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Cet ouvrage réunit des articles qui ont été soumis à un comité scientifique et évalués par des pairs à la suite du premier colloque international ICEBFIT qui s’est tenu à Alicante en Espagne du 29 au 31 mai 2014. L’ouvrage est publié sous la direction de Daniel Gallego-Hernández, président du comité organisateur du Colloque et professeur au Département de traduction et d’interprétation de l’Université d’Alicante. L’ouvrage compte une vingtaine d’articles courts d’au plus une dizaine de pages, rédigés en espagnol, en anglais et en français.
En premier lieu, Armando Valdés Aumente présente trois grands avantages de la spécialisation en traduction économique, commerciale et financière comme traducteur salarié d’un organisme du secteur de spécialisation : le fait de faire partie d’une équipe de traducteurs (et notamment de recevoir une rétroaction sur son travail) ; la valorisation de la formation qui découle de l’importance accordée à la qualité des traductions ; et l’immersion dans l’environnement du domaine de spécialisation (proximité des spécialistes et des utilisateurs des traductions). Izaskun Fuentes Milani Orkwis donne des conseils pour commencer à travailler à la pige pour une grande institution internationale et pour rester ensuite sur sa liste des fournisseurs de prédilection (« la liste des A »). Quelques trucs simples et utiles sont fournis, tant sur le plan professionnel, la pratique du doute méthodique, la vérification des termes, et même du sexe des personnes citées dans les textes, la lecture attentive du site Web de l’institution, comment ajouter de la valeur à son travail (en acceptant de nouveaux délais, par exemple), etc., que sur le plan administratif et commercial comme le calcul des délais et des honoraires, l’envoi du curriculum vitae et les communications avec l’institution cliente.
Dans le contexte de la traduction juridique du français et de l’espagnol au polonais, Agnieszka Konowska puise dans son expérience de traductrice assermentée (une pratique professionnelle que l’on appelle au Québec la traduction de documents officiels) différents exemples de déplacement du Skopos ou de la finalité de la traduction qui peuvent provenir d’un conflit d’intérêts entre le demandeur d’une traduction et l’institution publique qui est aussi le destinataire ou l’utilisateur de la traduction. Pour résoudre ces difficultés de traduction particulières (la présence d’éléments dans le document source que ne souhaite pas traduire le demandeur, ou dont la traduction est exigée par l’administration publique, la traduction des timbres et des seaux, la non-traduction des titres et des diplômes, la présence de termes d’une troisième langue dans le document source, etc.), l’auteure fait part des règles de déontologie et des pratiques professionnelles que doivent suivre les professionnels de la traduction.
Emmanuelle Pensec présente une analyse de corpus de rapports de développement durable publiés par les entreprises pour les besoins de l’organisme International Global Reporting Initiative. L’auteure analyse les collocations du terme « groupe » et des différents termes utilisés pour désigner l’entreprise et ses employés en français, en espagnol et en anglais. L’analyse lexicale de ces termes utilisés en communication d’entreprise met en évidence les valeurs et les identités que se donnent les entreprises dans les trois différentes langues-cultures. Rebeca Cristina López González passe en revue quelques difficultés de traduction de l’espagnol à l’anglais relevées sur un site Web touristique. À l’aide de quelques exemples, elle montre l’importance de ne pas perdre de vue les aspects culturels des textes touristiques (dans leurs fonctions expressives et conatives). L’auteure conclut que l’objectif visé par le site Web (intéresser le plus grand nombre de touristes) n’est pas atteint, du fait notamment que les traducteurs ne prennent pas le soin d’adapter le contenu textuel pour préciser ou pour faire comprendre les messages véhiculés dans la version originale (espagnole).
Toujours dans le domaine touristique, Ángela Flores García s’intéresse à la traduction des mots composés « chambre d’hôtes » et « table d’hôtes » en espagnol. Elle propose une marche à suivre pour l’analyse terminologique nécessaire à une traduction de qualité de ces termes. Cette démarche aboutit à la détermination des caractéristiques de la chambre d’hôtes (par opposition notamment au « Bed and Breakfast » anglophone) et à des traductions qui tiennent compte de ces caractéristiques. Marta Panadés Guerrero présente une analyse contrastive dans la presse écrite en allemand et en espagnol des stratégies de persuasion en publicité. Le relevé des indicateurs linguistiques ou des unités lexicogrammaticales ont permis de préciser les stratégies de persuasion dans les deux corpus de textes publicitaires et de procéder à une analyse qualitative de l’emploi de ces indicateurs dans différents contextes.
Iolanda Galanes Santos et Ieda Maria Alves décrivent leur projet d’étude des images de la crise économique par les termes utilisés dans la presse pour décrire de nouveaux concepts économiques en vue de produire un dictionnaire multilingue de la crise économique ainsi qu’un catalogue des images se rapportant à l’économie pour la période 2007-2013. Ce travail leur a permis d’associer l’image des ordures à des termes comme prêt hypothécaire à risque, actifs contaminés, actifs, toxiques, banques toxiques, obligation à haut risque et des images comme celles de la maladie, de la guerre, de la sécurité, etc. à d’autres termes présents dans des corpus en espagnol et en portugais constitués principalement d’articles parus dans trois périodiques (deux généraux et un spécialisé) de 2007 à 2013.
Luciana Sabina Tcaciuc s’intéresse aux stratégies de traduction des métaphores de l’anglais au roumain dans un corpus de 45 textes (institutionnels et économiques) de la Banque centrale européenne. Les métaphores examinées sont celles de l’institution et de l’économie en tant qu’ouvrages ou infrastructures physiques et de l’économie en tant que machine. Dans l’ensemble, on peut retenir que le cadre conceptuel des métaphores est le plus souvent préservé dans les pratiques de traduction des métaphores mises en évidence dans le corpus.
Tanagua Barceló Martínez et Iván Delgado Pugés présentent une analyse de l’utilisation des métaphores du vocabulaire de la bourse dans des textes journalistiques. Les auteurs proposent aussi des méthodes de traduction de ces métaphores en espagnol. Les principaux résultats de l’étude montrent que la majorité des métaphores reposent sur des mots de la langue courante (non spécialisée), que les deux types de métaphores à caractère négatif ou positif sont utilisés dans les mêmes proportions, et que, malgré une situation économique plutôt négative, peu de nouvelles métaphores sont créées dans le domaine boursier.
Marie-Évelyne Le Poder propose une étude de corpus sur le vocabulaire du secteur immobilier et des valeurs mobilières en espagnol et en français. Après la présentation des procédés de création des termes du domaine (emprunts et calques, suffixation, préfixation, composition, siglaison et métaphores), l’auteure donne des exemples de termes et d’expressions du domaine en espagnol pour lesquels elle propose une traduction en français.
Yasmine Barsoum a examiné la page d’accueil des sites Web de quelques entreprises multinationales à la recherche de variantes terminologiques dans les pages localisées en français et en anglais de ces sites. Elle trace un portrait global de la variation terminologique en traduction économique et propose quelques exemples de variation ainsi que des constats généraux sur la variation terminologique. Elle émet ainsi l’hypothèse, intéressante, que les pages Web d’entreprises de produits auraient tendance à être davantage localisées que les pages Web d’entreprises offrant des services, qui seraient davantage portées à l’uniformisation de leurs communications.
María Ángeles Orts Llopis décrit quelques aspects du style de l’économiste Paul Krugman qui ressortent de son ouvrage End this Depression Now (2012) et qui présentent une difficulté de traduction en espagnol. Elle s’intéresse d’abord aux emplois métaphoriques de termes comme debt, economy, spending, crisis, inflation, etc. d’après une classification générale des métaphores en trois grands groupes : la chaîne de la vie (ou « cadena del ser ») ; le thème du chemin ; ainsi que « les actions sont des événements ». Elle recense aussi de nombreux exemples de la grande créativité lexicale dont fait preuve l’auteur en matière de notions économiques, de clichés métaphoriques et de néologismes.
Dans son article, Danielle Dubroca Galin passe en revue les mérites et les difficultés de valorisation de la traduction spécialisée vers la langue étrangère. Elle soulève de nombreuses questions, signale les lacunes des études et de la recherche sur la pertinence de ces cours de traduction spécialisée pour les autres langues que l’anglais dans la formation des traducteurs. Elle examine d’un point de vue critique les critères à prendre en compte dans l’évaluation de ce type de traduction qui ne doivent pas être les mêmes que la traduction vers la langue maternelle et propose quelques solutions. Elle analyse enfin une situation concrète de traduction spécialisée A-B de l’espagnol au français par des hispanophones et l’omniprésence, pour les francophones mais pas nécessairement pour les hispanophones, d’un terme de la langue générale (contrefaçon) dans le domaine spécialisé du droit commercial.
Pilar Cardos Murillo et Kenneth Jordan Núñez présentent les résultats d’une étude sur les erreurs de traduction de textes économiques de l’anglais et du français à l’espagnol par des locuteurs natifs de l’espagnol. L’étude comporte une classification d’un grand nombre d’erreurs (21) en deux grands groupes inspirés de la terminologie du groupe PACTE : les erreurs de compréhension du texte source et les erreurs de reformulation en langue cible. L’analyse d’erreurs vise à dégager les compétences et habiletés que doivent acquérir les apprenants en traduction spécialisée pour chacune des sous-compétences qui font partie de la macro-compétence de traduction. Dans le cadre du modèle des compétences du groupe PACTE, Bibiana Clavijo Olmos présente une analyse des programmes de formation de traducteur offerts en Colombie et propose une liste de recommandations dans l’enseignement de la traduction spécialisée en commerce et en économie touchant les compétences à favoriser, les thèmes à aborder et les activités qui peuvent être organisées dans les cours de traduction spécialisée.
Izabela Kusicielek traite dans son article des types de systèmes de traduction automatique, des connaissances qui sont nécessaires au bon fonctionnement d’un système de traduction automatique et des informations à consigner dans les dictionnaires électroniques. Elle décrit aussi quelques projets de mise en service de systèmes de traduction automatique.
Iwona Sikora décrit les besoins de formation en traductique des étudiants des programmes universitaires en études anglaises spécialisées en anglais commercial qui se destinent à devenir des traducteurs spécialisés dans le domaine économique et commercial. Elle définit d’abord les compétences que doivent posséder les traducteurs spécialisés dans le domaine des affaires (économie, commerce), les compétences qui sont abordées dans le programme auquel sont inscrits les étudiants, puis elle discute des résultats d’un sondage mené auprès d’eux sur leurs besoins en traductique.
Alexandra Albuquerque, Rute Costa et José Paulo Esperança présentent les résultats de deux premières études empiriques sur les pratiques de traduction dans des entreprises multinationales ainsi que d’une étude en cours auprès de traducteurs non professionnels qui apprennent à utiliser les nouvelles technologies de la traduction dans une grande entreprise. Les auteurs définissent un nouveau type de traduction (la traduction ad hoc) pratiquée par les entreprises à l’étranger qui recourent à des locuteurs de la langue étrangère qui n’ont pas de compétence particulière en traduction. Les différentes études des auteurs tendent à montrer que la traduction ad hoc et le fait de ne pas recourir aux outils d’aide à la traduction et aux systèmes de gestion de contenu (comme la terminologie et les connaissances spécialisées propres à l’entreprise) contribuent à l’inefficacité des communications dans les entreprises multinationales et à l’augmentation des coûts de traduction.
L’ouvrage se termine par un article d’Agustín Jiménez, de la direction générale de la traduction de la Commission européenne, qui était l’un des conférenciers invités au colloque. L’auteur relate les principes et les aléas du multiculturalisme européen tel qu’il se pratique en réalité et tel que l’on voudrait qu’il soit, sous l’angle d’une sélection de langues (minoritaires et majoritaires) et du rôle que jouent les traducteurs dans les négociations linguistiques à l’oeuvre dans le noble projet du multiculturalisme. On y apprend quelques faits intéressants sur le multiculturalisme (la langue vernaculaire de la deuxième ville de l’Empire turc, Salonique, était le ladino, une variété du castillan du XVe siècle) ainsi que quelques traits linguistiques de l’eurovocabulaire comme la subsidiarité, la directive, le nouveau sens d’étranger pour les citoyens européens qui vivent dans un autre des pays européens que leur pays d’origine, les importations et exportations qui deviennent des échanges, le cabotage, etc.
En résumé, l’ouvrage donne un très bon aperçu des tendances et approches qui caractérisent aujourd’hui le domaine d’études (relativement récent) que représente ce qu’on appelle la traduction économique et institutionnelle, c.-à-d. les pratiques de la traduction qui répondent aux besoins des grandes entreprises, du commerce, du secteur financier et des grandes institutions publiques.