Publié en 2020 sous la direction de Younès, Gremion et Sylvestre à la suite du colloque de l’ADMEE-Europe tenu à l’Université de Lausanne (UNIL) en 2019, l’ouvrage Évaluations, sources de synergies porte sur les synergies en évaluation. Cette note de lecture mobilise le concept de référentialisation afin d’identifier la mise en synergie des dimensions axiologique et technique de l’évaluation (Ardoino et Berger, 1989 ; Lecointe, 1997). La référentialisation est le processus évaluatif « par lequel un jugement évaluatif est construit » (Aussel et Marcel, 2015, p. 7), qui se manifeste tout au long de l’évaluation : de la caractérisation de l’objet évalué à la restitution des résultats. C’est durant ce processus que les évaluateurs et évaluatrices définissent les référents et référés de l’évaluation (Barbier, 1985 ; Figari, 1994 ; Figari et al., 2014 ; Figari et Tourmen, 2006 ; Hadji, 2014). Cette « recherche de références pertinentes » (Figari, 1994, p. 48) se matérialise par le référentiel d’évaluation, qui n’est pas un construit figé, mais évolutif, où les référents et référés sont amenés à se transformer au cours des différentes étapes de l’évaluation. Mottier Lopez et Dechamboux (2017, 2019) offrent une conception renouvelée de la référentialisation avec la coconstitution référentielle. Les référents et référés ne se construisent pas de manière séparée avec d’abord la définition des attendus, puis avec leur observation, mais à travers une relation dialectique « foncièrement située, c’est-à-dire par rapport, et avec, des contextes significatifs agissant[s] » (Mottier Lopez et Dechamboux, 2017, p. 17). La prise en compte des contextes et de leur particularisme renforce la conception d’Ardoino et Berger (1989) et de Lecointe (1997), pour qui l’évaluation se définit par une dimension axiologique (Marcel et Bouillier-Oudot, 2011), qui correspond aux valeurs et intentions de l’évaluation (le pour quoi évaluer), puis par une dimension technique (le quoi et le comment évaluer). Les neuf chapitres de l’ouvrage sont ainsi présentés à partir de ces deux dimensions. Une première partie expose la dimension axiologique identifiée dans chacun des chapitres, puis une seconde présente de la même manière la dimension technique. La dimension axiologique de l’évaluation a été traitée sous trois angles différents au sein de ces neuf chapitres. Dans certains chapitres (1, 2, 7 et 9), elle se trouve directement analysée et met en avant les paradoxes possiblement en tension, tandis que, dans d’autres (chapitres 3, 5 et 6), le choix a été fait d’identifier le poids de cette dimension dans la conception même de l’évaluation. Enfin, elle apparaît également en arrière-fond pour justifier la dimension technique plus exposée (chapitres 1, 4 et 8). Dès le chapitre 1, la dimension axiologique est frontalement interrogée par Moulin et Dubochet. À partir des notions de norme et de « hors » norme, ces auteurs interrogent directement les missions de l’école au sein de la société. Pasquini met quant à lui en évidence le paradoxe entre les intentions d’accompagnement des élèves et celle de sélection, qui selon lui est prédominante dans le système vaudois, en Suisse. Enfin, Maradan l’évoque en début de discours, quand il annonce la volonté partagée par les communautés citoyenne et politicienne d’harmoniser le niveau de sortie des étudiants et étudiantes, pour expliciter ensuite la manière dont l’évaluation est menée. Le chapitre 2 entre par la dimension technique pour mettre au jour les ambivalences de la dimension axiologique. Butera, Batruch, Pulfrey, Autin et Toma démontrent la manière dont les notes incarnent la sélectivité du système scolaire, délaissant ainsi la conception de l’école comme lieu de développement des élèves. La dimension axiologique vient donc interroger la dimension technique construite autour de la note. Le chapitre 3 traite des …
Parties annexes
Références
- Ardoino, J. & Berger, G. (1989). D’une évaluation en miettes à l’évaluation en actes : le cas des universités. Matrice-Andsha.
- Aussel, L. & Marcel, J.-F. (2015). Construction théorique d’un modèle d’évaluation de dispositif de formation pour accompagner la décision politique. Questions vives, 23. https ://doi.org/10.4000/questionsvives.1718
- Barbier, J.-M. (1985). L’évaluation en formation. PUF.
- Figari, G. (1994). Évaluer : quel référentiel? De Boeck.
- Figari, G., Remaud, D. & Tourmen, C. (2014). Méthodologie d’évaluation en éducation et formation : ou l’enquête évaluative. De Boeck Supérieur.
- Figari, G. & Tourmen, C. (2006). La référentialisation : une façon de modéliser l’évaluation de programme, entre théorie et pratique. Vers une comparaison des approches en France et au Québec. Mesure et évaluation en éducation, 29(3), 5-25. https ://www.researchgate.net/publication/273381183_Figari_G_Tourmen_C_2006_La_referentialisation_une_facon_de_modeliser_l’evaluation_de_programme_entre_theorie_et_pratique_Vers_une_comparaison_des_approches_en_France_et_au_Quebec_Mesure_et_Evaluation
- Hadji, C. (2014). Pour une évaluation démocratique. Dans J. Morrissette & M.-F. Legendre (dir.), Enseigner et évaluer : regards sur les enjeux éthiques et sociopolitiques (p. 57-88). PUL.
- Lecointe, M. (1997). Les enjeux de l’évaluation. L’Harmattan.
- Marcel, J.-F. (2013). Les valeurs et la technique. Dans J.-F. Marcel et H. Savy (dir.), Évaluons, évoluons (p. 47-58). Éducagri Éditions.
- Marcel, J.-F. & Bouillier-Oudot, M.-H. (2011). Du processus de référentialisation : analyse d’un hiatus entre valeurs et technique. Les dossiers des sciences de l’éducation, 25, 41-55. https ://doi.org/10.4000/dse.994
- Mottier Lopez, L. (2017). Une modélisation pour appréhender la référentialisation dans l’évaluation des apprentissages des élèves. Dans P. Detroz, M. Crahay & A. Fagnant (dir.), L’évaluation à la lumière des contextes et des disciplines (p. 169-192). De Boeck Supérieur. http ://dx.doi.org/10.3917/dbu.detro.2017.01.0169
- Mottier Lopez, L. & Dechamboux, L. (2017). D’un référentiel d’évaluation fixe à une co-constitution référentielle dynamique, ce que nous apprend le jugement situé de l’enseignant. Contextes et didactiques, 9, 12-29. https ://doi.org/10.4000/ced.706
- Mottier Lopez, L. & Dechamboux, L. (2019). Modélisation d’une évaluation « de » et « pour » la recherche collaborative : l’exemple de deux recherches sur des pratiques d’enseignement et d’apprentissage. La Revue LEeE, 1. https ://doi.org/10.48325/rleee.001.02
- Wiggins, G. (1989). A true test : Toward more authentic and equitable assessment. Phi Delta Kappan, 70(9), 703-713. https://doi.org/10.1177%2F003172171109200721