Journal of the Canadian Historical Association
Revue de la Société historique du Canada
Volume 21, numéro 1, 2010
Sommaire (7 articles)
Montreal 2010
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“Don't Speak For Me”: Practicing Oral History amidst the Legacies of Conflict
Joy Parr
p. 1–11
RésuméEN :
This article revisits claims that it is possible to ‘hare authority' in the practice of oral history, with particular reference to disturbed and disturbing sites, in which witnesses have been marked by difficult times and may not ‘now what they will tell' the interviewer. It also explores reflections by anthropologists, ethnographers, and translators on the politics of such relationships.
FR :
Cet essai revisite l’idée voulant qu’il soit possible de partager l’autorité dans la pratique de l’histoire orale, particulièrement lorsqu’il est question de sujets difficiles ou traumatisants ayant profondément marqué les témoins, qui ne savent alors pas quoi raconter à l’interviewer. Il explore les réflexions des anthropologues, des ethnographes et des traducteurs en regard de la relation entre l’interviewer et les interviewés.
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Quelle guerre raconter ? Le dilemme du légionnaire Paul Caron
Béatrice Richard
p. 13–36
RésuméFR :
Cet article propose de revisiter le rapport du Canada français à la Grande Guerre à travers l’étude d’un témoignage singulier : celui du journaliste Paul Caron, enrôlé dans la légion étrangère en 1914. Anti-impérialiste affiché, le légionnaire a produit une série de lettres du front que l’on retrouve sous forme de chroniques dans Le Devoir et dans Le Peuple de Montmagny entre 1914 et 1917. En se mettant lui-même dans la peau d’un poilu canadien-français, l’auteur propose un récit cathartique qui reflète davantage l’ambivalence de ses semblables face au conflit en cours que le refus d’y participer. À cet égard, ses écrits nous renseignent peut-être moins sur la guerre elle-même que sur le défi d’en rendre compte — que laisser transpirer de l’horreur des tranchées? — tout en respectant l’horizon d’attente de ses lecteurs, notamment des nationalistes — quelle guerre leur raconter? Caron produit ainsi un artefact qui, au-delà des faits rapportés, révèle le poids et la complexité du cadre de référence culturel à travers lequel lui et ses contemporains, tant anglo que franco-canadiens, tentent de donner un sens à la guerre.
EN :
This article re-examines French Canada’s relationship with the Great War through a particular account: that of the journalist Paul Caron who enrolled in the Foreign Legion in 1914. A well-known anti-imperialist, the legionnaire wrote a series of letters from the front that were published in columns of the newspapers Le Devoir and Le Peuple de Montmagny between 1914 and 1917. By assuming the character of a French-Canadian “poilu”, the author offers a cathartic account which underlines the ambivalence of his fellow French-Canadians towards the ongoing conflict, rather than their refusal to participate in it. In this respect, his writings tell us less about the war than they do about the challenge to report it — what part of the horrors of the trenches to disclose? — all the while trying to respect his readers’ expectations, particularly those of the nationalists — what war to tell? More than a mere factual report, the artefact produced by Caron reveals the burden and complexities of the cultural framework by which he and his contemporaries, whether they be English or French-Canadians, try to make sense of the war.
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The Myth of the Emperor and the Yamato Race: The Role of the Tairiku nippô in the Promotion of Japanese-Canadian Transnational Ethnic Identity in the 1920s and the 1930s
Aya Fujiwara
p. 37–58
RésuméEN :
This article examines the role that the Japanese-Canadian (first-generation) issei press, the Tairiku nippô, played in transnational ethno-racial identity, focusing on the myths of the Emperor and the Yamato race. The newspaper is an invaluable source that shows Japanese Canadians’ self-image that emerged in response to intense anti-Asianism in British Columbia during the 1920 and the 1930s. The press incorporated politicized images and stories, which integrated the Emperor and Japanese racial roots into its editorials and columns, boosting their sense of racial pride. Hirohito’s daijôsai of 1928 and Japan’s invasion of the Manchuria in 1931 served as the best opportunities to spread their myths and symbols. The newspaper also became a space where Japanese Canadians could freely express their opinions and feelings for their homeland through essays and poems, without facing any criticisms from mainstream British Columbians. An examination of such messages reveals that Japanese-Canadian Buddhist issei, and some nisei, who had strong affiliation with the Tairiku nippô, maintained their loyalty to the Emperor, and expanded the idea that they were part of the noble Yamato race. Their ideology was a factor that prompted them to support and justify Japan’s invasion of China.
FR :
Cet article explore le rôle joué par le Tairiku nippô, journal de la première génération de Canadiens d’origine japonaise (issei), dans le développement d’une identité ethno-raciale transnationale fondée sur le mythe de l’Empereur et de la race Yamato. Une analyse du contenu de ce journal démontre que l’identité des membres de la communauté canadienne-japonaise s’est développée en réponse à un intense sentiment anti-asiatique en Colombie-Britannique dans les décennies 1920 et 1930. Les éditoriaux et chroniques publiés dans ce journal contiennent plusieurs références à l’Empereur et à l’origine de la race japonaise. Ces textes visaient à développer la fierté nationale des membres de la communauté japonaise au Canada. Les festivités suivant le couronnement de l’Empereur Hirohito en 1928 (daijôsai) ainsi que l’invasion de la Manchourie par le Japon en 1931 ont permis de disséminer les mythes et les symboles japonais au Canada. Le journal est ainsi devenu un lieu important où les Canadiens d’origine japonaise pouvaient exprimer librement leurs opinions et leurs sentiments concernant leur mère-patrie à travers des essais et des poèmes, sans craindre les critiques des autres Britanno-Colombiens. L’étude des messages inclus dans le Tairiku nippô révèle que la première génération de Canadiens d’origine japonaise (issei), principalement bouddhistes, ainsi que quelques membres de la génération suivante (nisei), ont utilisé le journal pour affirmer leur loyauté à l’Empereur et défendre leur appartenance à la noble race Yamato. C’est en partie cette idéologie qui leur a permis de justifier l’invasion japonaise de la Chine.
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Subjects of Interpretation: Second Language Acquisition by Jesuit Missionaries among the Northern Ojibwa, 1842–1880
Gabrielle Parent
p. 59–82
RésuméEN :
This article focuses on second-language learning and “linguicide” in Upper Canada between 1843 and 1877. From the small group of Jesuits that made up the ranks of the Society of Jesus’ new missions to Canada in the post-suppression era, it was Jean Pierre Choné, Joseph Hanipaux, Nicholas Frémiot, and Dominique du Ranquet, August Kohler, Nicolas Point, and Joseph Jennesseaux that first learned Algonquin languages in order to proselytize to the Northern Ojibwa populations at the Upper Canada. The Upper Canada mission, led by superior Pierre Chazelle, re-established some of the Society of Jesus’ older Aboriginal missions, and expanded their evangelical territory north and west along Lake Huron and Lake Superior. Important stations were built among the Ojibwa at Wikwemikong on Manitoulin Island in 1844, in Sault Sainte Marie in 1846, and along the Pigeon and Kamanistikwa Rivers, near Fort William, in 1848. This paper examines why the new Jesuits were motivated to learn the languages spoken at their Aboriginal missions in the nineteenth century and simultaneously investigates how the massive and unexpected psychological challenges of the 1800s, including anti-Catholicism, British rule, mass immigration, and formidable industrial development in Upper Canada, supported or discouraged the Jesuits’ language acquisition.
FR :
Cet article porte sur l’apprentissage de langues secondes par les Jésuites et la disparition des langues autochtones au Haut-Canada de 1834 à 1877. Les pères Jean-Pierre Choné, Joseph Hanipaux, Nicholas Frémiot, Dominique du Ranquet, August Kohler, Nicolas Point et Joseph Jennesseaux ont été parmi les premiers missionnaires jésuites venus au Canada au XIXe siècle à apprendre les langues algonquiennes. Leur but était alors de pouvoir évangéliser les populations Ojibwa du nord du Haut-Canada. La mission haut-canadienne, dirigée par le père Pierre Chazelle, a rétabli quelques-unes des anciennes missions jésuites et étendu leur territoire d’évangélisation au nord et à l’ouest, le long des lacs Huron et Supérieur. D’importantes missions furent établies parmi les Ojibwa à Wikwemikong sur l’île Manitoulin en 1844, à Sault-Sainte-Marie en 1846 et le long des rivières Pigeon et Kamanistikwa, près du Fort William, en 1848. Cet article explore à la fois les raisons ayant encouragé les missionnaires jésuites à apprendre les langues autochtones ainsi que l’influence que les importants défis du XIXe siècle (incluant l’anticatholicisme, la domination britannique, l’immigration des masses et l’extraordinaire développement industriel du Haut-Canada) ont eu sur les efforts des missionnaires pour acquérir de nouvelles langues.
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“I was a 555-pound freak”: The Self, Freakery, and Sexuality in Celesta ‘Dolly Dimples’ Geyer’s Diet or Die
Jane Nicholas
p. 83–107
RésuméEN :
This paper analyses former sideshow performer Celesta Geyer’s autobiography Diet or Die (1968). Despite her unusual employment in a freak show, Geyer’s autobiography fits the standard popular narrative of the disciplining of the fat body in order to achieve an idealized thin body. On the surface, the text reads as an absolute rejection of fat identity — a word that Geyer often associates with freakery. Yet, Geyer’s autobiography also shows how she became a subject through enfreakment, and it subtly reveals deep ambivalences regarding weight, sexuality and freakery. Part autobiography, part self-help manual, and part dieting advice manual, the text is a remarkably complex reflection of aspects of American culture and society in the early to mid twentieth century that has deep resonances in today’s fat phobic, dieting obsessed culture. Geyer’s autobiography also highlights the difficulties of reading and interpreting autobiographies as self-evident presentations of personal history and raises questions of how individuals tell their own stories.
FR :
Cet article analyse l’autobiographie d’une ancienne vedette d’exposition de curiosités vivantes (freak show), Celesta Geyer, intitulée Diet or Die (1968). Malgré son emploi inusité, Geyer a rédigé une autobiographie correspondant aux normes des récits populaires à propos des personnes en état de surcharge pondérale qui désirent perdre du poids afin d’avoir un corps mince idéalisé. De prime abord, le texte se lit comme un rejet absolu de l’identité d’obèse — un mot qu’elle associe fréquemment à une curiosité. L’autobiographie de Geyer démontre également comment son auteur est devenu un sujet à travers sa transformation en un phénomène de foire et révèle subtilement une profonde ambivalence concernant le poids, la sexualité et les phénomènes bizarres. À la fois autobiographie, ouvrage de croissance personnelle et manuel de régime alimentaire, le texte constitue une réflexion remarquablement complexe concernant plusieurs aspects de la société et de la culture américaine dans la première moitié du XXe siècle ayant encore une grande résonnance dans la culture actuelle obsédée par la minceur. L’autobiographie de Geyer démontre enfin les difficultés de lire et d’interpréter des autobiographies comme s’il s’agissait de la présentation d’une histoire personnelle évidente et soulève des questions quant à la manière dont les individus racontent leur propre histoire.
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“This Room is Yours, Personal!”: The Rise and Fall of Middle-Class Decoration Expertise in the Bedrooms of America’s Teens, 1900–1985
Jason Reid
p. 109–129
RésuméEN :
This article also examines how the decline of teen-oriented room décor expertise reflected significant changes in the way gender and class influenced teen room culture during the tail end of the Cold War. Earlier teen décor strategies were often aimed towards affluent women; by contrast, the child-centric, do-it-yourself approach, as an informal, inexpensive alternative, was better suited to grant boys and working class teens from both sexes a greater role in the room design discourse.
This article evaluates how middle-class home décor experts during the early decades of the twentieth century re-envisioned the teen bedroom as a space that was to be designed and maintained almost exclusively by teens rather than parents. However, many of the experts who formulated this advice would eventually become victims of their own success. By the 1960s and 1970s, teens were expected to have near total control over their bedrooms, which, in turn, challenged the validity of top-down forms of expertise.
FR :
Cet article explore également comment le déclin de l’expertise des décorateurs des chambres de jeunes reflète certaines transformations majeures dans la manière dont le genre et la classe ont influencé la culture entourant ces espaces à la fin de la Guerre froide. Initialement, les stratégies concernant leur décoration ciblaient les femmes aisées. Avec le temps, l’adoption d’une approche alternative informelle et peu dispendieuse centrée sur les jeunes et leur capacité de réaliser eux-mêmes leur décor a donné davantage de contrôle aux garçons en général ainsi qu’aux adolescentes et adolescents de la classe ouvrière.
Cet article aborde la manière dont les experts de la classe moyenne spécialisés en décoration intérieure ont re-conceptualisé dans les premières décennies du XXe siècle la chambre des adolescents comme un lieu devant être sous le contrôle presque exclusif de leur occupant plutôt que sous celui de leurs parents. Ironiquement, plusieurs de ces experts ont éventuellement été victimes de leur propre succès alors que, dans les années 1960 et 1970, leur recommandation a été généralement acceptée, laissant le contrôle de la décoration des ces chambres aux jeunes eux-mêmes, rendant du même coût caduc l’influence des experts en la matière.
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(Re-)telling Newfoundland Sealing Masculinity: Narrative and Counter-narrative
Willeen Keough
p. 131–150
RésuméEN :
Throughout the controversy over Newfoundland sealing in the latter twentieth century, anti-sealing protest and counter-protest movements, government policy, the media, and the broader arena of international opinion all became sites for the creation of knowledge about Newfoundland sealing masculinity. Sealers engaged with these various discourses as they negotiated their own masculine identities. Recent interviews with sealers of the period reveal the complexity of this process. Not surprisingly, they challenged negative portrayals by their environmentalist critics. More intriguingly, they often positioned themselves outside a Newfoundland cultural narrative of “jolly ice-hunters” and undaunted heroes of the ice- floes. This article explores the disconnect between a romanticized, static cultural understanding of sealing masculinity and the more grounded, nuanced masculinity articulated by sealers and their local communities.
FR :
Tout au long de la controverse concernant la chasse aux phoques à Terre-Neuve à la fin du XXe siècle, les mouvements de protestation contre la chasse comme les contre-protestations, les politiques gouvernementales, les médias ainsi que l’opinion publique internationale sont devenus des lieux de discussion concernant la masculinité des chasseurs terre-neuviens. Lorsque que ces chasseurs ont tenté de définir leur masculinité, ils sont entrés en discussion avec les différents discours portant sur ce sujet. L’article qui suit, basé sur des entrevues récentes réalisées avec des chasseurs, démontre la complexité de ce processus identitaire. Si les chasseurs ont bien évidemment contesté les images négatives disséminées par les critiques environnementalistes, ils se sont néanmoins généralement positionnés en opposition à l’image des chasseurs enjoués ou des héros intrépides des glaces. Cet article explore la différence entre l’image traditionnelle plus romantique et statique de la masculinité de ces chasseurs et celle plus terre-à-terre et nuancée développée par ces mêmes chasseurs et leurs communautés au début du XIXe siècle.