Nouvelles perspectives en sciences sociales
Volume 4, numéro 1, septembre 2008
Sommaire (4 articles)
Articles
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Espace-temps d’un réseau sociocognitif complexe. II : Temporalités historiques et entropie sociocognitive
Bernard Ancori
p. 9–76
RésuméFR :
L’espace d’un réseau sociocognitif complexe représenté dans un article précédent n’est qu’un épisode du temps de ce dernier dont les dimensions spatiales et temporelles sont ainsi indissociables. Sa dimension temporelle comporte plusieurs aspects liés. En effet, le temps subjectif de chaque acteur observé et le temps objectif de l’observateur du réseau nécessitent l’introduction d’un troisième terme pour pouvoir être pensés en tant que temps. Ce troisième terme est le temps comme tel, sous lequel sont subsumés temps subjectif et objectif. Le temps subjectif est ici celui d’acteurs internes au réseau et le temps objectif celui d’un observateur de ce dernier. Les rôles de l’acteur observé et celui de l’observateur du réseau étant interchangeables, ce texte suggère d’associer au temps comme telle la forme topologique d’une bande de Moebius. Plus généralement, le temps comme tel prend la forme d’une structure feuilletée d’une infinité de bandes de Moebius ordonnées selon une hiérarchie croissante de raccordements entre niveaux d’organisation d’un réseau qui peut en comporter un nombre infini. Ce texte analyse les modifications de cette structure lorsqu’elle est réduite à trois niveaux d’organisation. Dans le cadre d’une certaine continuité des temps subjectif et objectif au sein du réseau, ces modifications s’appliquent à une bande de Moebius donnée. Tel est le cas des périodes de « science normale » dans l’analyse kuhnienne de l’évolution scientifique, ou plus généralement dans tout processus d’apprentissage n’impliquant pas de bouleversement majeur. Mais lorsque cette continuité est rompue, par exemple à l’occasion d’une révolution scientifique, d’une conversion religieuse ou de tout autre rupture majeure dans un processus d’apprentissage, la bande de Moebius elle-même se trouve changée.
EN :
The space of a complex sociocognitive network, as presented in a previous article, is only a temporal episode of the network, in which spatial and temporal dimensions cannot be dissociated. The temporal dimension of the network thus comprises several interconnected aspects. Indeed, the subjective time of each actor observed and the objective time of the observer of the network require the introduction of a third term, so that they can be studied as temporal phenomena. This third time is the time as such, under which subjective and objective times are subsumed. The subjective time is that of the actors within the network and the objective time is the one of the observer of this network. As the roles of the actor and the observer of the network are interchangeable, this article suggests to associate time as such with the topological form of a Moebius strip. More generally, the time as such takes the form of a structure of foliated space: an infinite number of Moebius strips ordered by a growing hierarchy of connection between the infinite numbers of levels of organization within a network. This article analyses the modifications of this structure for just three levels of organization. Given a certain continuity of subjective and objective times within the network, modifications only concern a given Moebius strip. This is the case for the periods of “normal science” in the Kuhnian analysis of scientific evolution, or more generally in all processes of learning without undergoing major change. However, once this continuity is broken, for example during a scientific revolution, a religious conversion, or any other major rupture of the process of learning, the Moebius strip itself will equally undergo change.
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La longue marche de la sociologie relationnelle
Claude Vautier
p. 77–106
RésuméFR :
L’avenir de la sociologie est-il, comme l’imagine Monique Hirshhorn dans un texte publié en 2000, dans l’introduc-tion d’une « démarche proprement phénoménologique », permettant de ne « pas réduire le “sujet” à l’acteur rationnel » et dans un nouveau questionnement « sur la construction sociale du soi » et « sur les modes d’élaboration de l’identité »? Ou bien s’agira-t-il plutôt de s’orienter vers une sociologie de la relation à laquelle appelaient notamment Laflamme en 1995, Emirbayer en 1997 ou Donati en 2004, au sein de réseaux comme dans l’analyse structurale ou dans une construction de modèles trialectiques proposée par Laflamme pour qui seule la relation, la communication, fonde le social et l’humain, est le social et l’humain? C’est cette question qui est au centre de cet article qui essaie de montrer que l’évolution contemporaine de la sociologie va d’une sociologie des « substances » (« objets » ou « sujets ») vers une sociologie de la relation.
EN :
Is the future of the sociology, as Monique Hirshhorn in a text published in 2000 imagines it, in the introduction of a “initiative clearly phenomenological”, allowing “not to reduce the ‘subject’ to the rational actor” and in a new questioning “on the social construction of the self” and “on the modes of elaboration of the identity”? Either it will be a question of turning rather to a sociology of the relation to which referred Laflamme in 1995, Emirbayer in 1997 or Donati in 2004, within networks as in the structural analysis or in the construction of trialectiques models proposed by Laflamme for whom only the relation, the communication, being the social and the human, is the social and the human? This question is at the heart of this article which tries to show that the contemporary evolution of sociology goes from a sociology of “substances” (“objects” or “subjects”) towards a sociology of the relation.
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Territoires de l’action publique spatiale et espaces réticulaires individuels : imbrication problématique
Denis Martouzet
p. 107–139
RésuméFR :
L’auteur examine les difficultés mais aussi les possibilités de prise en compte des espaces vécus pour l’élaboration de projets de territoire dans le cadre de la participation du public au projet. Les spatialités individuelles, connues selon une méthode d’enquête originale et réévaluant la notion d’espace vécu par celle d’espaces dits, n’ont ni une échelle ni une structure pouvant correspondre aux territoires institutionnels de l’action publique. L’habiter des individus est défini comme le mode et le contenu des justifications d’évocations d’espaces et de lieux fréquentés ou simplement pensés, justifications dont les différents types (qualification, explication, rationalisation) sont précisés. Cet habiter permet de distinguer, de façon archétypale, les individus qui se réfèrent prioritairement à un ou des modèles spatiaux construits pendant leur vie, de ceux qui, par opposition, se réfèrent à un ou des modèles de type relationnel (deux exemples sont détaillés). Ceux des premiers peuvent être pris en compte par les urbanistes, les autres beaucoup plus difficilement.
EN :
The author examines the difficulties but also the possibilities of taking lived-in spaces into account when elaborating territorial projects within the context of public participation in the project. Individual spatialities, established according to an original method of investigation and re-evaluating the notion of lived-in space through that of said spaces, have neither a scale nor a structure which can correspond to institutional spaces of public action. The individual’s dwelling is defined as the method and content of justifications for evocations of spaces and places that are frequented or simply thought of. Different types of justification are specified: qualification, explanation, rationalization. This dwelling allows us to distinguish between, in an archetypal manner, individuals who refer first and foremost to one or more spatial models constructed during their lives, and those who, in contrast, refer to one or more spatial models of a relational kind (two examples are examined). The first category can be taken into account by planners, the second with much greater difficulty.
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Analyse statistique linéaire et interprétation systémique
Simon Laflamme
p. 141–159
RésuméFR :
La plupart des analyses statistiques sont construites selon une logique linéaire : analyses de variance, analyses de régression. Pourtant, bon nombre de ces analyses dépeignent des phénomènes dont l’interprétation théorique est impossible dans une logique linéaire; ces phénomènes appellent plutôt une théorisation de type dialectique. Plus encore : les techniques statistiques linéaires permettent communément des modélisations multivariées. Or, les associations entre variables qu’elles décrivent, même si elles sont statistiquement soumises à une logique linéaire, permettent aisément des interprétations systémiques. Ainsi, la linéarité de l’analyse statistique peut servir des théorisations relationnelles ou systémiques. C’est ce que voudrait illustrer cet article. Pour ce faire, il présentera les résultats de deux analyses empiriques effectuées avec des outils statistiques sur des phénomènes sociaux (rapport des jeunes à la communauté, usages des médias) et il montrera comment les objets qui sont dépeints ne peuvent être théorisés adéquatement sans qu’on recoure à des notions de récursivité, de dialectique et de système.
EN :
Most statistical analyses are built according to a linear logic: analysis of variance, regression analysis. Yet, several of these analyses describe phenomena for which theoretical interpretation is impossible with linear logic; these phenomena rather require dialectical type theorization. More than that: linear statistical techniques commonly allow for multivariate modelling. However, associations between the variables that they describe, even though they are statistically submitted to a linear logic, easily allow for a systemic interpretation. Thus, statistical analysis linearity can serve relational or systemic theorizations. That is what the article illustrates. To this end, results from two empirical analyses operated with statistical tools on two social phenomena (relation between youth and their community, media uses) are presented; they show how objects that are depicted cannot be theorized properly without resorting to notions of recursiveness, dialectic, and system.