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Depuis moins d’une décennie, nos sociétés affrontent une succession de crises structurelles sans précédent. Si les racines en sont déjà lointaines, les bouleversements qui affectent le climat sont aujourd’hui de plus en plus tangibles. Nous savons pertinemment désormais que, à défaut de vigilance et de volontarisme, notre planète sera rapidement condamnée à subir toujours plus de dérèglements délétères et irréversibles. La pandémie imputable à la covid-19 a pareillement fragilisé l’ensemble des populations à l’échelle du monde. Elle a crûment révélé à quel point les choix économiques et politiques qui, hier, avaient été effectués pour préparer l’avenir étaient en réalité dysfonctionnels pour juguler la survenue et la propagation d’un virus jusqu’alors inconnu. Last but not least, après que la chute du mur de Berlin a signé la fin d’un long épisode d’affrontement entre l’Est et l’Ouest, les tensions ont resurgi violemment en 2022. Elles ont modifié les équilibres géopolitiques et ravivé le spectre d’une destruction nucléaire. Elles ont également provoqué une crise de la production énergétique et obligé un grand nombre d’Européen·nes, au-delà même des territoires directement concernés par les affrontements militaires, à tempérer leur consommation d’énergie, voire plus généralement à amender leurs façons de vivre.
Les deux faces de la sobriété
Sur ce fond chaotique, plusieurs voix s’élèvent régulièrement pour réclamer un changement radical des modes de vie, seule façon, à les en croire, de nous permettre de lutter efficacement contre la dégradation de notre habitat naturel, de prévenir les risques de nouvelle crise sanitaire et d’expérimenter un rapport moins destructeur et plus apaisé au monde. La sobriété (ou sufficiency dans le vocabulaire anglo-saxon) s’est ainsi imposée il y a peu dans l’espace public à titre de mot d’ordre capable d’agréger les bonnes volontés décidées à réinventer nos façons de travailler, de produire, de consommer, d’habiter, de voyager, de communiquer…, bref, de vivre ensemble sur une planète viable. Indice intéressant à ce titre : en 2022, le GIEC (Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat) s’est emparé officiellement du terme sufficiency pour désigner ce qui est suffisant afin de vivre convenablement sans nuire à la planète ni au bien-être des individus.
En réalité, comme le note Sophie Dubuisson-Quellier (Cailloce, 2022), la sobriété fait l’objet d’une attention particulière de la part des sciences sociales depuis une vingtaine d’années déjà au moins. La théorie du donut de Kate Raworth (2017) a largement contribué à la légitimité d’une telle question. La thèse défendue par l’économiste anglaise est qu’une vie sobre devrait nous permettre, collectivement, de bâtir une économie régénérative et redistributive d’une part, d’instituer un espace de sécurité et de justice accessible à toute l’humanité de l’autre. Le philosophe Dominique Bourg et le juriste Alain Papaux (2010) n’ont pas davantage attendu la conversion du GIEC à la sufficiency pour clamer haut et fort que c’est vers une société « sobre et désirable » qu’il convient de nous diriger aujourd’hui.
Les questions posées par la thématique de la sobriété sont aussi vastes que multiples. L’ambition de ce numéro de Lien social et Politiques n’est pas de les appréhender toutes dans leur profondeur comme dans leur diversité. En posant une question générique – Qu’est-ce qu’une vie sobre ? – il propose de baliser un territoire de savoirs en émergence en sondant les significations sociales et les implications pratiques de la sobriété. Les nombreuses contributions de ce numéro, le plus volumineux de l’histoire de la revue, témoignent de fait de l’importance croissante de la question de la sobriété au coeur des préoccupations actuelles. Plus que la seule émergence d’un nouveau savoir, la notion de sobriété met en lumière des inquiétudes multiples, notamment celles liées aux excès du capitalisme et aux effets de la crise climatique. En plus d’exprimer certaines peurs qui traversent notre époque, la sobriété s’impose comme une valeur positive, enracinée dans des pratiques à la fois individuelles, collectives et politiques. À cet égard, les deux facettes du concept de sobriété permettent, d’une part, d’établir un diagnostic des contradictions de l’époque, et, d’autre part, d’inspirer des vertus proprement positives orientées par l’avènement de nouveaux imaginaires sociaux.
Dans un tel cadre problématique, ce numéro s’inscrit sous les auspices non seulement de la sociologie et de l’anthropologie, mais aussi de l’histoire et de la philosophie politique. L’esprit qui a gouverné la fabrication collective de ce volume est celui d’une compréhension des temps présents grâce à des perspectives inspirées de l’oeuvre de nos aîné·es, celles et ceux en particulier qui donnent pleinement droit à la tempérance dans les conduites de vie (Baruch Spinoza, Simone Weil, Pierre Hadot, Michel Foucault…). On peut penser, dans un même état d’esprit, à ces penseurs connus, comme Henry David Thoreau aux États-Unis, ou moins connus, comme le menuisier Louis Gabriel Gauny en France, qui, que ce soit par la magnification d’un retour à un mode de vie « naturel » ou par la modélisation d’une économie cénobitique, ont placé la sobriété au coeur de leur réflexion sur la concrétisation possible d’un geste insurrectionnel et d’une refondation de notre rapport au travail.
Les valeurs de la sobriété/sufficiency
L’incitation à changer de comportements prend aujourd’hui un relief particulier à l’occasion d’un moment historique marqué par la conjonction des trois crises structurelles évoquées précédemment. Mais il convient d’aller plus loin dans l’analyse pour éclairer le sens et la portée de ce qui se joue aujourd’hui à travers la promotion de la sobriété et de la sufficiency. Ne faut-il pas, autrement dit, se défaire du style des « grands récits » et, ainsi que nous y incite Christophe Bonneuil (2020, 2022), repenser l’histoire de l’anthropocène autrement que comme une découverte récente ? N’avons-nous pas intérêt à cette fin à faire varier les angles d’interprétation et à typer (au sens de Max Weber) des récits, au pluriel, sur l’anthropocène ? N’a-t-on pas intérêt par ailleurs à porter attention aux nouvelles exigences morales que formulent des mouvements comme celui de l’écoféminisme (Pruvost, 2021) ? Il est particulièrement utile dans une telle perspective d’intégrer les questions de politique et d’axiologie aux analyses sur les crises écologiques et sanitaires et de réfléchir sur le fait de savoir si nous vivons à l’ère de l’anthropocène ou à celle du capitalocène (Moore, 2016, 2017).
C’est à l’aune de ces questionnements que l’on peut lire la contribution d’Yves-Marie Abraham (« La décroissance soutenable comme politique de sobriété »). Pour l’auteur, les appels actuels à la sobriété, inhérents notamment aux politiques gouvernementales du développement durable, laissent présager le risque de formes inégalitaires de sobriété, plus proches de l’austérité que d’un projet collectif proprement écologique, et dont les plus vulnérables seraient les premières victimes. Comment, dès lors, assurer l’articulation entre sobriété et démocratie ? Pour ce faire, Y.-M. Abraham analyse les riches possibilités qui entourent l’hybridation entre les perspectives de subsistance, de low-tech, de communalisme et de biorégionalisme. Ainsi, depuis la perspective d’Y.-M. Abraham, la vie sobre semble se décliner dans une manière quotidienne d’habiter le local afin de favoriser de nouvelles résonances au monde (Rosa, Zilberfarb et Raquillet, 2021). Cependant, l’interconnexion mondiale ne cesse pas pour autant d’exister. Comment travailler sobrement à l’ère des multinationales ? Valérie Deruelle et Jean-Luc Metzger explorent cette tension dans leur article « Peut-il y avoir une vie sobre sans travail sobre ? ». Dans ce texte, la sobriété est présentée comme un impératif moral visant à réduire les empreintes écologiques des activités humaines. Judith Butler (2014), dans sa réflexion sur la « vie bonne », soutient qu’une vie sobre est fondée sur une délibération collective entre égaux, dans une société où chaque groupe identifie ses vulnérabilités, reconnaît sa part de responsabilité dans leur formation et agit solidairement pour les atténuer. Parmi les aspects clés de cette démarche, le travail joue un rôle central, notamment en ce qu’il permet de saisir les multiples grammaires de la précarisation des vies. Un travail est qualifié de « sobre » lorsqu’il répond aux conditions suivantes : une participation active des travailleurs et travailleuses aux décisions ; une prise en compte de l’intérêt général ; un engagement à minimiser les impacts écologiques et des évolutions légales qui pérennisent ce modèle.
Pour vérifier la pertinence de ce cadre, une étude empirique est menée par les auteur·es auprès de deux groupes de travailleur·euses du numérique. Le premier regroupe des individus engagés dans des projets coopératifs numériques, tandis que le second concerne des salarié·es d’une multinationale cherchant à intégrer des pratiques de sobriété dans leur quotidien professionnel. Les résultats montrent que, si les coopératives numériques correspondent bien à la définition du travail sobre, les salarié·es de la multinationale se heurtent à une contradiction entre l’impératif de sobriété et la pression de créer de la valeur pour les actionnaires. C’est ainsi que l’on perçoit ici la portée à la fois mondiale et intime de l’avènement d’une vie où le travail lui-même s’inscrit dans une dynamique de sobriété.
Ces deux premières contributions relèvent du registre critique. Est-ce là une constante des discours sur la sobriété ? Si, autrement dit, on remonte aux textes fondateurs, la notion de « sobriété » est-elle nécessairement critique ? Dans son article « Le “paradoxe Walden” : la vie sobre est-elle anti-économique ? », Anne de Rugy explore l’ouvrage d’Henry David Thoreau Walden ou La vie dans les bois, devenu un classique de la pensée écologique, afin de mettre en lumière un paradoxe sous-jacent qui permet de répondre à ces questions. En effet, bien que H. D. Thoreau y dépeigne une forme de vie frugale, en marge de la société, celle-ci reste néanmoins structurée par des calculs économiques rappelant la figure de l’homo oeconomicus. S’appuyant sur les travaux de Max Weber et d’Albert O. Hirschman, l’article montre que la quête de sobriété chez H. D. Thoreau, loin d’incarner un économisme propre à la subjectivité capitaliste, valorise au contraire le libre arbitre en posant la question des finalités au centre des délibérations personnelles. Dans ce contexte, la sobriété revêt une dimension subversive et politique, orientant la rationalité vers de nouvelles aspirations collectives.
D’emblée, donc, la notion de « sobriété » peut se révéler problématique et polémique, notamment en raison des diverses techniques de gestion proprement libérales qu’elle peut favoriser. Victor Fontaine explore, dans son article « La sobriété : une valeur économique traditionnelle qui appauvrit le sens de nos vies », les apories du concept. Bien qu’apparaissant subversive ou révolutionnaire, la sobriété n’engendre pas, selon l’auteur, de transformations concrètes des pratiques. V. Fontaine propose une lecture de Karl Marx et d’Herbert Marcuse pour observer la manière dont la sobriété voit aujourd’hui son potentiel incisif détourné de son sens originel. Une distinction est faite entre sobriété quantitative, prolongeant la logique capitaliste, et sobriété qualitative, porteuse d’espoirs de changement radical.
Pour plusieurs des contributeurs et contributrices à ce numéro, cette réappropriation du concept de « sobriété », en tant que nouvelle configuration du pouvoir, impose pareillement une pression accrue sur les individus en renforçant la moralisation de leurs comportements, au détriment d’une approche politique et critique des dynamiques de pouvoir qui les façonnent. La sobriété renvoie ici à l’idée d’un « marché de la vertu » (Ferrarese, 2023), fondé sur l’hypothèse qu’une réforme vertueuse du marché est possible, et que celui-ci peut devenir « éthique » lorsque les individus y adoptent des pratiques conformes. Partant de cette analyse critique, Ambre Fourrier examine dans son texte « Contre la sobriété gestionnaire, une sobriété kitsch ? » le potentiel subversif de l’esthétique kitsch, afin de réfléchir à une sobriété à la fois opposée aux impératifs du marché et pleinement intégrée dans l’écologie politique.
Un adieu à la société industrielle ?
Peut-on affirmer que, en dépit de ses ambiguïtés structurantes, la sobriété engage nécessairement une rupture avec la logique marchande ? Quelles significations les individus qui la pratiquent attribuent-ils d’ailleurs à cette notion de sobriété ? Depuis la fin des années 1960 jusqu’à nos jours, les pratiques de celles et ceux qui se réclament du gratuivorisme (freeganism) font signe vers un mode de consommation frugal et sain qui porte avec lui de nombreuses exigences éthiques et politiques (le partage équitable des ressources, la solidarité, la lutte contre l’aliénation par le travail…) propres à concurrencer le mode de production dominant aujourd’hui sur une grande partie de notre planète (Barnard, 2011). Le gratuivorisme est en phase plus généralement avec les revendications d’autonomie et d’horizontalité qui informent de nombreux mouvements sociaux contemporains. Ces exigences sont essentielles par exemple pour les communautés intentionnelles (Lallement, 2019) comme pour tous les autres petits groupes frottés de contre-culture (ZAD, mouvements de squatteurs, chantiers participatifs, écoquartiers…) qui, provisoirement ou non, ont décidé de faire sécession avec la grande société afin d’inventer presque de toutes pièces des manières de vivre, de produire et de consommer particulièrement économes mais également propices à davantage d’égalité et de liberté d’action (Dechézelles, 2022 ; Stroude, 2021).
Plusieurs contributions de ce numéro témoignent que ces mouvements de rupture avec la société industrielle ne sont pas des actions isolées. C’est là un des apports de Jean Autard (« Abondance frugale contre austérité pléthorique : pratiques de subsistance dans les Alpes françaises »), qui a mené une enquête ethnographique dans les mondes alternatifs ruraux et néo-paysans dans le Sud des Alpes françaises. J. Autard explore les distinctions entre les approches écologiques fondées sur les pratiques de subsistance, impliquant ainsi une reconfiguration des relations à l’État, au salariat, au travail et à la consommation, d’une part, et les approches institutionnelles centrées sur l’imposition de restrictions, d’autre part. Si les premières apparaissent effectivement plus radicales, elles semblent paradoxalement moins contraignantes pour celles et ceux qui les adoptent que ne le sont les secondes. Partant de cet écart, l’auteur explore les significations d’une forme « d’abondance frugale » inhérente à la vie sobre.
Curieuse elle aussi de savoir comment se gère l’adieu à un mode vie empreint d’industrialisme, Mélissa Moriceau (« “Retourner à la terre” au Québec en 2023 : un déplacement de la protestation ») s’est intéressée à celles et ceux qui, au Québec, ont décidé d’opter pour la voie de l’exil rural dans l’espoir de cultiver une vie plus sobre. La mobilité néo-rurale n’est certes pas un phénomène nouveau puisque déjà, au début des années 1970, on avait pu observer un retrait hors du monde afin de fuir les grandes villes industrielles. Aujourd’hui, cependant, le retour s’effectue différemment puisqu’il est motivé avant tout par des considérations professionnelles et qu’il s’agit non plus de marquer son refus de la société mais au contraire de s’y intégrer, mais autrement.
L’option communautaire est une autre voie privilégiée pour en finir avec la société industrielle. Cela apparaît clairement à la lecture de la contribution d’Aurélien Remy, qui a enquêté dans la communauté française de La Borie Noble (Hérault). Intitulé « De la pauvreté volontaire à la soutenabilité. Reconfigurations de la sobriété dans l’Arche de Lanza del Vasto », son article montre que, loin de reproduire les formes d’ascétisme de l’Ordre dont elle est l’héritière, la communauté étudiée a su inventer une forme inédite de sobriété qui s’appuie sur un usage raisonnable des techniques de production modernes et une politisation originale de la vie quotidienne.
La question des nouvelles générations et de leur manière de vivre les ruptures avec les injonctions productivistes se pose également dès que l’on aborde une thématique comme celle de la sobriété. L’article de Quentin Guatieri s’y penche en explorant le rapport au travail et à la méritocratie chez des jeunes ni en emploi, ni aux études, ni en formation au Québec. À partir d’entretiens menés auprès de 14 jeunes ayant volontairement choisi de se retirer du marché du travail et du système éducatif, l’étude analyse leur sobriété volontaire et leurs stratégies pour résister aux pressions sociales de réintégration. Ces jeunes adoptent un mode de vie alternatif basé sur la frugalité et la redéfinition de l’utilité, rejetant les modèles traditionnels de réussite centrés sur la consommation et l’accumulation. Leur sobriété volontaire constitue une résistance aux normes sociales, malgré maintes difficultés sociales et financières, lesquelles sont explorées dans l’article.
La transformation des modes de vie est, on l’aura compris, une façon de congédier un monde au sein duquel le neuf peine parfois à percer la carapace de l’ancien. Pourtant les germes sont bien là, qui menacent l’ordre institué autrement que sur le mode du refus. On voit l’expression d’une telle affirmation dans les résultats de l’enquête menée au Québec par Rosalie Rainville « Cultiver la sobriété. La subsistance au coeur des modes de vie agricoles et alimentaires alternatifs ». En examinant minutieusement toute une série de pratiques alternatives en matière d’agriculture et d’alimentation, l’auteure discerne trois stratégies particulièrement remarquables : l’invention de nouvelles manières de produire qui ont réussi à se défaire des normes productivistes et consuméristes, un fort ancrage territorial des personnes concernées, et enfin une promotion et une application au quotidien des valeurs de solidarité et de convivialité. C’est par le biais de l’anthropologie que Christophe Serra-Mallol nous propose de regarder pour sa part comment certains collectifs marquent leurs distances avec la société industrielle. Dans sa contribution intitulée « "Nous sommes les gardiens du Paradis" », l’auteur rend compte d’une enquête menée sur l’île de Rapa (Polynésie française). À cette occasion, il a observé les pratiques de ce qu’il nomme un isolat communautaire. On voit ainsi la vie d’une communauté utopique qui sait agrémenter la maîtrise collective de ses ressources alimentaires de valeurs d’égalité et de solidarité au service de la démocratie locale et de temporalités peu enclines à l’accélération.
Expérimenter une autre façon de conduire sa vie et de se gouverner collectivement
En dépit de nombreuses résistances gouvernementales, les bonnes intentions ne manquent pas aujourd’hui pour faire de la sobriété un impératif d’organisation collective : pensons, par exemple, à la volonté manifestée à l’échelon européen d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050 et l’adoption à cette fin d’une politique fiscale incitative (taxation des émissions de CO2) assortie de mesures volontaristes (réduction des quotas d’émission alloués à titre gratuit à l’industrie sur le marché européen du carbone) (Mini, Saïsset et Saubot, 2021). Ou encore à l’inclusion de clauses environnementales dans les accords commerciaux (Bellora et Thie, 2022). Dans un registre complémentaire, celui de l’industrie 4.0, il est question, grâce aux pays émergents, d’innovation frugale (ou jugaad) (Le Bas, 2021). Par-là, on désigne cette capacité, bien incarnée par les pratiques du monde maker (Berrebi-Hoffmann, Bureau et Lallement, 2018), à produire sur un mode créatif tout en respectant des impératifs de débrouille et d’économie de moyens.
C’est probablement dans le domaine de la consommation que les impératifs de sobriété et la sufficiency ont pénétré le plus avant. Produits d’injonctions et de convictions morales parfois bien trempées (Guillard, 2021), les pratiques à propos desquelles nous commençons à cumuler des savoirs ne concernent pas seulement l’énergie (Semal, Szuba et Villalba, 2014), mais plus généralement l’ensemble des achats et des modes d’usage des objets les plus ordinaires (aliments, vêtements, automobiles, téléphones…), le tout assorti d’une préoccupation de raccourcissement des circuits d’échange et de distribution, de lutte contre le gaspillage, de gestion optimale des déchets, etc. (collectif, 2020). De nombreux autres segments de nos vies quotidiennes encore sont directement concernés, à commencer par les transports (Bardi, 2017) et l’habitat (Lorrain, Halpern et Chevauché, 2018).
Quels que soient les objets privilégiés, la sobriété n’est pas réductible à une intention politique, à un règlement inédit et encore moins à un mot d’ordre généreux, fût-il gouverné par les meilleures intentions. Pour espérer bouleverser nos vies, elle appelle à concrétisation sous des formes variées qui relèvent aussi bien de l’expérimentation et de l’éducation que de l’incitation. De ce point de vue, comme le montre Maxence Mautray (« La responsabilisation des usagers, une modalité contestée de gouvernance des déchets ménagers »), la mise en place de politiques publiques innovantes au niveau local doit encore pouvoir faire ses preuves. En dépit de préoccupations écologiques partagées par le plus grand nombre, l’enquête menée par l’auteur dans un territoire rural met en évidence les réticences quand il s’agit de bousculer les habitudes en matière de gestion des déchets ménagers, soit parce que les injonctions au changement paraissent peu légitimes, soit qu’on y décèle la promotion d’intérêts bien compris, soit encore qu’on y voit l’expression d’une nouvelle désertion du secteur public. Une autre manière d’aborder l’expérimentation et l’incitation à la sobriété nous est présentée par Jessica Zaphiropoulo. L’auteure de « Le rôle des limites locales dans la sobriété énergétique : éclairages à partir du cas de l’autoconsommation collective en France » le fait en portant intérêt aux pratiques d’autoconsommation énergétique collective. L’originalité de ces modalités d’accès à la ressource électrique n’est pas tant d’affirmer un refus à l’encontre des grands systèmes d’approvisionnement que d’annexer à ces derniers des réseaux locaux mettant en lien producteurs et consommateurs, ce qui pose immédiatement la question des modalités d’articulation entre des acteurs, des dispositifs techniques et des registres d’action parfois fort hétérogènes.
L’éducation participe d’un mouvement similaire à celui qui vient d’être évoqué. C’est par ce biais en effet qu’il y a probablement le plus de chances d’aboutir à une conversion durable en faveur de la sobriété. Mais, en ce domaine également, le chemin n’est pas jonché de pétales de roses. Fabien Meslet le montre dans « L’éducation des pauvres à la sobriété énergétique. Émergence et mise en oeuvre contestée de deux dispositifs à Nantes ». Nourrie par une enquête menée à Nantes auprès d’un public de classes populaires, cette contribution met en évidence le fait que, même si elle subit une forme de sobriété forcée, cette population adhère aux objectifs de maîtrise de l’énergie. Il est néanmoins des contestations, mais qui émergent plutôt parmi les agent·es chargé·es de faire appliquer les préceptes éco-énergétiques auprès des personnes les plus précaires.
Dans le cadre d’une étude qualitative menée auprès de travailleur·euses (salarié·es ou non) impliqué·es dans diverses initiatives d’autogestion en Amérique du Nord, Marie-Pierre Boucher observe pour sa part que la réflexivité critique concernant l’émergence de nouveaux rapports marchands – qu’il s’agisse de l’accès aux moyens de production, des formes de rémunération, ou encore de la circulation des ressources – ne constitue pas une préoccupation centrale pour les participant·es. À l’inverse, la notion de frugalité, étroitement associée ici à la vie sobre, occupe une place primordiale dans les discours des enquêté·es. Ainsi, dans son article intitulé « "On est bons en maudit pour faire les choses à bas coût." L’argent dans neuf initiatives économiques nord-américaines », M.-P. Boucher questionne-t-elle les différentes dimensions de la frugalité au sein de ces initiatives, en explorant notamment la manière dont cette valeur influe sur l’organisation des pratiques économiques et sociales. Elle interroge également la façon dont la frugalité se distingue de la seule sobriété matérielle pour intégrer des considérations plus vastes relatives à la gouvernance collective et à la gestion des ressources.
La technique, autre vecteur de diffusion de nouvelles normes de comportement, n’est pas nécessairement l’ennemie de la sobriété. Elle peut même, à condition d’être apprivoisée, en être le meilleur des alliés. À preuve, l’usage du vélo, expression concrète d’un nouveau rapport au monde beaucoup plus sobre que celui de l’automobile. L’enquête effectuée par Alexandre Rigal (« À rebours des institutions totales. La sobriété dans deux ateliers d’autoréparation de vélo et au-delà ») ne fait pas que rappeler cette évidence élémentaire. Elle montre également que la sobriété signifie aussi apprendre, en toute autonomie, à prendre soin des choses. La restitution des résultats de son investigation offre l’occasion pour l’auteur d’esquisser un cadre analytique d’inspiration goffmanienne destiné à rendre compte des pratiques de sobriété innovantes que l’on peut observer aujourd’hui dans les milieux urbains.
La sobriété, on le voit à travers ces différents travaux, est intrinsèquement liée à des dynamiques collectives, dont on ne saurait oublier ce qu’elles doivent plus spécifiquement aux rapports de domination. Elle implique de porter attention aux conditions permettant à autrui (humain comme non-humain) une pleine existence. À l’instar des interprétations récentes des travaux de Simone Weil sur l’écologie et la mondialisation, la sobriété favorise une relation au monde extrêmement rare et exigeante : celle consistant à ne pas prendre le pouvoir qu’on pourrait pourtant accaparer, à s’autolimiter malgré les injonctions à l’excès, à renoncer à posséder ce qui est accessible, à refuser de performer des privilèges qui abaissent les autres afin de transmettre un milieu habitable où l’enracinement est possible (Supiot, 2019 ; Devette, 2024).
Le quotidien de la sobriété
Comme le suggèrent les travaux qui l’observent à partir des politiques publiques, la sobriété ne peut pas conduire mécaniquement vers une bonne vie en se contentant de promouvoir, plus ou moins fermement, une meilleure application des choix rationnels en matière de consommation. Le calcul utilitaire comme la contrainte sociale ont leurs limites intrinsèques. Cette précision importe. Nous faisons en effet le pari ici que la sobriété relève plutôt d’un engagement existentiel et politique dans et pour le monde, dont nous sommes toujours les obligé·es, pour reprendre la formulation d’Hannah Arendt (2020). Ici, l’amor mundi, cette dévotion pour le monde, rappelle que le monde n’existe qu’à plusieurs, qu’il est formé par la pluralité et la diversité des manières de l’habiter.
Les enjeux écologiques ne peuvent donc pas se réduire uniquement à une meilleure gestion économique, considérant que « la consommation ne saurait en effet constituer un monde » (Tassin, 2012 : 154). La crise écologique invoque les conditions de notre appartenance-au-monde, elle rend visible notre attachement pour ce qui nous précédait et ce que nous souhaitons léguer aux générations futures. À l’ère de la sixième extinction de masse, maintenir vivante la pluralité du monde implique une hospitalité radicale de l’autre (Lévinas, 1991), voire, dans un monde foncièrement inégal, colonial et patriarcal, une capacité à saisir la grammaire de ses propres privilèges individuels afin de se restreindre, s’activer, pour ainsi dire, à prendre moins de place, ou plutôt à la prendre autrement.
Comment cet autrement se décline-t-il dans la vie quotidienne de ceux qui, déjà, ont altéré leurs modes de vie anciens pour s’ouvrir à une autre façon d’exister et de coexister ? Pour cela, il faut commencer par accepter de nous ajuster à un monde aux ressources finies et fragilisé par des décennies, si ce n’est des siècles, d’exploitation irraisonnée de notre environnement. Tel est l’un des résultats de l’enquête menée par Violeta Ramirez (« La morale de la sobriété : s’adapter au milieu, limiter ses besoins, les satisfaire soi-même »), qui montre par ailleurs que la sobriété est aussi une affaire de ressources et de dispositions. Celles-ci, autrement dit, conditionnent l’invention de manières de vivre et de consommer aux couleurs de l’alternative. Une belle confirmation de ce théorème sociologique nous est donnée dans « De la subsistance à la consommation sélective : quand la pauvreté interroge la sobriété », article signé par Olivia Mercier. À l’occasion d’une observation participante parmi des glaneurs et des glaneuses qui viennent s’approvisionner sur des marchés, O. Mercier montre que la sobriété n’est pas qu’une affaire de classes moyennes. Elle concerne aussi, sur le mode de la survie souvent, une population obligée d’imaginer chaque jour des façons de se nourrir. En marge des espaces marchands, les glaneurs et les glaneuses savent faire preuve d’une intelligence tactique afin de récupérer et de recycler les déchets alimentaires d’une société du gâchis.
Pour mieux cerner encore la pluralité des façons d’agir selon les classes sociales, Aurore Flipo explore la relation entre la consommation énergétique et les formes de justice inhérentes à l’idéal de frugalité. L’article permet de saisir la diversité des pratiques et des représentations de la sobriété, à travers une étude menée dans cinq pays européens (Allemagne, Danemark, Italie, France, Lettonie). Basée sur 90 entretiens effectués avec des participant·es à des initiatives de sobriété et sur 50 entretiens avec des individus tirés au sort, lesquels ont ensuite été divisés en deux classes selon le revenu, l’étude met en lumière trois approches de la sobriété : celle de la conversion pour les participant·es aux initiatives, celle de la conservation pour les ménages modestes et celle, enfin, de la rationalisation pour les ménages aisés.
L’article qui clôt le présent numéro montre combien, au quotidien, la sobriété est affaire d’ambivalence, y compris parmi celles et ceux qui peuvent faire figure de radicaux en matière de rupture avec la société industrielle qu’ils et elles ont décidé de fuir. À partir d’entretiens qualitatifs menés en Suisse romande, Lena Matasci (« Sobriétés ordinaires : la simplicité volontaire à travers le prisme des rapports au monde ») brosse dans cet esprit le portrait des « simplicitaires », qui ont décidé de vivre autrement. Les discours et les pratiques que L. Matasci donne à voir révèlent que la sobriété n’est pas qu’une affaire de modération en matière de consommation. C’est un autre rapport à soi, aux autres et à la société qui se bricole, et qui passe notamment par l’invention de nouvelles temporalités de vie. Cette manière d’être et d’agir ne délie pas complètement pour autant ces simplicitaires de la société dont ils et elles sont le produit et dont ils et elles continuent à porter les stigmates.
Des chantiers pour l’avenir
Les sciences sociales se sont dotées de longue date de prismes d’analyse qui peuvent nous aider à éclairer à la fois les respirations les plus amples de l’histoire comme les pratiques les plus quotidiennes ou les plus éphémères. Une des caractéristiques du présent numéro est d’avoir réservé une large place aux enquêtes de terrain dont nous espérons avoir ici synthétisé quelques-uns des enseignements majeurs. Plus que des conclusions définitives, ce sont surtout des questions anciennes et des interrogations nouvelles qui surgissent finalement des contributions que l’on va lire. Comment, par exemple, un système singulier d’exploitation des ressources formatées par la loi de la valeur a-t-il conduit au passage vers ce que, depuis les années 2000, l’on nomme l’anthropocène ? Pourquoi et comment, sur le long terme, a-t-il à ce point déréglé les formes de régulation géologiques, biologiques, climatiques, etc., au point de multiplier les pathologies (ruptures climatiques, pollution à grande échelle, incendies chroniques et ravageurs, acidification des océans, fonte des pôles, disparition massive d’espèces animales…) ? Plus que jamais, il nous appartient de regarder en arrière pour mieux imaginer de quoi demain pourrait être fait.
Autre interrogation connexe : que nous disent du gâchis et de la sobriété les auteurs « classiques », à commencer par Karl Marx et Max Weber, qui avaient tôt observé l’inclination frénétique à l’exploitation irraisonnée des ressources naturelles ? Pourquoi la théorie économique néo-classique est-elle (et demeure-t-elle) aveugle à la condition terrestre ? Que nous apprend la sociologie historique du capitalisme sur les moments et les dynamiques qui ont conduit à l’anthropocène ? Comment, à la façon dont Robert Boyer (2022) par exemple l’a proposé récemment en formalisant un mode de développement anthropogénétique, peut-on intégrer les enjeux de décroissance et d’écologie aux perspectives économiques hétérodoxes ? Voilà un autre ensemble d’interrogations auxquelles il serait intéressant d’apporter des réponses susceptibles de nous aider à faire de la sobriété une vie bonne.
Afin de lier l’émergence de l’anthropocène à une dynamique de long terme, il faudrait également se demander ce que nous apprend l’histoire des controverses anciennes et récurrentes qui, depuis plusieurs siècles déjà, ont fait office de sonnette d’alarme. Qui ont été, et qui sont aujourd’hui, les principaux·ales acteur·rices de la dénonciation ? Quels enjeux pointent-ils/elles avant tout ? À quelles formes d’action donnent-ils/elles la priorité ? Et quels futurs, néo- ou post-capitalistes, associent-ils/elles éventuellement à l’anthropocène ? Le terme d’anthropocène ne camoufle-t-il pas d’ailleurs les conditions coloniales dans lesquelles la production capitaliste a pris son essor, venant par ce fait même renforcer la double rupture coloniale et environnementale évoquée par Malcolm Ferdinand (2019) ? N’est-ce pas, en effet, la plantation, par son déracinement et sa restructuration violente des écosystèmes, qui a permis l’essor du capitalisme mondial ? N’est-ce pas, encore aujourd’hui, dans le Sud global que les déchets du Nord aboutissent ? N’est-ce pas, aujourd’hui comme hier, à travers la déréalisation de certaines vies, considérées comme comptant moins, que leurs sacrifices sont justifiés pour le confort d’autres (Butler et Worms, 2021) ? À l’instar de Donna Haraway (2016), d’Édouard Glissant (1990), de Val Plumwood, Diane Linder et Laurent Bury (2020) et de plusieurs autres, l’écologie décoloniale nous a invité·es à modifier la production des savoirs afin de permettre l’apparition de ce qui a été maintenu aux marges du monde. L’articulation des questions écologiques au monde politique qui les a fait naître implique, on peut en faire le pari, une refondation des épistémologies. Cette question mérite donc, elle aussi, d’être davantage travaillée.
Si plus de réponses ont été apportées par ce numéro aux interrogations relatives aux conditions de l’action de ce que, pour paraphraser Erving Goffman, on pourrait nommer des entrepreneur·euses de sobriété, de nombreux questionnements restent néanmoins en suspens sur le terrain de l’analyse empirique des pratiques associées à la sobriété. Qui porte avant tout de telles préoccupations, avec quels intérêts, quelles ressources et quels effets ? Différentes échelles d’observation ont été mobilisées dans ce numéro pour fournir des éléments de réponse, depuis le niveau local (communautés, municipalités…) jusqu’à l’échelon macro (systèmes de valeur) en passant par tous les registres intermédiaires (entreprises, réseaux, associations…). Il serait particulièrement intéressant, à l’aide d’une telle grille de lecture, de questionner plus précisément l’origine et la portée des discours aujourd’hui à la mode. On peut penser à celui des coups de pouce (nudges) comme instruments de politiques publiques (Bergeron et al., 2018) destinés à favoriser l’adoption de comportements sobres. On peut penser aussi à cette rhétorique des « petits gestes » qui, par l’entremise de certaines figures médiatiques, a connu le succès que l’on sait. Dans le prolongement des multiples travaux sur la pluralité des modes, des styles et des conduites de vie, il vaudrait enfin de porter attention à la balance des inégalités. Le choix de la sobriété n’est jamais sans effets équivoques. C’est pourquoi, pour poursuivre l’effort engagé dans ce numéro, il serait également utile de continuer à se demander dans quelles mesures celles et ceux qui, par leurs discours et leurs actions, promeuvent ou vivent la sobriété créent, aggravent ou au contraire atténuent les inégalités.
Parties annexes
Bibliographie
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- Supiot, Alain. 2019. Mondialisation ou globalisation ? Les leçons de Simone Weil. Paris, Éditions du Collège de France.
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