Comptes rendus

Fortin, Daniel. La vallée laurentienne au XVIe siècle, entrevoir la construction de la niche des Iroquoiens du Saint-Laurent (Québec, GID, 2023), 282 p.

  • Christian Gates St-Pierre

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  • Christian Gates St-Pierre
    Université de Montréal

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Couverture de Volume 77, numéro 3, hiver 2024, p. 1-213, Revue d’histoire de l’Amérique française

Spécialiste de l’histoire naturelle de la Nouvelle-France, l’ethnobotaniste Daniel Fortin s’intéresse dans ce livre à l’impact qu’ont pu avoir les Iroquoiens du Saint-Laurent sur leur environnement naturel. Plus précisément, l’auteur cherche à savoir comment ces Iroquoiens ont pu transformer le paysage à travers leurs pratiques horticoles et sylvicoles, essentiellement à partir de l’examen critique des textes ethnohistoriques. C’est d’ailleurs le point fort de cet ouvrage qui décortique les sources de manière rigoureuse et détaillée. L’auteur s’est intéressé à cette question dans le cadre de son mémoire de maîtrise, ce qui transparaît dans la structure de l’ouvrage qui en reprend un peu trop fidèlement le format, d’où un certain nombre de longueurs. Fortin conçoit son analyse dans le cadre de la théorie de construction de niche, ce qui paraît justifié de prime abord. Cependant, l’auteur n’en présente pas toutes les constituantes et semble considérer qu’elle se limite à comprendre les transformations de l’environnement par les humains. En réalité, cette approche est beaucoup plus complexe et comporte un certain nombre de considérations théoriques articulées autour des concepts fondamentaux de rétroaction, de codépendance et de coévolution. Ainsi, il ne suffit pas de documenter la construction de niches écologiques par les seules actions transformatrices des humains ; cette approche théorique vise aussi, et même surtout, à expliquer comment ces transformations programmées de l’environnement affectent l’évolution des espèces (végétales dans le cas présent) et l’évolution des humains eux-mêmes, par exemple à travers des processus de codépendance évolutive. Or, il n’en est pas question dans la thèse de l’auteur, ce qui est dommage ; une application plus aboutie de la théorie de construction de niche aurait certainement offert une meilleure compréhension de la relation complexe entre les humains et leur environnement végétal. Le bât blesse également au niveau de la méthode. En premier lieu par l’affirmation suivante, qui témoigne d’une ambition irréaliste : « … nous nous appuierons sur une approche multidisciplinaire, impliquant principalement une revue de littérature dans les domaines de l’ethnologie, de l’ethnohistoire, de l’histoire, de l’ethnologie comparative, de la géographie, de l’écologie, de l’agronomie, de la palynologie, de l’étude des charbons de bois fossiles, de l’archéologie et de l’archéologie du paysage … » (p. 46). En réalité, plusieurs de ces disciplines ne sont qu’effleurées dans cette étude et la revue de littérature en question, concernant l’archéologie notamment, est très incomplète. Plus importante encore est la confusion qui règne au fil des pages concernant le sujet d’étude : les Iroquoiens du Saint-Laurent. On s’étonne en effet de voir l’auteur s’attarder bien plus longuement aux autres nations autochtones du Nord-Est américain et au-delà, jusqu’en Alberta, passant de l’une à l’autre sans précaution méthodologique. Dans cet exercice comparatif précaire, les distinctions culturelles ne semblent plus avoir d’importance, les nations autochtones étant par moments essentialisées en une seule grande entité indifférenciée. Ainsi, l’auteur présume régulièrement qu’une pratique présente chez d’autres nations autochtones, aussi éloignées soient-elles sur les plans culturel ou géographique, devait nécessairement être présente également chez les Iroquoiens du Saint-Laurent, ce qui constitue un raisonnement analogique hautement discutable. L’ouvrage contient également des généralisations abusives et des erreurs factuelles. À titre d’exemple, l’auteur affirme que la culture du maïs a « modifié l’environnement … dans tout le nord-est de l’Amérique du Nord » (p. 93), alors que cette plante est loin d’avoir été cultivée partout sur cet immense territoire. Il en va de même lorsqu’il s’attarde longuement aux épidémies pour expliquer la dispersion des Iroquoiens du Saint-Laurent (qu’il qualifie à tort de « disparition »), sans parler d’un autre facteur tout aussi important sinon davantage : les conflits armés entre nations autochtones. De plus, la terminologie utilisée …