La fusion cellulaire joue un rôle clef dans de nombreux processus biologiques et pathologiques. Cet événement marque même le début de la vie puisque la fusion d’un spermatozoïde et d’un ovule est à l’origine de tout embryon. Par la suite, ce mécanisme devient fondamental au cours du développement. Chez les mammifères, les cellules du trophoblaste fusionnent entre elles pour former le placenta ((→) m/s 1999, n° 11, p. 1236). Au cours du développement, les ostéoclastes qui participent à la formation des os résultent de la fusion de précurseurs d’origine monocytaire ((→) m/s 2001, n° 12, p. 1260), et la formation des fibres musculaires de celle des myoblastes durant la myogenèse [1]. La compréhension des mécanismes de fusion entre deux cellules présente des intérêts multiples. Il est intéressant de noter que la fusion des cellules musculaires a lieu même chez l’adulte. Ainsi lors d’une lésion musculaire, les cellules satellites prolifèrent et les mécanismes de fusion entre les myoblastes permettront la reconstitution de fibres multinucléées (voir l’Encadré de V. Mouly, p. 696 de ce numéro). On peut dès lors imaginer l’intérêt que peut présenter le contrôle de ce mécanisme dans le cadre d’une thérapie. La fusion de myoblastes génétiquement modifiés avec les cellules musculaires de patients atteints de dystrophie musculaire par exemple, pourrait permettre de reprogrammer les cellules déficientes et de corriger la maladie [2]. La fusion cellulaire s’observe aussi au cours de certaines pathologies, la principale étant l’infection virale. En effet, l’entrée des virus enveloppés (par exemple le virus influenza) dans les cellules nécessite une fusion entre la membrane virale et la membrane de la cellule hôte. Cet événement implique le mélange de deux membranes cellulaires en une seule et même bicouche lipidique, aboutissant à la formation d’une large cellule multinucléée dans laquelle les constituants des deux cellules sont partagés. La fusion entre deux membranes, quelle que soit la provenance de ces membranes, requiert deux conditions: (1) surmonter la barrière énergétique créée lors du rapprochement des deux membranes lipidiques chargées et (2) être spécifique. Toute fusion membranaire nécessitera donc l’intervention de protéines capables d’assumer ces deux fonctions: rendre le mécanisme favorable d’un point de vue énergétique, et identifier les membranes à fusionner afin d’assurer la spécificité de la fusion. Notre compréhension des phénomènes de fusion membranaire provient essentiellement des études de fusion entre un virus et une cellule et des études de fusion entre les vésicules intracellulaires et les organites. La fusion de la membrane des virus avec la membrane plasmique de la cellule hôte fait intervenir une protéine membranaire virale fusogène, comme la protéine hémagglutinine du virus influenza. L’hémagglutinine du virus est responsable de l’adhérence du virus à la membrane, puis de la fusion elle-même, cette dernière étant provoquée par une diminution du pH induisant un changement de conformation de cette protéine et exposant un peptide de fusion. Les peptides fusogènes sont caractérisés par leur nature amphipathique et leur structure en hélice. Ce peptide s’insère alors dans la membrane hôte, et induit la fusion membranaire [3]. Un mécanisme similaire est utilisé par les protéines SNARE pour catalyser la fusion des vésicules lipidiques avec un organite cible dans la cellule. Les protéines SNARE sont des protéines transmembranaires, localisées de part et d’autre des membranes: les v-SNARE sur les vésicules et les t-SNARE sur les membranes cibles. La fusion aura lieu lorsqu’une v-SNARE reconnaît le t-SNARE qui lui correspond et s’y associe de façon spécifique ((→) m/s 2001, n° 5, p. 669). Lors de la formation du complexe SNARE, les deux membranes se rapprochent et leur fusion survient ensuite [4]. Malgré les connaissances accumulées …
Parties annexes
Références
- 1. Witze E, Rothman JH. Cell fusion: an EFFicient sculptor. Curr Biol 2002; 12: R467-9.
- 2. Taylor M. Muscle development: molecules of myoblast fusion. Curr Biol 2000; 10: R646-8.
- 3. Colman P, Lawrence M. The structural biology of type I viral membrane fusion. Nat Rev Mol Cell Biol 2003; 4: 309-19.
- 4. Galli T, Martinez-Arca S, Paumet F. Mécanisme de la fusion membranaire. Med Sci 2002; 18: 1113-9.
- 5. Huovila AP, Almeida E, White JM. ADAMs and cell fusion. Cur Opin Cell Biol 1996; 8: 692-9.
- 6. Molher W, Shemer G, del Campo J, et al. The Type I membrane protein EFF-1 is essential for developmental cell fusion. Dev Cell 2002; 2: 355-62.