Résumés
Résumé
Bien que l’innovation soit aujourd’hui considérée comme le principal levier d’amélioration de la performance publique locale, rares sont les recherches portant sur sa dynamique et ses déterminants. L’objectif de cet article, qui appréhende l’innovation comme un phénomène multidimensionnel est d’analyser l’impact des déterminants organisationnels, environnementaux et managériaux sur les différentes formes d’innovations publiques locales, en s’appuyant sur une recherche quantitative menée auprès de collectivités locales françaises. En mettant en évidence des déterminants communs mais aussi des déterminants propres à certaines formes d’innovation, cette recherche apporte un éclairage sur les dynamiques de changement et d’innovation au sein des organisations publiques.
Mots-clés :
- innovation publique,
- organisation publique,
- collectivités locales,
- dynamique de changement
Abstract
Although innovation is now considered to be the main driver for improving local public performance, there is little research on its dynamics and determinants. The objective of this of this research, which considers innovation as a multidimensional phenomenon, is to analyze the impact of organizational, environmental and managerial determinants on the various forms of local public innovation, based on a quantitative research conducted among French local authorities. By highlighting common determinants but also determinants specific to specific forms of innovation, this research sheds a new light on the dynamics of change and innovation within local public organizations.
Keywords:
- Public innovation,
- public organizations,
- local authorities,
- change dynamics
Resumen
Aunque implementar innovación ahora se considera como la mejor idea para mejorar el desempeño público local, hay poca investigación científica sobre su dinámica y sus determinantes. El objetivo de este artículo científico, que considera la innovación como un fenómeno multidimensional, es analizar el impacto de los determinantes organizacionales, ambientales y de gestión en las diferentes formas de innovación pública local. Este trabajo se apoya en una investigación cuantitativa realizada por organizaciones publicas locales en Francia. Al destacar los determinantes comunes pero también los determinantes específicos de ciertas formas de innovación, esta investigación propone una presentación nueva de la dinámica del innovación dentro de las organizaciones públicas.
Palabras clave:
- innovación pública,
- determinantes,
- comunidades locales,
- análisis cuantitativo
Corps de l’article
Dans un contexte de fortes contraintes, notamment financières, d’accroissement de la demande de services publics, et d’émergence de problématiques, caractérisées, entre autres, par une très forte interdépendance entre acteurs, l’innovation s’impose progressivement dans l’agenda politique et administratif (Bekkers et Tummers, 2018). Celle-ci est souvent présentée comme la principale voie d’amélioration de l’efficacité et de l’efficience de l’action publique (Damanpour et Schneider, 2006; De Vries et al., 2018), mais aussi comme un vecteur de qualité des services publics (Jung et Lee, 2016). En témoignent les multiples rapports consacrés à ce sujet récemment, tant au niveau de l’État que sur le plan local, ainsi que les divers dispositifs et programmes destinés à encourager et à diffuser l’innovation publique (Arundel et al., 2015). Dans ce contexte, les innovations publiques locales, qui sont généralement polymorphes ou multidimensionnelles en étant organisationnelle, technologique ou de gouvernance (Vries et al., 2016) sont aujourd’hui largement privilégiées par les collectivités locales afin de gérer la crise des finances publiques locales.
Néanmoins, si les différentes catégories d’innovation publique locale se développent, peu d’études analysent de manière spécifique les déterminants propres à chacune d’entre elles ainsi que ceux qui leur sont communs. Or, l’enthousiasme suscité autour de ce mouvement et les espoirs placés dans les innovations publiques contrastent avec les résultats obtenus. Un certain nombre de recherches (Moynihan 2006; Van Dooren et Thijs 2010) font en effet état d’un taux d’échec ou d’insatisfaction importants en ce qui concerne des innovations managériales de type management par la performance. Bien que plébiscitées, ces innovations ont du mal à s’implanter et produire des résultats significatifs au sein du secteur public. La compréhension des facteurs d’adoption et de diffusion des innovations publiques locales est d’autant plus importante que, comme nous le montrons par la suite, les recherches dans ce domaine sont (1) relativement rares, notamment en ce qui concerne les études empiriques (Lewis et al., 2018), (2) qu’elles conduisent à des résultats contradictoires ou non conclusifs (Acker et Bouckaert, 2018) et (3) qu’elles ont tendance à se limiter à l’analyse d’une seule ou d’un nombre réduit de catégories de déterminants (Berry, 1994; Damanpour et Schneider, 2008), ou d’innovations (Walker, 2006; Damanpour, 1991).
En outre, les caractéristiques spécifiques des organisations publiques (spécificités d’organisation, de fonctionnement et de valeurs) suggèrent des conditions de mise en oeuvre distinctes du privé[1] (Birkinshaw et al., 2008), mais aussi des dynamiques d’implantation et de développement différenciées selon les types d’innovation publique qui se distinguent quant à leur objet, leur complexité et leur degré d’ouverture. Ceci est d’autant plus vrai pour les innovations dites locales ou territoriales. Ces innovations, qui sont rarement abordées en tant que telle par la littérature, se distinguent des autres innovations publiques à trois niveaux. Premièrement, elles ont une dimension/empreinte territoriale forte et sont marquées par les caractéristiques spécifiques de leur territoire d’appartenance (Oural, 2015). Deuxièmement, elles sont plurielles et varient fortement en termes de finalité, de portée et de complexité. Troisièmement, leur conception et leur implémentation relèvent dans leur ensemble d’un processus collaboratif et intègrent une diversité de parties prenantes (usagers, associations, autres niveaux administratifs, etc.). Dès lors, l’objectif de cette recherche est d’analyser l’influence potentielle de différents types de déterminants sur les catégories d’innovations publiques locales. La nature spécifique et plurielle des innovations locales ainsi que les limites de la littérature sur ce sujet conduisent à formuler la question de recherche suivante : les déterminants de l’innovation locale varient-ils selon les différentes catégories d’innovations locales ? Et si oui de quelle manière ? A l’instar de Acker et Bouckaert (2017) dans leur étude des conditions de survie de l’innovation publique, nous privilégions une recherche de type exploratoire et structurons notre étude empirique autour d’une question et d’une proposition générale de recherche.
L’originalité de notre recherche réside dans le fait d’associer les trois principales catégories de déterminants de l’innovation avec différentes formes d’innovation publique locale. Pour répondre à la problématique, une étude quantitative menée au niveau national auprès de 118 collectivités locales a permis d’étudier les relations entre les déterminants des innovations publiques locales et le type de l’innovation décrite par les répondants.
Cette recherche revêt un intérêt théorique, en apportant un éclairage sur les phases initiales (l’adoption et l’implémentation) de la dynamique d’innovation au sein du secteur public local. Par ailleurs, elle présente un intérêt pratique et managérial, en identifiant des leviers d’adoption et d’implantation communs mais aussi, et surtout, des leviers spécifiques à chaque type d’innovation.
Cadre de la recherche
Dans un premier temps nous explorons et caractérisons les différentes formes d’innovations publiques locales. Dans un second temps, et en nous appuyant sur le cadre théorique plus général de la dynamique d’adoption et de diffusion des innovations, nous recensons les principales familles de déterminants de l’innovation publique et mettons en évidence les limites de la littérature quant à notre objet de recherche. Cette partie se conclut sur la définition d’une proposition générale et de notre modèle de recherche.
Les différentes formes d’innovation publique locale
Bien que l’innovation soit un concept complexe et polymorphe, elle peut être définie, à l’instar de Rogers (2003) et Damanpour et Schneider (2008), comme un processus conduisant à l’adoption par une organisation de nouvelles idées, pratiques ou comportements.
Les recherches portant sur l’innovation publique distinguent trois catégories principales d’innovations dans le secteur public : les innovations de produits/services/politiques, les innovations de process ou organisationnelles, les innovations de gouvernance (Schneider, 2007; Walker, 2006; Derircioglu et Audretsch, 2017). Si les premières ont trait aux outputs de l’action publique, les secondes se rapportent aux modes d’organisation et de production des organisations publiques, alors que les troisièmes se réfèrent principalement à la gestion des relations entre l’organisation publique et ses partenaires dans la mise en oeuvre de politiques publiques.
Néanmoins, les classifications utilisées, bien qu’intéressantes, adoptent, selon nous, une approche trop globalisante, notamment en ce qui concerne les innovations organisationnelles et n’intègrent pas la diversité des innovations locales. Celles-ci regroupent en effet des objets très différents qui ont trait aussi bien à des pratiques et des structures (ou modes d’organisation), qu’à des techniques et procédés organisationnels et managériaux. Ces innovations internes sont d’autant plus importantes au niveau local que les tensions fiscales et financières ainsi que les réorganisations de type mutualisation poussent les collectivités locales à repenser en profondeur leur mode d’organisation et de management.
C’est pourquoi, les innovations organisationnelles peuvent être distinguées en deux catégories génériques : les innovations d’organisation ou de structure, les innovations de techniques et procédés managériaux (De Vries et al., 2016). Ainsi, l’innovation organisationnelle en tant que pratique et objet de recherche fait face à une situation paradoxale dans le secteur public. En effet, bien que représentant une part croissante des innovations publiques locales (Carassus et al., 2015), et malgré son influence positive sur la performance organisationnelle (Gieske et al., 2019), l’innovation organisationnelle a longtemps été considérée comme mineure et secondaire, notamment par rapport aux innovation technologiques qui ont concentré la majorité des recherches. Le cas des innovations organisationnelles est ainsi, selon nous, révélateur des faiblesses des recherches passées portant sur la dynamique d’innovation des organisations publiques à savoir un recours trop important aux cadres théoriques issus du privé, ainsi qu’une absence d’analyse différenciée entre les différentes catégories d’innovations publiques locales[2].
Enfin, une dernière limite de ces classifications peut concerner le manque de prise en compte des innovations relatives à la conception et à la mise en oeuvre des politiques publiques, et plus généralement, à leur gouvernance. En effet, le caractère de plus en plus complexe des enjeux territoriaux combiné à une diminution des ressources financières locales poussent les collectivités locales à repenser et inventer de nouvelles formes de production et de gouvernance des politiques publiques, généralement plus ouvertes et collaboratives (Crosby et al., 2017, Favoreu et al., 2016).
Au regard des développements précédents et en accord avec les typologies d’innovation publique de Walker (2006, 2007), De Vries et al. (2016), Torugsa et Arundel (2016) et de Derircioglu et Audretsch (2017), cinq catégories peuvent être distinguées (tableau 1) : les innovations de services, les innovations organisationnelles de structures, les innovations organisationnelles de techniques/pratiques, les innovations technologiques, les innovations portant sur la gouvernance et la stratégie.
Ainsi ces cinq catégories correspondent à l’ensemble des types d’innovations publiques recensés au sein de la littérature correspondante. Ce paragraphe permet de les recenser, de les définir et de mettre en évidence des caractéristiques propres à chacun d’entre eux. Ces derniers seraient ainsi susceptibles d’induire des facteurs d’adoption et d’implémentation différents. En conséquence, en vue de pallier les limites évoquées précédemment, cette recherche vise à isoler ces cinq types d’innovations publiques locales et à les mettre en relation avec les principales catégories de déterminants identifiées par la littérature et décrites ci-après.
Les déterminants de l’innovation publique locale
L’innovation émane généralement de différentes sources (internes et externes à l’organisation), répond à des besoins, des objectifs et des pressions qui sont souvent variés et spécifiques. C’est pourquoi, elle doit être appréhendée comme un concept multidimensionnel dont la dynamique est influencée par une diversité de facteurs internes et externes à l’organisation (Damanpour et Schneider, 2006). Dans ce sens, les recherches sur les antécédents de l’innovation considèrent généralement trois familles principales de facteurs : les facteurs environnementaux ou contextuels, les facteurs organisationnels, et les caractéristiques intrinsèques de l’innovation.
De plus, au regard de la littérature sur les déterminants de l’innovation et du changement organisationnel, deux approches classiques peuvent être distinguées servant de cadre théorique à notre recherche : l’approche volontariste ou intentionnelle d’une part, qui met l’accent sur la nature intentionnelle, rationnelle et planifiée du changement, et l’approche déterministe ou contrainte d’autre part. Dans le premier cas, l’innovation est portée par un agent du changement (Burke, 2002; Scott, 2001) et constitue une réponse ou un choix stratégique à un problème ou une opportunité organisationnelle. Dans cette configuration, le processus est également fonction des caractéristiques de l’innovation elle-même. Alors que dans le second cas, la dynamique d’innovation est contrainte par des caractéristiques environnementales de type socioéconomiques et par des pressions institutionnelles. On retrouve ici des facteurs traités dans le cadre de la théorie de la contingence et la théorie néo institutionnelle.
Ainsi, dans le secteur public, la majorité des recherches se sont focalisées sur les déterminants organisationnels ou environnementaux (Damanpour et Schneider 2008; Walker, 2006; Moynihan 2006, Bernier et al., 2015). Dans ce sens, Damanpour et Schneider (2006) ont mis en évidence l’influence positive des facteurs environnementaux de type croissance économique et démographique, taille du territoire et richesse fiscale sur la décision d’innovation des gouvernements locaux. Ces travaux s’inspirent alors du courant de la contingence qui considère l’innovation comme étant une adaptation des structures de l’entreprise à des modifications environnementales. En conséquence, celle-ci apparait comme une réponse à des enjeux en termes d’opportunités ou de menaces de développement (Walker, 2006, 2007). Au sein de cette catégorie de facteurs environnementaux, de nombreuses recherches, s’inspirant des théories néo-institutionnelles (DiMaggio et Powell, 1983; Weiltz et Shenhav, 2000), se sont ainsi concentrées sur la caractérisation de l’influence des pressions institutionnelles et du contexte politique sur les choix d’innovation. Dans ce cadre, la quête de légitimité et les phénomènes de mimétisme expliqueraient en grande partie la dynamique d’innovation au sein du secteur public.
Par ailleurs, un second groupe de recherches (Damanpour, 1991; Walker, 2007) s’est intéressé à l’influence d’une diversité de caractéristiques organisationnelles, dont la taille, la nature de la structure (organique ou mécaniste), la communication, les ressources, les relations intra organisationnelles, ou l’intégration. Au sein de cette catégorie de déterminants, le rôle et les caractéristiques des managers et des leaders politiques et administratifs ont fait l’objet d’analyses plus poussées (Damanpour et Schneider 2008). Ces dernières ont alors permis de mettre en évidence leur influence différenciée sur la dynamique d’innovation des organisations publiques.
Enfin, plus récemment, des recherches ont porté sur l’analyse de l’influence des caractéristiques perçues de l’innovation sur son processus d’adoption et de diffusion au sein du secteur public (Boyne et al., 2005; Damanpour et Schneider, 2008). En cela, ces recherches s’inspirent des travaux de Rogers (2003), et mettent en évidence l’influence de cinq catégories d’attributs de l’innovation sur son rythme d’adoption et de diffusion : l’avantage relatif, la compatibilité, la complexité, la possibilité d’essai et le caractère observable de l’innovation. Ainsi, plus l’innovation est perçue comme conférant un avantage relatif élevé, comme étant compatible avec les valeurs de l’organisation, et comme pouvant être essayée et observée avant d’être utilisée, plus sa diffusion sera rapide. Damanpour et Schneider (2008) mettent également en évidence l’influence sur la dynamique d’innovation d’attributs tels que le coût de l’innovation, sa complexité et son impact ou avantage.
En synthèse nous présentons ces trois grandes familles de déterminants dans le tableau 2 ci-dessous.
Les limites des recherches actuelles : une approche globalisante et indifférenciée de l’innovation publique
Les recherches sur les déterminants de l’innovation publique présentent au regard de notre objet de recherche trois limites principales. La première d’entre-elles, et la plus importante à nos yeux, tient au fait qu’elles adoptent une approche globalisante et indifférenciée du concept d’innovation publique. Ainsi, sous ce terme sont généralement regroupées une diversité d’innovations qui varient fortement quant à leur nature, leur finalité et leur ampleur. Dans ce sens, la recherche de Acker et Bouckaert (2018) sur les facteurs explicatifs de la survie des innovations publiques est illustrative de cette conception indifférenciée. En effet, si cette recherche intègre et distingue dans sa partie empirique différents types d’innovation publique (administrative, technologique, de gouvernance), elle n’en adopte pas moins une approche globalisante dans ses analyses, ses résultats et dans les implications théoriques et managériales qui en découlent. Il en va de même des travaux de Torugsa et Arundel (2016) sur les innovations publiques interdépendantes, de ceux de Dermircioglu et Audretsch (2017) sur les conditions d’innovations des organisations publiques australiennes ou bien encore des recherches de Lewis et al. (2018) sur la capacité d’innovation de trois métropoles européennes. Ainsi, dans la plupart des cas cités dans cette étude, le concept d’innovation qui est retenu est un agrégat d’innovations marketing, organisationnelle, de service et de gouvernance.
A l’inverse, certaines recherches tendent à généraliser leurs observations sur la base d’analyses ne prenant en compte qu’une seule catégorie d’innovation, généralement de type managérial. Il en va ainsi de travaux de Berry (1994) et de Damanpour et Schneider (2008). Enfin, la troisième limite tient au fait de ne considérer qu’un seul type de déterminant, le plus souvent de type organisationnel ou environnemental à l’instar de Walker (2006) et de Damanpour (1991).
Ainsi, l’absence de véritable conceptualisation de l’innovation publique[3], qui conduit à adopter une conception homogène et indifférenciée, est d’autant plus problématique qu’un certain nombre de recherches mettent l’accent sur les spécificités de certaines catégories d’innovations publiques, suggérant ainsi des conditions d’adoption et d’utilisation différentes. Dans ce sens, les études de Damanpour (2014) et de Tether et Tajar (2008) soulignent les différences profondes existant entre les innovations organisationnelles et les innovations techniques. En effet, la nature tacite des connaissances liées aux innovations organisationnelles (Birkinshaw et al., 2008), leur identification à des individus et donc leur moindre transférabilité, leur caractère systémique (leur influence et leurs ramifications sur d’autres éléments organisationnels), leur impact sur le système social de l’entreprise (Damanpour, 2014) sont autant d’éléments qui rendent leur condition d’implantation et de diffusion plus complexes que les innovations technologiques. Aussi, cette dernière caractéristique – la nature systémique - serait l’une des spécificités fondamentales des innovations organisationnelles. Effectivement, alors que les transformations des innovations technologiques concernent majoritairement le système technique de l’organisation, les innovations organisationnelles génèrent des évolutions profondes des modes de fonctionnement, des relations entre individus, et plus généralement, des interactions sociales internes. De ce fait, en réinterrogeant non seulement les pratiques mais aussi les valeurs et les représentations associées aux routines organisationnelles (Ayerbe et Fonrouge, 2005), ces innovations sont susceptibles de heurter et de remettre en cause le système de normes et de règles sociales en vigueur au sein de l’organisation. Ce risque de confrontation avec le système social interne est d’autant plus élevé dans le secteur public que lesdites innovations puisent leur fondement dans le secteur privé et dans les principes du New Public Management, et qu’elles remettent en cause le mode de fonctionnement bureaucratique et hiérarchique traditionnel, ainsi que les comportements et les routines organisationnelles qui y sont associés (la stabilité, le respect de la règle, etc.)[4].
Par ailleurs, plusieurs auteurs évoquent les spécificités de certaines innovations. C’est le cas, selon Walker (2006), des innovations de gouvernance qui portent sur les modes de définition et d’implantation dépendant de facteurs qui généralement échappent à l’organisation et se situent en dehors de celle-ci. Ces innovations, qui réinterrogent des processus de décision publique, principalement caractérisés par leur complexité et leur degré d’ouverture, se heurteraient à un certain nombre de freins et de blocages internes liés au management de la diversité des parties prenantes. Aussi, pour Torugsa et Arundel (2016) les innovations stratégiques et technologiques se situent en amont des innovations organisationnelles et sont souvent des déclencheurs ou des vecteurs de ces dernières. Enfin, selon Walker (2006), les innovations de services publics ne peuvent se comprendre et s’analyser qu’à travers les relations qu’elles entretiennent avec les usagers. Cette caractéristique implique une intégration de ces derniers lors du processus d’adoption et de diffusion de l’innovation et font du management des interactions et de la participation un facteur clé de succès.
C’est pourquoi, face aux spécificités de chaque type d’innovation publique locale nous pouvons supposer que les déterminants des innovations varieront selon les catégories d’innovations publiques considérées, comme l’illustre notre modèle de recherche (figure 1). En effet, les limites de la littérature et des recherches actuelles (exposées précédemment) nous poussent à nous interroger sur l’influence potentielle de trois types de déterminants (environnementaux, managériaux, et propres à l’innovation) sur l’adoption et l’implantation de cinq catégories d’innovations publiques locales et à tester, dans une démarche exploratoire, la proposition suivante : les catégories génériques de déterminants de l’innovation publique ont une influence différenciée selon la catégorie d’innovation publique locale considérée.
Methodologie et resultats obtenus
Au cours de cette seconde partie, nous confrontons notre cadre d’analyse au terrain public local, à travers la proposition de recherche formulée précédemment. Pour ce faire, nous présentons d’abord la démarche de cette recherche. Ensuite, une seconde sous-partie est dédiée à l’exposé des résultats quantitatifs descriptifs, avant les résultats des trois catégories de déterminants en fonction des cinq types d’innovations publiques locales identifiés.
Une méthodologie quantitative
Pour répondre à notre problématique, nous avons eu recours à un questionnaire national, adressé à des managers territoriaux. Le terrain de recherche est ainsi constitué d’une base de données d’emails de responsables de structures publiques françaises (des collectivités locales et des SDIS notamment), à qui nous avons proposé de répondre à un questionnaire disponible en ligne. Ce dernier comportait une partie signalétique, une partie sur la présentation de l’innovation étudiée, puis une troisième partie sur la mise en oeuvre et ses déterminants[5]. Envoyé en juin 2017, le questionnaire a permis de collecter 118 réponses complètes sur l’ensemble des déterminants des innovations publiques locales. Le tableau 3 expose les caractéristiques des répondants et des innovations pour les questionnaires complets.
Ainsi, les répondants représentent chaque strate de l’administration locale française, à des échelles distinctes et des fonctions différentes, ce qui permet de construire une étude représentative des pratiques d’innovation publique locale. On note que la part des acteurs politiques est faible par rapport aux répondants administratifs, ce qui peut entrainer des opinions orientées sur les questions de leadership.
Les échelles de mesure portant sur les trois types de déterminants identifiés dans la littérature (déterminants internes à la collectivité, environnementaux, et endogènes à l’innovation) ont été testées auprès de 8 collectivités pour apprécier les construits. Les items des échelles de mesures des différents construits sont donnés dans l’annexe 1. L’analyse factorielle montre que les items appartiennent bien à une même composante et valide la segmentation en trois types de déterminants.
Nous avons par la suite étudié les liens entre chacun de ces trois déterminants et les cinq types d’innovations publiques locales identifiées dans la littérature (tableau 1) en recourant aux régressions logistiques multinomiales[6]. Il ne s’agit pas d’utiliser la structure du modèle de régression fourni par le logiciel (en l›espèce SPSS) mais d’identifier l’influence de chaque déterminant sur chaque type d’innovation à partir du Bêta attendu[7] (libellé exp(b), dans le tableau dont un extrait est proposé en annexe 2).
Dans ce cadre, nous présentons les statistiques descriptives pour chacun des déterminants identifiés, puis les statistiques compréhensives du phénomène étudié (tableaux des paramètres des régressions), avant de discuter les résultats qui mettent en avant des facteurs communs mais aussi spécifiques à chaque type d’innovation locale.
Les statistiques descriptives des déterminants
Les statistiques des déterminants des différentes formes d’innovations publiques locales sont présentées dans le tableau 4 ci-dessous.
Les résultats mettent en évidence que si des facteurs de contexte ou d’environnement peuvent expliquer l’adoption d’une innovation publique locale, ils n’apparaissent pas influents pour nos répondants. A l’inverse, des facteurs internes, notamment les leadership administratif et politique, ont une influence relativement plus importante, et les facteurs spécifiques à l’innovation obtiennent les résultats les plus élevés.
Nous cherchons désormais à spécifier l’influence de ces critères pour chacun des types d’innovations publiques locales identifiés dans la revue de littérature.
Des influences différenciées entre les types d’innovation et les trois catégories de déterminants
En nous appuyant sur l’étude des bêtas obtenus par les régressions multinomiales entre le type principal d’innovation (variable dépendante nominale en 5 modalités) et les trois familles de déterminants mobilisées antérieurement (variables explicatives mesurées sur une échelle de Likert en 5 points), nous détaillons nos résultats déterminants par déterminants, par ordre croissant en fonction de leur importance globale. Ainsi, les résultats obtenus laissent percevoir toutefois des degrés d’influence plus ou moins forts à l’intérieur de chaque déterminant.
Les liens entre déterminants environnementaux et innovations publiques locales
Nous commençons par l’analyse de l’influence des déterminants environnementaux pour les cinq types d’innovations publiques locales identifiés (tableau 5).
Premièrement, pour les innovations de service, nous relevons l’importance de facteurs concernant le contexte public local et la situation sociale, alors que la situation géographique et démographique, ainsi que le contexte culturel ne semblent pas influencer ce type d’innovation. Ensuite, les innovations organisationnelles-structurelles apparaissent dépendre du contexte public local, mais aussi des facteurs géographiques et démographiques du territoire. En revanche, les pressions normatives ne paraissent pas influencer ces innovations. A l’inverse, ce dernier facteur joue un rôle important pour les innovations organisationnelles-pratiques. En effet, les contraintes institutionnelles règlementaires (normes, réformes, etc.) influencent fortement l’adoption et la mise en oeuvre de ces dernières innovations. Par ailleurs, les innovations technologiques sont elles aussi fortement déterminées par les pressions normatives, et de manière moins marquée, par la situation sociale et le contexte local culturel. Enfin, pour les innovations stratégiques et de gouvernance, le facteur géographie et démographie du territoire est celui qui semble le plus influençant. De manière moins importante, ces innovations sont également caractérisées en partie par le contexte public local, l’implication du milieu associatif, culturel et citoyen et l’influence d’autres organisations.
Au global, la variable « contexte public local » (reposant sur un critère financier) apparait relativement importante dans les innovations, hormis les innovations technologiques. De plus, la variable « pressions normatives » est particulièrement importante pour les innovations organisationnelles-pratiques et les innovations technologiques.
Les liens entre les déterminants internes et les innovations publiques locales
Dans un second temps, nous avons analysé l’influence des déterminants internes sur chaque type d’innovations (tableau 6).
Ainsi, nos résultats montrent, tout d’abord, pour les innovations de services, des déterminants internes significatifs liés aux ressources mobilisées (à un niveau mitigé), ainsi que la structure de pilotage et le poids d’un leader administratif (à un niveau plutôt important), alors que le leader politique aurait un rôle plutôt réduit dans ce type d’innovation.
Ensuite, en ce qui concerne les innovations organisationnelles, certains facteurs sont significatifs à la fois pour les innovations orientées structure et celles focalisées sur les pratiques, comme les ressources mobilisables, la culture de l’organisation, ou encore la dynamique organisationnelle. En revanche, les innovations organisationnelles de type structurel présentent la spécificité de connaître une forte influence du leadership administratif.
Concernant les innovations technologiques, elles apparaissent elles aussi marquées par l’importance de l’implication d’un acteur administratif (DGS, DGA, etc.), mais également, dans une moindre mesure, par un facteur lié à la dynamique organisationnelle, c’est à dire à l’expérience de la collectivité liée à des innovations antérieures.
Enfin, les innovations stratégiques et de gouvernance paraissent influencées par des déterminants liés à la culture organisationnelle et la quantité de ressources. L’expérience en matière d’innovation, le leadership administratif et l’existence d’une structure de pilotage constituent également des déterminants de ces innovations mais de manière plus mesurée.
Globalement, la quantité de ressources mobilisables et le leader administratif se retrouvent dans une majorité des innovations identifiées. Nous notons aussi que la culture apparait déterminante pour les innovations stratégiques et de gouvernance, et dans une moindre mesure pour les deux types d’innovations organisationnelles. Par ailleurs, la dynamique organisationnelle apparaît dans quatre types d’innovations mais pour un niveau mitigé, ce qui confirme la faible moyenne et l’écart-type obtenu avec les statistiques descriptives. Ce facteur ferait alors référence a un caractère très contingent de l’innovation publique locale.
Les liens entre les déterminants endogènes et les innovations publiques locales
Nos derniers résultats compréhensifs s’intéressent à l’influence des déterminants endogènes, qui sont les plus importants d’un point de vue descriptif, sur les différents types d’innovations publiques locales (tableau 7).
Comme le suggéraient les résultats des statistiques descriptives, nos analyses font état de l’influence importante de plusieurs déterminants intrinsèques aux innovations. Plus précisément, concernant les innovations de service, tout d’abord, les déterminants mis en évidence sont la frugalité, l’adaptabilité, et dans une moindre mesure les avantages relatifs, la complexité et l’observabilité de l’innovation.
Deuxièmement, en ce qui concerne les deux innovations de nature organisationnelle, comme précédemment, certains facteurs paraissent communs à ces deux types d’innovations, tels que les avantages relatifs fournis par les innovations, ou encore leur caractère complexe. En revanche, d’autres déterminants sont exclusifs à l’une de ces deux formes d’innovations. D’une part, l’innovation organisationnelle orientée structure se caractérise de manière spécifique par des déterminants liés à sa compatibilité, c’est à dire l’adéquation de l’innovation avec les valeurs et les pratiques de la collectivité, ainsi que par le caractère adaptable de l’innovation en fonction des besoins des agents. D’autre part, l’innovation organisationnelle focalisée sur les pratiques se distingue par des déterminants liés à la dimension frugale de l’innovation, permettant de faire mieux avec moins, mais aussi de façon moins importante par le caractère observable de l’innovation permettant aux agents d’en connaître les résultats attendus. En complément, nous pouvons souligner que la complexité de ce type d’innovation, lorsqu’elle est perçue comme faible, apparaît comme un facteur important d’engagement.
Ensuite, les innovations technologiques dans le secteur public local semblent dépendantes de facteurs propres liés à l’adaptabilité, à la nature simple ingénieuse et peu coûteuse (caractère frugal), ainsi qu’au degré de complexité perçu par les acteurs. Pour finir, les innovations stratégiques et de gouvernance dépendent, elles, de l’avantage relatif qu’elles procurent, de leur capacité à être observées afin de permettre la compréhension de leurs résultats, ainsi que de leur adaptabilité mais de façon plus mesurée.
Au total, nous retrouvons l’importance du déterminant « avantages relatifs », influant pour les innovations organisationnelles, de services, stratégiques et de gouvernance, même s’il n’est que peu influant dans les innovations technologiques. De plus, quatre types d’innovations parmi les cinq admettent des déterminants relatifs au caractère collectif (compatibilité, adaptabilité) de l’innovation. Enfin, le critère frugal apparaît relativement influant puisque l’économie de moyens associée au développement de l’innovation serait importante selon les répondants dans trois catégories d’innovations. Ce résultat peut être mis en parallèle avec la moyenne élevée obtenue par les items « ressources mobilisées » en déterminant interne à la collectivité et « contexte financier local » en déterminant externe (tableau 4). Dans ce sens, la dimension financière semble importante dans les trois types de déterminants d’innovations avec des particularités pour l’innovation publique locale de type technologique qui semble moins concernée.
Par la suite, nous proposons une synthèse et une discussion de ces résultats au regard de la littérature mobilisée.
Discussion : synthèse et implications de l’étude
Notre étude porte sur l’influence de trois types de déterminants identifiés dans la littérature sur plusieurs catégories d’innovations publiques locales. En cela nos travaux représentent un apport vis-à-vis des recherches existantes (Torugsa et Arundel, 2016; Damanpour et Schneider, 2006; Dermircioglu et Audretsch, 2017, Arundel et al, 2015) qui privilégient une approche globale et uniforme de l’innovation. Notre objectif était de contribuer à une meilleure connaissance de la diffusion des différentes catégories d’innovations publiques locales en nous situant sur les phases initiales du processus et sur leurs antécédents.
En synthèse, le tableau 8 ci-dessous présente les résultats obtenus pour les cinq catégories d’innovations managériales identifiées dans la littérature. Celui-ci nous permet, d’une part, de mettre en exergue des déterminants communs à plusieurs types d’innovations, et d’autre part, de pointer des déterminants apparaissant plutôt comme spécifiques. Par ailleurs, notre étude soulève aussi des questionnements émergent liés à des influences opposées de certains facteurs d’une innovation à l’autre, ou encore à des déterminants qui ne semblent influencer aucune des innovations publiques locales. Nous discutons ces points par la suite.
Les déterminants communs aux innovations publiques locales
En premier lieu, nos résultats indiquent l’importance de certains facteurs communs pour plusieurs innovations développées au sein du secteur public local. Dans ce sens, le facteur « contexte public local » est identifié comme un déterminant important pour les innovations organisationnelles et de services. En effet, les collectivités locales évoluent dans un univers particulièrement contraint et changeant, les poussant à adopter des innovations en vue d’améliorer l’efficacité et l’efficience de l’action publique (Damanpour et Schneider, 2006), mais aussi de promouvoir la qualité des services publics (Boyne et al, 2005; Jung et Lee, 2016). En revanche, en matière de technologies tout comme pour la stratégie et la gouvernance, nous constatons la moindre importance de ce facteur, plutôt conjoncturel. D’une part, les innovations technologiques sont soumises à des pressions normatives, puisqu’elles peuvent être poussées par des injonctions étatiques, des réformes, ou des normes (comme la dématérialisation de la facturation par exemple). D’autre part, les innovations stratégiques et de gouvernance sont davantage impactées par les ressources et les caractéristiques territoriales.
Ensuite, au sein de la catégorie des déterminants internes aux organisations, le facteur « leader administratif » intervient dans trois types d’innovations publiques locales (organisationnelles-structure, de services, et technologiques), et l’item « ressources mobilisables » est présent dans les deux autres formes d’innovations. Ces résultats vont dans le sens de la littérature particulièrement riche sur le rôle et l’action des leaders, comme des acteurs du changement (Walker, 2006) capables également de mobiliser et d’organiser les ressources autour d’une innovation (Howell et Shea, 2001). Notre étude confirme aussi l’importance d’un leadership de type technico-administratif et vont dans le sens des travaux de Bryson et Roering (1988) et de Carassus et al. (2014) sur le leadership administratif. Ces résultats inscrivent ces déterminants dans une approche volontariste du changement et de l’innovation publique (Damanpour et Schneider, 2008; Elenkov et al., 2005). Ainsi, la diversité des freins[11] à l’innovation et au changement dans le secteur public (Bartoli, 2015; Boukamel et Emery, 2018) expliquerait le rôle clé et l’importance de cet acteur.
Enfin, des facteurs propres aux innovations paraissent déterminants pour plusieurs catégories d’innovations publiques locales, à savoir la perception de l’avantage que ces dernières procurent et l’adéquation de l’innovation avec les valeurs de la collectivité. Nous rejoignons dans ce sens Boyne et al., (2005), ou encore Damanpour et Schneider (2008), qui soulèvent l’importance des caractéristiques perçues de l’innovation sur son adoption et sa diffusion. De surcroit, le caractère frugal des innovations revêt un caractère important, ceci semble aller dans le sens du déterminant « contexte financier local » évoqué précédemment, puisque ces deux facteurs ressortent pour les innovations de services, et organisationnelles-pratiques. Effectivement, les collectivités locales sont amenées à privilégier une ingénierie spécifique d’innovation, ayant un impact minime sur les ressources à engager (Radjou et al., 2013), pour « faire mieux avec moins ». Pour finir, nous constatons la nécessité de prévoir l’adaptabilité des innovations, notamment pour celles de services, organisationnelles-structures ainsi que technologiques. En effet, l’interprétation et l’adaptation des changements par les acteurs qui en sont les destinataires a fait l’objet d’une littérature riche, questionnant les modalités d’appropriation des changements (De Vaujany, 2006).
Des facteurs spécifiques à certains types d’innovations
Par ailleurs, des déterminants paraissent influencer spécifiquement certaines innovations publiques locales. D’abord, les innovations de services sont les seules à dépendre de la situation sociale (pauvreté, inégalités, tensions sociales, etc.). La dimension territoriale est en effet beaucoup plus marquée pour des innovations qui sont en prise directe avec les besoins et les demandes des usagers. De plus, de manière spécifique, ce type d’innovation dépend de la mise en place d’une structure de pilotage dédiée. Dans ce sens, de plus en plus de collectivités locales sont engagées dans des démarches d’interactions et de co-développement des services publics avec les citoyens/usagers/parties prenantes, dans le cadre d’une gouvernance collaborative et ouverte (Chia et al., 2008). Ceci confirme les analyses de Walker et al. (2002) sur les spécificités des innovations de services publics liées aux interactions entretenues, lors de la mise en oeuvre, avec des acteurs externes. Ainsi, une structure de pilotage dédiée semble être un facteur clé dans le management des interactions, et dans la capacité de l’organisation à générer une innovation collaborative en lien avec le milieu local.
Deuxièmement, concernant les innovations organisationnelles-structures, nous constatons des déterminants spécifiquement liés à la situation géographique et démographique du territoire, ou encore à la compatibilité de l’innovation avec les valeurs de la collectivité. Les efforts de mutualisation, de regroupement de ressources, de réorganisation de services et de directions territoriales, opérés par certaines collectivités afin de lutter contre la dispersion de moyens et les effets de doublons (Marcou, 2015), pourraient expliquer le poids de ces facteurs démographiques et géographiques. De plus, il semble que la mise en oeuvre d’innovations organisationnelles liées à de nouvelles structures, soient logiquement assez dépendantes des caractéristiques, des pratiques et des valeurs d’une organisation.
En matière d’innovations organisationnelles focalisées sur les pratiques, nous relevons des spécificités liées aux pressions normatives et coercitives, mais aussi à l’importance d’une culture interne favorable à la prise de risque, l’initiative et la créativité. Ce dernier déterminant semble en effet important pour ce type d’innovation, fondé sur les techniques managériales et les pratiques de gestion. Aussi, les logiques de mimétisme, d’influence normative et de pressions institutionnelles (DiMaggio et Powell, 1983; Weiltz et Shenhav, 2000), semblent pousser à l’adoption de ces innovations. De même, les innovations technologiques sont également influencées positivement par les contraintes institutionnelles réglementaires (réformes, normes). Ces résultats vont dans le sens des travaux de Moon (2002) et de ceux de Meijer et Bolivar (2015) qui mettent en avant les effets de mimétisme, les logiques de rhétorique et les pressions normatives associés au développement du e government, de la digitalisation des services publics et de la smart city.
En ce qui concerne la cinquième catégorie, les innovations stratégiques et de gouvernance, nous avons mis en évidence des déterminants spécifiques liés aux caractéristiques démographiques et géographiques de l’environnement local et à l’observabilité de l’innovation. Effectivement, l’importance des ressources et des expertises que nécessitent ce type d’innovations font qu’elles sont souvent associées à des collectivités de grande taille. Ainsi l’environnement et les caractéristiques du territoire semblent déterminer en partie la capacité d’innovation des collectivités locales dans ce domaine, tout comme la possibilité pour les acteurs locaux de percevoir les résultats attendus de la mobilisation de technologies innovantes.
Des résultats émergents contre intuitifs
Pour finir, cette étude soulève certains questionnements. En premier lieu, il apparaît que l’influence de certains facteurs soit différenciée selon les innovations (influence nulle ou influence forte). En effet, ce phénomène émerge de l’analyse des résultats des déterminants endogènes. Dans ce sens, les facteurs « observabilité » et « frugalité » obtiennent un niveau 1 pour certaines innovations et un niveau 4 pour d’autres. De même, les facteurs « avantages relatifs » et « compatibilité » ont un niveau 2 pour des innovations et un niveau 4 pour d’autres. Cette spécificité nous parait importante à souligner pour les recommandations managériales découlant de notre étude. Ainsi, pour les innovations organisationnelles de type structure, les déterminants « observabilité » et « frugalité » n’ont pas d’influence, mais l’observabilité sera importante pour une innovation stratégique, et la frugalité influencera favorablement les innovations technologiques.
En second lieu, nous revenons sur la faible importance de facteurs qui ne semblent que peu influant sur les innovations publiques locales. C’est notamment le cas de déterminants à dimension plutôt politique, que sont le contexte politique, l’influence des réseaux, ou bien le leadership politique, dont les résultats étaient plutôt faibles dans les statistiques descriptives (tableau 3). De surcroît, les régressions n’ont pas fait apparaître d’influence que ce soit pour le contexte politique ou bien les réseaux, et mentionnent une faible influence du leadership de type politique. Si cette faible influence du leadership politique dans tous les types d’innovations publiques locales, peut paraître surprenante, elle peut trouver son explication à la fois dans la faible part d’acteurs politiques dans les répondants à notre étude, mais aussi dans l’avènement de processus de plus en plus collaboratifs et ouverts associés à ces formes d’innovations. La conduite des démarches stratégiques territoriales, et plus généralement le management stratégique public, reposent en effet de moins en moins sur un leader public unique ou une organisation publique pivot, mais de manière croissante sur des réseaux collaboratifs intra et inter organisationnels (Crosby et al., 2017) et sur un leadership partagé.
Conclusion
Cette recherche permet à la fois de conforter et de préciser notre proposition selon laquelle les catégories de déterminants ont une influence différenciée sur les types d’innovations publiques locales. Jusqu’à présent, peu de recherches ont abordé l’ensemble des déterminants de l’innovation publique. Pour celles qui l’ont fait, elles n’ont toutefois pas permis de mettre en perspective ces déterminants avec la diversité des innovations publiques locales.
Ainsi, cette recherche revêt un intérêt théorique, en apportant un éclairage sur les facteurs d’adoption propres aux différents types d’innovations publiques locales. De plus, nous distinguons au sein des catégories de déterminants, des facteurs spécifiques conduisant à une analyse plus détaillée des antécédents de l’innovation publiques locales. Sur le plan managérial, des préconisations prenant la forme de facteurs clés de succès, peuvent être mis en avant selon les innovations identifiées, afin de guider les collectivités locales dans les étapes d’adoption et de mise en oeuvre de leurs innovations. En effet, en complément d’une ingénierie simple et peu coûteuse (caractère frugal), et du développement d’un leadership administratif, certaines préconisations apparaissent comme spécifiques aux innovations développées. De surcroît, la communication sur les différentes caractéristiques de l’innovation -notamment en termes de finalités et d’avantages - s’avère fondamentale afin de réduire les barrières et oppositions au changement. Ainsi, au regard de cette étude et s’agissant des innovations de services, nous pouvons par exemple préconiser aux organisations publiques locales d’engager des processus de gouvernance collaboratifs et ouverts, ou encore de développer leur appréhension des besoins sociaux. Nous pouvons aussi recommander, pour les innovations organisationnelles-pratiques, de veiller à développer la capacité de la collectivité à promouvoir une culture d’innovation, permettant aux agents de prendre des risques et des initiatives.
Notre recherche témoigne des spécificités de l’innovation publique qui s’expriment à travers le poids de déterminants qui aident à dépasser les barrières ou les freins propres au changement dans le secteur public. Ainsi, l’importance du leadership administratif s’expliquerait par la nécessité de lutter contre des freins culturels et comportementaux, caractéristiques du secteur public (Boukamel et Emery, 2018), et des rigidités structurelles et organisationnelles liées au modèle bureaucratique. Les dispositifs de pilotage s’avèrent déterminants pour gérer la complexité d’un processus d’innovation qui inclut une diversité de parties prenantes et qui, à l’instar des processus de décision publique, est largement ouvert sur son environnement. Sur cette thématique, des études qualitatives pourraient se concentrer sur la caractérisation de la nature de l’influence de ces déterminants sur les barrières à l’innovation publique. Ainsi, des prolongements pourraient porter sur les stratégies et les actions mises en place par les leaders afin de modifier les freins culturels et comportementaux. Il serait aussi intéressant d’étudier l’influence de dispositifs tels que les laboratoires d’innovation sur la capacité d’innovation des agents publics et sur le développement d’une ambidextrie organisationnelle.
Au-delà de ces intérêts scientifiques et managériaux, cette étude présente toutefois certaines limites. En effet, notre recherche exploratoire ne constitue qu’une première appréhension des liens entre déterminants et types d’innovations publiques locales. Aussi, les résultats se fondent sur les perceptions des répondants des impacts de chaque déterminant. De plus, nous nous sommes concentrés ici sur les phases d’adoption et de mise en oeuvre des innovations, ce qui pourra nous amener, dans le futur et à l’instar de Birkinshaw et al. (2008), à analyser l’influence des facteurs que nous avons identifiés sur d’autres étapes du cycle de vie d’une innovation, notamment celles de l’institutionnalisation et de l’appropriation, voire de l’abandon.
Enfin, une recherche longitudinale de type qualitatif permettrait d’introduire une dimension historique et d’entrer dans le détail du processus d’adoption et de diffusion des innovations publiques locales. Ce type d’étude permettrait ainsi d’appréhender et d’explorer les interactions et les complémentarités susceptibles d’exister entre les différents types d’innovations publiques (Favoreu et al., 2018).
Parties annexes
Annexes
Annexe 1. Résultat de la factorisation portant sur les déterminants
Annexe 2. Extrait du tableau d'estimation des paramètres, issu de la régression multinomiale, pour l'innovation « Organisationnelle-structure » et les déterminants internes[12]
Notes biographiques
Christophe Favoreu, docteur en sciences de gestion, est professeur HDR à TBS Business School au sein de laquelle il enseigne la stratégie et dirige la spécialisation stratégie et conseil ainsi que la chaire du même nom. Il est associé à l’équipe de recherche Management et Territoires du Centre de Recherche et d’Études en Gestion (CREG) et de la chaire OPTIMA. Ses recherches, qui portent sur les thèmes du management stratégique public et de l’innovation publique, ont fait l’objet de nombreuses publications dans des revues académiques nationales et internationales.
Christophe Maurel, docteur en sciences de gestion, est professeur en gestion à l’université d’Angers au sein de laquelle il enseigne le contrôle de gestion et dirige le master d’administration de entreprises et Comptabilité contrôle audit (CCA). Il est membre du laboratoire Groupe de recherche angevine en économie et management (GRANEM). Ses recherches, qui portent sur les thèmes du contrôle de gestion public, management stratégique public et de l’innovation publique, ont fait l’objet de nombreuses publications dans des revues académiques nationales et internationales.
Yoann Queyroi, docteur en sciences de gestion, est chercheur au sein de l’université de Pau et des Pays de l’Adour, IAE Pau-Bayonne. Il est membre de l’équipe de recherche Management et Territoires du Centre de Recherche et d’Études en Gestion (CREG) et de la chaire OPTIMA. Ses recherches portent sur la gestion de la performance publique locale, et l’innovation publique. Il enseigne également au sein du master management des collectivités locales de l’IAE Pau-Bayonne.
Pierre Marin, docteur en sciences de gestion, est maître de conférences en sciences de gestion à l’université de Pau et des Pays de l’Adour, en poste à l’IAE Pau-Bayonne dont il est directeur délégué à l’innovation pédagogiques et aux relations entreprises. Il enseigne principalement le management de projet et l’innovation managériale. Il est responsable d’un master international. Il est membre du Centre de Recherche et d’Études en Gestion (CREG) et de la chaire OPTIMA. Ses recherches, qui ont fait l’objet de plusieurs communication et publications nationales et internationales, portent sur la gestion de la performance publique locale, et l’innovation publique.
Notes
-
[1]
La question de la diffusion des innovations a été souvent appréhendée, dans le secteur public, sous l’angle de la transposition de connaissances acquises, via l’étude dans le secteur privé, d’innovations à dominante technologique. Ce qui représente selon nous à la fois une limite sectorielle mais aussi une limite liée à la nature de l’innovation elle-même.
-
[2]
Ou à l’inverse une focalisation sur un type d’innovation particulier qui conduit à généraliser.
-
[3]
Et de l’innovation publique locale en particulier.
-
[4]
Les innovations organisationnelles à dominante privée induisent pour les agent publics une transformation des comportements, des valeurs, de l’organisation administrative et des modes d’interactions internes. (Bouckaert et Halligan, 2008).
-
[5]
Le questionnaire peut être envoyé au lecteur sur simple demande email aux auteurs de l’étude.
-
[6]
La régression logistique multinomiale est une extension de la régression logistique aux variables qualitatives à trois modalités ou plus.
-
[7]
La multi-colinéarité des items a été vérifiée et certains déterminants ont été ôtés de la régression (par exemple dans l’étude des déterminants externes, la proximité géographique, réseau universitaire, valeur sociétale, contexte politique et scientifique sont supprimés). Le tableau d’estimation des paramètres fournit les Bêtas, pour lesquels une association significative (appartenant à l’intervalle de confiance de 95 %) existe (annexe 2).
-
[8]
Les questionnaires mobilisent une échelle de Likert à 5 points. Les modalités en sont les suivantes : 1 – « Pas du tout d’accord », 2 – « Pas d’accord », 3 – « Ni pas d’accord, ni d’accord », 4 – « D’accord », 5 – « Tout à fait d’accord ». La moyenne théorique est donc de 3.
-
[9]
Légende : “n” fait référence aux modalités de réponse dans l’échelle de Likert, soit n1 pour niveau 1 « pas du tout » à n5 pour le niveau « tout à fait ». Les résultats font référence aux estimations des betas (exp(B) les plus élevés dans l’intervalle de confiance à 95 %) fournis dans le tableau d’estimation des paramètres de la régression par le logiciel SPSS.
-
[10]
L’item « pressions normatives » fait référence à la question sur les pressions institutionnelles, et l’item « contexte public local » fait référence à la question sur les contraintes financières.
-
[11]
Selon Boukamel et Emery (2018), aux freins de type organisationnel/structurel - liés au mode de fonctionnement hiérarchique, bureaucratique et vertical des organisations publiques- s’ajoutent des freins liés à l’écosystème politique et administratif ainsi que des freins culturels et comportementaux (aversion au risque, faible engagement pour l’apprentissage, flexibilité réduite, etc.). Pour les auteurs, ces derniers représentent les barrières les plus importantes à l’innovation.
-
[12]
Remarque : seul un extrait est proposé car les lignes du tableau (proposées ici par le logiciel SPSS) sont de 550, soit 5 innovations*22variables*5modalités de réponse).
Bibliographie
- Abrahamson, E. (1991). « Managerial Fads and Fashions : The Diffusion and Rejection of Innovations », The Academy of Management Review, Vol. 16, N° 3, p. 586-612.
- Acker, W., Bouckaert, G. (2018). « What Make Public Sector Innovation Survive ? An explorative Study of the Influence of Feedback, accountability and Learning », International Review of Administrative Sciences, Vol. 84, N° 2, p. 248-268.
- Alcouffe, S., Berland, N., Levant, Y. (2003). « Les facteurs de diffusion des innovations managériales en comptabilité et contrôle de gestion : une étude comparative ». Comptabilité - Contrôle - Audit, T9, 3, p. 7-26.
- Ansari, S.M., Fiss, P.C. & Zajac, E.J. (2010). « Made to fit : how practices vary as they diffuse », Academy of Management Review, Vol. 35, N° 1, p. 67-92.
- Arundel, A., Casali L., Hollanders, H. (2015). « How European Public Sector Agencies Innovate : The use of bottom-up, policy-dependent and knowledge-scanning innovation methods », Research Policy, Vol. 44, N° 7, p. 1271-1282.
- Ayerbe, C., Fonrouge, C. (2005). « Les transitions entre innovations : études de cas et proposition d’une grille d’interprétation », Finance Contrôle Stratégie, Vol. 8, N° 2, p. 39-64.
- Bernier, L., Hafsi, T., Deschamps, C. (2015). « Environmental Determinants of Public Sector Innovation : A study of innovation awards in Canada », Public Management Review, Vol. 17, N° 6, p. 834-856.
- Birkinshaw, J.; Hamel, G.;Mol, M.J. (2008). « Management Innovation », Academy of Management Review, Vol. 33, N° 4, p. 825-845.
- Boukamel, O., Emery, Y. (2018). « Les freins culturels à l’innovation dans l’administration publique : spécificités helvétiques », Gestion et management public, Vol. 6, N° 4, p. 25-43.
- Boyne, G. A. Law, J S.; Walker R. M. (2005). « Explaining the Adoption of Innovation : An Empirical Analysis of Public Management Reform », Environment and Planning : Government and Policy, Vol. 23, N° 3, p. 419-435.
- Brunel, S. (2015). « L›urbanisation africaine peut-elle être durable ? », Les grands dossiers des Sciences Humaines, Vol. 40, p. 34-35.
- Burke, W.W. (2002). Organization Change : Theory and Practice, Thousand Oaks, Sage Publications.
- Carassus, D., Favoreu, C., Gardey, D. (2014). « Factors that determine or influence managerial innovation in public contexts : The case of local performance management », Public Organization Review, Vol. 14, N° 2, p. 245-266.
- Chia, E., Torre, A., Rey-Valette, H. (2008). « Conclusion : Vers une « technologie » de la gouvernance territoriale ! Plaidoyer pour un programme de recherche sur les instruments et dispositifs de la gouvernance des territoires ». Norois. Environnement, aménagement, société, N° 209, p. 167-177.
- Crosby, B. C., Hart, P., Torfing, J. (2017). « Public value creation through collaborative innovation », Public Management Review, Vol. 19, N° 5, p. 655-669.
- Damanpour, F. (1991). « Organizational Innovation : A Meta-Analysis of Effects of Determinants and Moderators », Academy of Management Journal, Vol. 34, N° 3, p. 555-590.
- Damanpour, F. (2014). « Footnotes to Research on Management Innovation », Organization Studies, Vol. 35, N° 9, p. 1265-1285.
- Damanpour, F.,Schneider, M. (2006). « Phases of the Adoption of Innovation in Organizations : Effects of Environment, Organization and top Managers », British Journal of Management, Vol. 17, p. 215-236.
- Damanpour, F.;Schneider, M. (2008). « Characteristics of Innovation and Innovation Adoption in Public Organizations : Assessing the Role of Managers », Journal of Public Administration Research and Theory, Vol. 19, N° 3, p. 495-522.
- De Vaujany, F.X. (2006). « Pour une théorie de l’appropriation des outils de gestion : vers un dépassement de l’opposition conception-usage », Management & Avenir, Vol. 3, N° 9, p. 109-126.
- De Vries, H., Bekkers, V., Tummers, L. (2016). « Innovation in the Public Sector : a Systematic review and Future Research Agenda », Public Administration, Vol. 94, N° 1, p. 146-166.
- De Vries, H., Tummers, L., Bekkers, V. (2018). « A Stakeholder Perspective on Public Sector Innovation : Why Position Matters », International Review of Administrative Sciences, Vol. 84, N° 2, p. 269-287.
- Dermircioglu, M.A, Audretsch, D.B. (2017). « Conditions for Innovations in Public Sector Organizations », Research Policy, Vol. 46, N° 2, p. 1681-1691.
- DiMaggio, P.J., Powell, W.W. (1983). « The Iron Cage Revisited : Institutional Isomorphism and Collective Rationality in Organizational Fields », American Sociological Review, Vol. 48, N° 2, p. 147-160.
- Dubouloz, S. (2013). « Les barrières à l’innovation organisationnelle : le cas du Lean Management », Management International, Vol. 17, N° 4, p. 121-144.
- Elenkov D.S., Judge M., Wright, P. (2005). « Strategic Leadership and Executive Innovation Influence : An International Multi-Cluster Comparative Study », Strategic Management Journal, Vol. 26, N° 7, p. 665-682.
- Favoreu, C., Maurel, C., Carassus, D., Marin, P. (2018). « Influence and Complementarity of Follow-on Managerial Innovations within a Public Organization », Public Organization Review, Vol. 19, N°3, p. 345-365.
- Favoreu, C., Carassus, D., Maurel, C. (2016). « Strategic management in the public sector : a rational, political or collaborative approach ? », International Review of Administrative Sciences, Vol. 82, N° 3, p. 435-453.
- Fitzgerald, L., Ferlie E., Wood M.,Hawkins C. (2002). « Interlocking Interactions, the Diffusion of Innovations in Health Care », Human Relations, Vol. 55, N° 12, p. 1429-49.
- Gauzin-Muller D. (2015). « Des écoquartiers aux smart cities », Les grands dossiers des Sciences Humaines, Vol. 40, p. 36-42.
- Gieske, H., George, B., VanMeerkerk, I., VanBuuren, A., (2020). « Innovating and optimizing in public organizations : does more become less ? », Public Management Review, Vol. 22, N° 4, p. 475-497.
- Hofstede, G. (1981), Management control of public and not-for-profit activities, Accounting, Organizations and Society, Vol. 6, N° 3, p. 193-211.
- Howell J.M., Shea C.M. (2001). « Individual Differences, Environmental Scanning, Innovation Framing, and Champion Behavior : Key Predictors of Project Performance », Journal of Product Innovation Management, Vol. 18, N° 1, p. 15-27.
- Jung, C. H., Lee G. (2016). « Organizational Climate Leadership, Organizational Size and Aspiration for Innovation in Government Agencies », Public Performance & Management Review, Vol. 9, N° 4, p. 757-782.
- Lewis, J. M., Ricard, M. R., Klijn, E.H. (2018). « How Innovation Drivers Networking and Leadership Shape Public Sector Innovation Capacity », International Review of Administrative Sciences, Vol. 84, N° 2, p. 288-307.
- Marcou, G. (2015). « L’État, la décentralisation et les régions », Revue française d’administration publique, Vol. 4, N° 156, p. 887-906
- Marrel, G., Payre R. (2006). « Temporalités électorales et temporalités décisionnelles. Du rapport au temps des élus à une sociologie des leaderships spatio-temporels », Pôle Sud, N° 25, p. 71-88.
- Meijer, A., Bolivar, M. P. R. (2016). « Governing the smart city : a review of the literature on smart urban governance », International Review of Administrative Sciences, Vol. 82, N° 2, p. 392-408.
- Meyer, J. W., & Rowan, B. (1977). « Institutionalized organizations : Formal structure as myth and ceremony ». American journal of sociology, 83(2), p. 340-363.
- Moynihan, D.P. (2006). « Managing for Results in State Government : Evaluating a Decade of Reform », Public Administration Review, Vol. 66, N° 1, p. 78-90.
- Oural, K. (2015). « L’innovation au pouvoir ! Pour une action publique réinventée au service des Territoires », Rapport établi par Akim Oural avec l’appui du secrétariat général pour la modernisation de l’action publique.
- Paugam, S. (2005). Les formes élémentaires de la pauvreté, Presses Universitaires de France, 276 p.
- Radjou, N., Prabhu, J., Ahuja, S. (2013). L’innovation jugaad. Redevenons ingénieux !, Paris, Éditions Diateino.
- Rogers, E.M. (2003). Diffusion of innovations, New York : Free Press, 5ème ed.
- Schneider, M. (2007). « Do attributes of Innovative Administrative Practices influence their adoption ? An exploratory Study of US local Government », Public Performance & Management Review, Vol. 30, N° 4, p. 590-614.
- Scott, W.R. (2001). Institutions and organizations, Thousands Oaks, Sage Publications.
- Sminia, H., Van Nistelrooij, A.T. (2006), « Strategic Management and Organization Development : Planned Change in a Public Sector Organization », Journal of Change Management, Vol. 6, N° 1, p. 99-113.
- Teece D., Pisano G. (1994). « The Dynamic Capabilities of Firms : an Introduction ». Industrial and Corporate Change. Vol. 3, N° 3 p. 537-556.
- Tinacci-Mossello M., Dini, F. (1989). « Innovation et communication sociale dans les districts industriels », Revue internationale P.M.E., Vol. 2, N°2-3, p. 229-251.
- Torugsa, N. A., Arundel, A. (2016). « Complexity of Innovation in the Public Sector », Public Management Review, Vol. 18, N° 3, p. 392-416.
- Van Dooren, W., Thijs, N. (2010). « Paradoxes of Improving Performance Management (Systems) In Public Administration », EIPASCOPE, p. 15-19.
- Walker, R. (2006). « Innovation Type and Diffusion : An Empirical Analysis of local Government », Public Administration, Vol. 84, N° 2, p. 311-335.
- Walker, R. (2007). « An Empirical evaluation of Innovation Types and Organizational and Environmental Characteristics : Toward a configuration Frameworks », Journal of Public Administration Research and Theory, Vol. 18, N° 2, p. 591-615.
- Weitz, E., Shenhav, Y. (2000). « A Longitudinal Analysis of Technical and Organizational Uncertainty in Management Theory », Organization Studies, Vol. 21, N° 1, p. 243-266.
Parties annexes
Biographical notes
Christophe Favoreu, Ph.D. in Management Sciences with accreditation to supervise research, is professor at “TBS Business School”. He teaches strategy and directs the strategic and advisory department as well as the chair connected. He is associated with the research team “Management and Territories” of the Centre d’Etude et Recherche en Gestion (CREG) and the OPTIMA Chair. His research, which focuses on the themes of public strategic management and public innovation, has been the subject of numerous publications in national academic journals.
Christophe Maurel, PhD in Management Sciences, is a Professor in management at the University of Angers in which he teaches management control and directs the Master of Business Administration and Control Accounting & Audit (CCA). He is a member of the “Groupe de recherche angevine en économie et management” (GRANEM). His research, which focuses on the topics of public management control, public strategic management and public innovation, has been the subject of numerous publications in national and international academic journals.
Yoann Queyroi, PhD in management sciences, is a researcher at the University of Pau and Pays de l’Adour, IAE Pau-Bayonne. He is a member of the research team Management and Territories of the Centre de Recherche et d’Etudes en Gestion (CREG) and the OPTIMA Chair. His research focuses on local public performance management, and public innovation. He also teaches performance, research and innovation.
Pierre Marin, PhD in management sciences, is a senior lecturer in management sciences at the University of Pau and Pays de l’Adour, at the IAE Pau-Bayonne. He is deputy director of the Management School, in charge of educational innovation and business relations. He teaches mainly project management and managerial innovation. He is responsible for an international master’s degree. He is a member of the Centre de Recherches et d’Etudes en Gestion (CREG) and the OPTIMA Chair. His research, which has been the subject of several national and international publications and publications, focuses on public management in local authorities, public performance and public innovation.
Parties annexes
Notas biograficas
Christophe Favoreu, Ph.D. en ciencias de la gestión, capacitado para dirigir investigaciones, es profesor en la “TBS Business School”. Ch. Favoreu enseña estrategia y dirige la especialización de estrategia y la cátedra de estrategia. Dr. Favoreu forma parte del laboratorio “Centre de Recherche et d’Etude en Gestion” de la Universidad de Pau et des Pays de l’Adour, y de la Cátedra OPTIMA. Su trabajo se concentra en los de gestión estratégica pública e innovación pública, ha sido objeto de numerosas publicaciones en revistas académicas nacionales e internacionales.
Christophe Maurel, PhD en ciencias de la gestión, es profesor de gestión en la Universidad de Angers en la cual enseña control de gestión y dirige el Máster en Administración de Empresas y Auditoría Contable. Es miembro del Laboratorio de Economía y Gestión del Grupo de Investigación Angevin (GRANEM). Su trabajo se centra en los temas de control de gestión pública, gestión estratégica pública e innovación pública. Su trabajo se encuentra en numerosas revistas académicas nacionales e internacionales.
Yoann Queyroi, doctor en ciencias de la gestión, es investigador en la Universidad de Pau et des Pays de l’Adour, IAE Pau-Bayonne. Es miembro del laboratorio “Centre de Recherche et d’Etude en Gestion” de la Universidad de Pau et des Pays de l’Adour, y de la Cátedra OPTIMA. Sus investigaciones se centran en el nuevo management público local y la innovación pública. También enseña en el Master Management de las insituciones públicas del IAE Pau-Bayonne.
Pierre Marin, PhD en ciencias de la gestión, es profesor titular de ciencias de la gestión en el instituto de management (IAE Pau-Bayonne) de la Universidad de Pau et des Pays de l’Adour. Es el subdirector de innovación pedagogica y relaciones insitucionales. Enseña principalmente gestión de proyectos e innovación. Es responsable de una maestría internacional. Es miembro del laboratorio “Centre de Recherche et d’Etude en Gestion” de la Universidad de Pau et des Pays de l’Adour, y de la Cátedra OPTIMA. Sus investigaciones, en varias publicaciones nacionales e internacionales, se centran en la gestión del desempeño público local y la innovación pública.