il y a trois pommes sur la table » ne consiste pas dans une relation mythique quelconque avec la réalité extérieure au psychique (où le nombre trois doit être exemplifié de quelque manière), mais bien dans le fait que les pommes sur la table peuvent être dénombrées correctement en tant qu’elles sont au nombre de trois. Nous avons affaire ici à une position « antiréaliste » fondant la vérité mathématique non pas dans un monde platonicien, mais bien sur le concept de rectitude de nos opérations formelles.
EN :
In his first book (Philosophy of Arithmetic 1891) Husserl develops a very interesting philosophy of mathematics. Mathematical concepts are interpreted as « second order » concepts gained by reflection on our mental operations of counting. Accordingly the truth of the proposition « There are three apples on the table » consists not in any mythical relation to the extra-mental reality (where the number three should be somehow exemplified), but rather in the fact that the apples on the table can be correctly counted as three. We have here an « anti-realist » position grounding the mathematical truth not in platonic realms, but rather in the concept of correctness of our formal operations.
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La Mannigfaltigkeitslehre de Husserl
Claire Ortiz Hill
p. 447–465
RésuméFR :
Pour projeter de la lumière dans de nombreux coins et recoins obscurs de la logique pure de Husserl et dans les rapports entre sa logique formelle et sa logique transcendantale, et combler des lacunes empêchant qu’on arrive à une appréciation juste de sa Mannigfaltigkeitslehre, ou théorie de multiplicités, on examine comment, en prônant une théorie des systèmes déductifs, ou systèmes d’axiomes, comme tâche suprême de la logique pure, Husserl cherchait à résoudre certains problèmes épineux auxquels il s’était heurté en écrivant Philosophie de l’arithmétique. Ces problèmes sont décrits. Ensuite, on rassemble les éléments nécessaires pour caractériser ce que Husserl, à travers les textes présentement disponibles, voulait dire des Mannigfaltigkeiten. Pour conclure, il est indiqué comment Husserl pouvait considérer que sa théorie représentait une solution aux problèmes qui avaient conduit à son élaboration.
EN :
To shed light on the numerous dark areas surrounding Husserl’s ideas about pure logic and the relationship between his formal logic and his transcendental logic, and so provide an accurate characterisation of his Mannigfaltigkeitslehre, a close look is taken at how, by advocating a theory of deductive systems, or axiomatic systems as the highest task of pure logic, Husserl sought to resolve certain thorny problems he encountered when writing the Philosophy of Arithmetic. Those problems are described. Then, his ideas about axiomatization and manifolds are drawn together from the various sources now available to provide a more complete picture of his Mannigfaltigkeitslehre. In conclusion, it is shown how Husserl considered his theory to be a solution to the problems leading to its development.
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Franz Brentano et l’« inexistence intentionnelle »
Mauro Antonelli
p. 467–487
RésuméFR :
La thèse de l’« inexistence intentionnelle » formulée par Brentano a été traditionnellement interprétée comme une théorie de la « relation intentionnelle », autrement dit de la relation entre l’acte mental et son « objet immanent » ou « intentionnel », c’est-à-dire interne à la conscience. Se fondant sur la lecture du fameux passage sur l’intentionnalité de la Psychologie du point de vue empirique (1874), le présent article démontre que l’interprétation ontologique de la théorie de l’intentionnalité du premier Brentano est insoutenable, toute dominante qu’elle est. Pour ce faire, nous partirons des sources de la pensée de Brentano, en particulier de la théorie de la perception et des relatifs d’Aristote, pour rejeter la conception de l’objet immanent ou intentionnel comme entité immanente à la conscience et mettre en évidence la continuité qui existe entre la première conception de Brentano de l’intentionnalité et la seconde, consécutive à ce qu’on définit comme le tournant réiste de sa pensée.
EN :
Brentano’s thesis of “intentional inexistence” has been traditionally interpreted as a theory of “intentional relationships”, i.e., of the relation between a mental act and its “immanent” or “intentional object”, within consciousness. Starting from the famous passage on intentionality in Psychology from an Empirical Standpoint (1874), the present paper shows that the dominant ontological interpretation of Brentano’s former theory of intentionality is untenable. Proceeding from the sources of Brentano’s thought, in particular from Aristotle’s theory of perception and of relatives, the conception of the immanent or intentional object as an immanent entity to consciousness is rejected. Instead, the continuity between Brentano’s former conception of intentionality and the subsequent one, following the so-called reistic turning-point in his thought, is highlighted.
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Husserl et Stumpf sur la Gestalt et la fusion
Carlo Ierna
p. 489–510
RésuméFR :
Dans la seconde édition des Logische Untersuchungen, Husserl affirme avoir investigué le premier, dans l’école de Brentano, les objets d’ordre supérieur et les qualités de forme. En effet, on retrouve dans Philosophie der Arithmetik une discussion des moments figuraux et de la fusion qui pourrait donner un certain appui à une telle affirmation. En considérant les concepts de Gestalt et de fusion dans leur contexte historique — particulièrement en relation à Stumpf en ce qui concerne ce dernier concept — nous constatons que Husserl a effectivement une conception plutôt originale et intéressante de ces phénomènes d’ordre supérieur.
EN :
In the second edition of the Logische Untersuchungen Husserl claims to have investigated higher order objects and Gestalt qualities before anyone else in the School of Brentano. Indeed, in the Philosophie der Arithmetik we find a discussion of figural moments and fusion that could lend some support to such a claim. By considering the concepts of Gestalt and Verschmelzung in their relevant historical context, the latter especially in connection to Stumpf, we find that Husserl indeed gave a quite original and interesting account of such higher order phenomena.
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L’intuition est-elle un concept univoque ?
Dominique Pradelle
p. 511–532
RésuméFR :
L’article s’interroge sur l’unité intrinsèque des concepts d’intuition, d’évidence et de remplissement dans la pensée de Husserl : existe-t-il un concept formel d’intuition qui soit valable pour toutes les sphères d’objets possibles ? Peut-on transposer aux différents types d’essences ou de catégories d’objets le paradigme de l’intuition élaboré dans la sphère de la perception sensible ? Cette question nous conduit à analyser, chez Husserl, la structure et les modalités du remplissement et de l’intuition pour les singularités sensibles, les essences matériales et les essences mêlant sensibilité et forme catégoriale.
EN :
In our paper, we ask whether or not the concepts of intuition, insight and fulfillment have an intrinsic unity in Husserl’s thought. Does a formal concept of intuition exist, which would have a validity in all possible spheres of objects ? Is it possible to transfer to the different kinds of essences (i.e. to the different categories of objects) the model of intuition, which has been elaborated in the sphere of sensory perception ? That problem leads us to analyze in Husserl’s thought the structure and modalities of fulfillment and intuition for sensory singularities, for material essences and for essences that are a mix of sensibility and categorical form.
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La critique de la psychologie de Natorp dans la VeRecherche logique de Husserl
Denis Seron
p. 533–558
RésuméFR :
La présente étude vise à identifier et à clarifier quelques aspects centraux de la critique de la psychologie de Natorp dans la VeRecherche logique de Husserl. Après avoir ramené l’argumentation de Husserl à quatre objections principales, nous montrons qu’elles ont toutes pour enjeu l’idée d’une psychologie empirique de style brentanien. Nous commentons sur cette base deux questions parmi les plus significatives soulevées par la controverse Husserl-Natorp : la nature de la différence entre le psychique et le physique et la possibilité d’objectiver les contenus phénoménaux — en clarifiant en quel sens les deux auteurs y apportent des réponses diamétralement opposées. L’article s’achève par quelques remarques sur les faiblesses de la conception de Natorp.
EN :
The aim of this essay is to identify and to analyze some key aspects of Husserl’s critique of Natorp’s psychology in the fifth Logical Investigation. After dividing Husserl’s argumentation into four main objections, we show that what is at stake in all of them is the idea of an empirical psychology in Brentano’s style. From that perspective we comment two of the most significant questions raised by the Husserl-Natorp debate : the nature of the difference between psychical and physical, the possibility of objectifying phenomenal contents. We then attempt to clarify in what sense Husserl’s and Natorp’s answers to these two questions are diametrically opposed. We conclude by some remarks on the intrinsic weaknesses of Natorp’s approach.
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Réduction, construction, destruction. D’un dialogue à trois : Natorp, Husserl, Heidegger
Jean-François Courtine
p. 559–577
RésuméEN :
In order to introduce the question of tbe « given » and of its elaboration with respect to the motifs of reduction, construction and destruction, we take as a point of departure the first courses of Heidegger at the University of Freiburg in the years 1919-1920. Framed by a sustained debate with the different figures of Neokantianism that occupied the forefront of the philosophical scene in Germany, Heidegger’s aim is to take up and to radicalize Husserl’s phenomenological enterprise indexed to intuition of an ultimate givenness, through the question : « Was heißt “gegeben”, “Gegebenheit” — dieses Zauberwort der Phänomenologie und der “Stein des Anstoßes” bei den anderen ? » This project of taking Husserl’s phenomenlogy will lead Heidegger to reopen the ongoing debate between Husserl and Natorp about the method of reconstruction vs. reduction. So we could venture the hypothesis, according to which the Heideggerian theme of Destruktion “destruction” or “deconstruction,” if it does inherit a sense from the Husserlian Abbau (destruction), from the de-sedimentation of accumulated strata that have come to obstruct the grasp of insight (Einsicht), this theme could all the same be understood as the taking up again — in a practical reversal — Rekonstruktion, Natorpian reconstruction.