Les mécanismes de mutations ou de translocations chromosomiques aboutissant à l’activation incontrôlée de tyrosine kinases (TK) semblent représenter une caractéristique commune à différentes hémopathies malignes. Actuellement émerge une nouvelle stratégie thérapeutique qui consiste à cibler l’activité TK de récepteurs ou de molécules intracytoplasmiques. L’efficacité remarquable d’un inhibiteur de la protéine de fusion BCR-ABL (imatinib mésylate, Glivec®) dans la leucémie myéloïde chronique (LMC) encourage cette démarche ((→) m/s 2004, n° 12, p. 1125). Dans ce contexte, Jing Chen et al. laissent entrevoir l’efficacité potentielle d’un inhibiteur de TK, le PKC412, dans le traitement de syndromes myéloprolifératifs associés à la région chromosomique 8p [1]. Dans ce syndrome, la translocation de la région carboxy-terminale du domaine TK d’un gène déterminant la synthèse du récepteur TK, FGFR1, avec la région amino-terminale des différents partenaires (ZNF198, CEP110, FOP, BCR, HERV-K) est récurrente. Bien que les séquences des protéines partenaires soient très différentes, toutes présentent néanmoins des motifs d’homodimérisation/oligodimérisation permettant de mimer la dimérisation nécessaire à l’activation physiologique de la TK. Les auteurs ont d’abord caractérisé l’activité transformante de la fusion ZNF198-FGFR1 résultant de la translocation t(8 ;13)(p11 ;q12). L’activation constitutive de la TK chimère transforme des cellules hématopoïétiques murines Ba/F3. Cet effet est consécutif à l’activation d’effecteurs intracellulaires tels que STAT5, PI3K et PCL-γ. Les analyses de mutagenèse démontrent que, contrairement aux séquences à doigts de zinc, les séquences riches en proline de la région amino-terminale de ZNF198 sont nécessaires à cet effet transformant. Par ailleurs, l’inhibition de l’activité TK de ZNF198-FGFR1 par le PKC412 aboutit à l’arrêt de la prolifération des cellules transformées. Cet effet inhibiteur a été confirmé in vivo dans un modèle murin de syndrome myéloprolifératif induit par ZNF198-FGFR1 : le traitement des animaux par le PKC412 prolonge leur survie et restaure un phénotype compatible avec une rémission (rétablissement de l’équilibre entre les différentes lignées hématopoïétiques, diminution de la splénomégalie). De manière élégante, les auteurs démontrent - après transplantation de cellules médullaires exprimant différents variants de ZNF198-FGFR1 - le rôle central joué par l’activation de cette TK dans l’induction de différents phénotypes de la maladie. Ainsi, bien que n’étant pas nécessaires à l’activation de la TK, les motifs à doigts de zinc de ZNF198 participent probablement à la différenciation des cellules Ba/F3 transplantées. Le PKC412 (Novartis), surtout connu pour son effet inhibiteur de FLT3, est actuellement évalué dans le traitement des leucémies aiguës myéloïdes (LAM). Or, les patients atteints du syndrome myéloprolifératif 8p présentent une hyperplasie myéloïde qui progresse souvent vers une LAM dans l’année qui suit le diagnostic. Le traitement d’un patient présentant une translocation t(8 ;13) (p11 ;q112) par le PKC412 (100 mg/jour) a permis d’obtenir une amélioration clinique et biologique suffisante, sans pour autant éradiquer l’anomalie cytogénétique. Ce résultat confirme la place des inhibiteurs de TK, utilisés seuls ou en association, dans l’arsenal des nouveaux outils thérapeutiques anticancéreux. La fonction oxyphorique de l’hémoglobine (Hb) requiert l’existence d’un tétramère α2β2 et donc la synthèse coordonnée des chaînes α et β dont les gènes codants sont localisés sur des chromosomes différents. Une avancée importante dans la compréhension de cette coordination a été la mise en évidence d’une protéine chaperon AHSP (α-hemoglobin stabilizing protein) qui se lie temporairement aux chaînes α en excès, évitant ainsi leur précipitation dans le globule rouge et toute une série de lésions cellulaires [2] ((→) m/s 2002, n° 12, p. 1189). On avait aussi montré le caractère stoechiométrique de l’association [3]. Si un rôle essentiel était reconnu à la protéine AHSP, son mécanisme d’action n’avait pas été déterminé. Une première étude par résonance magnétique …
Parties annexes
Références
- 1. Chen J, et al. Proc Natl Acad Sci USA 2004 ; 101 : 14479-84.
- 2. Kihm AJ, et al. Nature 2002 ; 417 : 758-63.
- 3. Gell D, et al. J Biol Chem 2002 ; 277 : 40602-9.
- 4. Santiveri CM, et al. J Biol Chem 2004 ; 279 : 34963-70.
- 5. Feng L, et al. Cell 2004 ; 119 : 629-40.
- 6. Epel S, et al. Proc Natl Acad Sci USA 2004 ; 101 : 17312-5.
- 7. Iwamoto T, et al. Nat Med 2004 ; 10 : 1193-9.
- 8. Lewis A, et al. Nat Genet 2004 ; 36 : 1291-5.
- 9. Strader AD, et al. J Clin Invest 2004 ; 114 : 1354-60.
- 10. The Parkinson study group. N Engl J Med 2004 ; 351 : 2498-508.
- 11. Drouot X, et al. Neuron 2004 ; 44 : 769-78.
- 12. Gerull B, et al. Nat Genet 2004 ; 36 : 1162-4.
- 13. Rampazzo A, et al. Am J Hum Genet 2002 ; 71 : 1200-6.
- 14. McKoy G, et al. Lancet 2000 ; 355 : 2119-24.
- 15. Lapidos KE, et al. J Clin Invest 2004 ; 114 : 1577-85.
- 16. Dausset J. Science 1981 ; 213 : 1469-74.
- 17. Vandiedonck C. Proc Natl Acad SciUSA 2004 ; 101 : 15464-9.
- 18. Giraud M. Neurology 2001 ; 57 : 1555-60.
- 19. Bock-Marquette I, et al. Nature 2004 ; 432 : 466-72.
- 20. Fraidenraich D, et al. Science 2004 ; 306 : 247-52.