Comptes rendus

McShea, Bronwen. Apostles of Empire. The Jesuits and New France (Lincoln, University of Nebraska Press, 2022 [2019]), 378 p.

  • Renée Girard

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  • Renée Girard
    Chercheuse indépendante

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Couverture de Volume 77, numéro 3, hiver 2024, p. 1-213, Revue d’histoire de l’Amérique française

McShea réussit à défaire l’image souvent proposée des robes noires fanatiques uniquement préoccupées de spiritualité. Elle met en évidence les efforts déployés par ces missionnaires au niveau social, politique et commercial afin de promouvoir l’établissement d’un empire français et catholique en Amérique. Si certains de ces thèmes ont déjà été abordés dans l’historiographie de la Nouvelle-France, l’autrice réussit à faire ressortir la force de cette implication et à mettre en contexte les difficultés rencontrées par les missionnaires, au-delà des guerres franco-iroquoises. La perte de protecteurs tels que Richelieu, les perturbations sociales et politiques entraînées par la Fronde, le déménagement de la cour à Versailles, la sécularisation de la société française et les conflits entre le pape et Louis XIV qui entraînent la fin de la publication des Relations, tout cela a directement contribué à miner les efforts soutenus des Jésuites. Cette mise en contexte est une des forces principales d’Apostles of Empire. L’ouvrage se divise en deux parties qui comprennent chacune quatre chapitres. La première, intitulée « Foundations and the Era of the Parisian Relations », met l’accent sur l’importance des liens privilégiés que les Jésuites de la Nouvelle-France entretiennent avec la métropole. McShea évoque la collaboration qui se développe entre les différents supérieurs des Jésuites en Nouvelle-France, auteurs des Relations, et leur imprimeur Sébastien Cramoisy, proche de Richelieu et membre de la Compagnie de la Nouvelle-France, qui tous se consacrent au projet impérialiste des Bourbons. Elle insiste sur le côté journalistique innovateur de ces rapports annuels et sur le rôle important qu’ils jouent comme outils de promotion. Selon McShea, les Jésuites auraient amplifié l’altérité des peuples autochtones dans les publications initiales afin de convaincre d’éventuels bienfaiteurs de la nécessité d’introduire auprès d’eux non seulement la foi catholique, mais les valeurs de « civilité » et d’« honnesteté » associées à la culture de l’élite dans la métropole. Au milieu du 17e siècle, une fois les missions en Huronie dévastées, les Jésuites auraient, cette fois, exagéré la menace iroquoise afin d’obtenir à la colonie plus de fonds pour assurer sa défense. Leur désir d’expansion les aurait amenés à promouvoir une nouvelle croisade, une guerre sainte contre les Iroquois au service de Dieu et de la France. Cette première partie se termine par un chapitre consacré l’engagement social et médical des Jésuites auprès des Autochtones, en collaboration avec les Hospitalières et des bienfaitrices laïques. McShea soutient que ces préoccupations sociales généralement associées aux Lumières s’inscrivent dans une vision post-tridentine méconnue. La deuxième partie du livre, « A Longue Durée of War and Metropolitan Neglect », se penche sur les difficultés et les frustrations ressenties par ces « apôtres de l’empire » devant le désintérêt grandissant de l’élite métropolitaine pour les missions de la Nouvelle-France. À partir de Relations plus tardives et de documents d’archives moins connus, McShea revient en premier lieu sur la notion de croisade. Elle soutient que le discours militaire et offensif des Jésuites a été interprété comme une série de métaphores spirituelles, alors qu’il était bien ancré dans le réel et le concret. Déterminés à promouvoir une position offensive contre les ennemis de l’expansion française et du catholicisme, plusieurs jésuites n’ont pas hésité à profiter de leur accès privilégié aux territoires et aux affaires autochtones pour agir comme aumôniers militaires, guides et interprètes. L’autrice met en exergue l’opposition entre le désir offensif des Jésuites et la position défensive des administrateurs coloniaux. Désabusés par le désintérêt des seconds pour le projet d’expansion impériale, les premiers ont espéré réaliser leur mission civilisatrice grâce au soutien des convertis autochtones, et même de certains non convertis, chez qui …