Recensions

Giovanni Ventimiglia, Distinctio realis. Ontologie aristotelico-tomistiche nella prima metà del Novecento. Lugano, Eupress FTL (coll. « Credere e pensare », 4), 2012, 198 p.[Notice]

  • José Antonio Valdivia Fuenzalida

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  • José Antonio Valdivia Fuenzalida
    Université Paris-Sorbonne

Comme le suggère son titre, cet ouvrage porte sur l’intéressante discussion menée par d’importants auteurs thomistes de la première moitié du xxe siècle, plus précisément de la période allant de 1909 à 1941. Ces deux dates correspondent aux années de publication de deux ouvrages très importants pour comprendre l’évolution de cette discussion : Le sens commun, la Philosophie et les Formules dogmatiques de Garrigou-Lagrange, et la dernière réponse apportée par Fabro dans Divus Thomas aux critiques que Descoqs lui avait adressées (p. 16). Le livre est composé de trois chapitres. Or pour comprendre sa structure, il convient tout d’abord d’expliquer une distinction faite par Ventimiglia entre deux types fondamentaux de thomismes présents à l’époque concernée. Il s’agit — et ici l’auteur suit une terminologie établie par Montagnes dans un article consacré au Thomisme de cette période (« La réception du thomisme compromise par ses défenseurs », Revue Thomiste, 108 [2008], p. 253-280) — du « thomisme impéré » et du « thomisme élicite ». Ces deux thomismes s’inscrivent dans un mouvement de défense de la doctrine traditionnelle de l’Église contre un ensemble de doctrines générales telles que l’idéalisme et le néo-idéalisme, l’ontologisme rosminien et, surtout, le modernisme. L’une des thèses combattues était l’immanentisme qui niait la transcendance de Dieu et de la connaissance, ce qui impliquait le panthéisme. La philosophie de saint Thomas était considérée comme la seule apte à répondre à toutes ces « erreurs » (p. 21-23). Dans ce contexte, le « thomisme impéré » réunissait quelques auteurs qui soutenaient des thèses pour ainsi dire acceptées par les autorités ecclésiastiques de l’époque (p. 15), en particulier avec la publication, en 1914, par la Congrégation des Études des « vingt-quatre thèses thomistes » (Acta Apostolicae Sedis). Ce « thomisme impéré » soutenait la distinction réelle entre l’essence et l’existence, qui était considérée par certains comme l’« argument princeps » contre l’immanentisme et contre tout panthéisme, quel qu’il soit (p. 23). Pour sa part, le « thomisme élicite », qui interprétait Thomas à la lumière de Suárez, avait une vision qui différait de quelques-unes des thèses « autorisées » (p. 15, 65). Parmi les thèses que n’acceptaient pas ses défenseurs, figurait celle de la distinction réelle entre l’essence et l’existence (p. 66), qui ne serait pas indispensable dans la lutte contre l’immanentisme. En accord, donc, avec ces deux types de thomisme, les trois chapitres de ce livre sont : 1) Le thomisme impéré (p. 21-64) ; 2) Le thomisme élicite (p. 65-134) ; 3) La discussion Descoqs-Fabro (p. 135-169). Il n’est pas nécessaire de présenter un résumé de chaque chapitre. Il suffira d’exposer de manière générale les arguments les plus importants des deux positions et d’émettre quelques remarques critiques. Commençons par présenter une synthèse de ces arguments que, d’ailleurs, l’on peut retrouver dans la conclusion du livre (p. 171-175). Les défenseurs de la distinction réelle se divisent en deux catégories : les « paléo-thomistes » et les « néo-thomistes » (p. 48). Les premiers argumentent que, étant donné que l’existence est commune à la pluralité des choses, elle ne peut en être la cause. Par conséquent, il faut qu’il y ait un principe qui multiplie l’existence. Ce principe est l’essence et se distingue réellement de l’acte d’exister. Cependant, même si l’essence se distingue réellement de l’existence, celle-là ne se situe pas dans le pur néant. Dans ce cadre, l’essence se présente comme la puissance et l’existence comme l’acte. Cette distinction réelle aurait le mérite d’éviter le panthéisme dans la mesure où elle permettrait d’expliquer la distinction entre Dieu et les créatures (p. 23-29 ; 35-36 ; …