Cette semaine, Nature et Science nous font passer du génome à l’étape suivante, celle des effecteurs, c’est-à-dire les voies de signalisation. Une compagnie privée, Sugen, du groupe Pharmacia, à laquelle se joint Tony Hunter, publie dans Science l’analyse de toutes les kinases intervenant dans les fonctions cellulaires [1]. Il s’agit d’une étude rétrospective de compilation, déduite de la publication de toutes les données (gènes, ADNc et EST) disponibles (publiques du consortium du génome humain, ou privées de Céléra, Incyte EST, GenBank, etc.) provenant du séquençage du génome humain. Le total de ces kinases se monte à 518, ce qui est bien moindre que les 1000 envisagées il y a 15 ans, mais représente malgré tout 1,7 % des gènes. Pour les auteurs, ces 518 kinases sont au complet, et donc responsables de l’ensemble des phosphorylations de l’organisme humain. La plupart (478) appartiennent à une seule famille protéique, dont la signature est un domaine catalytique ePK, et 40 sont dites aPK (a = atypical). Soixante et onze d’entre elles étaient soit inconnues, soit leur activité enzymatique n’avait pas été confirmée. Parmi les petites nouvelles, citons une nouvelle cycline, deux nouvelles MAP3K et deux nouvelles MAP4K. La classification originelle de T. Hunter en 5 groupes, 44 familles et 51 sous-familles, fondée sur une comparaison de séquences primaires et du domaine catalytique, a été complétée par l’ajout de 4 groupes de kinases, 90 familles et 145 sous-familles, et forme un arbre qui orne la page de bienvenue du site [2]. Une comparaison phylogénétique permet non seulement de déduire l’évolution par duplication de certains de ces gènes, et de dater leur ségrégation, mais aussi de constater une conservation des familles entre l’espèce humaine, C. elegans et la drosophile, chaque catégorie, famille ou sous-famille s’avérant plus nombreuse chez l’homme que dans les deux autres espèces. Ce nombre élevé de kinases caractérise des systèmes très développés chez l’homme comme l’hématopoïèse et les systèmes nerveux, vasculaire ou immunitaire. Mais pourquoi diable l’homme a-t-il 14 familles de récepteurs Ephrine et le ver ou la mouche une seule? L’étude de la séquence permet également de décrire les domaines d’interaction avec d’autres protéines de signalisation, posant les pièces du puzzle qui se complétera au cours des prochaines années. On reconnaît aussi quelques bizarreries, comme le fait que 50 de ces kinases ont un domaine catalytique inactif, dont la signification n’est pas claire à ce jour. Sugen et ses partenaires ont également déterminé la localisation chromosomique des gènes codant pour toutes ces kinases, ce qui permet de faire le lien avec la pathologie humaine. Outre la possibilité de détecter des clusters de gènes de kinases dans un même locus, comme celui qui réunit les gènes des kinases des récepteurs du PDGF et du CSF-1 sur le chromosome 5 et qui est conservé chez le pfuffer fish, l’analyse décèle que 164 kinases sont présentes dans des amplicons observés dans des tumeurs et que 80 le sont dans des locus impliqués dans d’autres maladies importantes. Est-ce à dire que dans quelques années chacun de nous se définira par un réseau d’algorithmes comme celui que décrivent Y. Pommier et K.W. Kohn (p. 173 de ce numéro) pour le cycle cellulaire, ou Lee et al. dans un récent numéro de Science, pour le fonctionnement de la levure? [3] Alfred Gilman, prix Nobel en 1994 pour sa découverte des protéines G, lance à grands renforts de publicité le site dédié au consortium, l’AfCS, The Alliance for Cell Signalling dans Nature, le partenaire de cette aventure [4]. Maintenant qu’il n’apparaît plus totalement hors de portée des scientifiques de disséquer complètement le fonctionnement cellulaire …
Parties annexes
Références
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- 2. www.kinase.com/human/kinome
- 3. Lee TI, et al. Science 2002; 298: 799-804.
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