Résumés
Résumé
L’affirmation de la primauté de la justice étatique ressort de l’idée d’un lien consubstantiel entre État et droit, selon laquelle le droit n’a pas d’autre réalité sociale que celle assignée par la loi étatique, nationale, et ne peut être multiforme. Pourtant la multiplicité des normes, rationalités et mécanismes de justice dans toute société et l’existence de traités internationaux sur les droits fondamentaux mettent à mal cette idée. Les droits étatiques ne peuvent plus ignorer les autres ordres normatifs sous peine de porter atteinte à des principes désormais admis: la dignité des acteurs, la légitimité de leur identification personnelle et leur nécessaire adhésion à l’autorité de l’État. Dans ce contexte, une de nos recherches analyse la réception par des juges de valeurs et de normes familiales suivies par des musulmans et le présent texte se penche sur la réception de la kafálah, une forme de prise en charge d’un enfant musulman abandonné, orphelin ou dont la famille ne peut assumer le coût de l’éducation. Neuf jugements, rendus au Québec entre 1997 et 2009, sont présentés.
Abstract
The affirmation of the primacy of state justice stems from the idea that there is an integral link between law and state, where the social reality of the law is only that which is assigned to it by the state―an idea that leaves no room for legal pluralism. The presence of international treaties on fundamental rights, and the plurality of norms, rationales and mechanisms of justice have repudiated this idea. State law can no longer ignore other normative orders without undermining principles such as the dignity of actors, and the legitimacy of their personal identity. In this context we intend to assess the reception of Muslim values and norms by central actors in the legitimization of any foreign law: the judges. We study nine judicial decisions in Quebec rendered between 1997 and 2009 about kafálah, a Muslim legal institution to take care of abandoned children.