Comptes rendus de lecture

Croissance et soutiens à la croissance d’entreprise, L.J. FILION, Montréal, JFD éditions 2015, 325 p.[Notice]

  • Jean-Pierre Chanteau

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  • Jean-Pierre Chanteau
    Maître de conférences HDR en sciences économiques, Université Grenoble-Alpes, CREG

Cet ouvrage collectif est le produit d’un groupe de travail créé en 2013 à HEC Montréal pour étudier les déterminants de la croissance d’entreprise, particulièrement celle des entreprises à forte croissance. Plusieurs études et rapports, dont ceux de l’OCDE et des auteurs, ont déjà documenté ce phénomène : l’intérêt de ce livre est d’en proposer une synthèse, en notant que la littérature scientifique recensée (cf. chapitre 1) date principalement des années 1990 (presque la moitié des 116 références) pour seulement douze références depuis 2010. Les résultats présentés mériteraient donc d’être actualisés. Le premier chapitre (O. Kay) présente « la documentation de recherche sur les PME à forte croissance », discutant notamment leurs déterminants. Le deuxième chapitre (M. Ibanescu) rassemble « statistiques, informations et considérations générales sur les entreprises en croissance » pour plusieurs pays (Suisse, Allemagne, États-Unis, Canada…). Le chapitre 3 (P.-A. Julien) analyse « les défis de la croissance des entreprises québécoises », dont l’attitude de la direction (« volonté de croître », aptitudes managériales, faible aversion au risque) est, selon l’auteur, le déterminant premier – le second déterminant étant la mobilisation des salariés (en temps et en compétences). Les conséquences et la spécificité de cette seconde caractéristique appellent cependant discussion : d’une part, l’implication du salarié est à la fois source de gains de productivité, mais aussi menace pour sa santé ; d’autre part, ce mode de management est assez général, au-delà des seules gazelles, et activer l’implication du travailleur motive souvent la réduction de taille des organisations productives, qu’il s’agisse d’entreprises privées ou d’administrations publiques (dans la lignée, par exemple, de la théorie des contingences structurelles). Le chapitre 4 (S. Chalançon) liste « l’intervention gouvernementale, programmes et propositions pour les PME en forte croissance du Québec », que le chapitre 5 (K. Joyal) approfondit par l’analyse des rapports OCDE (2002, 2005, 2009, 2010, 2013), articulant les leçons des « politiques pour soutenir les entreprises à forte croissance » autour d’un « design d’un écosystème entrepreneurial » (l’auteur détaille plus précisément dans un chapitre ultérieur le rapport OCDE 2010). Enfin, L.J. Filion propose son analyse de la « croissance des entreprises : enjeux, défis, information et scénarios de croissance ». Dans son ensemble, le livre doit être compris à la lumière de la commande passée aux auteurs par le Centre sur la productivité et la prospérité de HEC Montréal, à savoir : « quelles sont les façons de stimuler et de soutenir la croissance d’entreprise ? » D’où le souci de dégager dans chaque chapitre des recommandations pour les politiques publiques, qui peuvent aussi bien être lues comme des conseils utiles aux entrepreneurs eux-mêmes. On comprend moins la focalisation quasi exclusive sur les « gazelles », entreprises à forte croissance, qui grossissent « de 20 % et plus par an pendant au moins trois années consécutives », bien qu’elles représentent « seulement 4 % à 6 % des entreprises ». D’une part, le titre général de l’ouvrage annonçait un questionnement plus large. D’autre part, malgré les justifications avancées, il n’est pas toujours facile d’isoler le rôle spécifique de ce type d’entreprises dans les phénomènes analysés (emploi, investissement, exports, pérennité). Cela étant, pour qui ne connaît pas les gazelles, ce livre constituera une bonne entrée en matière. Pourquoi encourager ces entreprises à forte croissance ? Du point de vue des politiques publiques, d’abord, le premier enjeu (cf. chapitre 2) est celui de l’emploi : selon les auteurs, les gazelles ne sont que « 2 % à 10 % des entreprises pérennes » mais « génèrent entre 40 % et 60 % des nouveaux emplois selon les pays ». L’autre …

Parties annexes