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Celia Izoard, La ruée minière au XXIe siècle. Enquête sur les métaux à l’ère de la transition, Paris, Éditions Seuil, 2024, 344 pages [Notice]

  • Édouard de Guise

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  • Édouard de Guise
    Étudiant en master d’affaires internationales, Sciences Po Paris (Paris School of International Affairs), edouard.deguise@sciencespo.fr

La journaliste et philosophe Celia Izoard présente dans son essai La ruée minière au XXIe siècle : enquête sur les métaux à l’ère de la transition, publiée en 2024 aux Éditions du Seuil, ce qu’elle considère comme un paradoxe qui définit la société et l’économie contemporaines. Elle refuse l’idée reçue selon laquelle la simple transition des énergies fossiles aux énergies renouvelables permettrait de résoudre les maux environnementaux de notre époque. En mobilisant de nombreux exemples et statistiques, Izoard démontre l’absurdité (sur le plan environnemental) de cette « transition » écologique qui, au lieu de résoudre un problème, ne fait qu’au mieux, le déplacer, et au pire, y contribuer. Véritable monstre dans un costume d’agneau, l’industrie minière serait, selon elle, loin d’être la panacée écologique appuyée par les élites politiques et économiques partout dans le monde. L’autrice commence par expliquer dans la première partie du livre ce qu’est réellement la « transition écologique ». Elle commence cette partie avec l’opposition de deux citations diamétralement opposées, mettant en exergue la tension entre, d’un côté, les élites qui cherchent à justifier une activité minière prétendument « propre » et, d’un autre côté, les spécialistes qui y voient un mensonge qui tente de justifier une activité profitable, mais fondamentalement mauvaise pour l’environnement. Izoard met dos à dos les propos des lobbys miniers et la réalité. Elle illustre d’abord l’insoutenabilité de la transition du fossile à l’électrique, celle-ci requérant des quantités colossales de métaux divers dont l’exploitation actuelle est insuffisante et devrait être décuplée au-delà de toute mesure raisonnable. Un de ses nombreux exemples, le plus évocateur à mon avis, est celui de l’électrification du parc automobile britannique. Cette transition « nécessiterait l’équivalent de deux fois la production mondiale actuelle de cobalt, les trois quarts de la production de lithium, et la moitié de la production de cuivre. » (pp. 28-30) En plus des métaux nécessaires à la production de ces voitures, il faut compter les métaux nécessaires à la production électrique par des sources dites renouvelables. La production de panneaux photovoltaïques et d’éoliennes nécessite également une grande quantité de métaux. Izoard tente de déconstruire d’un point de vue minier l’image strictement positive de la transition énergétique. En plus de cette impossibilité pratique, la journaliste démontre en quoi l’industrie minière, dans ses pratiques actuelles, ne représente pas l’alternative souvent citée à l’industrie des énergies fossiles. Alors que certaines élites font la promotion de la mine dite « du XXIe siècle », Izoard démontre que la majorité des pratiques et procédé de l’industrie ont été inventés au XIXe. Elle illustre également les réalités moins connues de l’extraction minière, des montagnes de déchets qu’elle rejette à la modification du paysage en passant par les procédés énergivores et les ruptures de digues catastrophiques. Un recensement de Standard & Poor’s cité par la journaliste démontre qu’il y aurait 34 820 mines dans le monde en 2024. Il est alarmant que malgré l’ubiquité de ces sites, la grande majorité des gens soient inconscients des réelles implications sociétales et environnementales des mines. Selon l’Agence internationale de l’énergie, les prélèvements d’eau par les entreprises minières auraient doublé entre 2018 et 2021 dans le monde, illustrant l’ampleur des conséquences auxquelles l’on peut s’attendre avec l’expansion du secteur minier que commanderont les nouvelles technologies. Déconstruisant ainsi le mythe écologique de la transition du fossile au minier, Izoard parle de réinvention d’un récit pour maintenir un statu quo et pour le maintien des activités d’extraction minière. Un des constats les plus forts de son argumentaire concerne l’illusion de la mine européenne propre. Selon l’autrice, des élites économiques et politiques en …

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