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L’éternité en héritage : enquête sur les secrets de la résilience des organisations  de Alain Bloch et Isabelle Lamothe[Notice]

  • Pascal Gaudron et
  • Aziz Mouline

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  • Pascal Gaudron
    Chaire de management stratégique international Walter J.-Somers, HEC MONTREAL

  • Aziz Mouline
    Centre de Recherche en Economie et Management, UMR CNRS 6211, UNIVERSITE de RENNES 1

« En survivant aux crises successives qu’elles traversent, certaines organisations sont capables de faire de leur passé un héritage qui leur ouvre l’avenir ». On peut lire cet extrait dans la quatrième de couverture de l’ouvrage d’Alain Bloch et d’Isabelle Lamothe!. La relation entre les chocs exogènes (crises, mutations technologiques, etc.) et les trajectoires des organisations a fait l’objet de nombreuses publications. Pourquoi et surtout comment certaines organisations défient le temps et ces chocs ? Où puisent-elles leurs capacités à s’adapter en permanence aux turbulences de plus en plus fréquentes, de plus en plus profondes ? Cette résilience, cette capacité à résister est donc au coeur de l’ouvrage d’A. Bloch et d’I. Lamothe. Dans une précédente recherche, il a été démontré que les plus grandes entreprises familiales se distinguaient de leurs concurrentes non familiales par une résilience supérieure face aux crises. Le livre d’A. Bloch et d’I. Lamothe s’interroge sur l’extension du modèle explicatif proposé aux entreprises non familiales avec pour objectif ambitieux de déchiffrer la nature profonde des capacités qui permettent cette résilience et de montrer ainsi que les entreprises familiales n’ont pas le monopole de la pérennité. L’étude s’appuie sur une analyse et des interviews auprès des dirigeants de 19 entreprises centenaires non familiales. Les secrets de la résilience sont d’emblée annoncés dans l’ouvrage : « la résilience organisationnelle, qui renvoie à la capacité de faire face à l’inattendu voire à l’imprévisible, a pu être explicitée autour de trois dimensions structurantes : la première qui consiste à supporter et à absorber les chocs, la seconde qui permet ensuite le renouvellement de l’organisation et enfin, au-delà du rebond, la troisième qui vise à l’appropriation positive de l’épisode par un processus d’apprentissage. Encaisser, rebondir, apprendre ». Selon les auteurs, les organisations ambidextres ont cette faculté d’encaisser, de rebondir et d’apprendre. Elles savent mettre en oeuvre des compétences distinctives et des capacités dynamiques quasiment opposées. Vous avez dit ambidextrie ? Concept qui remonte aux travaux de March (1991), l’un des premiers auteurs à avoir fait la distinction au sein d’une organisation entre l’exploration innovante et l’exploitation traditionnelle qui vise l’efficience dans les champs de prédilection de l’organisation en question. Selon March, l’exploration est la recherche de nouvelles idées, de nouveaux marchés, de nouvelles relations. Elle inclut des notions telles que recherche, variation, prise de risques, flexibilité, découverte et innovation. March insiste sur le rôle de la diversité humaine dans l’entreprise pour entretenir des activités d’exploration et la création de nouvelles connaissances. Ainsi, l’exploration consiste à prendre de nouvelles directions en s’appuyant sur l’expérimentation, sur de nouvelles interactions voire sur une prise de risque. Une organisation peut ainsi développer de manière simultanée des activités d’exploitation et d’exploration pour devenir ambidextre. L’objectif est, dans la mesure du possible, d’assurer un transfert des innovations générées par les activités d’exploration vers les activités d’exploitation. Au niveau théorique, Tuschman et O’Reilly (2013) distinguent trois types d’ambidextrie : Tuschman et O’Reilly ont identifié des antécédents favorables à la mise en oeuvre de l’ambidextrie au sein d’une organisation : un environnement incertain en évolution qui amène l’organisation à s’interroger sur sa structure, une compétition croissante entre établissements, la disponibilité de ressources (car la mise en oeuvre simultanée d’activités d’exploration en plus de celles d’exploitation nécessite des moyens) et une grande taille. Notons que, bien souvent, dans une organisation ambidextre, exploration et exploitation ne constituent pas seulement deux activités mais bel et bien deux cultures intégrées simultanément dans une même organisation. Pour concilier ces deux cultures et relever les nombreux défis, les théoriciens des organisations ambidextres insistent sur l’indispensable autonomie qu’il faut donner aux « exploreurs » pour réussir …

Parties annexes