Recensions

Christine de Montclos, Un pèlerin politique ? Les voyages de Jean-Paul II. Paris, Bayard Éditions (coll. « Actualité »), 2000, 230 p.[Notice]

  • Gilles Routhier

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  • Gilles Routhier
    Université Laval, Québec

Cela ne fait pas de doute, Jean-Paul II aura profondément marqué le dernier quart du xxe siècle. S’il n’est pas le pape qui a inauguré les voyages pontificaux (Jean XXIII en Italie et Paul VI, dont le nom revient souvent ici à travers le monde), Jean-Paul II en aura fait la marque de son long pontificat. Christine de Montclos tente ici de faire une première analyse de cette activité débordante qui n’a jamais laissé indifférent. Après avoir dressé un tableau chronologique des 90 voyages hors d’Italie réalisés par Jean-Paul II (février 2000), voyages dans une grande diversité de situations religieuses, sociales et politiques, l’auteure, surtout intéressée par l’attitude du Saint-Siège sur la scène internationale, veut dégager, en neuf chapitres, les grandes arêtes de cette activité pèlerine qui présente plus de cohérence et de continuité que ces déplacements tous azimuts pourraient le laisser croire. Le premier chapitre demeure tout compte fait introductif, posant, sans y répondre réellement, la question du véritable caractère de ces voyages : pèlerinage ou diplomatie ? Pour sa part, le chapitre II sert réellement d’ouverture à l’ensemble de l’ouvrage. Se fixant sur les voyages réalisés au cours de la première année de son pontificat, C. de Montclos veut nous indiquer les grandes lignes directrices qu’adopteront tous les autres voyages. Les autres chapitres veulent regrouper l’ensemble des voyages en continuité avec ceux réalisés au cours de l’année inaugurale et dans la perspective de Redemptor hominis, encyclique programme de l’ensemble du pontificat. Après avoir évoqué trois constantes au chapitre III — la condamnation des idéologies, en particulier le communisme, le combat pour la liberté entamé dans les pays vivant sous des régimes marxistes et chez les dictatures des pays catholiques et l’appel à la solidarité —, le chapitre IV développe, peut-être de manière insuffisante, ce qui représente un point fort de l’activité de Jean-Paul II, la défense des droits de la personne, droits individuels et droits sociaux, droits culturels et droits des nations — ce qui fait écho à une longue tradition polonaise de défense de la nation contre les occupants — et, en plus, droit à la liberté religieuse, élément trop passé sous silence ici. Le chapitre V est consacré à la construction de la grande Europe, de l’Atlantique à l’Oural, une Europe fondée sur ses racines chrétiennes et une Europe dont la figure remonte par-delà les Lumières. Quant au chapitre VI, il est consacré aux efforts déployés par Jean-Paul II, au cours de ces voyages, en vue d’affermir et de promouvoir l’unité de l’Église catholique. Ici, le concept d’unité n’est pas travaillé et on l’utilise d’emblée comme s’il allait de soi alors que le mouvement oecuménique aussi bien que la tradition catholique, à travers les siècles, nous ont montré qu’il y a plusieurs modèles d’unité et plusieurs façons de se la représenter. Ce chapitre est l’occasion de traiter de l’unité de l’Église catholique et de l’engagement oecuménique de l’Église catholique avec ses partenaires protestants et orthodoxes. La longue évocation du « pèlerinage insolite » dans les pays scandinaves et les désirs encore insatisfaits de visiter les pays orthodoxes, malgré quelques ouvertures (en Roumanie et bientôt en Grèce, nonobstant toutes les controverses), indiquent bien le long chemin qui reste encore à parcourir. Le chapitre VII aborde une autre dimension originale de ces voyages, celle du dialogue avec les autres religions, dimension honorée surtout lors des voyages en terre d’islam ou en Israël (le chapitre IX fera une place spéciale au pèlerinage sur les pas d’Abraham), sans oublier l’Inde. Il s’agit là, probablement, d’une des dimensions les plus importantes de ce pontificat, dimension qui rejoint aisément le …