Cet ouvrage réunit un certain nombre de textes ou éditoriaux rédigés par les membres du groupe ‘Reliance en Complexité’. Ce groupe est issu d’une première activité en octobre 2019, alors que s’est tenue une réunion rassemblant une douzaine de membres, chercheurs, enseignants, consultants ou professionnels qui s’intéressent à la pensée d’Edgar Morin et tentent de l’appliquer dans leurs domaines de travail respectifs. Lors de cette rencontre, chacun a présenté comment il utilise la pensée complexe de Morin dans l’enseignement ou dans ses autres activités professionnelles. L’objectif de tous est d’utiliser cette pensée pour tenter de mieux comprendre les divers problèmes sociaux pour ensuite chercher à y trouver des solutions. L’introduction de Régis Meissonier commence par présenter le concept de pensée complexe, indiquant qu’elle est « une manière d’aborder et de traiter les problèmes de la société qui se distingue des méthodes rationnelles classiques et en particulier de la pensée cartésienne avec laquelle nous avons l’habitude de réfléchir, de décomposer et de simplifier un problème au risque de le réduire et d’appliquer des solutions qui, à terme, se révèlent inefficaces ». L’auteur dit aussi que la pensée complexe « n’est pas une méthode ou une méthodologie dont il suffirait d’appliquer une liste de règles. Il s’agit en premier lieu d’un modèle mental, d’une façon de penser et de faire face à la complexité. » (p. 12) L’auteur rappelle qu’ « Edgar Morin invite d’abord à « bien penser », c’est-à-dire à développer un raisonnement favorisant la conscience et la modélisation des phénomènes étudiés par leurs interactions avec les autres phénomènes constitutifs de leur environnement et non en cherchant à en contrôler ou réduire les effets par un souci de simplicité. » (p. 13). On peut dire ici que la pensée complexe se rapproche de l’approche systémique, qui cherche aussi à identifier divers facteurs, variables ou autres éléments associés aux divers phénomènes sociaux et autres et à mettre en évidence les interactions entre ces phénomènes ou facteurs et les effets sur d’autres éléments du système. L’auteur le reconnaît d’ailleurs plus loin dans l’Introduction, où il fait référence à la théorie des systèmes, de la cybernétique et de la théorie de l’information de Shannon. Pour préciser encore, l’auteur indique que « c’est la simplification (et non la simplicité) qui est le contraire de la complexité, c’est-à-dire la démarche logique suivie pour caractériser et déformer le phénomène étudié en fonction de nos schémas de pensée. » Il ajoute que la pensée complexe « n’est pas une quête infinie et insatiable visant à découvrir les enchevêtrements de causes et de conséquences permettant d’expliquer pourquoi ce papillon a pu, à un moment donné, être à l’origine d’un tel déchaînement. Quand bien même nous pourrions découvrir ce mystère, quelle utilité justifierait un tel effort ? Comme prévenait Morin dès la fin du premier tome de la Méthode : « à supposer que nous voudrions une observation exhaustive sur un objet, nous serions entraînés dans une spirale infinie des interactions auxquelles participe cet objet et dont il procède (…) La connaissance portée à l’absolu est autodestructrice » (1977, pp. 355-356). » (p. 13). L’auteur affirme que la pensée complexe ne cherche pas à connaître un phénomène dans son intégralité (c’est-à-dire de manière exhaustive), mais à le comprendre dans son intégrité (c’est-à-dire par rapport à sa propre dynamique auto-générative en lien avec son environnement. Elle révèle les limites de la raison logique classique que nous mobilisons en recherche, dans le monde professionnel comme dans notre quotidien. C’est une des critiques qui a été adressée à ce courant de pensée que de développer la complexité, se limiter à affirmer la …
Reliance en Complexité (2023). Éditoriaux en pensée complexe. Paris : L’Harmattan. Collection Questions contemporaines. 143 pages[Notice]
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Diane-Gabrielle Tremblay
Professeure, École des Sciences de l’Administration, Université TÉLUQ, directrice de l’ARUC-GATS, titulaire de la chaire de recherche sur les enjeux socio-organisationnels de la société du savoir, Montréal, Canada, diane-gabrielle.tremblay@teluq.ca