Le dossier : Racisme et discrimination systémiques dans le Québec contemporain

Racisme et discrimination systémiques dans le Québec contemporainPrésentation du dossier[Notice]

  • Myrlande Pierre et
  • Pierre Bosset

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  • Myrlande Pierre
    Sociologue et Chercheure associée, Centre de recherche en immigration, ethnicité et citoyenneté (CRIEC), Université du Québec à Montréal (2001-juin 2019)

  • Pierre Bosset
    Professeur, Département des sciences juridiques, Université du Québec à Montréal

Il n’y a pas de définition universelle et absolue du racisme et la signification de ce concept fait l’objet de nombreux débats dans le milieu universitaire et dans le champ de l’intervention. La définition proposée par Albert Memmi (1994), largement utilisée depuis par de nombreux sociologues et chercheurs, a néanmoins suscité un grand intérêt et alimenté de nombreuses réflexions sur le racisme au fil des ans : « Le racisme est la valorisation, généralisée et définitive, de différences, réelles ou imaginaires, au profit de l’accusateur et au détriment de sa victime, afin de justifier une agression ou un privilège. » Le racisme contemporain est pourtant marqué par de fortes mutations. Selon P.-A. Taguieff (1988), « le discours raciste contemporain a connu une véritable métamorphose, en abandonnant son orientation hiérarchique et “racialiste” […] pour devenir différentialiste et culturaliste. Autrement dit, il a glissé de la “science des races” à l’ethnocentrisme. » Ce qui se manifeste est, plus souvent qu’autrement, un « racisme sans races » (Balibar, 2005), fondé sur l’affirmation que les différences culturelles sont irréductibles. Les manifestions et les diverses formes du racisme contemporain sont plus insidieuses et plus sournoises, ce qui ne lui enlève en rien son caractère délétère et néfaste. Tout comme le racisme dit « traditionnel », ce nouveau racisme vise à légitimer des comportements ou des discours discriminatoires, et contribue à les alimenter et à les exacerber. C’est ainsi qu’au Québec comme ailleurs, on a vu naître et croître « une “internationale raciste”, nébuleuse d’organisations et de groupuscules qu’unit un refus profond du caractère pluraliste de nos sociétés modernes. L’émergence de mouvements structurés d’extrême droite, de tendance raciste, constitue peut-être la forme la plus exacerbée de cette pathologie politique » (Bosset, 1994, p. 585). Ces profondes mutations, cependant, n’altèrent en rien l’ancien mécanisme de rejet social et d’exclusion qui, parfois, se cristallise en ce que l’on peut qualifier de stigmate social. Ce stigmate peut s’observer par la persistance des disparités et des inégalités socio-économiques que vivent certains groupes de population, notamment les groupes racisés, les communautés noires et les Autochtones. Ce dossier thématique entend faire le point sur l’évolution du racisme et de la discrimination et sur les diverses formes et manifestations que ces phénomènes empruntent. Il se propose de décrire et d’analyser l’évolution du phénomène du racisme au Québec, particulièrement au cours de la dernière décennie, de même que ses manifestations dans différents domaines (Pierre, 2005). L’objectif est de comprendre comment le phénomène du racisme a évolué au cours des dernières années dans son contexte juridique et sociopolitique, en mettant en évidence ses formes actuelles, de même que les initiatives qui, sur le terrain des pratiques sociales, témoignent d’une mobilisation contre le racisme et la discrimination systémiques. De plus, ce dossier thématique s’inscrit dans la foulée de la proclamation de la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine (2015-2024) par l’Assemblée générale des Nations Unies. Le thème de la Décennie (Personnes d’ascendance africaine : considération, justice et développement) met bien en lumière la « nécessité de renforcer les mesures et activités de coopération nationales, régionales et internationales pour garantir le plein exercice des droits économiques, sociaux, culturels, civils et politiques des personnes d’ascendance africaine ainsi que leur pleine et égale participation à la société sous tous ses aspects » (ONU, 2014). Dans cet esprit, la Décennie invite les États à mettre en place des actions et des stratégies structurantes et pérennes pour assurer leur pleine et égale participation à la société. Il est impossible de passer sous silence les événements survenus depuis l’annonce, en décembre 2018, de l’appel à contribution à ce dossier thématique. Il nous …

Parties annexes