Enfant, j’allais à l’église de Saint-Eustache tous les dimanches avec mes parents, mon frère jumeau et ma soeur. J’aimais l’odeur d’encens mêlé de vieux bois, les chandelles innombrables, les ornements fabuleux, le silence doucement grave et étonnamment plein. Prémisse à mes intérêts matérialistes peut-être, je préférais le bâtiment aux messes, l’espace habité aux prières répétées en choeur. Bonne élève, j’étais irritée de ne pas connaître les mots latins, murmurés aussi simplement, me semblait-il, que « s’il vous plaît ». J’enviais le prêtre de connaître quelques mots de cette langue aux accents mystérieux, clés secrètes d’une porte qui me semblait inaccessible. En grandissant, j’ai gardé ce rapport de fascination et de (légère) détestation du latin, qui me semblait souvent marquer une différence de classe. Au cégep, puis à l’université, j’ai rencontré des personnes qui avaient appris le latin au secondaire, d’autres qui utilisaient les locutions latines couramment, ad hoc. J’ai parfois éprouvé une certaine gêne à l’idée de ne pas prononcer correctement deus ex machina ou sinequa non. Par la force des choses, j’ai toujours considéré avec beaucoup de scepticisme les « débats » ponctuels autour du « retour » aux collèges classiques et aux classes de latin, perçus par certaines personnes comme « meilleurs » que le cursus secondaire ou collégial actuel. Chose certaine, la présence de cette institution (les collèges classiques) dans la mémoire québécoise, mais aussi canadienne-française, est notable. Comme le soulignent Marianne Arseneau, François Bonnet et Michel Bock en introduction du présent dossier, « nombre d’actrices et d’acteurs majeurs de la vie francophone en Amérique ont ainsi fait leurs premières armes dans des collèges classiques ». L’intérêt de ces collèges, comme lieux de sociabilité, de camaraderie, d’apprentissage, d’enseignement et de circulation des idées, est indéniable. Nous sommes heureuses et heureux, à Mens, d’accueillir ce dossier sur « Les collèges classiques au Canada français », dont les perspectives ouvrent ou prolongent des chantiers porteurs, notamment sur les collèges classiques hors Québec. Dans la section « Article libre », on pourra également lire le texte passionnant de Daniel Poitras sur le parcours intellectuel et le rapport à l’exil de l’écologiste Pierre Dansereau.
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