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Cet article porte sur le phénomène de la construction sociale de la maladie de l'alcoolisme en Amérique du Nord. Le but de cette étude est de comprendre comment l'alcoolisme se trouve associé à une maladie permanente alors que des preuves scientifiques contraires à cet énoncé s'accumulent depuis plus d'une trentaine d'années.
En premier lieu, nous avons mis l'accent sur les études scientifiques qui appuient le paradigme dominant de la maladie de l'alcoolisme. Dans cette optique, nous avons exploré et mis à jour les théories génétiques et les études les plus significatives dont celles des jumeaux, des marqueurs génétiques et des adoptions. Nous avons complété celles-ci avec les théories neurobiologiques et neuro-comportementales et mis en perspective le rôle idéologique majeur du mouvement des Alcooliques Anonymes. Dans ce cadre, nous avons illustré comment la dissémination et la socialisation du discours de la maladie passent par la philosophie des 12 étapes, et en particulier par le contenu de la première étape, soit l'acceptation préalable de la perte de contrôle quant à la consommation d'alcool.
En deuxième lieu, nous avons opposé au discours dominant de la maladie un contre-discours où le processus de la dépendance est compris comme un phénomène multifactoriel. En examinant les principaux fondements scientifiques de la maladie de l'alcoolisme, nous avons réussi à démontrer, à travers des études significatives et concluantes, que le modèle de la maladie s'inscrivait dans un processus de médicalisation des comportements alcooliques. Par le biais d'analyses critiques sur les plans philosophique, épistémologique, sociologique, culturel et psychosocial, nous avons réussi à démontrer l'émergence d'un paradigme alternatif à la maladie de l'alcoolisme. Celui-ci prône une vision, où l'individu souffrant de dépendance n'est pas un objet, étant donné la condition permanente de perte de contrôle et de maladie, mais un sujet social responsable capable de décider, de réduire, d'arrêter ou de continuer sa consommation, et ce, selon ses choix personnels et sociaux.
En dernier lieu, notre étude conclut qu'il est important de nous interroger sur les enjeux actuels et futurs de la médicalisation grandissante des comportements sociaux en général, et de l'alcoolisme / toxicomanie en particulier.