FR :
La treizième réunion du Symposium Aristotelicum, en 1993, a eu une très étrange et très triste destinée. Certes, elle s’est tenue dans le cadre enchanteur de la Chartreuse de Pontignano, près de Sienne ; elle a donné lieu, comme ses devancières, à des communications et à des discussions d’un vif intérêt. Mais l’édition de ses Actes, pour une fois, s’est heurtée à d’insurmontables obstacles. La charge en avait été initialement confiée à Mario Mignucci et à Michael Frede, deux des plus fidèles et stimulants participants du Symposium. Ils ont été tragiquement enlevés à notre admiration et à notre affection, le premier en 2004, sous les coups d’une longue et impitoyable maladie, le second en 2007, en conséquence d’un accident imprévisible et brutal. Le retard causé à la publication du XIIIe Symposium par cette double et douloureuse disparition n’a pu être comblé jusqu’à présent ; les membres du comité organisateur m’ont assuré qu’à leur avis, il risquait de ne l’être jamais.
Par une coïncidence émouvante (en tout cas pour moi), trois semaines seulement avant la mort de Michael Frede, mon collègue et ami Thomas De Koninck me demanda si j’accepterais de publier dans le Laval théologique et philosophique l’étude que j’avais présentée, plus de dix ans auparavant, au XIIIe Symposium. Je passe sur les divers scrupules qui me firent hésiter quelque temps. L’insistance du Professeur De Koninck et celle de ses collaborateurs, Paul Asselin et Martin Achard, en eurent finalement raison, ce dont je leur suis très profondément reconnaissant.
Quant à ce texte, le lecteur voudra bien se souvenir de la longue histoire dont il est l’ultime fruit. Il serait bien difficile de le résumer : il est, il tente d’être cela même pour quoi il se donne, à savoir pour une lecture détaillée du commentaire par Ammonius du célèbre premier chapitre du De Interpretatione, lecture focalisée non pas tellement sur la lumière que le commentaire ancien peut (ou peut ne pas) jeter sur la lettre et sur l’interprétation du texte aristotélicien que sur ce que ce commentaire peut nous apprendre sur les méthodes, les choix, les comportements intellectuels de son auteur lui-même, et sur ses propres motivations philosophiques et pédagogiques face à un texte comme celui qu’il entreprend de commenter.
EN :
The XIIIth meeting of the Symposium Aristotelicum, which took place in 1993 on the De Interpretatione, had a very strange and very sad history. True enough, it took place in the enchanting decor of the Certosa di Pontignano, near Siena ; and, as usual, it offered contributions and discussions of the highest order. But this time the publication of the papers met with insurmountable obstacles. It had been initially entrusted to Mario Mignucci and Michael Frede, two of the most faithful and devoted participants in the Symposium. Most infortunately, however, they were both wrenched from our admiration and affection, Mario Mignucci in 2004, after a protracted and merciless disease, Michael Frede in 2007, owing to an unpredictable, sudden accident. The inevitable ensuing delay for the publication of the XIIIth Symposium has not been caught up with so far and those members of the Organization Committee whom I have been able to contact told me that, in their opinion, it ran a strong risk of never being caught up at all, alas.
By a moving coincidence (at least for me), no more than three weeks before Michael’s death, my colleague and friend, Professor Thomas De Koninck, had asked me if I would agree to publish the present paper in the Laval théologique et philosophique. Thomas and his collaborators Paul Asselin and Martin Achard helped me to finally overcome my scruples ; I am deeply grateful to them.
As for this long paper itself, it would be difficult to summarize it : it is, or tries to be, exactly what it looks like, namely a detailed reading of Ammonius’ commentary to the famous Chapter One of the De Interpretatione. If this reading has any dose of originality, it will be due not so much to the lights the ancient commentary may shed (or not shed) on the letter and the interpretation of the Aristotelician text as to what it may teach concerning the methods, selections, and intellectual behaviour of its author himself, as well as with regard to his own philosophical and pedagogical reactions before such a text as Aristotle’s own.