Malgré d’importants progrès réalisés au cours de ces dernières décennies, les maladies cardiovasculaires restent à l’heure actuelle la première cause de morbidité et de mortalité dans les pays industrialisés [1]. C’est pourquoi l’amélioration des traitements préventifs et thérapeutiques représente un important enjeu humain, économique et social. Elle requiert avant tout une meilleure connaissance des mécanismes cellulaires et moléculaires mis en jeu dans la physiopathologie de l’athérosclérose. L’athérosclérose est à l’origine de la plupart des maladies cardiovasculaires. Maladie progressive multi-factorielle, elle se caractérise par l’accumulation de lipides et de tissu conjonctif fibreux dans les artères [2]. La sécrétion de cytokines et de facteurs de croissance induite localement en réponse à la lésion de la paroi artérielle provoque l’activation et la prolifération des cellules musculaires lisses vasculaires (CML). La formation d’une hyperplasie intimale qui en résulte peut entraîner l’occlusion de la lumière artérielle. Cette induction de la prolifération des CML, associée à la réponse inflammatoire locale dans la paroi vasculaire joue ainsi un rôle décisif dans le développement de l’athérosclérose. Elle intervient aussi dans la survenue de complications après des procédures médicales pour traiter la maladie, telles que la resténose-occlusion secondaire à une angioplastie transluminale avec ou sans mise en place d’une prothèse endocoronaire (stent) - et la vasculopathie du greffon lors d’un pontage veineux [3]. La resténose survient chez 30 % à 50 % des patients après une intervention coronarienne percutanée, et 20 % d’entre eux devront subir d’autres interventions, par exemple un pontage, lui-même limité par le risque de rejet de la greffe veineuse à la suite de l’obstruction luminale [4]. L’activation des CML induit leur changement phénotypique, qui est associé à une altération des mécanismes contrôlant le cycle cellulaire. Alors que les cellules de la paroi artérielle normale sont en phase G0 du cycle cellulaire (état quiescent, différentié et contractile), leur activation induit leur progression à travers la phase G1 et l’entrée en phase S, phase de duplication des chromosomes (état dé-différencié, synthétique et prolifératif, ressemblant à un phénotype de cellules embryonnaires) [5]. La transition G1 à S est principalement contrôlée par la phosphorylation de pRB (produit du gène du rétinoblastome) par les kinases dépendantes des cyclines (CDK) [6] (Figure 1). Ces CDK sont activées par leur liaison avec des cyclines et inhibées par des inhibiteurs des CDK (CDKI), qui sont exprimés transitoirement et spécifiquement au cours du cycle cellulaire [6]. Ainsi, l’augmentation de la phosphorylation de pRB est considérée comme le point de départ de la formation de l’hyperplasie intimale [3]. La caractérisation des mécanismes mis en jeu dans cette (dé)régulation du cycle cellulaire des CML et la recherche de stratégies pour les contrer apparaît aujourd’hui clairement comme un objectif majeur dans la recherche contre l’athérosclérose et les maladies vasculaires occlusives associées. Les fibrates (tels que le gemfibrozil, bezafibrate, ciprofibrate et fénofibrate), molécules synthétiques, sont des médicaments actuellement administrés seuls ou en combinaison avec les statines aux patients qui ont un risque cardiovasculaire élevé (tels que les patients diabétiques et les patients ayant eu un infarctus) pour empêcher la progression de l’athérosclérose [7]. En prévention secondaire, ils diminuent la morbidité due aux maladies cardiovasculaires [7, 8]. Sur le plan moléculaire, ils agissent via la liaison avec le récepteur nucléaire PPARα (peroxisome proliferator-activated receptor α) provoquant sa dimérisation avec un autre récepteur nucléaire, le RXR (retinoid X-receptor) [9]. L’hétérodimère se lie alors sur des éléments spécifiques de l’ADN (appelés PPAR-response elements ou PPRE) pour activer l’expression des gènes cibles de PPARα. Par ailleurs, PPARα activé peut aussi réguler indirectement l’expression du gène cible en se liant à des protéines elles-mêmes fixées sur l’ADN …
Parties annexes
Références
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- 2. Ross R. Atherosclerosis : an inflammatory disease. N Engl J Med 1999 ; 340 : 115-26.
- 3. Dzau VJ, Braun-Dullaeus RC, Sedding DG. Vascular proliferation and atherosclerosis : new perspectives and therapeutic strategies. Nat Med 2002 ; 8 : 1249-56.
- 4. Froeschl M, Olsen S, Ma X, et al. Current understanding of in-stent restenosis and the potential benefit of drug eluting stents. Curr Drug Targets Cardiovasc Haematol Disord 2004 ; 4 : 103-17.
- 5. Hao H, Gabbiani G, Bochaton-Piallat ML. Arterial smooth muscle cell heterogeneity : implications for atherosclerosis and restenosis development. Arterioscler Thromb Vasc Biol 2003 ; 23 : 1510-20.
- 6. MacLachlan TK, Sang N, Giordano A. Cyclins, cyclin-dependent kinases and cdk inhibitors : implications in cell cycle control and cancer. Crit Rev Eukaryot Gene Expr 1995 ; 5 : 127-56.
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- 8. Robins SJ, Collins D, Wittes JT, et al. Relation of gemfibrozil treatment and lipid levels with major coronary events : VA-HIT : a randomized controlled trial. JAMA 2001 ; 285 : 1585-91.
- 9. Michalik L, Desvergne B, Wahli W. Peroxisome-proliferator-activated receptors and cancers : complex stories. Nat Rev Cancer 2004 ; 4 : 61-70.
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