Le terme paratraduction forgé par José Yuste Frías ouvre de nouvelles perspectives théoriques, didactiques et professionnelles en établissant un lien entre théorie et pratique de la traduction et de l’interprétation. Ce terme a donné lieu à la fondation du Groupe de recherche Traduction & Paratraduction (T&P) à l’Université de Vigo en 2005. La notion de paratexte du théoricien français Gérard Genette est à l’origine du terme traductologique de paratraduction qui préconise, d’une part, la prise en compte des dispositifs paratextuels du texte de départ pour en permettre la compréhension indispensable dans tout processus de traduction ou d’interprétation de qualité et, d’autre part, la participation active du traducteur-interprète à la production des paratextes du texte d’arrivée. Cet ouvrage a donc pour ambition de remédier à une conception de la traduction conçue uniquement et exclusivement comme un transfert entre langues et cultures, en nous invitant à réfléchir sur ce qui se passe dans les marges, en marge et au seuil de la traduction. En paratraduction, la marge comporte à la fois les éléments verbaux et non verbaux (visuels, sonores, voire olfactifs) qui se trouvent autour du texte (soit le péritexte selon Genette 1987) et en dehors du texte (soit l’épitexte) et qui contribuent à construire le sens tant du texte de départ que du texte d’arrivée en accord avec les normes, les croyances et les valeurs de deux sociétés données, celle de départ et celle d’arrivée. La paratraduction redécouvre l’espace liminal où se trouve le traducteur, entre le texte de départ et le texte d’arrivée, pour y (re)construire les différents types de relations transtextuelles entre ces deux textes grâce à leurs paratextes respectifs. La perspective paratraductologique implique ainsi une pratique de la pensée du seuil dans une gymnastique de l’« entre » qui s’impose à chaque démarche stratégique du processus traductif (p. 57-60). En somme, la paratraduction s’occupe de tout ce qui n’avait pas encore été considéré comme de la traduction au sens strict mais qui, en réalité, en assure la réception : la paratextualité. La révolution numérique ne fait que consolider la pertinence de cette perspective paratraductive dans une traductologie plus proche des pratiques intersémiotiques quotidiennes de la communication transculturelle du xxie siècle où s’estompent les frontières aussi bien entre texte et paratexte qu’entre péritexte et épitexte (p. 37-38). Le volume s’ouvre sur un chapitre introductif signé par les directeurs. Il revient sur le contexte dans lequel la notion de paratraduction a été forgée, sur sa portée heuristique et sur les divers axes de recherche du Groupe T&P et du Programme doctoral international en Traduction & Paratraduction : Philosophie et traduction, Image et traduction, Littérature et traduction, Linguistique et traduction, Mémoire et traduction, Migration et traduction ; Métissage, identité et traduction, Anthropologie et traduction, Écran et traduction, et, finalement, Secteurs stratégiques de la traduction. La grande capacité de travail dont fait preuve le Groupe T&P se distingue notamment par la production de publications audiovisuelles dans trois émissions Web-TV : Zig-Zag, Exit et Pilules T&P. Dans le deuxième chapitre, José Yuste Frías apporte des précisions importantes sur l’origine genettienne de la notion de paratraduction et propose une mise au point théorique visant à lui redonner sa profondeur critique. Le chercheur principal du Groupe T&P démontre à maintes reprises qu’il y a beaucoup plus qu’une simple affinité entre traduction et paratextualité. Il rappelle que l’acte de traduire implique toujours la création d’une marge. Celle-ci déclenche l’expérience du seuil dont la prise de conscience suppose des implications sociologiques, culturelles, politiques, éthiques et idéologiques. La nouveauté théorique de la notion de paratraduction dans les Études de Traduction se trouve dans …
Parties annexes
Bibliographie
- Genette, Gérard (1987) : Seuils. Paris : Seuil.
- Heger, Heinz (2002) : Los hombres del triángulo rosa. Memorias de un homosexual en los campos de concentración nazis. (Traduit de l’allemand par Eduardo Knörr Argote) Madrid : Amaranto Editores.
- Heger, Heinz (1991) : Gli uomini con il traingolo rosa. La tragedia di un omosessuale nei campi di concentramento della Germania nazista. (Traduit de l’allemand par Gabriele Lenzi) Torino : Sonda.
- Heger, Heinz (1981) : Les hommes au triangle rose : journal d’un déporté homosexuel, 1939-1945. (Traduit de l’allemand par Alain Chouchan en collaboration avec Marie-Claude Sanjuan) Paris : Persona.
- Heger, Heinz (1972) : Die Männer mit dem rosa Winkel. Hamburg : Merlin.
- Levi, Primo (2019) : Se isto é un home. (Traduit de l’italien par Xoán Manuel Garrido Vilariño) Vigo : Edición Xerais.
- Levi, Primo (1987a) : Si esto es un hombre. (Traduit de l’italien par Pilar Gómez Bedate) Barcelona : Muchnik.
- Levi, Primo (1987b) : Si c’est un homme. (Traduit de l’italien par Martine Schruoffeneger) Paris : Julliard.
- Levi, Primo (1986) : Se questo è un uomo. Torino : Einaudi.
- Marx, Karl et Engels, Friedrich (1848) : Manifest der Kommunistischen Partei. London : Hirschfeld.