L’autisme, nouveau mal du siècle, toucherait un enfant sur 166 et aurait augmenté de 400 % entre 1994 et 2003. Comme d’autres troubles du comportement, cette affection a fait dès le début des années 1980 l’objet d’études génétiques visant à identifier un « gène de l’autisme », ou plus précisément un gène dont certains allèles accroîtraient le risque d’une telle évolution. Ces premiers travaux (comme pour la psychose maniaco-dépressive ou la schizophrénie) souffraient d’analyses statistiques approximatives et de nombreux biais méthodologiques, ce qui n’a pas empêché des annonces aussi catégoriques que rapidement démenties. Il est néanmoins clair aujourd’hui que l’autisme comporte une composante génétique significative, et les études de localisation, reprises avec des marqueurs performants comme les SNP (single nucleotide polymorphisms), concordent pour au moins quatre régions chromosomiques. On se retrouve donc dans la situation maintenant classique d’une maladie complexe (comme le diabète) dont le déclenchement dépend à la fois de l’environnement et des allèles présents pour certains gènes. Leur identification peut aider à comprendre le mécanisme de l’affection et, peut-être, à évaluer le risque couru par chacun. Un article récemment paru dans Le Monde va à l’encontre de cette vision nuancée : intitulé « Le premier test de diagnostic de l’autisme va être lancé », il annonce la commercialisation dès 2006 aux États-Unis, du « premier test génétique de diagnostic de l’autisme » - qui plus est, proposé (dans ce pays) en tant que home-test, sans prescription médicale. Et l’entreprise à l’origine de cette nouvelle, Integragen, est une start-up française implantée à la Génopole d’Évry et honorablement connue pour ses travaux en matière de cartographie génétique. A-t-elle fait une découverte inattendue qui révolutionne nos conceptions sur la génétique de l’autisme et permet de le prévoir à coup sûr ? L’annonce, faite le 19 juillet 2005, s’appuie sur un article paru le même jour dans Molecular Psychiatry [1]. Il décrit l’étude de 116 familles comportant au moins un cas d’autisme sévère, effectuée grâce à la technique de cartographie mise au point par l’entreprise. L’analyse pointe sept régions susceptibles de contenir des gènes influençant la prédisposition à l’autisme, dont quatre avaient déjà été repérées dans les travaux antérieurs. L’une d’elles, située sur le bras court du chromosome 16, est alors étudiée plus en détail, la localisation est affinée et s’avère centrée sur le gène PRKCB1. Or, la kinase pour laquelle code ce gène joue un rôle important dans la régulation des transmissions synaptiques entre cellules de Purkinje et cellules granulaires – et, justement, des anomalies à ce niveau ont été trouvées dans le cerveau d’autistes. De plus, l’activation d’une des formes de PRKCB1 améliore certains apprentissages auditifs chez le rat. Il faut néanmoins souligner que les auteurs n’ont trouvé chez les personnes affectées, ni changement d’acide aminé dans la protéine, ni mutation d’épissage dans ce gène, ce qui laisse un doute sur son implication dans la maladie. Il est bien sûr possible d’imaginer qu’un changement plus subtil (et plus difficile à détecter par analyse de séquences) affecte sa régulation, mais ceci reste à prouver. Résultats intéressants donc, et hypothèse séduisante, mais on comprend la prudence de la conclusion finale : « Our data suggest that the PRKCB1 gene may be involved in the etiology of autism ». Quid du fameux test génétique ? Le communiqué de l’entreprise mentionne pour l’autisme une prévalence de 1 sur 150 et un accroissement de 10 % à 17 % par année : valeurs élevées, correspondant à celles du récent article du Quotidien de Médecin mais très supérieures à celles de l’OMS (d’ailleurs citées dans un autre communiqué d’Integragen…). Il indique que …
Parties annexes
Référence
- 1. Philippi A, Roschmann E, Tores F, et al. Haplotypes in the gene encoding protein kinase c-beta (PRKCB1) on chromosome 16 are associated with autism. Mol Psychiatry 2005 ; 19 juillet online.