Comptes rendus

Sous la direction de Sophie Boutillier, L’artisanat et la dynamique de RÉSEAUX, Paris, L’Harmattan, série Économie et innovation, coll. « L’Esprit économique », 2011, 254 p.[Notice]

  • Michel Marchesnay

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  • Michel Marchesnay
    ERFI, Université de Montpellier

Cet ouvrage est le fruit d’un colloque tenu à l’Université du Littoral (Dunkerque), à l’initiative du Laboratoire de recherche sur l’industrie et l’innovation, avec le soutien de l’Institut supérieur des métiers (ISM), institution dont les missions sont décrites en fin d’ouvrage par Eric de Lannoy. Pour de multiples raisons, largement évoquées dans ce document comme ailleurs, les TPE et autres microentreprises connaissent une montée, non seulement en légitimité, mais aussi en compétitivité. Celle-ci s’avère bien souvent la conséquence d’une démarche en réseau(x), dans laquelle l’artisan, longtemps stéréotypé comme viscéralement individualiste, se joint non seulement à des « collègues », soit de la même activité, soit de métiers différents, mais aussi à d’autres personnes ou institutions. Au demeurant, l’institution corporatiste dont il est le prolongement a toujours usé de telles pratiques communautaires, ne serait-ce qu’à titre défensif. C’est tout l’intérêt de cet ouvrage d’en décortiquer les tenants et aboutissants. Il est divisé, assez arbitrairement à notre sens, en deux parties. La première offre principalement une présentation de la « problématique », en s’appuyant sur les recherches et les théories concernant autant les réseaux que les TPE. La seconde, axée sur les « cas », est sans conteste plus originale, car elle comprend des résultats d’enquêtes menées par plusieurs équipes universitaires sur les questions de réseaux et d’innovation. Ce « réseau » d’équipes s’organise le plus souvent autour d’un club des dirigeants. L’ISM assure le soutien logistique et financier de cette recherche collective, dont la moindre originalité n’est pas d’assurer, et d’assumer, avec l’appui de chambres régionales de métiers et des instances universitaires, une interaction, parfois très forte et entretenue de longue date, entre les artisans, les institutionnels du secteur (notamment les Chambres de métiers) et les universitaires. Est-il besoin d’ajouter que ce type de collaboration, dans la pure tradition pragmatiste, reste exceptionnel dans la société (et l’université) française, laquelle a (trop) longtemps accordé un intérêt plus que limité aux PME et à l’entrepreneuriat ? Trop de chercheurs, de tous âges et conditions, hésitent encore à se frotter au terrain, et se contentent de traitements statistiques sur des données de seconde main. Ajoutons que, de leur côté, les entrepreneurs hésitent encore à entrer dans les locaux de l’université, l’alma mater les ayant trop longtemps dédaignés. Un premier thème abordé est celui de la place de la petite entreprise dans la théorie économique, et plus particulièrement dans la théorie de la firme. Cette question est abordée de plain-pied par Maria Vitelli-Vollant, qui voit dans l’historique de la gestation de celui que nous appellerons l’entrepreneur en industrie « un nouveau syntagme pour une nouvelle science » (à savoir l’économie politique). Sophie Boutillier traite plus particulièrement de la question de la place de l’artisanat, tant dans l’histoire, depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours, que dans la science économique, le constat étant d’ailleurs un avis de carence de cette « science ». Un deuxième thème nous permet de sortir de l’Hexagone (sinon de la France non continentale). Cette dimension spatiale est abordée dans deux contributions, l’une relative au Mexique (S. Boutillier et B. Castilla Ramos) et l’autre, au contexte antillais (E. Djuatio). Cette dernière approche soulève la question du réseau d’échanges constitué par le marché des Caraïbes, où cohabitent des cultures différentes, liées à l’histoire coloniale – anglaise, espagnole, française. Malheureusement, l’auteur nous laisse un peu sur notre faim en ce qui concerne cette diversité communautaire, et les modes d’insertion ou d’adaptation des TPE guadeloupéennes. En revanche le travail de G.F. Manche sur l’orfèvrerie à Vicence (Italie du Nord) a le mérite de rappeler que l’organisation artisanale « moderne » trouve ses origines dans les villes …