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On ne traduit pas pour rechercher son identité mais pour la perdre tout en en retrouvant une autre. C’est l’enrichissement de la rencontre.

Yuste Frías 2013 : 128

1. Introduction

La vision du monde d’un cinéaste est reflétée dans ses films. Ainsi, en utilisant certaines techniques cinématographiques, celui-ci choisit de montrer des images plutôt que d’autres, d’agencer ces images, d’orienter le mouvement de la caméra et de construire à la fois une réalité cinématographique et un univers imaginaire. Les films d’animation de silhouettes dans l’oeuvre de Michel Ocelot forment un corpus de récits originaux qui s’inspirent de l’imaginaire des contes traditionnels, tout en les revisitant. Or, malgré l’utilisation d’archétypes ancrés dans l’inconscient collectif, l’univers imaginaire des contes n’est pas universel. À cet égard, José Yuste Frías constate que :

Chaque système symbolique de chaque culture transforme la lecture, l’interprétation et la traduction de l’image. Ces différents systèmes symboliques laissent des traces profondes et nombreuses dans la conception et la définition de l’image ; dans les usages des formes et des couleurs symboliques qui sont celles d’aujourd’hui mais pas celles d’hier ni celles de demain ; dans les différents codes sémiotiques et rituels symboliques de chaque culture ; dans le lexique de chaque langue ; dans l’imaginaire de chaque texte et de chaque image à traduire.

Yuste Frías 2011d : 258

Peut-on traduire l’image d’un film ? « Dans quelle mesure l’image est-elle universelle ? Y a-t-il des limites à l’universalité de l’image ? » (Yuste Frías 2011d : 256). Selon Yuste Frías (2011d : 261), « traduire l’image, c’est faire de la paratraduction ». Ainsi donc, le traducteur doit non seulement paratraduire l’image d’un film, mais il doit également paratraduire l’imaginaire implicite dans l’image et ses symboles. Ce ne sera pas une tâche aisée, car l’image n’est pas universelle et elle peut avoir un sens très différent d’une langue-culture à l’autre, mais l’aspect visuel dégage l’essence même du sens. En contexte audiovisuel, la lecture, l’interprétation et la (para)traduction dépendent du degré de compréhension du réseau de sens symbolique tissé entre l’image, l’imaginaire, les éléments textuels et les éléments paratextuels.

Dans le présent travail, nous aborderons, en premier lieu, les liens que tissent le concept de paratraduction et l’imaginaire, puis, dans un deuxième temps, nous déterminerons quels sont les signes visuels, verbaux, sonores, filmiques qui composent le message audiovisuel et de quelle manière ils construisent le sens symbolique. Dans le cadre méthodologique de la paratraduction qui prend en compte l’image dans la traduction audiovisuelle comme un élément paratextuel à part entière, nous analyserons un corpus de films d’animation de silhouettes sous-titrés en espagnol.

2. Imaginaire et paratraduction

L’approche théorique de ce travail est fondée sur la paratraduction qui prône l’importance de l’image et de l’imaginaire lors du transfert du sens en traduction. Yuste Frías (2011d : 260) remarque que l’image guide la lecture, oriente la réception et engendre des représentations imaginaires. Il convient d’apporter quelques précisions concernant le terme imaginaire. Selon Yuste Frías (2011a : 36-39), le terme imaginaire renvoie à l’ensemble des images « matérielles » de nature non verbale (images visuelles telles que les dessins, illustrations, photographies) et des images « mentales » de nature verbale (images mentales implicites dans chaque signe linguistique) qui forment une « entité iconotextuelle » et construisent des structures cohérentes et dynamiques qui produisent un sens symbolique à lire, interpréter et traduire par le traducteur. Le traducteur ne traduit pas des langues ou des mots, mais toujours des imaginaires véhiculés par des images mentales ou verbales et des images matérielles ou non verbales :

Il n’y a d’imaginaire que si un ensemble d’images et récits forment une totalité cohérente productrice de sens donnant lieu à différentes interprétations selon le lieu, le moment, la langue et la culture. Les images sont des produits culturels à géométrie variable dont le sens change suivant la localisation spatio-temporelle.

Yuste Frías 2011a : 37

Si l’étude de l’imaginaire porte sur les relations images-textes, il est essentiel de savoir lire et interpréter l’image pour une traduction symbolique de l’imaginaire présent dans les textes. C’est d’ailleurs toute la problématique que nous souhaitons aborder dans la présente étude :

  • Quelles sont les « images mentales » et les « images matérielles » qui construisent le sens symbolique dans l’imaginaire des films de Michel Ocelot ?

  • Comment le sous-titrage de ces films d’animation véhicule-t-il le sens symbolique ?

Dans les lignes qui suivent, nous apporterons des éléments de réponse depuis la notion de paratraduction. Comme l’affirme Yuste Frías (2010 : 293), le terme paratraduction « veut rendre à l’image et à tout aspect visuel des paratextes la place méritée dans la construction du sens symbolique en traduction ». Or, si « l’image en traduction est un symbole et pas un signe », l’enjeu de la paratraduction est dès lors la transposition du « sens symbolique » (Yuste Frías 2011b : 264). Par conséquent, c’est toute la problématique du sens de l’image qui se pose en paratraduction. Comme les structures de l’imaginaire ne sont pas figées de la même manière dans chaque culture, ce n’est pas tant le signifié du signifiant du signe mais plutôt le sens du symbole qui fait apparaître le sens symbolique de l’image. Pour Rastier (2003 : 213), « le sens suppose une contextualisation maximale aussi bien par la langue (c’est tout le texte) que par la situation qui se définit par une histoire et une culture ». Le sens est donc contextuel et culturel. Or, selon De Los Reyes Lozano et Chaume Varela (2021 : 1), le texte audiovisuel est « un ensemble sémiotique où le sens est le produit du croisement et de l’interaction de plusieurs signes, structurés et organisés dans divers codes de signification […]. Les problèmes spécifiques de la traduction audiovisuelle sont alors liés à – et peuvent s’expliquer par – l’interaction entre ces codes et les dialogues (le code linguistique). » Le traducteur qui devient paratraducteur va au-delà des mots à traduire, au-delà du textuel pour franchir le « seuil » et entrer dans le paratextuel afin de déceler le sens symbolique de l’image. Mais qu’entendons-nous par sens symbolique en contexte audiovisuel ? Est-ce la même chose de traduire un texte que de paratraduire un paratexte à l’écran ?

Y con paratextos « paratraducidos » – que no « traducidos » – queremos expresar que los paratextos se transfieren teniendo en cuenta la naturaleza material de los mismos : no es lo mismo trasladar un elemento paratextual puramente verbal que un elemento paratextual icónico, verbo-icónico, sonoro, musical, material u olfativo […] Los paratextos del texto de partida van a ser trasladados usando diferentes grados de manipulación de los mismos con el fin de adaptarlos, recrearlos, reimaginarlos, reformularlos, transmutarlos, transformarlos o transcrearlos completamente.

Yuste Frías 2022 : 43

Face aux contraintes propres au message audiovisuel, la paratraduction propose une démarche qui permet au traducteur d’interpréter et de traduire non seulement les éléments textuels, mais également les éléments paratextuels qui composent l’imaginaire présent dans chaque entité iconotextuelle (texte-image) qui véhicule le sens symbolique à l’écran. Le modèle de Yuste Frías qui s’inscrit dans un cadre intersémiotique définit ainsi le processus de traduction audiovisuelle :

Traducir para la pantalla nunca puede concebirse sólo y exclusivamente como un proceso puramente interlingüístico del texto que se va a escuchar (doblaje) o se va a leer (subtitulado) en pantalla, sino también como un conjunto de procesos intersemióticos y multisemióticos implícitos en la traducción de los múltiples paratextos que se ven y se miran, se oyen y se escuchan no sólo dentro de la pantalla (los peritextos) sino también fuera de ella (los epitextos).

Yuste Frías 2011c : 63

Nous pouvons ainsi distinguer deux types de paratextes à l’écran : les péritextes et les épitextes. Dans le tableau 1, ci-après, José Yuste Frías (2011c : 64) présente un récapitulatif de ce vaste filet paratextuel :

Tableau 1

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Pour les besoins de notre étude, nous nous focaliserons sur les péritextes à l’écran sans pour autant négliger l’importance des épitextes qui sont constitués par les espaces de production, de fonctionnement et de diffusion des films qui touchent les aspects artistiques, techniques et financiers, et par l’ensemble des agents intermédiaires comme les producteurs, distributeurs, exploitants, techniciens, directeurs de casting, adaptateurs, directeurs de doublage, etc., sans oublier, évidemment la figure centrale de l’auteur-réalisateur.

3. Cadre méthodologique

Les spécialistes en traduction audiovisuelle, Gambier (1996 : 17), Gottlieb (1997 : 146), Chaume Varela (2004), Díaz Cintas et Remael (2007 ; 2021), Cornu (2008 ; 2014), Pedersen (2011), entre autres, reconnaissent la complexité du message audiovisuel constitué de différents codes de signification qui proviennent de quatre canaux sémiotiques : non verbal visuel (image), non verbal sonore (musique, effets sonores), verbal sonore (dialogues) et verbal visuel (sous-titres et autres éléments verbaux visuels [affiches, lettres et autres messages écrits apparaissant à l’écran]). Selon Yuste Frías :

El texto audiovisual y multimedia se construye con ayuda de códigos de significación diferente de los puramente lingüísticos : sonidos, músicas, melodías, gestos, junto con las distintas realizaciones de la imagen (colores, símbolos, marcas, señales, fotografías, iconos, pictogramas, paisajes, planos, etc.) constituyen elementos paratextuales que resultan ser tan importantes o más que las unidades puramente lingüísticas.

Yuste Frías 2011c : 63

Dès lors, les principaux défis liés à la traduction audiovisuelle dépendront de l’interaction entre ces codes de signification et du degré de compréhension du réseau de sens tissé entre les éléments textuels et tous les éléments paratextuels. Étant donné que ces éléments paratextuels interagissent avec « l’unité iconotextuelle » constituée par le couple texte-image (Yuste Frías 2012 : 127), nous avons établi une distinction entre les signes verbaux et les signes non verbaux, d’une part, et les signes qui constituent l’interaction entre les personnages (signes dialogiques) et ceux qui construisent le film (signes filmiques), d’autre part (Franzelli 2013 : 37). Les signes dialogiques peuvent être de nature verbale ou non verbale et comprennent les signes sonores (dialogues) et visuels (sous-titres et autres éléments verbaux visuels [affiches, lettres et autres messages écrits apparaissant à l’écran]). Parmi les signes dialogiques non verbaux se trouvent les péritextes iconiques (images, regards, gestes, mouvements corporels, etc.) et sonores (intonation, volume de la voix, vitesse d’élocution, prosodie, accents, pauses). Les signes filmiques désignent tous les éléments qui ne sont pas véhiculés par les personnages, à savoir les péritextes iconiques (les décors, les couleurs, les vêtements, les bijoux et les accessoires) et sonores (la musique, les chansons, les effets sonores et les bruits). Enfin, nous avons ajouté les techniques cinématographiques qui ont également de l’importance pour la mise en scène filmique. Nous pouvons résumer l’ensemble de ce que nous considérons comme textes et péritextes à l’écran dans le tableau 2, ci-dessous :

Tableau 2

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Le but de notre démarche consiste à trouver la relation entre les signes dialogiques et filmiques et leur convergence pour construire le sens symbolique. Il est question d’analyser comment les péritextes iconiques et sonores constituent le sens et examiner si les sous-titres sont révélateurs de ce sens symbolique. Partant du cadre méthodologique paratraductif évoqué plus haut, et par le biais d’une analyse contrastive des dialogues originaux en français et des sous-titres correspondants en espagnol, nous souhaitons attirer l’attention sur les interactions sémiotiques qui s’établissent « entre différents codes sémiotiques producteurs ou régulateurs de sens d’ordre symbolique qui entrent en relation intersémiotique et multisémiotique pour transmettre ensemble le sens » (Yuste Frías 2011c : 59). Dans le cas du sous-titrage, cette approche intersémiotique s’impose. Il convient de rappeler que le sous-titrage consiste en une reformulation écrite de la bande-son où les dialogues oraux sont transposés à l’écran (Díaz Cintas et Remael, 2007). Il s’agit d’une « traduction sélective » (Gambier 2007 : 65) qui privilégie l’essentiel de l’information. Cependant, Cornu (2008 : 15) nous rappelle que le traducteur devra prendre en compte « les rapports indissociables qui unissent les trois éléments dont dépend le sous-titrage : l’image, le son, les dialogues ». Le sous-titre est considéré comme un élément essentiel de l’image et constituerait même une « image dans l’image » (Hamus-Vallée 2021 : 41). Néanmoins, le but ultime du sous-titrage est de faciliter la compréhension du film.

Les sous-titres sont une réussite tant qu’ils donnent accès à l’univers fictif ; dès qu’ils transgressent exagérément le rapport à cet univers et empêchent le spectateur d’y croire, ils ne remplissent plus une de leurs fonctions cardinales : permettre le passage dans un autre monde.

Gambier et Lautenbacher 2010 : 12

4. Analyse du sous-titrage espagnol des contes ocelotiens

Afin d’appliquer cette approche méthodologique, notre choix a porté sur les films d’animation de silhouettes de Michel Ocelot. Selon Jouvanceau (2004), les films de silhouettes sont des films d’animation mettant en scène des figures noires articulées qui sont inspirées du théâtre d’ombres. Cette technique a des contraintes à toutes les étapes du processus filmique : décor, cadrage, plans, montage. Il faut donner aux silhouettes l’impression de réalité et de profondeur. S’agissant de silhouettes noires, c’est à travers leurs gestes et leurs mouvements que les personnages des contes ocelotiens transmettent leurs émotions au spectateur : « les visages restent aveugles et les personnages accompagnent les paroles d’une gestuelle surexpressive » (Kawa-Topor 2004 : 11). Pour Michel Ocelot, les voix des personnages et les dialogues sont également essentiels, c’est la raison pour laquelle il est le premier à introduire la parole dans les films de silhouettes (Jouvanceau 2004 : 203). C’est avec les contes de Ciné Si (1989)[1] que Michel Ocelot crée ses premiers films d’animation de silhouettes noires sous forme de contes. Depuis les silhouettes en papier découpé de ses débuts jusqu’aux silhouettes numériques en 3D relief des Contes de la nuit (2011)[2] ou de son dernier long métrage, Le Pharaon, le Sauvage et la Princesse (2022)[3], Michel Ocelot a fait des silhouettes noires sa « marque de fabrique ». Le cinéaste déploie depuis 30 ans une variété de procédés artistiques et techniques au service de son style qui font de lui un « artificier de l’imaginaire »[4]. Au fil de sa carrière, Michel Ocelot a su alterner les techniques d’animation en les adaptant aux contraintes de production. L’oeuvre du cinéaste est marquée par l’expérimentation technique dans la continuité esthétique tout comme son approche de l’écriture des contes. D’après Ben Nun :

S’inspirant du répertoire traditionnel mondial, ses contes animés partagent leurs motifs et ressorts narratifs. L’auteur y insuffle sa touche personnelle, détournant des motifs familiers et révélant les mécanismes des contes traditionnels pour mieux interroger les conventions et les messages qu’ils véhiculent.

Ben Nun 2021 : 128

Le réalisateur renoue avec l’imaginaire collectif classique et les fonctions traditionnelles des contes en célébrant « la victoire du faible sur la force » (Propp 1928/2015), mais il y ajoute son imaginaire personnel. À travers ses contes, Michel Ocelot revisite différentes époques historiques afin de partager avec le public la richesse artistique des cultures du monde : l’Égypte antique, la civilisation aztèque, les estampes japonaises de Hokusai, les mandalas tibétains, les enluminures et les gravures sur bois du Moyen Âge, les sculptures africaines ou les arts décoratifs européens du xviiie siècle, qu’il met en valeur par ses dessins, ses découpages, la sobriété des silhouettes noires et la luxuriance de couleurs des décors. Michel Ocelot se décrit volontiers comme « cinéaste-conteur » et ses films « ne sont pas des histoires pour s’échapper, mais pour ouvrir les yeux sur des choses réelles » (Ben Nun 2021 : 94). En effet, bien qu’il soit de nature merveilleuse, le conte participe du réel car il fait référence à des objets, à des coutumes, à des valeurs et à la mémoire historique. Dans son ouvrage pionnier, Les structures anthropologiques de l’imaginaire[5], Durand (1960/1976) indique que l’imaginaire fait le lien entre le symbolique et le réel. L’enfant a besoin de se créer un monde imaginaire afin d’apprendre à vivre avec la réalité qui l’entoure et faire face à toutes les épreuves et aléas de la vie. La distance entre la représentation et la réalité qu’il interprète selon son imaginaire personnel amplifie la portée symbolique des contes de Michel Ocelot. Les films de silhouettes ocelotiens constituent un corpus privilégié car ils intègrent les représentations qui forment l’imaginaire dans l’espace symbolique du conte de fées et l’imaginaire caractéristique de l’artiste.

Dans les extraits choisis, nous nous occuperons d’analyser les signes dialogiques verbaux sonores (dialogues) et les signes dialogiques verbaux visuels (sous-titres) et la relation que ceux-ci entretiennent avec les signes filmiques et leurs péritextes iconiques et sonores respectifs dans le but de déceler le sens symbolique sous-jacent dans chaque conte. Tous les exemples seront présentés sous forme de tableaux numérotés qui contiennent les dialogues originaux en français ou version originale (V.O.), et les sous-titres en espagnol ou version sous-titrée en espagnol (V.S.E.) fournie par l’Institut français de Madrid. Les images correspondant aux extraits choisis apparaissent sous forme de figures numérotées également. Concernant les choix de traduction dans les sous-titres, nous suivrons la taxonomie de Díaz Cintas et Remael (2007 : 247) et la typologie de Gambier (2007 : 64-65).

Le premier conte que nous avons choisi – Le Sauvage[6] – (figure 1) est extrait du dernier long métrage de Michel Ocelot, Le Pharaon, le Sauvage et laPrincesse (2022 ; voir la note 3). Le scénario dialogué, aimablement fourni par l’auteur (tableau 3), est le scénario de travail rédigé avant l’élaboration du scénarimage ou story-board qui constitue « une étape centrale dans l’écriture, premier moment où l’ensemble du film est mis en images » (Ben Nun : 2021 : 158). Inspirée d’un conte auvergnat d’Henri Pourrat, l’histoire se déroule au Moyen Âge dans le château d’un seigneur féodal. En jouant à la balle, le fils du châtelain découvre un prisonnier et, ému par la tristesse de ce père qui vit loin de sa fille, l’aide à s’évader. Lorsque le seigneur apprend que le prisonnier s’est évadé, il condamne à mort le geôlier.

Figure 1

Le Sauvage

Le Sauvage

Le Pharaon, le Sauvage et la Princesse, 2022

© Ocelot

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Tableau 3

Le Sauvage

Le Sauvage

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Dans la figure 1, nous remarquons l’importance de la mise en scène et du péritexte iconique : les regards, les gestes, les mouvements corporels et la position des personnages, entre autres, permettent au spectateur et au traducteur de se plonger rapidement dans l’action de la scène. Rappelons que la lecture et l’interprétation de l’image, en tant que péritexte iconique (Yuste Frías 2011b : 265), sont déterminées par la coprésence de deux éléments : le punctum et le studium (Barthes 1980 : 48). Si nous observons attentivement l’image ci-dessus, le punctum se situe dans la partie gauche où apparaît l’enfant qui se tient face aux trois autres personnages. La main de l’enfant indique le mouvement qui part d’un détail de l’image et qui est dirigé vers le regard du spectateur, « ponctuant » la lecture et l’interprétation de l’image. Pas de mouvement de caméra, c’est l’oeil du spectateur, le studium qui balaie la scène et oriente le regard et le sens que le spectateur-paratraducteur porte sur l’image. La décoration de la grande salle de style gothique richement meublée évoque le Moyen Âge, où la pierre grise contraste avec le fond bleu de l’arc de l’entrée afin de mettre en valeur la figure chétive de l’enfant. L’emploi d’un plan séquence général focalise l’attention sur les personnages (images matérielles) et sur leurs propos (images mentales) : le châtelain, au visage anguleux, les poings serrés, hurle de colère : « Par le diable, geôlier, tu vas payer de ta vie cette trahison épouvantable. » Devant lui, le geôlier aux formes arrondies, terrorisé, crie son innocence : « Ce n’est pas moi ! Non ! Pitié ! Non ! » Le bourreau, cagoulé et le torse bombé, obéissant aux ordres du seigneur, amène brutalement le geôlier vers le gibet, mais s’arrête brusquement face à l’enfant qui, d’un simple geste de la main, s’interpose et remet toute la situation en question : « Père, ce n’est pas lui qui a donné les clés. » Tous les éléments visuels, textuels et paratextuels entrent en interaction intersémiotique et convergent vers le sens symbolique à travers le geste de l’enfant : le refus de l’injustice, des préjugés et de la condamnation à mort.

Figure 2

La Princesse des Diamants

La Princesse des Diamants

Princes et Princesses, 2000

© Ocelot

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Tableau 4

La Princesse des Diamants

La Princesse des Diamants

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Le conte La Princesse des Diamants[7] nous transporte au Moyen Âge. Une princesse est prisonnière dans un dôme de verre gardé par un dragon et un prince devra, dans un temps limité, trouver tous les diamants d’un collier pour la délivrer, sinon il sera transformé en fourmi. Dans ce conte, les signes filmiques (techniques cinématographiques) dirigent le regard du spectateur et orientent le sens du message : le travelling de la caméra accompagne le mouvement de va-et-vient constant de la princesse au prince ce qui aide le spectateur à comprendre immédiatement la situation. Le décor est un autre signe filmique important (figure 2) : le dôme de verre avec le vitrail historié qui détaille le sortilège de la princesse constitue le péritexte iconique ainsi que la couleur rose, symbole de douceur et de féminité (Pastoureau et Simonnet 2005 : 115), qui envahit l’image lorsque la princesse apparaît. Dans le tableau 4, nous remarquons que les sous-titres ne se plient pas aux normes de réduction (Díaz Cintas et Remael 2007 : 147). Selon ces normes, lorsqu’un personnage fait son apparition à l’écran, il convient d’éviter de le nommer. Or, le terme « príncipe » apparaît à trois reprises alors que le prince est bien visible. Dans le premier sous-titre, l’image matérielle et mentale du « sablier », dont l’équivalent en espagnol est « reloj de arena », est neutralisée. Les termes « sable » et « sablier » sont remplacés par le terme plus général « tiempo » en utilisant une tactique d’expansion (Gambier 2007 : 65). De plus, la substitution du verbe « écouler » par « acabar » suppose la perte de la notion d’écoulement du temps qui passe, inexorable. Par conséquent, ce sous-titre est trop bref et témoigne d’un décalage par rapport au péritexte sonore. En effet, le contraste entre le débit lent de la princesse n’est pas respecté alors qu’il marque le rythme de toute la séquence, tout en contrastant avec la musique trépidante, voire stressante qui simule la lutte contre le temps. Ce sous-titre ne révèle donc pas complètement le sens symbolique du conte.

Figure 3

Le pont du petit cordonnier

Le pont du petit cordonnier

Dragons et Princesses, 2010

© Ocelot

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Figure 4

Le pont du petit cordonnier

Le pont du petit cordonnier

Dragons et Princesses, 2010

© Ocelot

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Tableau 5

Le pont du petit cordonnier

Le pont du petit cordonnier

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Le conte Le pont du petit cordonnier[8] se situe dans un village d’Europe centrale, où un jeune cordonnier rêve d’un trésor caché sous une statue sur le pont Charles, à Prague. Sa fiancée le pousse à quitter le village à la recherche du trésor. Il ne trouve rien mais le gardien du pont lui avoue qu’il a fait, lui aussi, un rêve étrange : il a vu un trésor caché sous un pommier. De retour chez lui, il découvre un immense trésor dans son jardin. Dans le tableau 5, nous remarquons que le sous-titrage est assez proche de la langue d’origine. Le sous-titre qui contient l’expression « bottier à la ville », traduite littéralement par « botero de la ciudad », ne révèle pas le sens figuré implicite que contient l’expression originale. En effet, en utilisant cette tournure métaphorique, la cliente se moque du jeune cordonnier trop pauvre pour s’acheter un cuir de qualité comme le ferait un bottier et qui rêve de pouvoir travailler un jour à la ville. Une option paratraductive qui respecterait le sens figuré implicite et permettrait au spectateur hispanophone de mieux saisir le ton sarcastique de la cliente serait « zapatero real » ou « zapatero de la reina ». En outre, dans le sous-titre suivant, le terme « galoche », désignant une bottine en cuir à semelle de bois très utilisée en Auvergne, a été traduit par « zapatos » alors que l’image matérielle visible à l’écran ne correspond pas à des « chaussures » (figure 4). Si l’on tient compte du péritexte iconique et du mouvement de caméra (gros plan) sur l’objet que la cliente tient à la main, on peut aisément (para)traduire « galoches » par « bottines ». À travers ces choix traductifs, nous pouvons observer clairement que le péritexte iconique est essentiel pour le sous-titreur. Concernant le sens symbolique du conte, l’image matérielle du trésor est un symbole de richesse intérieure et de révélation. Dans les contes de fées, « les processus intérieurs sont traduits par des images visuelles » (Bettelheim 1976 : 472). Le petit cordonnier voyage jusqu’à Prague pour comprendre qu’il est riche par son talent et l’amour de sa fiancée.

Figure 5

La Fille-Biche et le Fils de l’Architecte

La Fille-Biche et le Fils de l’Architecte

Les Contes de la Nuit, 2011

© Ocelot

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Figure 6

La Fille-Biche et le Fils de l’Architecte

La Fille-Biche et le Fils de l’Architecte

Les Contes de la Nuit, 2011

© Ocelot

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Tableau 6

La Fille-Biche et le Fils de l’Architecte

La Fille-Biche et le Fils de l’Architecte

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Avec ce conte original, La Fille-Biche et le Fils de l’Architecte[9], Michel Ocelot nous livre un récit du Moyen Âge qui rend hommage à l’architecture de Viollet-le-Duc grâce à la magie du numérique et des effets spéciaux. Deux jeunes amants, Thibaut et Maud, sont heureux jusqu’au jour où leur amour est menacé par un puissant sorcier qui enferme Maud dans une tour pour l’épouser de force. Le jour de la cérémonie nuptiale, Thibaut réussit à libérer Maud et ils s’enfuient à cheval dans la forêt. Le sorcier, fou de jalousie, transforme la jeune fille en biche. Désespéré, le jeune homme décide d’aller trouver la fée des caresses afin de briser le sortilège. Dans cette scène (figure 5), le péritexte iconique, notamment le langage corporel, les gestes, les mouvements, la distance et la position des personnages, « contribuent à créer un ensemble, à construire tout un réseau de significations » (Pettit 2008 : 111). En effet, nous pouvons observer le cortège nuptial formé par le sorcier qui ouvre la marche et Maud qui le suit, tête baissée, escortée par deux files de gardes armés : ici, le péritexte iconique reflète la domination du sorcier face à la soumission de la jeune fille. Dans la figure 6, le comportement du sorcier, perché en haut de la tour, qui étend les bras en tournant sur lui-même laisse présager de terribles conséquences car des ondes lumineuses jaillissent de ses mains dans toutes les directions. Concernant les sous-titres (tableau 6), ceux-ci sont traduits suivant la tactique de la compression (Gambier 2007 : 64) : « Je renonce à t’avoir » / « Renuncio a tí ». La traduction de l’expression péjorative « freluquet d’amoureux » par « mequetrefe de tu amante » a particulièrement attiré notre attention. À notre avis, le sous-titre espagnol véhicule un sens légèrement différent car « freluquet » fait référence à une personne mince et frêle alors que mequetrefe ajoute un aspect péjoratif sur le plan physique et moral. Le sens symbolique du conte est véhiculé par l’imposante figure dominatrice du sorcier (image matérielle) et son langage péjoratif (image mentale) qui représente la violence sexiste face à l’amour pur et innocent des deux amants.

Figure 7

La Sorcière

La Sorcière

Princes et Princesses, 2000

© Ocelot

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Tableau 7

La Sorcière

La Sorcière

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Dans le conte La Sorcière[10], un roi promet la main de sa fille à celui qui réussira à pénétrer dans le château imprenable de la sorcière. Alors que de nombreux princes échouent, un jeune paysan frappe à la porte du château et demande la permission d’entrer. La sorcière l’accueille aimablement et lui fait visiter son château. Instruite et créative, elle possède une bibliothèque universaliste, un atelier où elle fabrique ses inventions, un jardin où elle cultive des légumes et une rivière souterraine (figure 7). Dans cet extrait (tableau 7), nous constatons que la stratégie de l’expansion est à nouveau utilisée dans les sous-titres : l’expression « faire tourner les moulins à eau » qui fait référence au système hydraulique inventé par la sorcière est rendue par « desviar mis millas de agua » qui fait allusion au détournement de l’eau, ce qui révèle que l’image mentale est interprétée de manière différente, excluant les équivalents « molino de agua » ou « noria hidráulica ». Nous trouvons d’autres exemples de choix traductifs orientés vers la tactique de l’expansion (Gambier 2007 : 65) dans les sous-titres suivants : « Il reçoit le soleil qu’il faut à travers un jeu de miroirs » / « Obtiene la luz que necesita de un grupo de espejos ». À travers ses inventions, la sorcière symbolise les savants et les artistes qui, à la fin du Moyen Âge, présageaient les valeurs humanistes de la Renaissance : le développement culturel, intellectuel et moral de l’être humain. Les valeurs que le conte nous transmet symboliquement sont la tolérance et le respect des autres, l’acquisition des savoirs et des arts accessibles à tous, femmes et hommes, sans distinction. Le péritexte sonore véhicule également ces valeurs humanistes car les instruments qui résonnent sont ceux qui étaient utilisés à l’époque de la Renaissance : viole, violon, clavecin, flûte et hautbois.

Figure 8

Prince et princesse

Prince et princesse

Princes et Princesses, 2000

© Ocelot

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Figure 9

Prince et princesse

Prince et princesse

Princes et Princesses, 2000

© Ocelot

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Tableau 8

Prince et princesse

Prince et princesse

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Cet exemple illustre bien le fait que les différentes cultures ne partagent pas forcément les mêmes imaginaires comme nous l’avons indiqué auparavant. Le conte Prince et Princesse[11] met en évidence que « les signes sont culturellement marqués, d’une culture à l’autre, d’une autre façon d’organiser la réalité, que le public interprète selon son propre univers de référence » Pettit (2008 : 111). Dans un parc romantique, au clair de lune, un prince et une princesse se déclarent leur passion réciproque. Lorsque le prince demande un baiser à sa belle et qu’ils s’embrassent, il se transforme en crapaud. Les signes filmiques (décors, vêtements, accessoires et bijoux) sont ici très importants car ils se combinent pour former un ensemble significatif : le parc avec des saules pleureurs, les rosiers, les vêtements des personnages : costume, chapeau et épée pour le prince et robe avec col en dentelle, rubans et perles pour la princesse (figure 8). En Espagne, le prince charmant qui incarne l’idéal masculin est le « príncipe azul ». Pastoureau et Simonnet (2005 : 23) soulignent que le bleu est la couleur de l’infini, du lointain et du rêve car associée au ciel, à l’azur, mais aussi au romantisme : […] « La poésie romantique allemande célèbre le culte de cette couleur si mélancolique . Le sens symbolique est à nouveau placé sous l’influence de l’image car le punctum se situe sur le « prince-crapaud » qui devient « príncipe-rana » [prince-grenouille] (figure 9). En Espagne, le conte des frères Grimm, Der Froshkönig oder der eiserne Heinrich[12], paru en 1812, a été traduit en espagnol et popularisé comme El Príncipe rana dans les Cuentos de la infancia y del hogar. Ainsi, « l’image mentale » du « crapaud » de la version originale est substituée par « l’image mentale » de la « rana » dans la version sous-titrée en espagnol. Les sous-titres reflètent un souci d’acceptabilité de la culture cible (tableau 8). Cette tendance cibliste est confirmée par Gambier (2007 : 63) : « le sous-titrage est fréquemment une stratégie cibliste ». Lorsqu’ils échangent des baisers, le prince se transforme en papillon, poisson, rhinocéros, teckel, éléphant, cochon et la princesse, elle, devient limace, mante religieuse, tortue, baleine et vache. Les images matérielles et les images mentales des animaux véhiculent le sens symbolique du conte : le crapaud/la grenouille symbolisent le dégoût pour les expériences sexuelles trop précoces (Bettelheim 1976 : 268), et les différentes transformations symbolisent la représentation des genres et la dualité masculin/féminin.

Figure 10

Le Mousse et sa Chatte

Le Mousse et sa Chatte

Dragons et Princesses, 2010

© Ocelot

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Tableau 9

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Ce dernier exemple (figure 10), extrait du conte Le Mousse et sa Chatte[13], met en scène un jeune mousse qui est maltraité par le capitaine du bateau et par tout l’équipage de pirates. Il a pour seule amie sa petite chatte. Un jour, le navire accoste au port d’une magnifique ville en Inde. Lors d’une invitation au palais du roi, la chatte du jeune mousse tue tous les rats qui tentent de manger la nourriture et le roi propose au jeune homme de l’or et des pierres précieuses en échange de son animal. Dans le tableau 9, nous remarquons que les répliques du roi en langue étrangère sont conservées : le roi s’exprime en ourdou (l’une des langues officielles au Pakistan, mélange d’hindi, d’arabe et de persan) et l’interprète traduit ses propos. Nous nous trouvons ici face à un dilemme pour le traducteur : sous-titrer ou ne pas sous-titrer une langue étrangère autre que la langue originale dans un film. Et si le sous-titrage respectait la diversité culturelle en tenant compte de la perspective paratraductive essentielle à l’acte de traduire le couple texte-image ? Cette question est cruciale pour Michel Ocelot, qui supervise personnellement le processus de sous-titrage de ses films. Dans ce cas, le cinéaste a tenu à ce que l’on respecte son choix artistique de ne pas sous-titrer les répliques en langue étrangère afin de respecter cette diversité culturelle. Cette « imposition » du réalisateur de ne pas sous-titrer les dialogues en ourdou permet de préserver, d’une part, l’image du monarque dans toute sa splendeur matérialisée dans le péritexte iconique et, d’autre part, de produire un effet chez le spectateur lié à l’incompréhension face à une langue et une culture inconnues. Ainsi, l’absence de traduction dans les sous-titres est révélatrice du sens symbolique : le respect des différences sociales et des cultures.

5. Conclusion

Cet article vise à mettre en lumière l’importance de considérer la traduction au-delà du verbal. La réflexion qui a été présentée ici a porté sur divers aspects relatifs à la pertinence de la notion de paratraduction appliquée en contexte audiovisuel, notion qui revendique l’importance de l’image et des paratextes en traduction. En partant du concept de paratraduction tel qu’il est théorisé par le Groupe T&P, nous avons proposé une approche méthodologique holistique pour l’analyse de l’image, des textes et des paratextes à l’écran. Nous avons élaboré une grille d’analyse qui englobe les signes verbaux et non verbaux, les signes dialogiques et les signes filmiques ainsi que les péritextes iconiques et sonores. Tous ces éléments forment un message complexe verbal, visuel et sonore qui donne lieu à des options de traduction différentes en fonction de leur interaction.

Pour mener à bien l’analyse des sous-titres espagnols, nous avons considéré l’image dans la traduction audiovisuelle comme un élément paratextuel à part entière. Les sous-titres ont été analysés en coprésence des signes visuels, verbaux, sonores et filmiques et surtout des péritextes iconiques et sonores afin de déceler le sens symbolique que ceux-ci véhiculent. Concernant les questions posées au début de ce travail, nous avons analysé les images matérielles et les images mentales qui construisent le sens symbolique dans l’imaginaire des films ocelotiens, ce qui nous a permis de constater que les sous-titres ne véhiculent pas complètement le sens symbolique dans les cas de figure suivants : lorsque les images mentales et matérielles ne sont pas interprétées de la même manière dans les deux cultures (Prince et Princesse) et lorsqu’elles reflètent une réalité sociolinguistique différente (La Sorcière). Il convient de signaler également que des maladresses ont été relevées lorsqu’il y a un décalage entre le sous-titre et le péritexte sonore (La Princesse des Diamants) et lorsque le péritexte iconique n’est pas pris en compte (Le pont du petit cordonnier). Enfin, le sous-titreur doit prêter une attention particulière aux péritextes iconique et sonore car ceux-ci sont essentiels dans la construction du réseau de significations (La Fille-Biche et le Fils de l’Architecte) et doit se plier aux choix artistiques du réalisateur (Le Mousse et sa Chatte). Concernant les différents choix traductifs, les principales tactiques utilisées dans le sous-titrage espagnol sont la réduction, la compression, l’omission, l’explicitation et l’expansion, cette dernière étant la plus fréquente. Ces conclusions s’inscrivent uniquement dans le cadre de notre étude et ne peuvent pas être extrapolées à d’autres films ; néanmoins, celles-ci constituent le point de départ d’une étude plus approfondie sur la paratraduction de l’imaginaire à l’aide d’un corpus de films d’animation plus ample. Notre objectif est d’intégrer la notion de paratraduction dans les cursus universitaires en tant qu’approche théorique et pratique afin de « développer la capacité visuelle du traducteur, car bien lire et interpréter l’image pour mieux la (para)traduire est essentiel quand l’aspect visuel dégage l’essence même du sens à traduire » (Yuste Frías 2010 : 301).

À l’heure du numérique, de la diffusion incessante de séries et d’émissions en tout genre sur les différentes plateformes de vidéo à la demande et des spectateurs avides de sous-titres, il serait très intéressant de développer d’autres pistes de décodage à l’aide de la paratraduction de l’image, de l’imaginaire et des symboles véhiculés par le message audiovisuel.