Résumés
Résumé
La littérature établit que la perception de réussite entrepreneuriale est multidimensionnelle (en intégrant des critères personnels et business) et potentiellement variable selon, par exemple, le genre, la nationalité ou l’âge des publics. La question de la volatilité de cette perception au fil du processus entrepreneurial reste largement inexplorée à ce jour, ce concept ayant été surtout étudié de façon statique. Dans cette recherche, nous adoptons une perspective dynamique, en nous intéressant au public des jeunes entrepreneurs. Nous nous demandons dans quelle mesure leur définition de la réussite entrepreneuriale et les critères qu’ils y associent sont amenés à évoluer dans la durée de l’aventure entrepreneuriale. Pour répondre à cette question, nous réalisons une analyse qualitative longitudinale de sept trajectoires de jeunes entrepreneurs, via six phases de collectes étalées sur 30 mois. Les données empiriques recueillies, analysées selon la méthodologie dite « à la Gioia », permettent de confirmer la coexistence de critères personnels et business dans la perception de réussite entrepreneuriale des jeunes entrepreneurs, et surtout d’identifier des critères de réussite spécifiques à ce jeune public. Plus encore, notre recherche souligne le caractère évolutif desdits critères, en mettant en évidence des mécanismes de renforcement et de fragilisation de la perception de réussite entrepreneuriale.
Mots-clés :
- Perception de réussite entrepreneuriale,
- Jeunes entrepreneurs,
- Évolution de la perception de réussite,
- Étude qualitative longitudinale,
- Méthodologie Gioia
Abstract
The literature shows that the perception of entrepreneurial success is multidimensional (encompassing personal and business criteria) and potentially variable, depending, for example, on the public’s gender, nationality, or age. The volatility of this perception over the course of the entrepreneurial adventure remains largely unexplored to date as the concept has mainly been investigated using a statical approach. In the present research, we adopt a dynamic perspective which focuses on the public of young entrepreneurs. We ask to what extent their definition of entrepreneurial success and the criteria they associate with it evolve as the entrepreneurial experience unfolds. To answer this question, we conducted a qualitative longitudinal analysis of seven young entrepreneurs’ trajectories involving six collection phases spread over 30 months. The empirical data collected and analyzed using the “Gioia” methodology confirms the coexistence of personal and business criteria in young entrepreneurs’ perceptions of entrepreneurial success and, above all, determines success criteria specific to this young public. Our research underscores the evolving nature of these criteria, identifying mechanisms that reinforce and weaken the perception of entrepreneurial success.
Keywords:
- Perception of entrepreneurial success,
- Young entrepreneurs,
- Evolution of perception of success,
- Longitudinal qualitative study,
- Gioia methodology
Resumen
La literatura establece que la percepción del éxito empresarial es multidimensional (estando integrada por criterios personales y empresariales) y potencialmente variable en función, por ejemplo, del sexo, la nacionalidad o la edad de los sujetos. La cuestión de la volatilidad de dicha percepción a lo largo del proceso emprendedor apenas se ha explorado hasta la fecha, ya que el concepto se ha estudiado principalmente de forma estática. En esta investigación, adoptamos una perspectiva dinámica, centrándonos en el público de los jóvenes emprendedores. Nos preguntamos hasta qué punto su definición del éxito empresarial y los criterios que asocian al mismo cambian en el transcurso de la aventura empresarial. Para responder a esta pregunta, hemos llevado a cabo un análisis cualitativo longitudinal de las trayectorias de siete jóvenes emprendedores, a través de seis fases de recogida de datos repartidas en 30 meses. Los datos empíricos recogidos, analizados mediante la metodología «Gioia», nos han permitido confirmar la coexistencia de criterios personales y empresariales en la percepción del éxito empresarial entre los jóvenes emprendedores y, sobre todo, identificar criterios de éxito específicos de este público joven. Además, nuestra investigación subraya el carácter evolutivo de estos criterios, poniendo de relieve los mecanismos de refuerzo y debilitamiento de la percepción del éxito empresarial.
Palabras clave:
- Percepción del éxito empresarial,
- Jóvenes emprendedores,
- Cambios en la percepción del éxito,
- Estudio cualitativo longitudinal,
- Metodología Gioia
Corps de l’article
Introduction
La réussite entrepreneuriale a fait l’objet de nombreux articles mettant au jour ses déterminants (Kumar, 2007 ; Staniewski, 2016). Si les indicateurs de succès ont été historiquement financiers – dans une approche objectivable, mesurable et comparative de la performance –, les recherches depuis les années deux mille ont introduit la notion de subjectivité (Jarvis, Curan, Kitching et Lightfoot, 2000 ; Walker et Brown, 2004). La perception de réussite entrepreneuriale y est abordée du point de vue des entrepreneurs et de leurs propres critères de réussite, mêlant des aspects business et personnels (Reijonen et Komppula, 2007 ; Gorgievski, Ascalon et Stephan, 2011 ; Wach, Stephan et Gorgievski, 2016 ; Wach, Stephan, Gorgievski et Wegge, 2020). Ces travaux ont permis de dépasser une acception binaire du succès (réussite contre échec sur un plan économique) ouvrant la voie à une compréhension plus nuancée de la perception de réussite, à la fois multidimensionnelle et potentiellement différente selon les publics.
Au-delà de la nature des déterminants de la réussite subjective et de leur spectre selon les types d’entrepreneurs, une piste à explorer reste celle de sa stabilité (Wach et al., 2020). En effet, le processus de création d’entreprise amène l’entrepreneur à évoluer au fil du temps, notamment en termes de perception de sa situation (Delanoë-Gueguen, 2015). Pourtant, la littérature a essentiellement abordé la perception de réussite de manière statique, indépendamment du processus de création d’entreprise, de l’état d’esprit des entrepreneurs et de leur environnement incertain, eux-mêmes fluctuants. Si l’on en juge par l’instabilité émotionnelle des startupers de la high-tech chez qui « des pics d’euphorie extrême alternent avec des moments de grande angoisse » (Buquet, Luca et Bouilloud, 2017, p. 23), la réussite, d’un point de vue subjectif, pourrait elle aussi varier dans le temps. Staniewski et Awruk (2019) envisagent certes une perspective temporelle, en distinguant la perception de réussite au lancement de l’entreprise et celle perçue par les entrepreneurs au moment de l’étude, mais ils n’expliquent pas pourquoi les entrepreneurs passent d’une perception à l’autre, ni comment leur perception de réussite s’améliore ou se détériore au fil du temps.
Intégrer la diversité des critères de réussite et les envisager de manière dynamique nous semble particulièrement important s’agissant des jeunes entrepreneurs (entre 18 et 30 ans selon BPI France), alors que le nombre d’entreprises créées par des jeunes a fortement augmenté en France au cours des dix dernières années et surpasse en proportion celui du reste de la population[2]. Selon l’Insee, la part des créateurs d’entreprises individuelles de moins de 30 ans s’est élevée à 40 % en 2021, contre 29 % en 2010. Pour ces primoentrepreneurs, les perceptions naissantes de réussite et d’échec, encore en construction, peuvent se heurter de plein fouet à des normes sociales autour des critères de succès. Dans les médias, les stéréotypes de réussite entrepreneuriale, à l’instar d’Elon Musk ou Jeff Bezos, sont en effet dominés par la performance financière, biaisant les représentations de la réussite chez les jeunes entrepreneurs qui y sont surexposés (Buquet, Luca et Bouilloud, 2017). De même, les dispositifs pédagogiques d’accompagnement manquent encore de diversité dans les modèles donnés en exemple, tant au niveau des profils, des parcours que des critères de performance (Brière, Tremblay, Poroli et Auclair, 2021).
Guidés par la volonté de proposer une vision plus nuancée de la perception de réussite et ancrée dans l’expérience des jeunes créateurs d’entreprises, nous nous sommes posé la question suivante : comment les jeunes entrepreneurs perçoivent-ils leur réussite dans la durée ?
En réponse à cette question, notre recherche propose un cadre théorique de la perception de réussite et de son évolution chez les jeunes entrepreneurs et vise à 1) identifier les déterminants de la perception de réussite des jeunes entrepreneurs au moment du lancement de leur entreprise et 2) apprécier les éléments pouvant conduire ces déterminants à évoluer dans le temps.
Notre recherche s’appuie sur l’analyse qualitative longitudinale de sept trajectoires de jeunes entrepreneurs pendant deux ans et demi, à partir du lancement de leur entreprise. L’état de l’art qui ouvre cet article fait le point sur les recherches relatives à la perception de réussite entrepreneuriale et sur leur absence chez les jeunes entrepreneurs que la littérature a plutôt abordés sous l’angle de leurs motivations et de leurs valeurs. La méthodologie de Gioia, Corley et Hamilton (2013), retenue pour le codage des données, permet de faire émerger un modèle dynamique de la perception de réussite entrepreneuriale. Les résultats mettent en exergue les déterminants – personnels et business – de la perception de réussite chez les jeunes entrepreneurs ainsi que les éléments de renforcement et de fragilisation susceptibles de faire évoluer cette perception dans le temps.
1. État de l’art
Le construit central de cette recherche est celui de la réussite entrepreneuriale subjective. Nous en présentons les principaux déterminants identifiés dans la littérature pour adresser ensuite la spécificité des jeunes entrepreneurs en matière de réussite perçue.
1.1. La réussite entrepreneuriale subjective
Bien que la littérature en entrepreneuriat ait abondamment abordé les notions de succès (Fisher, Maritz et Lobo, 2014) et d’échec (Ucbasaran, Shepherd, Lockett et Lyon, 2013), le concept de réussite entrepreneuriale subjective est plus rare et encore en construction (Wach, Stephan et Gorgievski, 2016). Plusieurs concepts proches de celui-ci apparaissent néanmoins dans les travaux existants, élargissant la notion de performance entrepreneuriale au-delà des indicateurs financiers classiques : la satisfaction entrepreneuriale (Cooper et Artz, 1995), la représentation de la performance par les entrepreneurs (St-Pierre et Cadieux, 2011) ou encore la perception de la carrière entrepreneuriale (Lebègue, 2015). Tous intègrent la subjectivité de l’entrepreneur. Celui-ci donne et évalue ses critères de réussite, par opposition à des critères édictés de l’extérieur, par les parties prenantes ou des chercheurs, ou plus généralement par des normes sociales (Ajzen, 1991) dominées par la réussite économique. Pour l’entrepreneur, la réussite subjective va au-delà du fait d’émettre un avis personnel sur une liste d’indicateurs imposés : elle consiste à définir par et pour lui-même ses propres critères de succès et à les hiérarchiser. Elle est donc affaire de perception. Wach, Stephan et Gorgievski (2016) la définissent comme « la compréhension et l’évaluation individuelle de la réalisation des critères qui sont personnellement importants pour l’entrepreneur » (p. 1099).
Si la subjectivité est commune à ces approches, les dimensions qui composent le construit n’ont pas encore trouvé de consensus. Nous relevons les modèles testés empiriquement avec leurs principaux résultats.
1.2. Une approche multidimensionnelle de la réussite entrepreneuriale
Dès les années deux mille, l’attitude des entrepreneurs vis-à-vis de la croissance est questionnée. Alors que la croissance est reconnue comme le principal vecteur d’enrichissement et de création d’emplois, certains entrepreneurs s’y refusent, craignant les conséquences d’une telle stratégie sur le climat social et le bien-être des employés (Wiklund, Davidsson et Delmar, 2003). Ce résultat est confirmé par Reijonen et Komppula (2007) auprès d’entrepreneurs en Finlande pour lesquels gagner sa vie est un critère de réussite important, mais s’enrichir davantage n’est pas une préoccupation majeure. Leurs performances sont évaluées selon d’autres critères que la croissance tels que le plaisir au travail et la satisfaction des clients.
La manière dont un entrepreneur hiérarchise ses critères de réussite est liée à ses valeurs (Gorgievski, Ascalon et Stephan, 2011). Les auteurs demandent à 150 entrepreneurs néerlandais de classer 10 critères issus de la littérature par ordre d’importance. Les trois critères les plus cités sont la satisfaction personnelle, la rentabilité et la satisfaction des parties prenantes ; les moins cités sont la contribution sociétale, la reconnaissance publique et la croissance. Ces résultats ouvrent la voie à une définition de la réussite entrepreneuriale ancrée dans les valeurs individuelles de l’entrepreneur s’affranchissant de la norme de réussite économique.
Les travaux ultérieurs s’attachent à mesurer la perception de réussite par le développement d’échelles de mesure (Tableau 1).
Si les critères sont différents, ces recherches montrent que la perception de réussite par les entrepreneurs est multidimensionnelle et que des critères commerciaux coexistent avec des critères sociaux. Ces travaux reconnaissent cependant que la composition de leur échantillon ne permet pas de généraliser les résultats à tous types d’entrepreneurs (Wach, Stephan et Gorgievski, 2016). De futures investigations contextualisées sont appelées afin d’appréhender les critères de réussite subjective selon la taille de l’entreprise, son secteur d’activité, la nationalité des entrepreneurs ou encore leur âge (Gorgievski, Ascalon et Stephan, 2011). Dans le contexte de l’entrepreneuriat féminin, Lebègue (2015) met au jour, à partir de dix cas, que la réussite de carrière entrepreneuriale des femmes est une notion « complexe, englobante et multidimensionnelle » (p. 115), résultant des expériences vécues dans quatre sphères : personnelle, familiale, économique et sociétale. S’agissant du lien entre la réussite entrepreneuriale perçue et l’âge des entrepreneurs, Gorgievski, Ascalon et Stephan (2011) avancent que les plus âgés attachent moins d’importance au profit et aux compensations financières et davantage au fait de rendre à la société ce qu’ils ont reçu. Wach, Stephan et Gorgievski (2016) confirment cette hypothèse, en suggérant que les jeunes entrepreneurs valoriseraient davantage les rétributions financières personnelles. Les auteurs soulignent la nécessité de poursuivre les travaux pour comprendre comment les entrepreneurs appréhendent plusieurs critères de réussite simultanément et si ces critères se modifient dans la durée.
1.3. Les jeunes entrepreneurs et la réussite entrepreneuriale
À notre connaissance, il n’existe pas de recherche longitudinale dédiée à la perception de réussite entrepreneuriale chez les jeunes entrepreneurs. Pour autant, l’engouement des jeunes pour l’entrepreneuriat a suscité des travaux sur les spécificités de ce public en matière d’intention entrepreneuriale (Fayolle, 2002), d’accompagnement (St-Jean, 2008), de compétences entrepreneuriales (Brenet, Schieb-Bienfait et Authier, 2017), d’auto-efficacité (Brunel, Laviolette et Radu-Lefebvre, 2014) ou encore de motivations et de valeurs (Trépanier, St-Pierre, Tremblay et Carrier, 2017). Ce dernier courant est le plus proche de la perception de réussite, la littérature ayant établi des ponts entre la réussite subjective et les valeurs d’une part (Gorgievski, Ascalon et Stephan, 2011) et les motivations qui poussent à entreprendre d’autre part (Staniewski et Awruk, 2019).
En termes de valeurs, les études menées en France et au Québec auprès d’étudiants-entrepreneurs de moins de 30 ans montrent que ce public perçoit le travail comme un moyen de gagner sa vie et non une fin en soi. Gagner l’argent nécessaire ne doit pas se faire au détriment de la vie privée (Gabarret, Vedel et Etzol, 2016), ce qui pourrait nuancer les résultats précédents observés quant à la valorisation des rétributions financières par les jeunes entrepreneurs (Gorgievski, Ascalon et Stephan, 2011 ; Wach, Stephan et Gorgievski, 2016). Par ailleurs, les figures entrepreneuriales qui inspirent les jeunes entrepreneurs le sont tant pour leur réussite économique spectaculaire, à l’instar des patrons vedettes des GAFA (Buquet, Luca et Bouilloud, 2017), que pour les valeurs que défendent certains startupers, en particulier lorsque celles-ci touchent au développement durable. Sur ce dernier point, Trépanier et al. (2017) ne montrent pas de différences significatives dans les objectifs poursuivis entre les entrepreneurs de la génération Y et ceux des générations précédentes. Ce constat pourrait varier avec les entrepreneurs de la génération Z, dont les natifs (nés en 1995 et après) privilégient les démarches RSE (Dalmas, 2022).
En définitive, l’approche subjective de la réussite entrepreneuriale a permis d’apporter de la nuance dans la compréhension des critères du succès d’un entrepreneur, ajoutant des critères personnels de réussite aux critères économiques traditionnels. Il manque cependant à la compréhension de la perception de réussite entrepreneuriale une approche contextualisée selon les types d’entrepreneurs ainsi qu’une perspective dynamique. Ce questionnement a guidé notre choix d’une étude longitudinale afin de mieux cerner la perception de réussite des jeunes entrepreneurs au moment de leur lancement d’une part et de comprendre comment et sous l’influence de quels facteurs leur perception de réussite évoluait dans la durée d’autre part.
2. Méthodologie
Notre recherche s’appuie sur une étude qualitative fondée sur l’analyse de sept trajectoires de jeunes entrepreneurs pendant deux ans et demi.
2.1. Collecte des données
En septembre 2019, nous avons contacté les 24 étudiants-entrepreneurs accompagnés par l’incubateur étudiant de l’Université de Bordeaux cumulant le statut d’étudiant-entrepreneur et un diplôme de niveau bac +5[3]. Parmi ces jeunes primoentrepreneurs – qui ont lancé leur projet pratiquement au même moment – neuf ont accepté de participer à notre étude (Tableau 2).
Adoptant une perspective longitudinale, nous leur avons proposé de les interroger tous les six mois pendant deux ans avec une première collecte dès la phase de contact (T1), soit un total de cinq collectes sur la période (septembre 2019-octobre 2021). Sur les neuf participants initiaux, sept entrepreneurs (E1 à E7) sont allés au bout de la démarche en participant aux cinq phases de l’étude. Leur participation aux collectes est de 34/35, soit un taux de réponse de 97,1 %[4]. À chaque période, des questions identiques leur étaient administrées via Google Forms (Encadré 1). Les participants pouvaient répondre librement aux huit questions ouvertes, sans limite de caractères (573 mots en moyenne).
Six mois après l’ultime collecte (T5), nous avons sollicité nos sept répondants pour un entretien semi-directif de clôture (T6) d’une durée moyenne supérieure à une heure (février-mars 2022), visant à approfondir les données empiriques collectées en ligne et faire un bilan détaillé des 30 mois écoulés (Encadré 2).
2.2. Analyse des données
Nos données empiriques ont été codées en utilisant la méthodologie de Gioia, Corley et Hamilton (2013), qui permet d’expliquer le cheminement vers les résultats théoriques (Point, 2018). L’annexe 1 présente ainsi la structure des données (Gioia, Corley et Hamilton, 2013, p. 20) détaillant le processus d’abstraction des données de terrain aux concepts, en trois étapes successives : 50 codes de 1er rang, 14 codes de 2d rang et 5 codes agrégés de 2d rang.
Pour réaliser ce travail de conceptualisation, nous avons opté pour une démarche abductive afin de tenir compte des concepts déjà existants dans la littérature. En l’occurrence, nous nous sommes inspirés des cinq facteurs de réussite entrepreneuriale identifiés par Wach, Stephan et Gorgievski (2016). En effet, leur grille de lecture était la plus proche des données recueillies. Ainsi, dans notre structure des données, des termes tels que « sécurité financière », « performance » ou « épanouissement » sont empruntés à ces auteurs. D’autres en constituent des adaptations (le concept d’« impact » a été transformé en « alignement sur les valeurs » afin de retenir la terminologie la plus proche possible de nos données). Une telle approche a permis de faire ressortir la singularité des résultats (l’importance de la « concrétisation positive de l’offre » ou de la « reconnaissance sociale de l’entrepreneur »).
Les entretiens ont été analysés selon cette arborescence afin de constituer un fichier de verbatim, utilisé pour rédiger les résultats. Au-delà d’étudier les jeunes entrepreneurs comme un cas global, nous appréhendons également nos 34 périodes de collecte comme des sous-unités de ce cas d’ensemble. Nous comparons alors l’état de ces sous-unités, à la fois de façon synchronique (à un moment donné du temps), mais aussi de façon diachronique (en mettant en évidence leurs évolutions dans le temps) (Musca, 2006).
3. Résultats
Nos résultats (Figure 1) établissent non seulement que la perception de réussite entrepreneuriale par les jeunes entrepreneurs est liée à des critères personnels et business, mais aussi que celle-ci n’est pas figée et peut, au contraire, se renforcer ou être fragilisée au fil du temps.
3.1. Critères de succès personnels
Épanouissement à travers l’alignement sur les valeurs : sur le plan personnel, les jeunes entrepreneurs veulent prendre du plaisir et être épanouis dans leur travail. Pour eux, être entrepreneur est un « choix de vie »[5] devant leur permettre d’être « libres », en étant leur « propre patron », et de faire ce qui leur « plaît ». Plus encore, nos répondants accordent beaucoup d’importance à l’alignement du projet avec leurs « valeurs » (conduite d’un projet à impact sociétal). Pour éprouver un « sentiment d’accomplissement », ils aspirent à trouver du « sens » à ce qu’ils font et à être « en phase » avec leur offre de produits/services.
« Mon service accompagne les étudiants étrangers à trouver un logement ou une formation adaptée à ce qu’ils souhaitent faire. Voir un étudiant qui avait une envie, qui était encore dans son pays d’origine, en train de chercher quelque chose, et le voir directement en France dans sa formation, pour moi c’est de la réussite […]. Ça peut paraître dérisoire, mais ça procure un sentiment d’accomplissement ! De se dire que c’est utile ce qu’on fait […]. Ce qui prime, c’est vraiment d’être en accord avec moi. (E4-T6)
Reconnaissance sociale : la perception de réussite par le jeune entrepreneur est également attachée à la reconnaissance sociale dont il jouit. Celle-ci est liée tout d’abord à l’impression d’être « soutenu » par ses proches, qui « valorisent le chemin parcouru » et « croient à la réussite du projet ». Nos répondants ont néanmoins conscience que le point de vue de l’entourage est « biaisé ». En ce sens, être « identifié » comme un acteur « légitime » au sein de son écosystème d’affaires, « être pris au sérieux » et susciter la « confiance » de ses partenaires sont des critères plus décisifs à leurs yeux. Le fait d’être « sollicité » spontanément – par exemple, par des fournisseurs potentiels – constitue, à cet égard, un indicateur d’« ancrage » réussi sur le plan local, voire national. Il en va de même de la considération positive portée à leur entreprise par les investisseurs providentiels et en capital-risque, ou encore par des programmes d’accompagnement de type French Tech. En d’autres termes, les jeunes entrepreneurs veulent sentir que leur projet est jugé « crédible » et « viable ».
« Notre plus grande réussite est d’avoir convaincu et fédéré beaucoup de monde autour de notre projet et notamment des parties prenantes importantes comme le Centre de ressources technologiques, qui s’occupera de la formulation de notre boisson. Nous avons réussi à apporter suffisamment de crédibilité à nos profils, nos pitchs et durant nos échanges, même avec des scientifiques experts. » (E2-T1)
Sécurité financière : les jeunes entrepreneurs reconnaissent qu’il ne saurait y avoir de réussite sur le plan personnel si l’activité ne permet pas de « se rémunérer de façon pérenne ». Nos répondants soulignent l’importance de pouvoir se « dégager un salaire » suffisant pour « atteindre une stabilité financière et émotionnelle ». Ainsi, la sensation de « précarité » du jeune entrepreneur est antinomique d’une perception de réussite.
« Ça veut aussi dire trouver son compte financièrement puisque, quand même, il faut réussir à manger. La définition de la réussite est différente selon plein de cas et plein de personnes, mais pour moi, c’est me lever, avoir le smile, aimer ce que je fais tous les jours, et puis ne pas non plus me demander si je vais finir sous un pont à la fin du mois. » (E6-T6)
3.2. Critères de succès business
Concrétisation de l’offre : sur le plan économique, nos répondants estiment que le succès est intimement lié à la capacité du jeune entrepreneur à concrétiser son offre. Symboliquement, le lancement du produit/service est souvent vécu comme un moment fort dans la vie de l’entrepreneur, car le projet n’est plus « abstrait ». Au-delà de ce « moment de concrétisation », le jeune entrepreneur veut aussi pouvoir être « fier » de son offre (« qualité » et « valeur ajoutée » de l’offre) et avoir le sentiment d’une « différenciation » par rapport à la concurrence.
« On a créé un concept de A à Z. On n’avait pas spécialement de moyens : on venait tous les deux d’une famille modeste. Mais, à travers le travail, on a réussi à développer une structure que certains, à Toulouse, pourraient nous envier. Oui, une machine qui fonctionne très bien, qui est très bien huilée, avec une grosse présence sur les réseaux sociaux. » (E1-T6)
Enrôlement des parties prenantes : le jeune entrepreneur lie sa réussite à sa capacité d’enrôler les parties prenantes clés dans son projet. En externe, il lui faut « convaincre » ses différents partenaires d’affaires (clients, financeurs, fournisseurs) de l’utilité de son offre et sentir leur « enthousiasme ». C’est le cas, par exemple, lorsque les « prescripteurs » recommandent le produit/service. En d’autres termes, le jeune entrepreneur est à la recherche d’une « communauté de soutien », qui accepte de « continuer à avancer » avec lui. Il attend donc un « retour » positif de ses interlocuteurs professionnels, en particulier sur la qualité et l’image de son produit/service. La capacité à « fidéliser » les clients est notamment un indicateur qu’il surveille tout particulièrement. En interne, il est important, à ses yeux, d’être capable de « fédérer » les membres de l’équipe autour de lui et que ceux-ci soient « motivés » par le projet.
« Nos parties prenantes commencent à nous voir comme de futurs gros acteurs de l’agroalimentaire. Nous sommes souvent complimentés sur notre marque et les produits que nous avons développés. De plus, nous savons que nos partenaires de logistique, en voyant nos factures augmenter, font maintenant passer en interne la consigne de nous choyer, car nous pourrions devenir leurs plus gros clients. » (E2-T4)
Performance financière : de façon plus classique, la réussite sur le plan business est liée aussi à la performance financière du projet, à travers le « chiffre d’affaires » dégagé à l’instant T et sa « progression » au fil du temps, la « rentabilité » du modèle économique ou encore la capacité de l’entreprise à disposer d’une « trésorerie » suffisante pour fonctionner.
« L’entreprise se porte bien. Le chiffre d’affaires prédit dans le business model pour l’année d’exploitation 2020 a été atteint le 3 mai de cette même année. Ce qui est très encourageant pour la suite. Malgré la crise sanitaire, nous avons pu continuer à exploiter le restaurant grâce à la vente à emporter. » (E1-T2)
Développement : enfin, aux yeux des jeunes entrepreneurs, la réussite du projet est liée à l’inscription dans une logique de développement. En interne, cela passe par du « recrutement » pour que le jeune entrepreneur se recentre sur des tâches à forte « valeur ajoutée ». Cela tient aussi à la mise en place de « process » visant, non seulement à « déléguer », mais aussi à « structurer » l’organisation et à dépasser un mode de fonctionnement informel. En externe, cela suppose le basculement de l’activité vers une « échelle » plus grande (nouveaux points de vente, contrats avec de plus gros clients), l’obtention de soutiens financiers importants (banque, financement participatif, investisseurs providentiels, capital-risqueurs) ou encore la hausse de la « notoriété » de l’entreprise (présence médiatique plus forte, hausse des abonnés sur les réseaux sociaux).
« On arrive à une étape où il va falloir accélérer le développement avec un apport financier extérieur, afin de déployer un plan de communication plus agressif, et faire connaître la marque sur le plan national […]. On a obtenu un certain nombre de référencements qui sont également plutôt intéressants et qui ont contribué à la notoriété de notre marque. » (E3-T6)
3.3. Évolution de la perception
Nos résultats mettent toutefois en évidence que la perception de réussite entrepreneuriale ne doit pas être appréhendée de façon statique. En effet, celle-ci évolue au fil du temps chez les jeunes entrepreneurs, comme l’illustre le tableau 3. Pour chaque période – en dehors de l’entretien rétrospectif de clôture – nous faisons ainsi apparaître, en blanc, les critères de réussite perçus comme présents à l’instant T par les jeunes entrepreneurs et, en grisé, ceux qu’ils perçoivent comme absents (en reprenant les items de notre grille Gioia). Chaque trajectoire individuelle est résumée dans la première colonne par le critère principal de réussite de chaque entrepreneur, le plus récurrent dans le temps.
Même s’il existe quelques critères incontournables (tous les répondants évoquent le CA), nous pouvons remarquer qu’il y a pratiquement autant de trajectoires différentes que d’entrepreneurs interrogés. Ainsi, l’entrepreneur E4 ne parle jamais de son salaire, là où il s’agit d’un critère souvent évoqué par certains de ses homologues (E2, E7). À l’inverse, elle se focalise sur l’épanouissement, alors même qu’il s’agit d’un critère ignoré par d’autres entrepreneurs (E1). Il apparaît aussi que la perception de ce qu’est une réussite ne reste pas la même dans la durée pour certains répondants (malgré la présence systématique d’un critère de réussite dominant faisant office de socle), et ce, notamment parce que leurs « objectifs » sont fréquemment réévalués (lancer le produit/service, puis faire un chiffre d’affaires significatif et devenir ensuite rentable). En pratique, nous pouvons constater que les critères de réussite évoqués ne sont jamais exactement les mêmes d’une période à l’autre. Plus encore, en l’espace de quelques mois, le jeune entrepreneur peut parfois porter un « regard » très différent sur son projet. Cette perception cyclique est à mettre en perspective avec les « montagnes russes émotionnelles » vécues par toutes les personnes interrogées (en ce qui concerne le sentiment d’auto-efficacité, E4 se sent « plus à l’aise » en période 1, évoque sa « capacité à être entrepreneure » en période 4, pour finalement conclure en période 5 qu’elle a « souvent le sentiment de ne pas être à la hauteur », alors même que son offre de services vient de se concrétiser).
« Les critères de réussite changent parce que, au fur et à mesure du développement de la société, forcément, quand le chiffre d’affaires augmente progressivement, au début, signer un contrat à 1 000 euros, c’est incroyable, vendre une palette, c’est fantastique. Et puis, quand il sort deux palettes par semaine, au bout d’un moment, on a envie d’en vendre beaucoup plus, donc ce n’est plus le même critère de réussite. Les objectifs et l’ambition évoluent forcément vers le haut […]. Il y a des jours où on a l’impression d’être les champions du monde et puis, le lendemain, qu’il n’y a rien qui marche, que c’est catastrophique. » (E3-T6)
Cette matrice illustre également l’ambivalence fréquente des jeunes entrepreneurs, dès lors qu’un même critère de réussite peut être jugé tout à la fois présent et absent à un moment donné (développement du projet pour E1). Dans la même veine, certains répondants parlent d’épanouissement, tout en soulignant simultanément leur fatigue et leur stress (E3, E6). Tout au long de leur expérience, la perception d’un jeune entrepreneur est donc rarement celle d’un franc succès (blanc) ou d’un échec total (noir), mais traduit généralement une vision nuancée de la situation vécue (une nuance de gris).
De façon cohérente avec la vision dynamique défendue supra, nous détaillons les facteurs de renforcement ou, au contraire, de fragilisation de la perception de réussite, qui émergent au cours du processus entrepreneurial.
3.4. Éléments de renforcement
Capacité d’apprentissage et de rebond : le jeune entrepreneur modifie sa perception de réussite entrepreneuriale à mesure qu’il réalise sa capacité d’apprentissage. Le sentiment d’« apprendre » (notamment de ses erreurs), de « mieux se connaître » et de « monter en compétences » – en développant de nouvelles expertises, voire tout simplement en « maîtrisant les codes » de l’entrepreneuriat – contribue ainsi à ce que l’entrepreneur porte un « regard » plus positif sur son projet et sur lui-même en tant que chef d’entreprise. En tirant des leçons de son expérience, il se sent plus armé pour faire face aux défis futurs. L’entrepreneur se réjouit également de remporter des petites victoires (réussir son argumentaire, convaincre son banquier) et de « surmonter les obstacles » qui se dressent sur son chemin et contribuent à « forger le caractère ». Il devient, à ce titre, « fier » de tout le « chemin parcouru », en particulier dans le contexte de la crise de la Covid-19.
« La crise sanitaire nous a épuisés ! Et elle nous a renforcés aussi, parce qu’on a décidé qu’on ne lâcherait pas, donc on a repensé notre format deux fois. On a fait des petites jauges, des petits concerts, en format assis […]. Il y a énormément de festivals dans la Manche […]. Et on est le seul à avoir eu lieu pendant la Covid-19. On était assez contents de nous ! […]. Ça nous a permis de solidifier et d’ancrer notre projet, parce que toutes les collectivités territoriales ont vu qu’on ne lâchait pas. On a eu 60 000 euros de la Région Normandie. Ils nous ont clairement dit : “On a vu que vous étiez tenaces.” Donc ça nous a permis de nous crédibiliser. » (E7-T6)
Augmentation du sentiment d’auto-efficacité : le sentiment d’auto-efficacité intervient également dans la perception de réussite entrepreneuriale. Il suppose, chez le jeune entrepreneur, une capacité à se détacher progressivement du « syndrome de l’imposteur » qu’il éprouve souvent à ses débuts. En particulier, il a besoin de sentir qu’au-delà de l’adhésion des salariés, les parties prenantes de « l’écosystème » ont également « confiance » en lui dans la relation d’affaires. Cela se manifeste par une capacité à « fédérer » des partenaires autour du projet. Petit à petit, le jeune entrepreneur peut aussi comprendre que l’imperfection du projet est inhérente au processus entrepreneurial et que les « erreurs » (négociation ratée, mauvais choix de partenaire) sont inévitables.
« J’ai toujours eu le syndrome de l’imposteur. Aujourd’hui, je sens que ce sentiment s’en va petit à petit et que ma confiance en moi en tant qu’entrepreneur s’accroît. » (E2-T1)
3.5. Éléments de fragilisation
Sentiment de fuite en avant : la perception de réussite entrepreneuriale peut, à l’inverse, être fragilisée au fur et à mesure de l’avancée du projet. Ce phénomène est lié, en particulier, à une fuite en avant permanente. Il apparaît, à ce titre, que les « attentes » de certains jeunes entrepreneurs ne sont jamais comblées. En effet, dès qu’ils ont atteint un « objectif », ils se projettent sur le prochain « palier » à atteindre, si bien que certains d’entre eux ne sont jamais réellement « satisfaits » de leur situation à un instant T. D’autres jeunes entrepreneurs, à l’inverse, peuvent se sentir bloqués psychologiquement par l’atteinte du principal objectif de départ (par exemple, l’ouverture d’un bar) et ne pas parvenir à se « remotiver ». Par ailleurs, nos répondants éprouvent souvent un sentiment de « frustration », car ils estiment généralement qu’ils pourraient faire « plus », « mieux » ou « plus vite ». Ils prennent aussi souvent conscience de leur difficulté à « anticiper » les problèmes et peuvent être sceptiques quant à leur capacité à « être à la hauteur » des prochains défis.
« Le seul regret que je peux avoir, c’est de me dire que je n’ai pas fait plus, mais ça, je le dirai toujours tant que je serai entrepreneure ! Je dirai que j’aurais pu faire encore mieux que ça […]. Je ne dirais pas que j’ai réussi dans la mesure où j’ai beaucoup plus d’attentes. C’est propre aux entrepreneurs d’avoir toujours des attentes plus poussées par rapport à ce qu’on met en place […]. On a toujours l’impression que ce n’est pas assez ! […]. Moi, je vois toujours de l’autre côté, encore plus loin. Plus dans l’avenir que le moment présent […]. On a cette estime de soi qui nous torture et qui nous dit qu’on ne fait pas assez et qu’on pourrait faire mieux. » (E4-T6)
Perception d’écarts avec l’environnement : le jeune entrepreneur peut également percevoir un décalage avec l’environnement. À titre d’illustration, l’image positive que des personnes éloignées du projet peuvent avoir de sa réussite (anciens camarades d’école) – du fait, par exemple, de la couverture médiatique dont il fait l’objet – peut être « biaisée » par rapport à la situation financière de l’entreprise (difficulté à se dégager un salaire). En outre, l’entrepreneur peut souffrir du fait que certains « critères de réussite » lui sont « imposés » par l’environnement (« lever des fonds »), alors même qu’il n’en perçoit pas l’intérêt. Le sentiment de « ne pas rentrer dans les cases » peut ainsi affecter sa représentation de la situation. De même, le jeune entrepreneur fait parfois le constat que les « valeurs » auxquelles il tient ne sont pas partagées par ses partenaires d’affaires. Par ailleurs, sa vision devient plus « négative » à partir du moment où il « compare » sa situation avec celle de ses camarades de promotion – notamment lorsque ceux-ci ont opté pour le salariat, perçu comme « plus stable » que l’entrepreneuriat – ou avec des concurrents évoluant dans son secteur d’activité et qui semblent obtenir de meilleurs résultats. Tous ces éléments peuvent contribuer à une « remise en question » du projet.
« Pour aller en GMS, pour aller dans les grands lieux parisiens où il y a beaucoup de notoriété, ce n’est pas un produit qui va faire la différence. C’est uniquement le prix. Donc tout le travail que l’on a fait sur le produit, sur les missions, sur les valeurs, des fois on se dit qu’on est dans un monde où ce n’est pas pris en compte, que ce n’est que du greenwashing. Et que, du coup, nos valeurs ne vont plus correspondre et qu’on ne va plus être assez motivés pour suivre cette entreprise. » (E2-T6)
Émergence de déséquilibres : enfin, la perception de réussite entrepreneuriale est fragilisée lorsque le jeune entrepreneur commence à voir émerger des déséquilibres personnels et/ou professionnels. C’est le cas lorsqu’il prend conscience de sa difficulté à « décrocher » du travail (journées de travail longues, pensées intrusives la nuit), des « sacrifices » importants auxquels il consent dans sa vie privée et de sa grande « fatigue » psychologique et/ou physique. La vie professionnelle tend alors à « empiéter » sur la vie personnelle, sauf lorsque l’entrepreneur accepte de ralentir la « vitesse de développement » de son entreprise. Le « stress » est, quoi qu’il en soit, « omniprésent » chez les jeunes entrepreneurs, a fortiori pour ceux rencontrant des « difficultés » dans leur affaire. Cette « charge mentale » est d’autant plus difficile à accepter lorsque la personne est dans une situation « précaire » (absence de salaire ou salaire insuffisant), alors qu’elle se « tue au travail ». Certains jeunes entrepreneurs peuvent aussi comprendre qu’en l’espace de quelques années leurs priorités ont évolué (projet personnel). En outre, plusieurs répondants comprennent que la réalité de l’entrepreneuriat était différente de celle qu’ils avaient imaginée à l’origine. En particulier, l’importance de la dimension « administrative » et de la « gestion » au quotidien (facturation, embauche, contrats de travail, emploi du temps) est souvent ignorée, au départ, par les jeunes entrepreneurs, tout comme le fait que les facteurs de la réussite ne sont pas tous contrôlables (Covid-19).
« Je me suis crue surhumaine au début. J’ai pensé que le projet était la première chose et j’ai oublié d’avoir assez de sommeil, assez de recul… […]. Quasiment, les deux premiers mois, je n’avais pas pris un seul jour, je pense que c’était une erreur […]. Là, j’ai des critères de réussite plus personnels […]. J’ai tout mis dans le travail. Par exemple, je rentrais chez moi, je ne m’étais pas fait à manger, et puis j’avais oublié de manger toute la journée. Et puis, d’un coup, je commandais à manger, mais après ça coûtait cher, je n’avais plus d’argent, je finissais à découvert, et je me mettais dans la détresse. Parce que je n’avais pas anticipé et j’avais oublié que j’ai une vie perso. » (E5-T6)
4. Discussion
Les résultats de cette recherche confirment la nature multidimensionnelle de la perception de réussite entrepreneuriale, en identifiant chez les jeunes entrepreneurs la présence simultanée de critères de succès personnels et business. Certains de ces critères font écho aux résultats des travaux antérieurs, tels que la performance financière et le développement de leur entreprise, sur un plan économique (Wach, Stephan et Gorgievski, 2016 ; Staniewski et Awruk, 2018), et la sécurité financière, sur un plan personnel (Reijonen et Komppula, 2007 ; Wach, Stephan et Gorgievski, 2016).
D’autres critères remettent en question l’idée selon laquelle la perception de réussite entrepreneuriale serait universelle – quels que soient l’âge, la nationalité, etc. – (Wach et al., 2020) et valident l’intérêt d’étudier des groupes d’entrepreneurs particuliers pour cerner la singularité de leur perception. Nous mettons ainsi en évidence, chez les jeunes entrepreneurs de notre étude, des critères de réussite perçue originaux. L’alignement sur les valeurs, absent des travaux précédents, ressort ici comme une dimension principale de leur perception de réussite. Ce résultat précise la notion d’épanouissement de Wach, Stephan et Gorgievski (2016), dans la mesure où l’alignement des jeunes entrepreneurs sur leurs valeurs conditionne leur épanouissement, les deux notions étant imbriquées dans nos données. Ces valeurs sont en lien avec l’impact sociétal positif que les jeunes entrepreneurs souhaitent avoir via leur entreprise. Alors que la contribution sociétale était l’un des critères de réussite les moins valorisés dans l’étude de Gorgievski, Ascalon et Stephan (2011), elle revêt une importance particulière pour les entrepreneurs de notre échantillon, confirmant un intérêt générationnel pour la RSE (Dalmas, 2022).
Parmi les critères business, l’enrôlement des parties prenantes, la reconnaissance sociale et la concrétisation de l’offre émergent également comme des critères propres à ce public. Pour ces jeunes entrepreneurs, la réussite peut ainsi passer par le fait d’enrôler toutes les parties prenantes de l’écosystème, au-delà des employés et des clients mentionnés par Wach, Stephan et Gorgievski (2016). L’importance accordée au fait de convaincre les parties prenantes renvoie au temps consacré à l’apprentissage et à la maîtrise de l’argumentaire en tant que jeunes porteurs de projet s’adressant à tous les acteurs de l’environnement (clients, structures d’accompagnement, financeurs, etc.). Elle souligne également chez eux le manque d’expérience et de légitimité ressenti au démarrage de l’entreprise, qui prend la forme du syndrome de l’imposteur ou d’un faible niveau d’auto-efficacité (Bandura, 1977). Cette même inexpérience professionnelle les conduit à percevoir la reconnaissance sociale comme un critère de réussite saillant, alors qu’il est l’un des critères les moins cités chez Gorgievski, Ascalon et Stephan (2011), et absent des autres travaux. La concrétisation de l’offre apparaît également comme un critère de réussite perçue spécifique aux jeunes entrepreneurs, faisant figure de Graal : il s’agit du premier but à court terme d’une série d’objectifs de développement, qui revêt une forte valeur symbolique à leurs yeux. En l’absence de groupe de contrôle, la question se pose alors de savoir si ce critère est propre aux jeunes dès lors que leur entreprise correspond à leur première réalisation, suscitant un lien d’attachement puissant, de l’ordre de l’enfantement (Lahti, Halko, Karagozoglu et Wincent, 2019).
Au-delà d’identifier des critères singuliers à un public donné, l’autre apport de cette recherche réside dans le fait d’aborder la réussite entrepreneuriale perçue de manière dynamique. Répondant à l’appel de Gorgievski, Ascalon et Stephan (2011) et Wach, Stephan et Gorgievski (2016), notre étude longitudinale met en évidence que la perception de réussite entrepreneuriale, loin d’être un construit statique, évolue dans le temps. Nos résultats permettent de comprendre les mécanismes qui amènent les jeunes entrepreneurs à reconsidérer l’importance de leurs critères de réussite dans la durée, sous l’influence d’éléments de renforcement (la capacité d’apprentissage et de rebond et l’augmentation du sentiment d’auto-efficacité) et d’éléments de fragilisation (sentiment de fuite en avant, apparition d’écarts avec l’environnement, émergence de déséquilibres). La notion d’équilibre semble au coeur de cette dynamique. En effet, les équilibres perçus en termes de réussite au moment du démarrage sont remis en question au fil du processus entrepreneurial conduisant les jeunes entrepreneurs à des phases de déséquilibre, puis de rééquilibrage qui rebattent les cartes des critères de réussite et façonnent leur perception de réussite entrepreneuriale dans la durée. Parmi ces mécanismes, trois points d’équilibrage nous semblent saillants.
Tout d’abord, le syndrome de l’imposteur, omniprésent chez les jeunes entrepreneurs au démarrage de leur entreprise, tend à disparaître à mesure que ceux-ci apprennent et rebondissent suite aux difficultés rencontrées, comme s’ils parvenaient à s’endurcir. Dans notre étude, la présence du syndrome de l’imposteur n’est pas genrée : les deux jeunes entrepreneurs qui l’évoquent avec le plus d’insistance sont respectivement un homme (E2) et une femme (E4), confirmant que le syndrome de l’imposteur, observé initialement chez des femmes dans la littérature, peut se manifester indépendamment du sexe (Chassangre et Callahan, 2017). Le renforcement de la réussite perçue provient ici d’une amélioration de l’équilibre dans les relations de travail, d’égal à égal avec les parties prenantes.
Par ailleurs, chez les jeunes entrepreneurs, qui sont aussi de jeunes adultes, la vie professionnelle et la vie personnelle sont simultanément en pleine construction. L’équilibre entre ces deux pôles fait d’ailleurs partie des priorités de la génération Z (Dalmas, 2022). Or, dans notre recherche, il se révèle instable dans la mesure où leur vie professionnelle et leur vie privée s’entremêlent, voire s’opposent, conduisant à des choix de vie ou des arbitrages dont les priorités peuvent rapidement changer (place à trouver en plus de l’entreprise pour la famille, l’amitié, voire la maternité chez E4). Les résultats le montrent de manière nette – et parfois douloureuse – en matière de santé, alors que l’équilibre personnel, absent des critères de réussite des jeunes entrepreneurs au démarrage, s’impose à eux quand leur état physique et mental se dégrade sous l’effet du surmenage. Ce résultat fait écho au courant de recherche sur le bien-être des entrepreneurs (Torrès, 2022).
Enfin, la réussite entrepreneuriale est un construit social : les entrepreneurs lancent leur entreprise dans un environnement donné qui n’a rien d’un vide social où ils se retrouveraient seuls (Wach, Stephan et Gorgievski, 2016). L’environnement vient parfois défier les valeurs socles du jeune entrepreneur, en véhiculant une idée de ce que devrait être la réussite sur le plan normatif. Peut alors apparaître un sentiment de déséquilibre chez le jeune entrepreneur, dans la dissonance de perspective entre sa perception de réussite et ce qu’Ajzen (1991) appelle les normes sociales de l’environnement. L’écart peut s’observer dans un sens (l’entrepreneur ne lève pas de fonds comme le dicterait l’environnement, mais ne se sent pas en échec pour autant) ou dans un autre (l’entrepreneur fait l’objet d’articles élogieux dans la presse, mais n’est pas renforcé dans son sentiment d’avoir réussi pour autant, parce qu’il a conscience de ses difficultés). Ces résultats sont en lien avec le fait que la perception de réussite entrepreneuriale est multidimensionnelle et potentiellement différente selon les parties prenantes (Razmus et Laguna, 2018).
Les trois points précédents mettent finalement en lumière une dynamique dans la perception de réussite entrepreneuriale, dont les jeunes adultes n’ont pas forcément conscience au démarrage de leur entreprise. L’évolution de leurs critères peut alors prendre des allures d’illusions perdues : l’équilibre entre leurs différents critères de réussite est une chimère et ne sera jamais atteint ; alors qu’ils en étaient persuadés au départ, concrétiser le projet n’est pas une fin en soi (il y a fuite en avant dans les objectifs) ; le jeune entrepreneur n’est plus le porteur de projet à succès qui argumente avec brio, il devient aussi un gestionnaire et un dirigeant contraint de répondre aux exigences administratives et RH.
Ces résultats ont des implications pratiques en matière d’accompagnement et de pédagogie. Ils questionnent la manière dont sont formés et accompagnés les jeunes entrepreneurs, en particulier quant aux modèles de réussite entrepreneuriale donnés en exemple. À la suite de Brière et al. (2021), la recherche souligne l’intérêt de sortir du storytelling caricatural autour des exemples de réussite à l’instar des empires des GAFA et des licornes de la high-tech ou d’échecs de type FailCon, pour embrasser plus largement la diversité des critères de réussite et les définir à l’échelle de l’entrepreneur lui-même – et non de la société, des médias, ou des parties prenantes. L’importance pour les jeunes entrepreneurs des critères de réussite « enrôlement des parties prenantes » et « concrétisation de leur offre » traduit un statut intermédiaire entre porteur de projet et entrepreneur. La formation et l’accompagnement des porteurs de projet évoquent-ils suffisamment la bascule entre ces deux états et l’évolution de perception de réussite qui s’ensuit ? Le bien-être est-il présenté comme un critère de réussite ? Faut-il attendre un épuisement professionnel des jeunes entrepreneurs pour se le représenter comme tel ?
Ces questions interrogent la responsabilité des accompagnateurs et des enseignants en entrepreneuriat dans l’image de la réussite entrepreneuriale qu’ils véhiculent et la liberté qu’ils octroient aux porteurs de forger la leur. Il s’agirait ainsi de prendre la précaution de ne pas devenir manichéen et de sensibiliser davantage les futurs entrepreneurs à la question de l’ambivalence de la perception de réussite. Nos résultats vont dans le sens d’un service d’accompagnement personnalisé, tenant compte des aspirations de l’accompagné (Chabaud, Messeghem et Sammut, 2010) et que les évolutions récentes du secteur de l’accompagnement ne font que confirmer : le métier d’accompagnateur glisse d’une posture de « transmission de contenu » normalisé vers un soutien adapté des entrepreneurs à partir de leurs besoins (Messeghem, Sammut, Temri et St-Jean, 2020). En pratique, les jeunes entrepreneurs gagneraient à être accompagnés pour lutter contre le syndrome de l’imposteur et accroître leur sentiment de légitimité, en travaillant par exemple à la restitution d’une image positive et réaliste de soi, moins centrée sur la performance supposément attendue et l’approbation des autres (Chassangre et Callahan, 2017). Ce travail sur soi et ses valeurs, centrales à l’épanouissement entrepreneurial des jeunes, peut également être adressé à travers des approches narratives (utilisation d’histoires, de métaphores, d’objets flottants), dont Solbreux, Hermans et Pondeville (2022) démontrent les bénéfices pour développer l’intégration identitaire.
Ce faisant, l’enjeu n’est en aucun cas de dévaloriser les dispositifs actuels, ni l’importance de la réussite économique, mais de reconnaître aux jeunes entrepreneurs le droit de pondérer de manière personnelle leurs critères de réussite avant que les politiques publiques ne les enjoignent à la croissance, au profit et à l’innovation (Gorgievski, Ascalon et Stephan, 2011).
Conclusion
L’objectif de cette recherche visait à déterminer comment les jeunes entrepreneurs perçoivent leur réussite dans la durée du processus entrepreneurial via une étude qualitative longitudinale auprès de sept jeunes entrepreneurs. À travers six périodes de collecte de données, à intervalles réguliers pendant deux ans et demi, nous confirmons la coexistence de critères personnels et business dans la perception de réussite entrepreneuriale. Nous enrichissons toutefois la littérature en mettant en évidence des critères spécifiques aux jeunes entrepreneurs, tels que l’alignement du projet entrepreneurial sur les valeurs, la concrétisation symbolique de l’offre, ou encore l’enrôlement des parties prenantes en tant que source de légitimité. Plus encore, notre recherche établit le caractère évolutif des critères de réussite pour chaque entrepreneur, en mettant au jour différents mécanismes de renforcement (par exemple, la prise de conscience d’une capacité d’apprentissage et de rebond) ou, au contraire, de fragilisation de la perception de réussite entrepreneuriale (par exemple, le sentiment d’une dissonance avec l’environnement quant à la représentation de la réussite entrepreneuriale).
Notre recherche plaide ainsi en faveur d’une pédagogie qui saurait diversifier les modèles de rôle mis en avant, afin de représenter plus justement la diversité des critères de réussite, au-delà de ceux véhiculés par les normes sociales. En matière d’accompagnement, nos résultats soutiennent l’émergence, déjà effective en pratique, d’un service personnalisé. De manière concrète, les préincubateurs étudiants et les incubateurs sont invités à conduire les jeunes entrepreneurs vers un futur qui intègre leurs propres critères de réussite, ceux que ces derniers sont à même d’énoncer au démarrage de leur entreprise et de faire évoluer chemin faisant. Une attention particulière gagnerait enfin à être accordée, chez ce public, à la lutte contre le syndrome de l’imposteur et à l’alignement avec leurs valeurs, dans une visée d’impact sociétal.
Du fait de son échantillon réduit et spécifique (des étudiants-entrepreneurs diplômés d’un master 2 en entrepreneuriat), cette recherche ne permet toutefois pas de proposer une typologie de trajectoires dans l’analyse de l’évolution des critères de réussite entrepreneuriale au fil du temps. Nous avons pris, au contraire, le parti d’identifier une grille englobante de critères que chacune des trajectoires étudiées vient illustrer différemment. Loin d’envisager les jeunes entrepreneurs comme un bloc homogène, nous les appréhendons dans leur singularité, tout en montrant que notre grille d’analyse est suffisamment générique pour fonctionner – avec des préférences variables – pour chaque individu étudié. Pour aller plus loin, il pourrait être intéressant de systématiser les observations périodiques autour des différents critères identifiés dans cette recherche. Les répondants (aux profils idéalement plus diversifiés) pourraient ainsi être invités, lors de chaque phase de collecte, à hiérarchiser les critères et à justifier ce choix. Un tel travail pourrait permettre – s’il est réalisé auprès d’une population étendue de jeunes entrepreneurs – de faire émerger, plus aisément, différents schémas d’évolution des critères de réussite entrepreneuriale et de procéder par exemple, à une analyse par genre.
Parties annexes
Annexe
Annexe 1. Structure des données selon la méthodologie de Gioia, Corley et Hamilton (2013)
Notes biographiques
Julien Cusin est un ancien élève de l’ENS Cachan. Professeur des Universités à l’IAE Bordeaux et directeur de l’Institut de recherche en gestion des organisations, il s’intéresse à la gestion individuelle et collective des erreurs et des échecs.
Florence Krémer est maître de conférences à l’IAE Bordeaux où elle enseigne le marketing entrepreneurial et la créativité. Au sein de l’équipe Entrepreneuriat de l’Institut de recherche en gestion des organisations, ses recherches portent sur la pédagogie de l’entrepreneuriat.
Notes
-
[1]
Remerciements : les auteurs remercient les entrepreneurs qui, pendant deux ans et demi, ont accepté de participer à ce projet de recherche.
-
[2]
https://bpifrance-creation.fr/observatoire/jeunes-au-coeur-dynamique-entrepreneuriale-france
-
[3]
E1 à E8 sont diplômés d’un M2 en entrepreneuriat de l’IAE Bordeaux. Toutes les entreprises créées l’ont été dans la ville du PEPITE, où les répondants ont été accompagnés, à l’exception de deux d’entre eux (en Occitanie et en Normandie).
-
[4]
E8 et E9 n’ont participé qu’à la première phase de collecte en T1 et E1 n’a pas participé à la 3e collecte.
-
[5]
Tous les mots entre guillemets sont empruntés à nos répondants.
Références
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