Résumés
Résumé
Le cinéma a toujours éprouvé plus ou moins le désir ou le besoin de se citer lui-même. Mais il en va autrement quand l’oeuvre entière tombe sous le coup de la citation généralisée, au gré de stratégies variées par lesquelles se retournent l’une sur l’autre les logiques du cinéma et celles de l’art contemporain. Trois oeuvres emblématiques forment en cela une sorte de paradigme, qui ouvre sur bien d’autres : 24 Hours Psycho (1993) de Douglas Gordon; Histoire(s) du cinéma (1989-1998) de Jean-Luc Godard; The Clock (2010) de Christian Marclay. Dans l’oeuvre de Gordon, le corps du film est mis à mal par la transformation dont il devient l’objet, ralenti jusqu’au paradoxe pour un spectateur mué en visiteur improbable. Mais ce geste iconoclaste s’inscrit malgré lui dans la logique épistémique qui a été celle des analystes de films. Godard, à l’opposé, conçoit une ode au cinéma comme art pensé dans son histoire et son rapport aux autres arts. Elle culmine à travers l’hommage à Hitchcock dans l’épisode Le contrôle de l’univers. Quant à Marclay, le paradoxe des vingt-quatre heures de son montage généralisé devenant le temps réel de son spectateur-visiteur réalise comme une sortie du cinéma sous couvert d’en emprunter la matière et d’en mimer le dispositif.
Abstract
As an art form, cinema has long been marked by a certain self-referential quality. However, a qualitative change arises when an entire film functions as a citation, influenced by various strategies at the intersection of cinema and contemporary art. Three iconic films of this nature work to form a type of paradigm, one which opens on to a consideration of many others: Douglas Gordon’s 24 Hours Psycho (1993); Jean-Luc Godard’s Histoire(s) du cinema (1989-1998); and Christian Marclay’s The Clock (2010). In Gordon’s work, the original film is undermined by a transformation through which it becomes the object of the piece itself, slowed down to the point of a paradox wherein the spectator becomes a visitor whose viewing of the film must remain fragmentary. But this iconoclastic gesture is nonetheless inscribed within the epistemic logic that similarly informed the work of film analysts. In contrast, Godard conceives of an ode to cinema as an art form in its historicity and in relation to other artistic practices. The work culminates with a tribute to Hitchcock in the episode Le contrôle de l’univers. In Marclay’s video installation, the twenty-four hour running time becomes the real time of its spectator/passer-by, and paradoxically achieves a type of escape from cinema through the guise of appropriating it for The Clock’s raw materials and structure.