Une vieille légende veut que les jardins du diable de la forêt tropicale amazonienne, qui ne sont composés quasiment que d’une espèce d’arbres, Duroia hirsuta, soient cultivés par un esprit malin de la forêt. Des études plus rationnelles avaient au contraire conclu que cette monoculture était le résultat d’une allélopathie, autrement dit d’une inhibition locale de la croissance d’une plante par une autre plante. Il semble que ni l’une ni l’autre de ces affirmations ne soit le reflet de la réalité. En effet, une équipe californienne vient de démontrer que l’adepte de la « pensée unique » est en réalité une habitante de ces lieux maléfiques, la fourmi Myrmelachista schumanni [1]. Cette dernière affectionne tout particulièrement le creux des souches de D. hirsuta pour y construire son nid. La meilleure stratégie a donc consisté à donner l’exclusivité à cet arbre en détruisant toute autre espèce. Cette fourmi est en effet capable de sélectivement reconnaître les autres espèces, d’en mordre les feuilles afin d’y introduire son abdomen et d’y déverser un poison mortel : l’acide formique. Moins de 24 heures plus tard, la feuille blessée commence une inéluctable nécrose. Cette stratégie d’extermination systématique, connue chez l’homme, n’avait encore jamais été décrite chez la fourmi. Elle a en tout cas permis à M. schumanni d’établir sa colonie dans les jardins du diable et d’y régner en maître depuis environ 800 ans ! Le comportement social et reproductif des mammifères est, on le sait, modulé par les signaux chimiques que sont les phéromones. Ceux-ci sont médiés par l’organe voméronasal qui est situé à la base du septum nasal. Classiquement, on distingue deux classes de récepteurs de ces phéromones, V1R et V2R, qui sont exprimés dans les neurones sensoriels de l’organe voméronasal. Jusqu’à présent, on considérait que les urines constituaient le principal véhicule des phéromones. Une première surprise cependant vînt de l’observation qu’un contact physique avec la région faciale d’un animal modifiait la stimulation neuronale du système voméronasal du partenaire. Une équipe japonaise vient désormais de donner une explication moléculaire à ce comportement en mettant en évidence un petit peptide de 7 kDa sécrété exclusivement par les mâles dans… les glandes lacrymales [2]. Cette protéine, appelée ESP1 (exocrine gland-secreting peptide1) est codée par une nouvelle famille de gènes regroupés à proximité de la région du complexe majeur d’histocompatibilité. Le contact direct entre les larmes du mâle et la femelle permet le transfert de ce petit peptide à l’organe voméronasal de la femelle où elle stimule le récepteur V2R des neurones sensoriels pour déclencher une réponse électrique. Certes, l’organe voméronasal des humains est réduit à peau de chagrin. On pourrait néanmoins se demander si le charme discret opéré par un homme sachant pleurer ne trouve pas un écho lointain dans cette voie de signalisation abandonnée. Nous pourrions également modifier quelque peu l’éducation des petits garçons puisqu’on pourra désormais leur dire, sur cette base scientifique : « pleure, si tu es un homme » ! La mesure de la concentration dans le plasma de l’antigène spécifique de la prostate (PSA) est la méthode la plus utilisée pour dépister le cancer de la prostate. Cette méthode a une bonne spécificité, mais une mauvaise sensibilité avec près de 80 % de faux positifs, ce qui conduit à des biopsies prostatiques injustifiées. On sait maintenant que les malades produisent des anticorps contre les antigènes tumoraux ; d’où l’idée exploitée par Wang et al. [3] de rechercher si la présence de tels anticorps dans le plasma des malades atteints de cancer de la prostate ne pourrait pas être un nouveau marqueur biologique de la maladie. La première …
Parties annexes
Références
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