Mémoires du livre
Studies in Book Culture
Volume 14, numéro 2, automne 2023 Portraits phototextuels de pays (XIXe – XXIe siècles). Généalogie et mutations d’un genre polymorphe Phototextual Portraits of Countries (19th - 21st century). Genealogy and Mutations of a Polymorphous Genre Sous la direction de David Martens
Sommaire (14 articles)
Articles
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Les guides de voyage, des portraits de pays ?
Ariane Devanthéry
p. 1–22
RésuméFR :
L’essentiel de l’Écosse par le Lonely Planet, Italie du Sud par le National Geographic, États‑Unis, Côte Est et Sud par les Guides bleus ou Hautes-Alpes aux Encyclopédies du voyage de Gallimard… De par leur côté à la fois généralisant et essentialisant, ces titres semblent bien proposer un portrait des pays qu’ils décrivent. Comme les guides revendiquent très souvent si ce n’est une claire impartialité du moins une prudente neutralité, on pourrait s’attendre à ce que le portrait du pays qu’ils brossent soit fidèle et complet, voire porte un regard assez subtil sur les phénomènes historiques, politiques et sociaux des espaces décrits. Mais dans le détail, est‑ce vraiment le cas ? Les guides de voyage proposent-ils réellement des portraits des pays dont ils traitent ? Et, si c’est le cas, à quels moyens recourent-ils ? Pour trouver des réponses à ces questions, cet article s’attachera à l’histoire du genre que constituent les guides de voyage et aux moyens qu’ils mettent en oeuvre pour décrire un pays, sa terre et ses habitants, en prenant en exemple le guide que les éditions Baedeker ont consacré à la Suisse et aux Alpes en 1859.
EN :
L’essentiel de l’Écosse by Lonely Planet, Italie du Sud by National Geographic, États-Unis, Côte Est et Sud by Guides bleus or Hautes-Alpes by Encyclopédies du voyage de Gallimard… These titles, by virtue of their generalized and encompassing nature, appear to offer a portrait of the countries they are describing. Given that travel guides often claim to be, if not entirely impartial, then at least cautiously neutral, one could expect the portrait they paint of the country to be accurate and complete, and even offer a fairly subtle look at historical, political and social phenomena of the places being described. However, is that really the case? Do travel guides actually provide portraits of the countries they cover? And, if so, by what means? To respond to those questions, this article focuses on the history of the genre that constitutes travel guides and the methods they use to describe a country, its landscape and its inhabitants, by taking as an example the guide to Switzerland and the Alps published by Baedeker in 1859.
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Une « prédisposition » pour le portrait phototextuel de pays au xixe siècle
Marta Caraion
p. 1–25
RésuméFR :
Il y a un lien intrinsèque, motivé théoriquement et historiquement, entre la photographie et le voyage au xixe siècle, qui constitue non seulement une alliance objective et immédiate, mais un argument fondateur des catégories topiques de la réception de la photographie à ses débuts, au moment des controverses esthétiques et idéologiques que son invention a suscitées. Ce lien n’est plus à documenter. Il ne s’agit donc pas de montrer comment se mettent en place les pratiques conjointes (du voyage et de la photographie) ou comment se tisse leur collaboration éditoriale, mais d’examiner le problème en se demandant si cette évidente relation est d’emblée destinée à fixer un genre à part — le portrait de pays ou de territoire —, distinct du récit de voyage, du livre pittoresque agrémenté d’illustrations, de l’ouvrage documentaire, encyclopédique, archéologique, tout en croisant toutes ces formes dans leur diversité et leurs contradictions. À travers quelques exemples prélevés dans le corpus de voyages photographiques du xixe siècle, dont nous interrogerons la possible typologie et la fondamentale hybridité, nous proposons d’examiner les conditions et les indices d’une « prédisposition » générique et d’en cerner quelques paramètres récurrents en réfléchissant de manière large aux raisons culturelles et littéraires de cette émergence.
EN :
During the 19th century, there was a natural link, theoretically and historically motivated, between photography and travel. It was not only an objective and immediate alliance; it was a seminal argument of the categories relevant to the reception of photography at its beginnings, at the time of aesthetic and ideological controversies that its invention gave rise to. That link no longer needs to be documented. The aim here is not to show how the joint practices of travel and photography came into being, or how their editorial collaboration was woven, but to examine the problem by asking whether this obvious relationship was intended from the beginning to become a separate genre – the country ou territory portrait – distinct from the travel narrative, from the illustrated book, or from documentary, encyclopedic or archaeological works, while at the same time bringing together all these forms in their diversity and contradictions. Taking as case studies examples from 19th century photographic travel books, this paper aims to: 1) question the possible typology and the inherent hybridity of these photographic publications; 2) examine the conditions of a generic predisposition; 3) describe cultural and literary reasons for the emergence of the genre and some of its recurring parameters.
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Raconter et décrire pour instruire : sur Le tour de la France par deux enfants
Philippe Antoine
p. 1–18
RésuméFR :
Le tour de la France par deux enfants (1877), livre de lecture courante illustré de plus de 200 gravures, s’inscrit dans la filiation de ces fictions pédagogiques qui entendent délivrer un savoir en recourant à un dispositif simple mais efficace : des personnages parcourent un territoire qui est décrit à mesure de leur progression. Ainsi prend forme un portrait délimité par un cadre (à savoir des frontières), pris dans une série de différentes temporalités (celles de « l’intrigue », de l’histoire d’une nation, des réceptions successives de l’ouvrage) et se mettant au service d’une visée didactique et idéologique. À la croisée de différents genres (le roman édifiant, le texte viatique et la littérature pédagogique), le livre donne à voir et à comprendre, par l’image et le texte, un pays qui, quelle que soit la diversité de ses aspects, renvoie, comme le portrait, à une identité et à une totalité.
EN :
Le tour de la France par deux enfants (1877), a common reading manual illustrated with over 200 engravings, is in the tradition of those educational stories which aim to impart knowledge using a simple but effective device: characters travel through a country that they describe as they progress. In this way, a portrait takes shape, defined within a framework (i.e. borders), caught up in a series of different temporal moments (those of the “plot,” of the history of a nation, of the successive receptions of the work) and serving a didactic and ideological purpose. At the crossroads of various genres (edifying novels, commissioned travelogues and educational literature), the book uses images and text to show and understand a country which, whatever the diversity of its aspects, refers, like a portrait, to an identity and a totality.
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L’itinéraire comme portrait de pays : la traversée de la France en automobile dans les années 1930
Anne-Céline Callens
p. 1–37
RésuméFR :
En 1931, les Éditions Firmin-Didot publient La route de Paris à la Méditerranée. Le texte est confié à Paul Morand et les illustrations à plusieurs photographes, parmi lesquels Germaine Krull, qui réalise la majorité des images. L’ouvrage décrit la route entre Paris et la Côte d’Azur en mettant à l’honneur plusieurs stations étapes. À travers la description géographique, historique et des habitudes de vie des habitants de ces lieux d’intérêt, l’ouvrage propose un portrait de la France davantage qu’un récit de voyage. L’automobile qui est utilisée par l’auteur et la photographe pour relier la capitale à Nice conditionne leur voyage, tout comme le récit et les images qui en sont faites. À partir de l’analyse de La route de Paris à la Méditerranée, nous verrons que le voyage est prétexte à dresser un portrait phototextuel de pays et que la technique automobile et photographique influence fortement la réalisation de ce portrait.
EN :
In 1931, the Éditions Firmin-Didot published La route de Paris à la Méditerranée. The text was written by Paul Morand and illustrated by several photographers, including Germaine Krull, who took most of the pictures. The book describes the route between Paris and the Côte d’Azur and highlights a number of stopover sites. Through geographical, historical and lifestyle descriptions of the inhabitants of these places of interest, the book is more a portrait of France than a travelogue. The automobile used by the author and photographer to travel from the capital to Nice determines their journey, but also the story and the images it produces. Our analysis of La route de Paris à la Méditerranée reveals that the journey is a pretext to providing a phototextual portrait of a country, and that automotive and photographic technology have a major impact on the way this portrait is produced.
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Le portrait de territoire entre presse et livre : reportages, chroniques et préfaces de Pierre Mac Orlan
Anne Reverseau
p. 1–21
RésuméFR :
Dans l’entre-deux-guerres, le genre éditorial du portrait de pays est encore en voie de constitution : il se cherche entre le reportage, la presse illustrée, l’écriture sérielle et le beau livre. Pour comprendre ce qui se joue entre les années 1920 et les années 1960, âge d’or de cette vogue éditoriale, et en particulier l’hybridation du portrait de territoire entre presse et livre, la trajectoire de Pierre Mac Orlan, écrivain polygraphe typique de cette époque, est idéale. L’article se penche sur la généalogie et les métamorphoses de ses écrits circonstanciels géographiques, comme ses textes sur la Tunisie, la Belgique, la Bretagne, Londres ou Hambourg, réunis dès 1929 dans Villes, sous-titré « Mémoires », ou encore Les Pays-Bas, livre photographique de 1965.
EN :
In the interwar period, “portraits of countries” as a publishing genre was in its infancy, still finding its place among reportage, the illustrated press, serial writing and the coffee-table book. The career of Pierre Mac Orlan, a versatile author typical of this period, provides a key to understanding what was at stake from the 1920’s to the 1960’s, the golden age of this publishing trend, in particular the cross-breeding of the press and the book in portraits of countries. This article tackles the genealogy and the metamorphoses of his circumstantial geographical writings such as his texts about Tunisia, Belgium, Britain, London or Hamburg, collected in Villes, subtitled “Memories” as of 1929, or of Les Pays-Bas, a photographic book published in 1965.
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Les représentations d’une région française durant l’entre-deux-guerres dans la revue La Bretagne touristique (1922-1939) : quel portrait de pays ?
Christian Bougeard
p. 1–19
RésuméFR :
La Bretagne touristique, publication mensuelle lancée le 15 avril 1922, devenue Bretagne en 1929, est la création d’un homme Octave-Louis Aubert, journaliste-éditeur installé à SaintBrieuc (Côtes-du-Nord, Bretagne). Par sa revue illustrée d’une riche iconographie dans laquelle la photographie occupe une grande place et au régionalisme revendiqué, Aubert veut promouvoir la Bretagne dans tous les domaines — économiques et touristiques bien sûr, mais surtout littéraires et artistiques —, en défendant les traditions bretonnes tout en associant modernisation et modernité. Des écrivains connus appuient cette initiative. Les reportages photographiques et textuels dressent le portrait d’une région à la forte identité régionale qui s’efforce de préserver sa langue celtique, le breton, ses coutumes et ses traditions en valorisant son patrimoine et son passé, mais qui aspire aussi à se moderniser. En même temps, surtout dans les années 1930, la revue fait connaître les jeunes créateurs bretons (écrivains, poètes, peintres, sculpteurs, graveurs, musiciens) en publiant leurs écrits ou en reproduisant leurs oeuvres. Le dépouillement des 173 numéros parus durant l’entre-deux-guerres montre que La Bretagne touristique forge des représentations du « pays breton », cette « petite patrie » qui veut préserver son identité régionale dans le cadre de la « grande patrie » française, après les sacrifices de la Première Guerre mondiale.
EN :
On April 15, 1922, Octave-Louis Aubert, a journalist, publisher and editor living in Saint-Brieux (Côtes-du-Nord, Brittany), launched the monthly journal La Bretagne touristique, renamed Bretagne in 1929. Through his publication, illustrated with rich iconography in which photography figured prominently and favoured regionalism, Aubert sought to promote Brittany in all fields - economy and tourism certainly, but literature and art above all - by defending Brittany’s traditions while associating them with modernization and modernity. Texts by well-known writers supported this initiative. Photographic and textual reports created the portrait of a territory with a strong regional identity that strove to preserve its Celtic language, Breton, its costumes and its traditions by promoting its heritage and its past, but strove also to modernize. At the same time, especially in the 1930s, the journal brought attention to young creative Bretons (writers, poets, painters, sculptors, engravers, musicians) by publishing their texts or reproducing their works. The perusal of the 173 issues published during the between-the-wars period demonstrates that La Bretagne touristique forged images of the “country of Breton,” this “tiny homeland” that was working to preserve its regional identity within the framework of the “larger homeland” of France after the sacrifices made in World War I.
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Hors du nid, de Charles ab der Halden et Laure Albin Guillot, portraits de pays pour enfants, en 1934
Laurence Le Guen
p. 1–29
RésuméFR :
Entre les deux guerres, la photographie fait une entrée remarquée dans les livres de lecture pour la jeunesse, de l’imagier au livre de catéchisme. Quelques récits de voyage illustrés de photographies voient timidement le jour parmi lesquels, en 1934, Hors du nid, de Charles ab der Halden. Il est illustré par la photographe Laure Albin Guillot, figure majeure de la photographie de l’entre-deux-guerres. Cet article se propose de cerner le genre de cet ouvrage, entre roman scolaire, récit de voyage et portrait de pays. Il examine comment les photographies participent de ce genre et analyse la collaboration des mots et des illustrations photographiques.
EN :
Between the two world wars, photography made a notable appearance in children’s books, from picture books to Sunday school books. A few travelogues illustrated with photographs began to appear, including Hors du nid, by Charles ab der Halden, in 1934. It was illustrated by the photographer Laure Albin Guillot, a major figure in interwar photography. This article sets out to identify the genre of this work, which is somewhere between a school novel, a travelogue and a portrait of a country. It examines how photographs contribute to the genre and analyses the collaboration between words and photographic illustrations.
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La collection « Petite Planète » (Seuil) sous la direction de Chris Marker (1954-1958)
Quentin Nerinckx
p. 1–30
RésuméFR :
À l’instar de toute une série de portraits phototextuels de pays, la collection « Petite Planète » commence à être éditée par les Éditions du Seuil dans une période que Jean Fourastié a nommée les Trente Glorieuses, dans un contexte de développement du tourisme de masse et d’apparition du livre de poche moderne. La personnalité de son directeur — le jeune Chris Marker qui fait alors ses premiers pas dans le monde du livre, de la photographie et du cinéma —, son format de poche, l’originalité de ses couvertures, son accent sur le présent des pays étudiés et leur population, ou encore la recherche et l’expérimentation dans l’utilisation d’une illustration riche et abondante sont autant d’aspects qui font que « Petite Planète » va se démarquer, dès son lancement, des séries concurrentes et affirmer sa singularité dans le paysage éditorial francophone de l’époque.
EN :
Along the lines of an array of photo-textual portraits of countries, Éditions du Seuil began publishing the “Petite Planète” [“Little Planet”] collection during the era that Jean Fourastié has called the Trente Glorieuses, the thirty years of economic growth after WWII that saw the growth of mass tourism and the appearance of the modern pocket book. The personality of its director – the young Chris Marker, who was then just entering the world of books, photography and cinema – its pocket format, the originality of its covers, its emphasis on the actualities of the countries studied and their population, as well as the research and experiments in the use of rich and abundant illustrations are all aspects that, from the moment it was launched, enabled “Petite Planète” to stand out from competing series and to assert the singularity of this collection in the contemporary French-speaking publishing landscape.
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JAPON de Nicolas Bouvier : un portrait phototextuel du pays du soleil levant pendant les années 1960
Camilla Tramonti
p. 1–30
RésuméFR :
Voyageur depuis sa jeunesse, écrivain par vocation, photographe par nécessité et iconographe par choix, Nicolas Bouvier dresse dans le volume analysé ici, paru aux Éditions Rencontre, un portrait du Japon des années 1960. Nous présentons brièvement ses précurseurs dans le contexte éditorial pour essayer d’établir l’emplacement singulier de l’ouvrage, soit dans la collection « L’atlas des voyages » soit dans les publications de Bouvier. Notre analyse vise à examiner la spécificité du binôme image-texte mis en place par le voyageur genevois. L’étude de trois exemples où l’interaction entre la composante verbale et la composante visuelle prend forme nous permet d’illustrer le rapport que Bouvier entretient avec le Japon et, par conséquent, de comprendre la manière dont il conduit ses lecteurs à la découverte de l’altérité.
EN :
Voyager from an early age, writer by inspiration, photographer by necessity and iconographer by choice, Nicolas Bouvier presents a remarkable portrait of 1960s Japan in Japon, published by Éditions Rencontre in Lausanne. In this paper, we examine his precursors’ published works about Japan, in order to demonstrate Bouvier’s book’s unique place in the L’atlas des voyages collection and among Bouvier’s other publications. Our research aims to investigate the image-text binomial created by the Genevan traveller and to define its specificity. To do so, we analyse three case studies of image-text pairings in which the interaction between the linguistic and visual elements is significant. These case studies enable us to illustrate not only Nicolas Bouvier’s relationship with Japan but also the way in which he introduces his readers to the Other.
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Le photobook de paysage contemporain comme portrait de pays, ou comment la photographie française a aujourd’hui force d’art
Ari J. Blatt
p. 1–23
RésuméFR :
Cet essai propose de reconsidérer et de calibrer à nouveau le statut relativement marginalisé du photobook — en particulier du photobook de paysage français contemporain —, et de montrer comment la forme et le format du livre contribuent, peut-être plus que tout autre support, à la fabrication d’un imaginaire spatial et topographique. Après une analyse de l’émergence, de l’état actuel et de la spécificité du genre, l’essai se conclut par plusieurs études de cas qui donnent à voir que l’aspect textuel, et donc phototextuel, du photobook contemporain est précisément ce qui favorise le « portrait » des pays (petits ou grands), des territoires et des paysages (urbains, périurbains ou ruraux) qui font de la France ce qu’elle est aujourd’hui.
EN :
This essay offers a reconsideration and recalibration of the relatively marginalized status of the photobook—especially photobooks that represent contemporary French landscapes—to show how the visual content and material format of these books contribute, perhaps more than any other medium, to the creation of a spatial and topographical imaginary. After an initial analysis of the emergence, current state of the art, and specificity of the photobook, the essay concludes with several case studies that illustrate how the textual—and, thus, phototextual—nature of the contemporary photobook establishes a portrait of the many distinct regions (large or small), territories, and landscapes (urban, suburban, or rural) that make France what it is today.
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Le cas du livre-enquête
Danièle Méaux
p. 1–23
RésuméFR :
Italy. Cross Sections of a Country (1998) de Gabriele Basilico et Stefano Boeri se présente comme une « tentative pour explorer le paysage, avec l’objectif de tester une méthode rigoureuse ». La dimension épistémologique du travail est affichée : à l’expérience se voit assignée une valeur paradigmatique. La photographie assortie d’un protocole travaille à l’investigation de l’aménagement du pays. Le livre se démarque des formes ordinaires du « portrait de pays », dans la mesure où il se tient aux confins de la production artistique et de la recherche en sciences sociales. Il tire le projet photographique vers la transitivité de l’enquête urbanistique, quand la réflexion en ce domaine se trouve nourrie des apports d’une expérience sensible qui permet de fonder et de complexifier certaines considérations.
EN :
Italy. Cross Sections of a Country (1998) by Gabriele Basilico and Stefano Boeri is presented as “an attempt to explore the landscape, with the aim of testing a rigorous method.” The epistemological dimension of the work is clear: experience is assigned a paradigmatic value. The photography, accompanied by a protocol, is used to study the development of the country. The book stands out from ordinary types of “country portraits” insofar as it positions itself within the borders of artistic production and social science research. It pulls the photographic project towards the transitivity of urban planning research at a time when studies in this field are being nourished by the contributions of a perceptible experience that helps to ground and complicate certain considerations.
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Humaine, de Marc Pataut : du portrait au portrait de pays
Danielle Leenaerts
p. 1–27
RésuméFR :
Sa participation au projet de résidence Photographie et Territoire du Centre régional de la photographie Hauts-de-France (Douchy-les-Mines) a conduit le photographe Marc Pataut à réaliser principalement des portraits : ceux de trois habitantes de cette municipalité devenues ses modèles trois années durant, entre 2008 et 2011.
Sur base de l’analyse du livre Humaine, issu de cette résidence artistique, nous nous proposons de vérifier l’hypothèse selon laquelle le genre du portrait offre ici une représentation métaphorique du territoire. Elle est développée en prenant en compte, successivement, le processus créatif de Marc Pataut dans le contexte de ce projet, la structure complexe du livre renvoyant au travail mené par l’artiste dans le temps long en relation avec ses modèles, le rapport entre expérience du territoire et expérience du corps et enfin l’intégration de ce genre spécifique au sein du genre du portrait de pays.
EN :
The photographer Marc Pataut’s participation in the Photographie et Territoire residency program at the Centre régional de la photographie Hauts-de-France (Douchy-les-Mines) led him to produce predominantly portraits: those of three female residents of that municipality who became his models for three years, from 2008 to 2011.
Based on an analysis of the book Humaine, the result of this artistic residency, we propose to test the hypothesis that the portrait genre offers here a metaphorical representation of territory. This hypothesis is developed by taking into account, in succession, Marc Pataut's creative process in the context of this project, the book's complex structure reflecting the artist's long-term work with his models, the relationship between experience of territory and experience of body, and finally the integration of this specific genre within the genre of “portrait de pays.”
Varia
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Book Worlds as a Window to Analyze the Extreme Right Wing in Argentina
Ezequiel Saferstein et Analia Goldentul
p. 1–27
RésuméEN :
This paper examines how certain contemporary books and authors contributed to the formation of an extreme right political option in Argentina. The paper focuses on Nicolás Márquez and Agustín Laje, two authors who have achieved unprecedented visibility, which is reflected in the circulation and sales of their books, in the number of their followers on social networks, and in the magnitude of their events and conferences. In 2016, the publication of El libro negro de la nueva izquierda. Ideología de género o subversión cultural [The Black Book of the New Left: Gender Ideology or Cultural Subversion] established both authors as figures with “authority” in right-wing culture, and enabled the formation of communities of young readers from the promotional circuit of the work. Having attended different events and conducted a series of in‑depth interviews with young readers, we explore the forms of sociability and political subjectivation enabled by these authors and this book in the space of circulation of right-wing ideas in Argentina today.
FR :
Dans le présent article, nous examinons la manière dont certains livres et auteurs contemporains ont contribué à la formation d’une option politique d’extrême droite en Argentine. Notre attention se porte plus précisément sur Nicolás Márquez et Agustín Laje, deux auteurs à la visibilité sans précédent, comme en témoignent la distribution et les ventes de leurs livres, leur nombre d’abonnés sur les réseaux sociaux, et le succès remporté par les événements et les colloques qui leur sont consacrés. En 2016, la parution de El libro negro de la nueva izquierda. Ideología de género o subversión cultural [Le livre noir de la nouvelle gauche. Idéologie du genre ou subversion culturelle] a conféré à ces auteurs un statut d’« autorités » au sein de la droite, et des communautés de jeunes lecteurs se sont formées dans le sillage du circuit promotionnel de l’ouvrage. Par notre participation à divers événements et des entretiens approfondis menés avec des jeunes lecteurs, nous explorons les formes de sociabilité et de subjectivation politique auxquelles donnent lieu Márquez, Laje et El libro negro de la nueva izquierda dans le contexte de la circulation des idées de droite en Argentine.