Dans l’éditorial du numéro précédent, nous annoncions la publication d’un article de fond sur le renouvellement démocratique des pratiques d’intervention sociale. Vous trouverez donc, dans le présent numéro, un texte occupant une place spéciale dans l’histoire de la revue, car il inaugure à NPS une nouvelle orientation et introduit une nouvelle équipe de direction ainsi qu’un nouveau graphisme. Ce texte d’orientation est le résultat de deux rencontres du comité de rédaction au cours desquelles les membres ont débattu de questions relatives aux enjeux démocratiques de l’intervention sociale. Il s’agissait de faire le point, de façon collective, sur la problématique du renouvellement démocratique de l’intervention sociale. Tant sur le plan théorique que pratique, nous souhaitons que ces réflexions puissent contribuer à penser le renouvellement démocratique des pratiques d’intervention, non pas dans le but ou l’espoir d’en clore un jour le débat, mais de nous laisser travailler par la question (Karsz, 2004 : 9). Rappelons que se laisser travailler par une question n’empêche nullement de prendre position lorsque cela s’avère nécessaire. Au contraire, cette posture permet justement de moduler nos positions à la lumière des réflexions qui réussissent de façon critique à transformer notre point de vue là où le « dogmatisme de l’évidence fait loi » (Karsz, 2004 : 12). Ainsi, l’article suivant l’entrevue tente essentiellement de formuler des questions entourant les enjeux actuels et à venir des pratiques d’intervention sociale en ce qui regarde leur horizon démocratique. Qu’entend-on par « pratique démocratique » dans le champ de l’intervention sociale ? Quels sont les principaux enjeux affectant le potentiel démocratique des pratiques d’intervention sociale ? Dans ces enjeux, peut-on relever des contradictions, des obstacles et des opportunités ? C’est globalement autour de ces questions que nous sollicitons des propositions d’articles issus d’auteurs du monde de la recherche et de l’intervention ; nous les invitons à partager leurs points de vue sur cette problématique. C’est aussi un appel à la diversité des points de vue qu’ils proviennent des intervenants et des intervenantes et des chercheurs et chercheuses oeuvrant au sein d’institutions étatiques, d’universités et d’associations communautaires auxquelles les pages de NPS sont principalement ouvertes. En qualifiant de « démocratique » le renouvellement lui-même, nous précisons le type de rapport politique caractérisant le processus de renouvellement qui nous intéresse ici. Non seulement nous nous questionnons sur les rapports de pouvoir favorisant ou non le renouvellement démocratique des pratiques d’intervention sociale, mais nous nous efforçons également de nous dégager de l’« indéfinition » fréquente du qualificatif « démocratique » lorsqu’il est confronté aux réalités de la pratique. Le qualificatif « démocratique » n’est pas le seul à souffrir d’indéfinition ; il n’y a qu’à penser à la notion d’« empowerment » utilisée dans des contextes différents, de façon polysémique, avec des finalités contradictoires et créant un malaise palpable au sein des milieux d’intervention pris alors dans une confusion des positions politiques. À titre d’exemple, dans le dernier numéro de NPS, plusieurs auteurs nous offrent des articles qui permettent d’alimenter un débat en proposant des précisions théoriques pouvant interpeller les chercheurs et les intervenants à ce sujet. Préciser les définitions a l’avantage d’ouvrir une discussion, mais ne résout pas automatiquement la question de la légitimité et de la validité qui, en démocratie, ne se réduit pas aux seules délibérations des experts. De plus, confrontée à l’application pratique, la pensée théorique de l’intervention sociale se bute constamment à la résistance du réel (Mendel, 1998). Cette remarque est importante en ce qui regarde le renouvellement démocratique des pratiques, car certaines tendances de la recherche scientifique ayant pour objet l’intervention sociale cherchent justement à occulter les contradictions liées …
Parties annexes
Bibliographie
- Couturier, Y. et S. Carrier (2004). « Pratiques fondées sur des données probantes en travail social », Nouvelles pratiques sociales, vol. 16, no 2, 68-79.
- Karsz, S. (2004). Pourquoi le travail social ? Définition, figures, clinique, Paris, Dunod.
- Lecomte, Y. (2003). « Développer de meilleures pratiques », Santé mentale au Québec, vol. 28, no 1, 9-36.
- Mendel, G. (1998). L’acte est une aventure ; du sujet métaphysique au sujet de l’acte pouvoir. Paris, La Découverte.
- Mendel, G. (2003). Pourquoi la démocratie est en panne. Construire la démocratie participative, Paris, La Découverte.
- Parazelli, M., Hébert, J., Huot, F., Bourgon, M., Laurin, C., Gélinas, C., Gagnon, S., Lévesque, S. et M. Rhéaume (2003). « Les programmes de prévention précoce. Fondements théoriques et pièges démocratiques », Service social, vol. 50, 81-121.