C’est peu de dire que ce petit ouvrage (à peine une centaine de pages), où l’humour voisine avec la rigueur (deux qualités bien connues chez son auteur), arrive à une heure opportune. En effet, du côté des chercheurs, la tendance, récente dans l’Hexagone, est à l’incitation forte à publier dans les « meilleures » revues, en français, mais aussi (certains diront surtout) en anglais. La sélection des personnes et le classement des équipes devraient donc s’opérer en fonction du nombre de publications dans les revues que Pierre Cossette qualifie de « savantes » (pour éviter le terme de « scientifiques »), si discutable que soit ce critère de performance, symbole de « pensée unique » en matière de recherche. Du côté des éditeurs, on observe une floraison de nouvelles revues en sciences de (la) gestion ; plus particulièrement, le « segment » entrepreneuriat et PME (entrepreneurship & small business) a le vent en poupe. En conséquence, le chercheur, plus ou moins jeune et/ou expérimenté, est bien souvent désemparé dans ses choix : quelle revue choisir ? Comment la contacter ? Quels sont les procédures et les processus à adopter, tant en matière d’écriture (forme et fond) que d’approche du comité éditorial ? Pierre Cossette rappelle à l’envi les raisons du taux important d’échecs, de rejets de papiers (et sans doute de renoncement). Ce sont trop souvent les mêmes causes, produisant les mêmes effets, que l’évaluateur un peu blanchi sous le harnais s’attend à trouver à la première lecture, ce qui peut expliquer, soit dit en passant, sinon excuser, la causticité de certaines critiques, sous l’empire de l’agacement. Pour éviter toute attitude condescendante, il faut souligner que ces biais sont intimement liés à l’acte d’écriture : ainsi, chacun aura constaté que, à l’issue du premier jet, ce qui a été développé en conclusion offre le plus souvent une excellente introduction − ce qui ne nous empêchera jamais de démarrer en écrivant d’abord celle-ci… En conséquence, pour reprendre les termes de l’avant-propos, « cet ouvrage propose une vision à la fois globale et détaillée des règles à suivre pour celui qui veut être un chercheur convaincant, c’est-à-dire un chercheur qui va persuader le rédacteur en chef d’une revue ainsi que les évaluateurs auxquels il fait appel que son manuscrit mérite d’être publié dans cette revue. Il a donc pour objectif d’aider les chercheurs, en formation ou non, à préparer un projet de recherche et à guider les évaluateurs dans la préparation de leurs commentaires et dans la recommandation qu’ils doivent faire au rédacteur en chef étant donné que, en principe du moins, chercheurs et évaluateurs se basent essentiellement sur les mêmes critères pour faire leur travail ». L’auteur expose alors ses préconisations en 10 points, en partant du principe qu’un article est d’abord une « conversation » (on ajoutera : autant que faire se peut, non conservatrice) avec des membres de la communauté oeuvrant sur le même sujet − ce qui implique que les évaluateurs soient eux-mêmes plus en conversation qu’en conservation… Ces 10 points sont les suivants. D’abord les cinq bases fondamentales, véritable archétype : poser le problème clairement et succinctement, justifier les questions et les hypothèses à partir des théories, expliciter et justifier ses choix méthodologiques, présenter clairement les résultats, discuter de l’apport et des implications. Sur cette base canonique de tout travail académique, Pierre Cossette ajoute des conseils qui sont plutôt d’ordre tactique : peaufiner le titre et le résumé, bien cibler les citations et références, soigner la rédaction et la bibliographie, soumettre avant présentation le texte à la critique, s’accrocher et persévérer… On ne saurait rendre …
Pierre Cossette, Publier dans une revue savante – Les 10 règles du chercheur convaincant, Québec, Presses de l’Université du Québec, 2009, 114 p.[Notice]
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Michel Marchesnay
ERFI Montpellier