En transplantation, d’importants progrès ont été notés depuis la commercialisation des inhibiteurs de la calcineurine (ICN). Les ICN (ciclosporine A et tacrolimus) réduisent l’activation des lymphocytes T alloréactifs (LT) en inhibant le premier signal d’activation, calcium-dépendant. Malheureusement, les ICN ont une toxicité rénale importante [1]. En effet, les malades transplantés d’organes autres que le rein (foie, coeur, intestin, poumon…) développent une insuffisance rénale chronique (IRC) après une dizaine d’années de traitement [2]. En transplantation rénale, les lésions liées à l’utilisation des ICN sont également observées et sont responsables fréquemment de la perte du greffon. L’enjeu actuel est de réduire, voire d’arrêter les ICN. Les nouvelles approches reposent sur la compréhension des mécanismes d’activation des LT et la mise en évidence du second signal d’activation du LT (Figure 1). Cette voie d’activation est nécessaire, mais non suffisante pour l’activation du lymphocyte T, et vient compléter les signaux transmis lors du premier signal. Ce second signal est principalement sous la dépendance de CD28 qui interagit avec deux protéines, CD80 et CD86, exprimées à la surface de la cellule présentatrice d’antigène [3]. L’absence du second signal rend le LT anergique. Au cours de l’activation lymphocytaire, un mécanisme de rétrocontrôle négatif est secondairement produit. Il implique la protéine CTLA4, synthétisée secondairement à l’activation par les LT, dont le domaine extracellulaire est homologue à CD28. CTLA4 interagit, avec une avidité supérieure à CD28, avec CD80/86. CTLA4 transmet alors un signal négatif au LT, permettant l’inhibition de la réponse immune. Une nouvelle stratégie est de bloquer le deuxième signal d’activation lymphocytaire en produisant une protéine recombinante humaine composée du domaine extracellulaire de CTLA4 conjugué aux domaines constants d’une IgG1 (CTLA4-Ig) [3] (Figure 2). Deux mutations ponctuelles dans le domaine extracellulaire de CTLA4 ont été identifiées permettant une meilleure avidité pour CD80/86. La protéine recombinante engendrée (Belatacept®) diminue in vitro la prolifération lymphocytaire [3] en dissociant l’interaction CD28-CD80/86. In vivo, dans différents modèles murins, un traitement par CTLA4-Ig associé à un anticorps dirigé contre CD40L induit la survie illimitée des greffons [4-6]. Chez les primates non humains, Belatacept® réduit la survenue de rejet aigu de greffon allogénique et augmente la durée de vie du greffon [7, 8]. Une étude originale de phase II multicentrique randomisée (22 centres, États-Unis, Canada, Europe) a été menée chez 228 malades recevant une greffe rénale [9]. Les malades étaient randomisés en trois groupes. Le groupe I (GI) était traité par ciclosporine (n = 73) ; le groupe II (GII) par Belatacept® à dose élevée (n = 71), et le groupe III (GIII) par Belatacept® à plus faible dose (n = 73). Seuls les malades du GI recevaient un ICN. Les malades des groupes GII et GIII n’avaient pas d’ICN et étaient traités pour la première fois par un inhibiteur du second signal. L’ensemble des malades recevait un traitement par mycophénolate mofétil et corticoïdes. Après randomisation, la population était identique dans les trois groupes. L’incidence des rejets aigus a été comparable dans les trois groupes (GI = 8 %, GII = 7 %, GIII = 6 %) de même que celle des rejets aigus cortico-résistants. Les rejets infracliniques (prouvés histologiquement sans modification de la créatinémie à un an) étaient cependant plus fréquents dans le groupe Belatacept® faible dose (20 %) (GIII) que dans le groupe Belatacept® forte dose (9 %) ou ciclosporine (11 %). En revanche, la fonction rénale était significativement meilleure dans les groupes traités par Belatacept® que dans le groupe traité ciclosporine. De plus, la survenue d’une néphropathie chronique était plus rare chez les malades traités par Belatacept® que …
Parties annexes
Références
- 1. Vincenti F, Ramos E, Brattstrom C, et al. Multicenter trial exploring calcineurin inhibitors avoidance in renal transplantation. Transplantation 2001 ; 71 : 1282-7.
- 2. Ojo AO, Held PJ, Port FK, et al. Chronic renal failure after transplantation of a non renal organ. N Engl J Med 2003 ; 349 : 931-40.
- 3. Sayegh MH, Turka LA. The role of T-cell costimulatory activation pathways in transplant rejection. N Engl J Med 1998 ; 338 : 1813-21.
- 4. Larsen CP, Elwood ET, Alexander DZ, et al. Long-term acceptance of skin and cardiac allograft after blocking CD40 and CD28 pathways. Nature 1996 ; 381 : 434-8.
- 5. Lenschow DJ, Zeng Y, Thistlethwaite JR, et al. Long-term survival of xenogenic pancreatic islet grafts induced by CTLA4Ig. Science 1992 ; 257 : 789-92.
- 6. Turka LA, Linsley PS, Lin H, et al. T-cell activation by the CD28 ligand B7 is required for cardiac allograft rejection in vivo. Proc Natl Acad Sci USA 1992 ; 89 : 11102-5.
- 7. Pearson TC, Alexander DZ, Winn KJ, et al. Transplantation tolerance induced by CTLA4-Ig. Transplantation 1994 ; 57 : 1701-6.
- 8. Pearson TC, Alexander Dz, Corbascio M, et al. Analysis of the B7 costimulatory pathway in allograft rejection. Transplantation 1997 ; 63 : 1463-9.
- 9. Vincenti F, Larsen C, Durrbach A, et al. Costimulation blockade with belatacept in renal transplantation. N Engl J Med 2005 ; 353 : 770-81.