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La reconnaissance de l’autogestion aujourd’hui comme composante de l’économie sociale et comme élément pour une nouvelle analyse économique de l’entreprise[Notice]

  • Nathalie Ferreira

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  • Nathalie Ferreira
    Université de Picardie Jules Verne

L’objet de notre article consiste à relancer le débat sur l’autogestion et, en particulier, sur la reconnaissance aujourd’hui de cette dernière comme l’une des formes d’organisation du travail du tiers secteur. L’intérêt renouvelé pour ce champ d’étude est principalement attribuable à la mise en oeuvre de nouvelles réponses à la crise de l’emploi et de l’État-providence et aux répercussions de cette double crise au sein de l’une des institutions fondamentales de nos sociétés : l’entreprise. Dans un premier temps, nous tenterons de redéfinir le concept même d’autogestion. Dans un deuxième temps, nous présenterons brièvement un diagnostic de la situation, une analyse de la crise à l’origine de l’arrivée de nouveaux acteurs économiques, d’une part, et du retour sur le devant de la scène d’anciennes organisations économiques, d’autre part. Dans un troisième temps, nous montrerons la présence de l’autogestion, en tant que mode de gestion et surtout forme d’organisation du travail, au sein du secteur de l’économie sociale, en général, et au sein de l’entreprise de type coopératif, en particulier. Enfin, dans un dernier temps, nous démontrerons que les problèmes relatifs à l’application de l’autogestion au sein de la firme peuvent être résolus en majeure partie par la remise en cause de l’analyse économique néoclassique. À l’origine de cette analyse se trouve une question que des économistes ont qualifié d’utopique et caduque : qu’est-ce que l’autogestion ? En effet, bien qu’ayant fait l’objet de réflexions ou d’analyses depuis l’Antiquité, bien qu’ayant été expérimentée dans plusieurs pays, l’autogestion ne bénéficie d’aucune définition unanimement reconnue par les économistes. Chacun, scientifiques ou politiciens, a voulu donner une définition et une interprétation de ce terme selon ses propres aspirations et attentes. « Les premiers, même s’ils sont conscients de la dimension pluridisciplinaire de l’autogestion, l’appréhendent avec leur propre formation et leur propre logique. Certains, parmi les seconds s’efforcent d’en modifier ou d’en dénaturer le contenu pour le faire rentrer dans le cadre d’un projet politique ou social préexistant », comme le soulignait Dumas en 1981. Une telle diversité gêne considérablement toute tentative de compréhension de la notion d’autogestion. Ainsi, il est nécessaire de poser au préalable une définition simple, afin de saisir l’objectif essentiel de l’autogestion. L’autogestion, par ses diverses expériences, a prouvé qu’elle ne pouvait être un système économique et politique initialement généralisé, d’où une nécessité de partir de la base, c’est-à-dire des unités économiques. Pour certains auteurs, comme Vanek, l’instauration au préalable d’une économie socialiste n’apparaît pas nécessaire pour une réelle pratique autogestionnaire au sein de l’entreprise. Ils entendent confier la gestion des entreprises aux travailleurs, procéder à un partage équitable du revenu entre tous les membres de l’entreprise, décentraliser le plus possible les prises de décision, au sein même d’une économie de marché. Pour eux, le capital peut être maintenu sans risque du fait qu’il ne dispose plus du pouvoir de décision. Il devient alors un simple moyen de production au même titre que les machines. La pratique autogestionnaire se rattache alors directement au travail dont elle transforme la nature. Néanmoins, ces auteurs ne semblent pas avoir considéré le fait que l’autogestion était, dans un premier temps, une réponse à la crise du travail (demande de travailler autrement), puis, dans un deuxième temps, une réponse à la crise de l’emploi (créer son propre emploi). Loin de devenir une institution généralisée, l’autogestion est avant tout un concept économique et social, c’est-à-dire un mode de gestion et surtout une forme d’organisation du travail engendrée par les crises du système capitaliste. Au sens littéral, autogestion signifie gestion par soi-même et ses postulats sont la suppression de toute distinction entre dirigeants et dirigés et l’affirmation de …

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