Dans la région qui va du sud des États-Unis au nord de l’Argentine, dans les plaines sèches ou les forêts humides, dans les terres vierges ou les jardins urbains, il n’est pas rare de voir voler l’Astraptes fulgerator. Ce papillon de la famille des Hesperidae est très répandu dans cette zone subtropicale. Décrit pour la première fois en 1775, il est observé et élevé depuis 25 ans dans la réserve naturelle de Guanacaste au nord-ouest du Costa Rica. Des entomologistes ont examiné des milliers de chenilles et des centaines d’adultes et les ont répertoriées sur le site http://janzen.sas.upenn.edu où l’on peut admirer de très nombreuses photos. Bien que la dissection de 67 mâles et femelles adultes n’ait révélé aucune différence morphologique, quelques petites différences (l’intensité de la couleur bleue du corps entre autres) conduisaient à se demander si, sous cet Astraptes fulgerator, ne se cachaient pas plusieurs espèces. Grâce à l’étude de l’ADN de 484 adultes, en comparant la séquence du gène codant pour la cytochrome oxydase I, on s’aperçut qu’on avait affaire à dix espèces différentes au moins ! Celles-ci sont désormais classées sur un site qui attribue à chacune un code barre, et qui a pour ambition de faire l’inventaire de la biodiversité de toutes les espèces vivantes (http://www.barcodinglife.com). A posteriori, une fois déterminés les dix haplotypes, il devint clair que chaque espèce avait des particularités morphologiques ou écologiques qui auraient pu permettre de la reconnaître : couleurs de la chenille, plante sur laquelle elle se développe, couleurs des ailes ou de l’abdomen des adultes. Les 10 espèces ont reçu un nom. Pour 7 d’entre elles, il se rattache au nom de la plante qu’elles consomment préférentiellement ou exclusivement : par exemple TRIGO pour celle qui ne se nourrit que de Trigonia, une herbe à feuilles trifoliées, ou BYTTNER, beaucoup plus rare, pour celle qui se nourrit uniquement de Byttneria catalaefolia (de la même famille des Sterculiacae que le cacaoyer ou le cola). Pour les trois autres espèces, il comporte en plus une indication de la couleur : citons SENNOV pour l’espèce qui se nourrit d’une variété de fèves (Senna hayesiana) et dont le ventre est orange (OV). Ce travail est intéressant à plus d’un titre [1]. Il prouve une fois de plus que l’analyse de l’ADN est un outil puissant et rapide d’identification des êtres. Il incite à étudier de la sorte d’autres variétés d’arthropodes dans les régions des tropiques où d’autres espèces cryptiques ont déjà été observées (en particulier dans la famille des Scorpionidés). Il justifie l’effort en cours pour attribuer un code barre, ou à « barcoder » animaux et végétaux. Ainsi, tandis que les modifications des écosystèmes font disparaître sous nos yeux de nombreuses espèces vivantes, nous en découvrons d’autres, jusque là ignorées (mais souvent très fragiles car liées à la présence de certaines plantes) qui vont nous obliger à redéfinir dans le détail l’évolution du vivant. Après le clonage des amphibiens (1966), des poissons et des mammifères (2002), voici que Drosophila melanogaster vient d’être clonée avec succès par une équipe canadienne [2]. Pour y parvenir - car jusqu’à présent les tentatives avaient échoué -, V. Lloyd et son équipe ont utilisé des noyaux d’embryons (et non pas des noyaux provenant d’adultes) marqués par la GFP (green fluorescent protein). Ils les ont injectés dans des oeufs provenant de femelles W1118 fécondées par des spermatozoïdes de mâles homozygotes ms(3)K81 connus pour leur incapacité à accomplir la fusion des pronucléus, ce qui interdit tout développement embryonnaire. Mais le travail fut laborieux : sur plus …
Parties annexes
Références
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